LUNDI, 13 mars 1865.
L'
HON. Proc.—Gén. MACDONALD—
Lorsque la chambre était sur le point de
s'ajourner vendredi soir, M. l'ORATEUR, il
a été convenu que nous terminerions aujourd'hui les débats sur l'adresse. En conséquence,
je propose:
"Qu'un comité, composé des hon. MM. les procureurs-généraux MacDonald et Cartier,
des hon.
MM. Galt et Brown et de M M . Robitaille et Haultain, soit nommé pour préparer le
projet d'une
adresse à Sa Majesté, basé sur les résolutions
adoptées vendredi dernier, le 10 du courant, au
sujet de l'union des colonies de l'Amérique Britannique du Nord."
L'
HON. J. H. CAMERON—Avant que
cette motion ne soit adoptée, M. l'ORATEUR,
je me propose de présenter,—car je crois
que c'est maintenant le moment de le faire,—
la résolution dont j'ai donné avis il y a
quelques jours. Je désire donc mettre entre
vos mains, M. l'ORATEUR secondé par M.
M. C. CAMERON, cette résolution qui est
comme suit:
"Que tous les mots après" Que" soient retranchés, et qu'ils soient remplacés par les
suivants:
" il soit présenté une humble adresse à Son Excellence le gouverneur-général, demandant
à Son
Excellence de vouloir bien, en vue des grands intérêts qui sont mis en jeu dans une
mesure si importante, et qui change entièrement la constitution
de cette province, ordonner qu'il soit fait un
appel au peuple avant que le parlement impérial
ne confirme ou décrète la dite mesure."
J'ai compris l'autre jour que l'hon. récureur-général du Haut-Canada avait insentation
de soulever une question d'ordre à
propos de la présentation de cette résolution
à cette phase des débats. Je voudrais
savoir si telle est encore son intention, parce
que, dans ce cas, je me bornerai à discuter
ce point en premier lieu.
L'
HON. Proc.—Gén. MACDONALD—
Oui, je soulève l'objection. Je ne veux pas
provequer de discussion, mais seulement
demander la décision de M. l'Orateur sur
le point d'ordre.
L'
HON. M. L'ORATEUR—Ayant appris
que le point d'ordre devait être soulevé, j'ai
étudié la question, et je déclare que la présentation de cette résolution est dans
l'ordre.
L'
HON. J. H. CAMERON—Je vais
donc, dans ce cas, présenter à la chambre les
remarques que je crois nécessaire de faire,
tant sur la question générale que sur la
matière particulière de ma motion. Et,
comme la chambre sait que je la trouble
très rarement de mes discours sur aucune
question, à moins que je ne la regarde comme
importante, et que lorsque je le fais j'occupe rarement le temps de la chambre pendant
longtemps, "espère qu'elle m'accordora toute son indulgence pendant que je
ferai ces remarques. En considérant la
longueur du temps occupé à la discussion
de ce sujet, et le grand désir qui existe dans
l'esprit de tout le monde, que cette affaire
soit terminée le plus rapidement possible, je
puis promettre à la chambre que je serai
court. J'ai déjà, en tout que mon vote
individuel dans cet-te chambre y est concerné,
fait exactement ce que j'aurais fait si je
n'avais été qu'un simple électeur appelé à
voter. Nous nous sommes prononcés sur les
résolutions soumises à la chambre, et j'ai
rouvé jusqu'à quel point j'en appréciais
'importance et la nécessité en votant en leur
faveur,—et, si je devais exercer mon droit
de vote comme électeur, je ferais, en dehors
de la chambre, ce que j'ai fait dans son
enceinte, et je me déclarerais en faveur de
ces résolutions, tout en n'étant pas convaincu
que le projet d'une confédération des provinces serait aussi avantageux qu'un projet
plus vaste d'union législative. Mais j'ai
toujours cru que, si l'on voulait obtenir
quelque chose à l'avantage du pays, il ne
fallait pas insister sur ce qui est impossible,
—sur ce qui ne peut—être obtenu,—mais
qu'il fallait chercher à obtenir ce que l'on
peut raisonnablement atteindre, et avec le
temps ou peut parvenir à réaliser ce qui de
de loin parait impossible. (Ecoutez!) Je
crois que la confédération des colonies nous
conduira plus tard à une union législative.
La seule difficulté que j'aie éprouvée, est
que je crois qu'il aurait été infiniment
mieux si tous les pouvoirs donnés aux gouvernements locaux étaient aussi donnés au
gouvernement général, de manière que
lorsque le temps serait arrivé, lorsque toutes
ces petites étoiles tomberaient du firmament,
le gouvernement général posséderait tous ces
pouvoirs, et qu'i n'y aurait alors aucune
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nécessité de refaire une nouvelle constitution. Je crois que l'on peut envisager ce
sujet sous trois aspects différents: premièrement, à l'égard de la nécessité d'un
changement dans la constitution; secondement,
à l'égard de la nature des changements
proposés. et eonrment ils affecteront les intéréts qu'ils embrassent; et troisièmement,
à
l'égard de la convenance de soumettre la
mesure au peuple avant qu'elle ne soit finalement décrétée par le gouvernement impérial.
Quant au premier point—la nécessité
d'un changement—je crois qu'il y a bien
peu de gens dans le pays, dans quelque
partie qu'ils se trouvent, qui diront qu'un
changement quelconque dans la constitution
du pays n'est pas devenu nécessaire. Je
pense que nous sommes tous convaincus que
les choses ne peuvent pas continuer à
marcher telles qu'elles sont aujourd'hui. Je
crois que nous sonnnes tous convaincus que
le peuple s'attend à un changement, au
moyen duquel il espère que nous parviendrons à un plus haut degré de prospérité
que celle dont nous avons joui depuis
quelques années. Pour ma part, je suis
fermement convaincu—contre l'opinion de
deux ou trois hon. messieurs qui ont parlé
l'autre soir—qu'il n'y a pas ou, depuis
l'Union des provinces, une plus grande
gêne, une plus grande absence du sentiment
de la prospérité, dans toute la partie occidentale du Canada, qu'il n'en existe en
ce
moment. Je crois que, dans quelque partie
du pays que vous alliez, vous trouverez
qu'une suite de mauvaises récoltes, et les
difficultés survenues en conséquence de ce
que de fortes sommes d'argent avaient été
empruntées à un intérêt élevé, et la nécessité de faire de fortes remises en Angleterre,—que
toutes ces causes ont lourdement
pesé sur l'énergie et l'activité du peuple, et
ont contribué à les paralyser. C'est pourquoi
il s'attend de toutes parts, avec tout l'espoir
qu'il peut y apporter, à des changements
en des modifications qui seront de nature à
le placer sur un meilleur pied que celui sur
lequel il a été jusqu'à présent. (Ecoutez!
écoutez!) Le président du conseil a cru
depuis plusieurs années, avec un grand
nombre de ceux qui ont toujours eu l'habitude de marcher avec lui, que si nous
obtenions, dans la partie occidentale du
Canada, la représentation basée sur la population, cela aurait une grande influence
pour
stimuler l'énergie du peuple et le placer
dans une bien meilleure position que celle
qu'il occupe aujourd'hui. Je suis convaincu,
avec cet hon. monsieur, que cela aurait en
cet effet à un point très considérable. Mais
nous connaissons parfaitement l'antagonisme
qui existait entre les deux sections, et que
cette mesure, tout en étant demandée avec
instance par le Haut-Canada, était repoussée
par le Bas-Canada. Nous avons senti—et.
sans doute un grand nombre des habitants
du Bas-Canada aussi—que cette confédération des colonies de l'Amérique Britannique
du Nord n'aurait probablement pas atteint
le point qu'elle a atteint, silos demandes——
lcsjustcs demandes—du Haut-Canada avaient
été favorablement reçues par le Bas- Canada;
—si nous avions été placés, sur le parquet
de cette chambre, dans la. position que nous
croyions pouvoir exiger de la législature en
considération des intérêts de la partie occidentale du Canada. (Ecoutez! écoutez!)
Mais
cela n'a pas été fait. Le Bas-Canada pensait
ne, si la représentation basée sur la population était concédée, ses institutions
auraient
couru des dangers étant ainsi placées à la
merci d'un plus grand nombre de représentants du Haut-Canada. Je crois que le peuple
du Bas-Canada se trompait sous ce rapport.
Je ne crois pas que ses institutions auraient
été traitées d'une manière a froisser les sentiments de ses habitants. Le peuple du
Haut- Canada, je crois, a toujours été prêt a faire
ce qui était juste et raisonnable envers le
peuple du Bas-Canada. (Ecoutez! écoutez!)
Je n'ai aucun doute, cependant, que le peuple
du Bas-Canada serait bien plus prêt à accepter un projet comme celui-ci, qui lui donnerait
une législature locale our administrer
ses propres affaires locales, plutôt que d'adopter une mesure qui le mettrait dans
ce qu'il
croirait être une position inférieure sous le
rapport du nombre des représentants en cette
chambre, et dans une position inférieure sous
le rapport du pouvoir—en supposant que la
représentation dans la législature-unie du Canada fût basée sur la population. Il
ne peut
y avoir aucun doute que l'idée de la nécessité
d'un changement est venue non seulement du
sentiment dont je viens de parler, mais encore
des circonstances qui se rattachent à nos relations avec la république voisine denuis
trois
ou quatre ans. Le traité de réciprocité a été
passé il y a dix ans, a une époque où la valeur
donnée aux Canada par le pays voisin était
bien différente de celle qu'i leur donne aujourd'hui,—lorsque les hommes d'Etat des
Etats-Unis croyaient que l'effet de ce traité
serait de faire mûrir graduellement la poire de
963
ce pays, jusqu'à ce qu'elle fût prête à tomber
entre leurs mains. Et incontestablement les
vues de beaucoin de ceux qui consentaicnt
a ce traité de réciprocité, à cette époque,
étaient qu'ils espéraient que son effet serait
de faciliter graduellement l'absorption de
ces colonies par les Etats-Unis,—de créer
un sentiment favorable à l'annexion, et d'arrêter le sentiment d'un tout autre caractère
qui s'élevait alors. Mais aujourd'hui, il n'y
a aucun doute que la disposition à abroger
le traité de réciprocité, ne provient pas
seulement d'un sentiment. d'hostilité envers
l'Angleterre, de la part du peuple des Etats- Unis, et en conséquence des prétendues
incursions sur leur territoire, parties d'ici, mais
elle provient aussi du fait que les taxes pèsent
lourdement sur lui, et qu'il est devenu nécessaire d'élever le tarif, et de l'idée
que,
s'il était imposé une taxe sur les produits
du Canada qui entrent aux Etats-Unis il en
résulterait. un accroissement de revenu.
Toutes ces circonstances ont donné lieu au
désir, de la part du peuple et du gouvernement des Etats-Unis, de mettre cette question
sur un pied différent de celui sur lequel elle
a été depuis dix ans, et d'abroger ce traité
qu'ils représentent comme étant tout en faveur du Canada, bien que de fait, il soit
très
considérablement en laveur des Etats-Unis.
(Ecoutez! écoutez!) Une autre raison qui
rend un changement nécessaire, est—comme
nous ne pouvons nous le cacher à nous-mêmes
—que notre position comme colonie a été
considérablement modifiée par les évènements
qui ont en lieu dans les Etats-Unis. Nous
ne pouvons maintenant espérer pouvoir
rester les bras croisés, en priant la Providence
de nous être propice, sans nous préparer à
nous défendre. Nous ne pouvons espérer
que l'Angleterre sera prête a prendre sur elle
presque tout le fardeau de la défense, et que
nous ne serons même pas les bûcheurs de
bois ou les charroyeurs d'eau. Il nous faut
être les deux. Et si nous obtenons,—comme
j'espère que nous l'obtiendrons lorsque le
temps ou sera venu, grâce aux résolutions
qui viennent d'être adoptées,—si nous obtenons le nom et la position d'une nation,
nous
ne devons pas craindre de prendre en même
temps les responsabilités d'une nation. Et
ce que nous avons de mieux à faire pour
éviter une attaque, est d'apprendre, en temps
de paix, à nous préparer aux exigences de la
guerre, et de nous mettre—ainsi que doit le
faire un peuple de quatre millions d'âmes,
comme nous le serons lorsque nous serons
unis ensemble —en état de défendre nos libertés, de quelque côté qu'elles soient attaquées.
(Ecoutez! écoutez!) Nous ne pouvons donc nous empêcher de voir la nécessité
d'un changement,—nécessité qui nous est
imposée et par notre position politique, relativement à l'état de la représentation
en parlement, et par la position dans laquelle nous
nous trouvons, en commun avec les colonies
maritimes. relativement aux probabilités
d'hostilités de la part des Etats-Unis, et à la
nécessité de placer le pays en état de défense.
La nécessité d'un changement est donc
admise,—et je crois qu'il n'y a guère
un seul membre de cette chambre,
d'un côté ou de l'autre, qui ne l'admet
pas, — les uns pensent que ce changement doit avoir lieu d'une manière, tandis
ne les autres pensent qu'il doit avoir lieu
'une autre manière; les uns pensent,—et
le président du conseil paraissait être de
cette opinion à. une certaine époque—que le
changement le plus désirable, serait le
moindre projet de fédération du Canada,
divisé en deux ou trois provinces,—que ce
serait la le meilleur moyen de prévenir les
maux qui nous menacent. D'autres pensent
que nous pouvons continuer à marcher tels
que nous sommes.
L'
HON. J. H. CAMERON—Ët d'autres
pensent que le seul moyen par lequel nous
pouvons atteindre à une position satisfaisante, serait une union des colonies soit
conformément à ce projet, soit par une union
législative. J'aimerais à savoir combien il
y en a qui croient que nous pouvons marcher
tels que. nous sommes?
L'
HON. J. H. CAMERON—Je crois
qu'il n'y a pas. six membres de cette chambre
qui croient que, avec les difficultés de notre
position, nous pouvons faire fonctionner
l'Union sous les conditions actuelles. Si nous
ne le pouvons pas, alors nous avons le choix
entre la dissolution de l'Union, en revenant
à l'ancienne position que nous occupions
avant l'Union,—ce que personne ne désirerait
pour un instant,—ou une fédération des
deux Canadas, ou le rojet plus vaste de
l'Union de toutes les colonies de l'Amérique
Britannique du Nord. Si l'on veut examiner
pour un instant tous ces projets sous le veritable point de vue sous lequel ils doivent
être examinés, l'on verra qu'à l'égard de la
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seconde partie de mon sujet—la nature
des changements et l'importance des intérêts qu'ils embrassent,—ce projet est celui
auquel la législature et le penp e de ce pays
doivent nécessairement en venir. (Ecoutez!
écoutez!) Nous désirons prendre une position sur ce continent qui mettra toutes ces
faibles colonies sous un seul gouvernement.
Et lorsque ce gouvernement sera fermé,
lorsque cette union aura lieu, nous serons
alors dans une position qui, d'après les faits
et les chiffres que l'on a cités de temps à
autres dans le cours de ce débat, nous établira comme puissance sur ce continent et
nous aidera it résoudre les trois problèmes
ofl'erts par les trois formes de gouvernement:
—le gouvernement despotique de Mexico,
le gouvernement républicain des Etats-Unis,
et le gouvernement constitutionnel de ces
colonies. (Ecoutez! écoutez!) J'espère que
le résultat sera que nous verrons le gouvernement de ces colonies durer plus longtemps
qu'aucun des autres, puisque nous croyons
qu'il est basé sur le plus libre exercice de
la véritable volonté du peuple et qu'il met
en pratique des institutions qui, dans la
mère—patrie, ont resisté à l'épreuve du
temps, des secousses et des revers, jusqu'à
ce qu'elles soient devenues plus fermement
eimentées aujourd'hui qu'à aucune époque
de leur existence. (Ecoutez! écoutez!) Et
je ne puis m'empêcher de penser que, si
cette nécessité de changement existe, la
nature du changement proposé doit se recommander d'elle-même a tous ceux qui
aiment véritablement leur pays de ce côté- ci de l'Atlantique. (Ecoutez! écoutez!)
Nous sommes cin colonies avec une population de 4,000,00 d'âmes, et nous aurons
une dette d'environ $80,000,000, ou à peu
près $20 pour chaque habitant. Dans la
république voisine, d'après un état fait à
la fin de l'année dernière, nous apprenons
que la dette de ce pays, au ler juillet prochain, sera d'environ $150 pour chaque
habitant. Donc, notre jeune nation, avec
une dette de $20 par tête, se trouvera sous
ce rapport dans une position bien différente
de celle du peuple de ce pays. Jetons un
coup-d'œil sur tout l'ensemble de l'empire
colonial britannique. L'Angleterre a trente- huit colonies, contenant 10,000,000 d'âmes.
Sur ce chiffre, y a six millions de blancs et
quatre millions de noirs. Sur les six millions
de blancs, quatre millions habitent les colonies de l'Amérique Britannique. Nous avons
pour le Canada, le Nouvelle-Ecosse et le
Nouveau-Brunswick, des navires de mer
d'une capacité de pas moins de cinq millions de tonneaux, et de sept millions sur
les lacs, ou un tonnage total de douze millions—ce qui nous met, sous ce rapport,
au rang de la troisième puissance du
monde. Nulle autre nation que l'Angleterre et les Etats-Unis ne possède un plus
grand tonnage que celui-ci. La Nouvelle- Ecosse seule a un plus grand tonne e que
le grand empire d'Autriche. Si telle doit
être notre position relativement à notre population, notre dette et notre tonnage,
l'on
ne peut s'empêcher de voir qu'il nous faut
nous fortifier en nous unissent ensemble par
une union politique et commerciale. Nous
avons aujourd'hui cinq tarifs différents—et
je puis dire hostiles: un dans chaque colonie—et nous avons cinq gouvernements différents.
Nous aurons alors un seul gouvernement fcrt, et un seul système d'impôts
douaniers. Bien que nous n'aurons pas la
même concentration de pouvoir que nous
aurions avec une union législative, nous
aurons cependant un pouvoir qui possèdera
sur ce pays cette grande autorité qu'il doit
posséder pour lui permettre de concentrer
sur un point toute la force militaire du
pays dans le cas où il deviendrait nécessaire de le défendre, et qui nous mettre
dans une bien meilleure position que jamais.
Regardons toutes les colonies de l'Angleterre,
et voyons si, sous le rapport de l'importance
du commerce qu'elles font avec l'Angleterre et de la quantité de marchandises
anglaises qu'elles consomment, comparées
aux dépenses que l'Angleterre est obligée
de faire, il a réellement quelque fondement valide dans la position que prennent
les économistes olitiques de l'école de Manchester et de Birmingham. Prenons toutes
les exportations de l'Angleterre aux colonies et ses importations des colonies, et
que
trouvons-nous? Nous trouvons que les exportations de l'Angleterre, l'année dernière,
se sont élevées à près de £100,000,000 sterling, tandis que les exportations des colonies
à la Grande-Bretagne se sont élevées à
£40,000,000 sterling. Placez les habitants
des colonies, homme pour homme, en comparaison avec ceux des pays étrangers, et vous
verrez que le commerce des colonies est
beaucoup plus avantageux pour l'Angleterre
que celui des nations étrangères, indépendamment de tous les autres grands intérêts
qui découlent de la conservation par l'Angleterre de ses possessions coloniales. Prenez
965
le fait que toutes les dépenses de l'Angleterre
sont de £40,000,000 à part l'intérêt de la
dette publique, tandis que ses dépenses pour
les besoins coloniaux, annuellement, à part
des Indes et des dépenses occasion nées parl envoi de troupes aux colonies où des
troubles ont lien, ne sont que de £2,000,000
sterling, dont le Canada n'a reçu que
£500,000 sterling. Quand ces faits sont pris
en considération, je dis que l'on voit que ces
colonies sont d'une bien plus grande valeur
pour la mère-patrie qu'on ne le suppose
généralement, et beaucoup plus rande que
les politiques de l'école dont j'ai parlé ne
voudraient le faire croire. (Ecoutez!
écoutez!) Si ce que retire le mère-patrie
de nos relations avec elle est d'assez eu
d'importance pour donner cours aux doctrines de cette école, je crois qu'il ne serait
pas difficile de démontrer que ce que nous
retircns de notre connexion avec la Grande- Bretagne n'est pas très important pour
nous,
excepté sous le rapport de la défense. Si
nous voulons vivre sous le vieux et glorieux
drapeau, et conserver le titre honorable de
sujets britanniques, est-il juste pour nos
frères d'Angleterre, qui sont exempts de
l'atteinte de l'ennemi, de dire qu'à moins
que nous ne pourvoyions nous-même à notre
défense, il faut nous abandonner? L'on
nous regarderait comme déloyaux si nous
prenions la même position et si nous disions
que nous choisirons nous-mêmes nos relations
si nous avons à pourvoir à tous les frais de notre
défense. (Ecoutez! écoutez!) Je crois, M.
l'ORATEUR, que nous devrions pouvoir dire
à la mère-patrie que nous sommes prêts à
faire tout ce qui est en notre pouvoir pour
nous défendre. Quand je dis que la dette du
Canada n'est que de $20 par tête, et que
celle des Etats-Unis serait bientôt, si elle
ne l'est déjà, de $150 par tête de leur population, je suis prêt a ajouter que je
suis
parfaitement disposé, afin de compléter notre
communication avec les bords de la mer, à
construire le chemin de fer intercolonial et
éviter la possibilité où nous sommes aujourd'hui de voir couper nos communications
avec la Grande-Bretagne. Je suis prêt à
ajouter $10 de dette de plus sur chaque
habitant de ce pays, afin que nous soyons
placés dans la véritable position que nous
devons occuper dans l'estime du peuple
anglais et du monde,—celle d'un peuple qui
ne regarde pas le simple sacrifice d'argent
comme comparable au devoir de se défendre
lui-même. (Ecoutez! écoutez!) Je crois,
M. l'ORATEUR que lorsque les délégués
de notre gouvernement iront en Angleterre,
ils devraient cuvcir dire ce que nous
sommes prêts à faire pour notre défense.
Ils devraient pouvoir dire au gouvernement
anglais que bien que nous soyons un jeune
et comparativement pauvre pays,—bien que
notre climat soit rigoureux et que la mer nous
soit fermée pendant une grande partie de
l'année,—cependant, que nous avons prouvé
plus d'une fois que nous sommes un peuple
à qui l'on ne pouvait pas enlever ses libertés
par la force des armes, et ne nous ne
sommes pas prêts à nous les laisser enlever
d'aucune autre manière; que nous sommes
prêts à prendre notre part dans toute mesure
juste et raisonnable que pourra adopter la
mère-patrie, mais que nous ne pouvons pas,—
et que l'on ne dort pas s'y attendre,—nous
charger de tout le poids de la défense de
cette partie exposée de l'empire britannique.
Voyez nos effets sur le marché anglais. Le
public anglais est sous l'impression que nous
pouvons à tout instant être envahie par les
Etats—Unis, ou que les idées de l'école de
Manchester peuvent prévaloir, et nos bons
5 pour cent sont à 80. La position des
Etats-Unis le long de notre immense frontière ouverte est telle ne, dans l'état d'excitation
et de force où ils se trouvent aujourd'hui, nous pourrions être plongés dans les
hostilités d'un moment à l'autre, et en
conséquence notre gouvernement devrait
dire aux autorités impériales " qu'il est absolument nécessaire de prendre des mesures
de défense sur une grande échelle,—que
nous sommes prêts à faire ce que devons
faire, mais qu'a les ne doivent pas s'attendre
à ce que nous en fassions tous les frais,
outre que nous subirions les pertes qui
résulteraient de la dépréciation de nos effets
publics sur le marché. S'il nous faut le
faire, ou même s'il nous faut faire de
grandes dépenses, il faut que vous garantissiez nos débentures. Sachant que vous
êtes notre garant, nous ne nous occupons
pas que les Etats-Unis traversent notre frontière avec des intentions hostiles ou
non.
Si nos voisins savent que nous obtiendrons
n'importe quelle somme nous aurons besoin,
soit comme prêt de votre part ou avec votre
garantie, de manière que nos bons resteront
au pair sur le marché, ils y penseront à
deux fois avant de nous attaquer. " Lorsque
le gouvernement anglais sera prêt à nous
supporter de cette manière, je dis qu'alors
nous devons marcher de l'avant et coopérer
966
avec lui pour construire un réseau considérable de travaux de défense, en supportant,
au moins, la principale partie du
fardeau. Nous n'avons que faire de ses
£50,000 et année pour l'érection de quelques fortifications à Québec, en employant
une autre petite somme pour restaurer
des ouvrages de terrassements dans l'Ouest,
justement pour inviter les Américains a
venir s'en emparer lorsque les travaux seront
a moitié faits, et qu'ils formeront un piége
dans lequel nous pourrons être plus facilement pus. Je suis sûr que chaque membre
de cette chambre et chaque citoyen du Canada
a dû être surpris de la position prise par les
honnnes d'état anglais à l'égard des défenses
du Canada, et de ce qu'ils ont dit qu'il n'y
avait que quelques jours de l'année pendant
lesques on pouvait travailler, avec notre
climat, a la construction de fortifications.
Je lisais l'autre jour que l'on avait dit en
Angleterre qu'il n'y avait qu'un mois dans
l'année où l'on pouvait travailler au dehors
avec avantage. Bien qu'il soit vrai que nos
communications avec la mer soient interrompues pendant environ la moitié de l'année,
par les glaces, cependant l'on peut
travailler dehors toute l'année dans le Haut- Canada, et pendant l'autre moitié de
l'année
dansle Bas-Canada, à l'exception de quelques
jours très orageux, à l'une ou l'autre partie
des travaux nécessaires a l'érection de
fortifications. Mais en ce qui a rapport à
notre protection contre les attaques des
Etats-Unis, la grande chose est de leur faire
savoir que, soit que nous dépensions l'argent
immédiatement—cet été—ou non, nous l'avons à dépenser. Il faut faire savoir que
le gouvernement impérial et le gouvernement provincial ont voté tous deux l'argent,
et qu'il sera converti en fortifications
solides le plus rapidement possible. La
population du Sud a eu bientôt construit
des fortifications derrière lesquelles elle a
combattu pour sa liberté, et nous aussi
devrions être prêts à combattre pour notre
liberté. C'est à l'argent qu'elle a employé
en fortifications qu'elle doit son existence
comme puissance formidable au moment
actuel. Il ne faudrait pas laisser circuler à
l'étranger l'idée que nous allons dépenser
une bagatelle de cinquante ou de cent mille
louis à faire un peu de replatrage ici et un
peu de maçonnerie là; mais nous devrions
commencer aussi rapidement que possible à
montrer que nous sommes prets a dépenser
en travaux efficaces tout l'argent nécessaire
pour nous mettre en état de résister à une
invasion, même avec une poignée de troupes
jusqu'à ce qu'il puisse nous en être envoyé
davantage. Comme nous sommes à présent,
le gouvernement des Etats-Unis comprend
que nous sommes à sa merci, et qu'il peut
faire de nous ce que bon lui semblera.
Un jour il nous impose un système de
passeports, et le lendemain il nous en
débarrasse. Aujourd'hui il nous menace
de l'abrogation du traité de réciprocité, et
demain il sera peut-être prêt, si nous sommes
bons enfants, à en continuer l'opération.
Un jour le système de transit en douane
doit être aboli; le lendemain nous n'en
entendons plus parler. Nous entendons dire
ensuite qu'il a l'intention de mettre une
flottille de chaloupes canonnières sur les
lacs; puis nous apprenons qu'il renonce à
cette intention. Que sont toutes ces belles promesses et ces bons sentiments qu'il
cherche
a faire naître, sinon des moyens de cacher ses
véritables projets? Croit-ou réellement qu'il
n'a pas dans le cœur l'intention de faire tout
ce dont il nous menace, et n'est-il pas de notre
devoir de nous mettre en état de subir les
conséquences de l'exécution de ces menaces?
Il voit maintenant que nous comprenons ses
projets, et il commence à nous traiter avec
plus de douceur, jusqu'a ce qu'il ait réglé
avec le Sud. Il commence a voir qu'il a
agi d'une manière agressive un peu trop tôt
contre ce pauvre lion britannique, et qu'il
y a danger de le réveiller. (Ecoutez!
écoutez!) Et, M. l'ORATEUR je crois
qu'il serait bon que nous fussions un
peu plus éveillés, en ce pays, par les événements qui se passent autour de nous, et
que
le peuple Anglais fût un peu plus sérieux,
afin que le peuple des Etats-Unis ne prenne
pas habitude de regarder le lion britannique, ainsi quc l'appelle le
Charivari de
Paris, comme un lion empaillé. Je voudrais
quelquefois que le lion rugisso un peu
(rires), comme il a rugi autrefois, et
comme il a rugi quand il a fait trembler
l'empereur de toutes les Bassins. (Ecoutez!
écoutez!) Je crains que nos voisins ne
soient sous la très-fausse impression que
n'avons plus que la peau de l'animal (rires),
et que si l'on entendait sa voix ce ne serait
pas un rugissement, mais un braiment.
Mais il ne doit pas trop se fier à cette idée,
car il pourra un beau jour être rudement
détrompé en voyant les os, et le sang, et les
muscles du puissant animal d'autrefois.
(Ecoutez! écoutez!) Je crois, M. l'ORA
967
TEUR, que nous ne pouvons remplir notre
devoir envers les autorités impériales, ni
elles envers nous, à moins que nous ne soyons
unis en une confédération, au lieu de rester
épars comme nous le sommes aujourd'hui.
Quelle serait notre position si nous étions
unis ainsi? Les adversaires de la confédération disent que nous n'aurions qu'une
frontière plus étendue, sans avoir plus de
bras pour la défendre; que la frontière que
nous aurions ainsi serait plus difficile à
défendre avec le surcroit d'hommes qu'elle
nous procurcrait, que notre frontière actuelle
ne le serait avec les forces dont nous disposons; que le Canada pourrait être appelé
a
envoyer des troupes dans les provinces d'enbas, en laissant notre propre frontière
exposée,
ou qu'elles auraient a envoyer leur milice ici,
laissant leur territoire ouvert à l'attaque de
l'ennemi. Mais en réponse à ces raisonnements, je dirai qu'il n'est pas probable que
nous soyons attaqués sur tous les points à la
fois. Nous pourrions être forcés de nous
retirer tout à fait d'une partie du territoire
afin de défendre des points plus importants, ou d'occuper des positions d'une
défense plus facile; mais personne ne peut
hésiter à convenirqu'il vaut infiniment mieux,
pour tous les besoins de la défense, que toute la
force de milice du pays soit placée sous le
contrôle d'un seul chef exécutif, qui pourrait la tenir ainsi sous sa main, plutôt
que de la disperser sur un vaste territoire
exposé, sous le commandement de différents
chefs, avec lesquels il faudrait s'entendre
avant que de pouvoir concentrer les troupes.
(Ecoutez! écoutez!) La véritable position
que nous devons occuper devant le monde
est que toute la milice soit placée sous
le contrôle d'un gouvernement central, car,
de cette manière, le bon sens veut et dit
qu'elle serait bien plus utile pour la défense
qu'elle ne pourrait l'être en étant divisée; et
l'effet moral produit sur une puissance
étrangère qui méditerait une attaque serait
beaucoup plus grand, s'il était bien compris
ne nous sommes un peuple uni, au lieu d'être
divisé. Notre population s'élèverait à quatre
millions, ce qui, en comptant dans la proportion ordinaire, nous donnerait une milice
de
500,000 hommes. Si nous croyons que notre
population est réellement et véritablement
loyale, fortement attachée à la constitution de
la mère-patrie, parce qu'elle croit que l'implantation des institutions de ce pays
sur le
sol de ce continent offre la meilleure et la
plus ample sécurité pour tout homme qui
veut jouir des bienfaits d'un pays et d'institutions libres, alors nous aurions étant
unis, non seulement ce sentiment d'attachement au trône de l'Angleterre, mais nous
aurions entre nos mains le mécanisme que
fournit cette grande constitution, au moyen
duquel nous pourrions faire fonctionner et
défendre nos libertés, et notre peuple jouirait
d'un véritable gouvernement constitutionnel
libre. (Ecoutez! écoutez!) Nos adversaires
disent que nous ne sommes pas mûrs, que
nous n'avons pas l'âge requis pour fonder
une nouvelle nationalité. Mais, M. l'ORATEUR, il n'y a aucune des puissances secondaires
de l'Europe, excepté la Belgique et la
Bavière, qui aient une population de quatre
millions, Si nous ne pouvons former une
nation avec quatre millions d'âmes, que
dirons-nous de la Grèce avec sa population
d'un million? Si nous devons jamais former
une nation,—et peu d'hommes nieront que
notre destinée soit de nous unir à une époque
quelconque,—quelle meilleure occasion pouvons—nous attendre pour transmettre à la
postérité le bienfait d'une nationalité libre et unie- le plus grand bienfait qu'un
gouvernement et
un peuple puissent léguer—que l'occasion
que l'état actuel des affaires nous présente?
Elle nous est offerte librement et ouvertement à la face du monde, et nous espérons
convaincre le monde que, des trois systèmes
de gouvernement maintenant en existence
sur ce continent, le nôtre est le meilleur.
Nous avons le trône despotique des MONTÉZUMAS rempli par un prince étranger et
soutenu par des bayonnettes étrangères; nous
avons le gouvernement républicain des Etats- Unis, basé sur le principe que tous les
hommes sont libres et égaux, et que la volonté
de la majorité doit gouverner et avoir raison;
et nous avons le gouvernement responsable
fourni par la constitution britannique, sous
laquelle la nation anglaise a si longtemps
existé, et sous la protection de laquelle ses
colonies est pris tant d'expansion que le
soleil ne s'y couche jamais. (Ecoutez! écou—
tez!) Nous croyons que cette dernière forme
de gouvernement est la meilleure que nous
puissions adopter pour les besoins actuels,
et transmettre à nos descendants sur ce
continent. M. l'ORATEUR si nous avons
des institutions, une population, des richesses
et un territoire d'une pareille étendue et d'une
aussi grande valeur à protéger, et que l'oc
casion nous soit librement offerte de nous unir
pour leur protection, je dis que le but que
l'on veut atteindre par ce changement
968
est un but ni ne peut que se recommander très c airement et très distinctement
à l'esprit de tous ceux qui désirent voir un
peuple uni et heureux habiter ce territoire
de 1 Amérique Britannique du Nord, s'étendant d'un océan à l'autre sous l'égide
protectrice de la constitution et de la
couronne anglaise. Nous n'avons, dans mon
humble opinion, à choisir qu'entre deux
états politiques futurs. Nous avons d'un
côté l'occasion de nous constituer en nation,
capable de nous protéger avec l'aide de la
mère-patrie, et de croître en richesse et en
rospérité sous cette forme d'existence.
D'un autre côté, nous avons la perspective
d'une absorption certaine, et à une époque
peu éloignée, par les Etats-Unis. Il n'y a
pas d'alternative. (Approbation ironique de
la gauche.) Il nous faut ou adopter l'une ou
nous réeigner à l'autre. Je n'ai aucun doute
qu'une immense partie de la population ne
voudrait pas consentir à rester ici, et à
se résigner à la dernière alternative, mais
que, comme les anciens loyalistes de l'empire-uni, elle abandonnerait tout ce qu'elle
possède, plutôt que de cesser d'avoir la
protection du drapeau britannique et de
porter le nom de sujets anglais—d'hommes dont la loyauté n'est pas seulement
un sentiment des lèvres, mais chez qui elle
forme autant un élément constitutif du sang,
que le principe vital lui-même. (Ecoutez!
écoutez!) Je suis convaincu, M. l'ORATEUR
qu'il n'y a pas d'autre alternative,—pas
d'autre choix pour nous, que de chercher à
concentrer la puissance anglaise et le sentiment britannique sur ce continent, ou
tomber dans les bras du gouvernement républicain des Etats-Unis. (Ecoutez! écoutez!)
Et, M. l'ORATEUR, lorsque nous examinons l'étendue du domaine qui nous est
ouvert, lorsque nous réfléchissons que nous
poserions un pied sur l'Atlantique et l'autre
sur le Pacifique, et que nous nous rappelons
l'immense, salubre et fertile territoire qui
existe entre nous et les Montagnes Rocheuses,
ces riches vallées de la Saskatchewan et
de l'Assiniboine, dont on dit ne la fertilité
est bien supérieure et est certainement égale
à celle d'aucune partie de ce continent,—
lorsque nous pensons a ces vallées et a
l'immense population que l'on pourrait y
jeter de l'ancien monde, pour développer
leurs ressources et amener leurs trésors sur
nos marchés par la voie des lacs,—je dis
que lorsque nous voyons tout cela, _nous
voyons s'élever pour nous un avenir qui me
parait, et qui devrait paraitre aux autres si
rillant, que personne ne devrait hésiter à
l'accepter plutôt que la seule autre alternative—de tomber par petites provinces dans
les Etats-Unis, où nous ne pouvons qu'être
écrasés par le fardeau de leurs taxes. (Ecoutez! écoutez!) Mais certaines personnes
disent que nous éviterons les taxes en nous
donnant aux Américains,—qu'ils seraient
prêts a nous recevoir demain et consentiraient à ne nous imposer aucune taxe, pour
le remboursement de leur dette créée par la
guerre; mais cette idée n'est-elle pas chimérique, puisqu'ils n'entretiennent aucun
doute, qu'ils peuvent nous envahir et nous
conquérir n'importe quand, et nous forcer de
partager leur dette et de payer la nôtre.
Quant à nos espérances sous le raport de
la colonisation et de l'extension de notre
population et de nos richesses, voyez ce que
nous pourrions faire pour attirer les immigrants de l'ancien monde sur notre territoire.
Mais ici je dois dire un mot d'un point du
projet quis. été adopté par la chambre, et
que j'espère voir changer. Je crois que
l'on a commis une fatale erreur, en plaçant
les terres publiques entre les mains des
gouvernements locaux, qui pourront faire
en réglements contraires relativement à
l'immigration, et qui tendront à retarder
plutôt qu'à seconder l'établissement du pays.
Toutes ces terres auraient du être placées
sous le contrôle du gouvernement général,
afin qu'il pût adopter un système uniforme
d'immigration. Quand nous regardons le
Haut-Canada et que nous voyons que sur
ses quatre-vingt millions d'acres de terre, il
n'y en a que treize millions et demi entre les
mains de propriétaires,—une moyenne de
neuf acres par habitant,—quand nous voyons
l'immense quantité de terres de ce pays,
propres à la culture, qui ne sont pas encore
utilisées, nous ne pouvons nous empêcher
d'en venir à la conclusion, que nous avons
un vaste champ ouvert à l'immigration, qui
devrait être placé sous le contrôle du
gouvernement général, et non pas laissé à la
spéculation des gouvernements locaux. Eh
bien! M. l'ORATEUR lorsqu'on voit tout
cela, et que l'on comprend et sait que le
grand changement qui sera opéré 'par cette
union nous donnera tant de choses désirables,
je dis que l'immensité des intérêts qu'il
embrasse devrait nous recommander, le plus
fortement possible, un changement de la
nature de celui dont j'ai parlé,—changement qui tendrait a placer ce pays sur un
969
pied qui doit évidemment faire de nous,
avec le temps, une grande nation, et cela en
bien moins de temps que beaucoup de gens
ne se l'imaginent. (Ecoutez! écoutez!)
Permettez-moi pour un instant, M. l'ORATEUR, de dire un mot de l'histoire des Etats-
Unis, pour voir dans quel état s'est trouvé
ce pays autrefois. En 1792, les Etats-Unis,
dont la population n'était alors que de neuf
millions d'âmes, avaient un revenu d'un peu
plus de quatre millions et demi de piastres,
tandis ne le Canada, en 1863, avec une
population de deux millions et demi, avait
un revenu de quatorze millions de piastres.
En 1821, alors que leur population avait
considérablement augmenté, le total de leurs
importations et de leurs exportations s'élevait
a quatre vingt-dix-huit millions de piastres,
tandis ne les nôtres, en 1863, avec une population de deux millions et demi, étaient
de
quatre-vingt-neuf millions de piastres, c'est- a-dire environ neuf millions de moins
que
toutes les importations et exportations des
Etats-Unis en 1821. Il est vrai que depuis
cette époque toutes les améliorations qui ont
fait des Etats-Unis une grande puissance sur
ce continent—la construction des chemins de
fer et des lignes de télégraphe, l'application
de la vapeur à toute espèce de mécanisme, et
les autres inventions des vingt ou trente
dernières années,—sont venues à l'existence,
et qu'ils ont marché vers la grandeur à
sa de géant. Mais, cependant, cela ne
étruit pas mon argument que de dire que,
comme nous avons, de mémoire d'homme,
progressé aussi rapidement, non seulement
en population, mais en tout ce qui tend à
placer le Canada sur un pied qui devrait être
satisfaisant pour tous ceux qui veulent le
bien du pays, il y ait quelque raison de croire,
pour un instant, ne tous les changements
qui doivent être faits ont été faits, et qu'avec
l'esprit d'entreprise et les efforts d'une population commune et éclairée nous ne
serons
pas en position de continuer à marcher dans
la voie de prospérité que nous avons parcourue
en aussi peu de temps, et qui a toujours été
croissante jusqu'à il y a trois ou quatre ans,
lorsque, pour des causes naturelles et en conséquence de la guerre des Etats-Unis,
elle
a reçu un aussi grave échec. Nous nous
trouverons, je crois, sitôt sur le chemin de la
prospérité, au moyen de cette union preposée,
que nous n'aurons aucune raison d'envler les
progrès d'aucune nation quelconque. (Ecoutez! écoutez!) Maintenant, M. l'ORATEUR,
que j'ai donné les raisons pour lesquelles je
crois un changement nécessaire, et que j'ai
cherché a faire voir la nature de ce changement, je vais tâcher de faire voir pourquoi
la résolution queje tiens à la main, et que
j'offre à l'adoption de cette chambre, est
une proposition qui devrait être adoptée.
J'ai déjà dit que, comme membre individuel
de la législature du Canada, je n'hésitais pas
à prendre sur moi la responsabilité de voter
en faveur des résolutions relatives à la confédération, bien qu'elles n'aient pas
été acceptées par le peuple de ce pays d'aucune
manière constitutionnelle. J'ai dit que je
le faisais sur le même principe que je l'aurais
fait si j'avais alors voté en dehors de la
chambre, au lieu de voter dans son enceinte.
J 'aurais voté en faveur de ces résolutions
comme électeur, parce que je crois qu'elles
forment une base équitable pour l'union
projetée; et, M. l'ORATEUR, je désire offrir
à tous les électeurs exactement la même occasion que je rechercherais, et je demande
pour
eux le même privilége que celui que je réclamerais pour moi-même dans cette chambre.
Je crois qu'ils ont droit qu'on soumette
cette question à leur considération, avant
que les résolutions qui ont été adoptées par
cette chambre ne soient définitivement décrétées par la législature impériale. (Ecoutez!
écoutez!) L'on a dit, M. l'ORATEUR,
que cela aurait l'effet de remettre indéfiniment l'accomplissement de l'Union projetée,
tandis que les événements nous pressent
tellement que nous n'avons aucun temps a
perdre pour nous mettre dans un état de
défense tel que nous puissions rencontrer et
repousser toute armée qui pourrait être
dirigée contre nous. Eh bien! M. l'ORATEUR, il n' a rien dans la résolution que je
propose qui empêcherait, suivant moi, l'accomplissement immédiat du projet. Le gouvernement
nous a dit qu'il se propose de
proroger le parlement dans quelques jours,
et il nous a dit aussi que nous devons être
réunis de nochau dans le cours de l'été.
Qui peut nous empêcher de prendre le rejet
en considération durant la session d'été?
L'on doit présumer que le gouvernement
impérial en viendra à quelque décision sur
les résolutions de la conférence de Québec,
qui ont été déposées devant les deux
chambres du parlement anglais, et je ne vois
rien qui puisse empêcher le gouvernment
impérial de déclarer son opinion sur ce sujet.
Je pense qu'il n'y a rien qui puisse empêcher notre uvernement d aller en Angleterre
et d'offrir ces résolutions à la considé
970
ration de la législature impériale, en la
laissant agir comme bon lui semblerait, mais
déclarant en même tems que la loi qui sera
passé ne devrait pas devenir en force dans
les différentes colonies jusqu'à ce qu'elle ait
été acceptée par les législatures de ces colonies. Il n'y aurait aucune perte de temps.
Il serait aussi facile de dissoudre ce parlement et de le convoquer de nouveau à temps
our prendre en considération la mesure que
a Grande-Bretagne aurait passée pendant cet
intervalle, qu'il le serait de nous réunir durant
l'été et de faire la même chose. Pourquoi
vaut-on traiter le Canada autrement qu'on
ne traite les autres provinces? La législature
du Nouveau-Brunswick a été dissoute afin
que le peuple puisse se prononcer sur la
question. Le procureur-général de Terreneuve a déclaré que le gouvernement de
cette colonie a l'intention d'en appeler au
peuple, et que rien ne sera fait avant qu'il
ait donné son opinion. (Ecoutez! écoutez!)
Dans la Nouvelle-Ecosse, le gouvernement,
si je comprends bien, n'en fait pas une
question ministérielle. Elle ne doit pas
être placée sur ce pied, et, s'il survient
quelque difficulté a la faire adopter par la
législature, le gouvernement de la Nouvelle- Ecosse est prêt a la dissoudre aussi.
Je ne
dis rien de l'Ile du Prince-Edouard—car
son acceptation ou son rejet du projet ne
signifierait pas grand'chose. Mais sa législature sera sans doute dissoute aussi,
afin
que le peuple uisse se prononcer, si la
chambre d'assem lée est hostile au projet, et
notre gouvernement aurait sans aucun doute
fait la même chose si cette chambre se fût
montrée hostile à la mesure. Mais parce
que cette chambre n'y est pas hostile, et parce
que les ministres se trouvaient assez forts
pour la faire adopter par une grande majorité, ils ont déclaré qu'ils adopteraient
la
conduite qu'ils ont suivre, bien que dans les
autres provinces les choses se sont passées
d'une manière tout a fait différente. (Ecoutez! écoutez!) Maintenant, M. l'ORATEUR,
examinons un instant pourquoi nous devrions
être placés dans la méme position que celle
qu'occupent les législatures et le peuple
des autres provinces. Nous entendons dire
de tous les côtés de la chambre que
tout le pays est en faveur de cette mesure.
Dans ce cas, pourquoi hésiter à demander
au pays de confirmer par une élection ce
qui est si clairement avantageux et ce
qui est si sûr d'être approuvé? Mars,
M. l'ORATEUR, j'entends dire, dans cette
chambre et en dehors de cette chambre, que
le peuple du Bas-Canada est opposé à la
mesure. Si tel est le cas, s'il y est aussi
fortement opposé qu'on l'a dit, serait-ce une
conduite sage de notre part de la lui imposer
contre sa volonté? (Ecoutez! écoutez!)
Nous voulons créer une existence gouvernementale entièrement nouvelle, et nous proposons
de soumettre une immense étendue
de pays à cette nouvelle forme du gouvernement. Nous voulons et rétendons qu'elle
ait sa meilleure et plus erme base dans le
coeur du peuple. Et, M. l'ORATEUR, ne
sera-t-elle pas plus forte et mieux enracinée
dans l'estime du peuple si on la lui soumet
et si on obtient sa sanction pour la mettre a
exécution? (Ecoutez l) En proposant qu'elle
soit sanctionnée par le peuple, je n'ai pas dans
l'idée l'absurdité, inconnue à notre forme de
gouvernement, de lui demander un vote
direct par oui et par non sur la question. Je
n'ai jamais pensé à rien de semblable. Je
propose de le faire faire d'une manière constitutionnelle. Tout mon passé politique
aurait fait voir à tous ceux qui le connaissent
que je ne pouvais entretenir une idée aussi
démocratique que celle de sortir de la constitution pour faire une chose qui peut
être
mieux faite en restant dans les limites de
cette constitution. En conséquence, celui
qui aurait pensé pour un moment que, tout
en cherchant à bâtir, je mettais en même
temps ce qu'on peut appeler une main sacrilége pour détruire, se tromprait grandement
sur la ligne de conduite que je voulais tenir
—la seule conduite convenable et sûre qui
pût être suivie. Si vous voulez édifier ce
monument d'une nouvelle nationalité sur les
véritables sentiments et le cœur du peuple,
il faut l'édifier sur un appel au peuple. Vous
ne devez pas le craindre. Vous pouvez dire
qu'il s'élèvera des diffiicultés,—que l'on soulèvera d'autres questions,—que les élections
ne se feront pas toujours sur la question
elle-même—pour la confédération ou contre
la confédération. Mais, je vous dis qu'elles
le seront, si le peuple est aussi favorable a
ce projet que vous le dites. (Ecoutez!
écoutez!) Les mérites ou démérites des
candidats seront mis de côté, et le vote sera
pris sur les mérites de la confédération;—
autrement le peuple ne mériterait pas qu'en
lui fit cet appel. On en a appelé à l'histoire, et l'on a dit ne des appels au peuple
sur des questions e cette nature sont inconnus sous la constitution anglaise. Les
cas de l'Union entre l'Angleterre et l'Ecosse,
971
et de l'Union des Canadas eux-mêmes, ont
été cités; et l'on a demandé si, dans aucun
de ces cas, l'on en avait appelé au peuple—
et on a répondu négativement. Je ne suis
pas prêt à. accepter cette réponse, bien qu'elle
soit vraie sous le rapport des faits. Dans le
premier de ces cas, où la résistance était peut- être la plus forte, un appel au peuple
eut lieu.
Ce ne fut ne longtemps après que l'affaire
eût été dé attuc, que l'Union entre l'Angleterre et l'Ecosse fut consommée. L'on se
amande alors—exactement comme en 1799
relativement à l'Union de l'Irlande,—si le
parlement écossais avait le pouvoir de livrer
es droits électoraux du peuple entre les
mains du arlement anglais. Quant à
l'Union de l'Ecosse avec l'Angleterre, la
question fut soumise au peuple, non pas
d'une seule ou de deux manières, mais de
plusieurs manières. Il fut nommé des commissaires, et des conventions, et il fut fait
plusieurs tentatives pour amener cette Union
avant qu'elle n'eût définitivement lieu.
Elle fut tentée dans le temps de JACQUES I.
dans le temps de CROMWELL, et encore sous
le règne du roi GUILLAUME, et finalement
adoptée sous le règne de la reine ANNE.
La proclamation convoquant le parlement
écossais de 1702 déclarait que, entre autres
choses, il devait s'occuper de l'union de
l'Ecosse avec l'Angleterre. (Ecoutez!
écoutez!) Nous trouvons encore dans les
livres le texte même de cette proclamation,
qui déclarait que ce parlement était convoqué en Ecosse dans le but exprès de
traiter de cette question. Ce parlement ne
déclara rien de définitif sur la question, mais
le parlement suivant le fit, et l'union fut
consommée. Et ce parlement était exactement dans la position de celui de 1702,
ayant été convoqué par une proclamation
exactement semblable. (Ecoutez! écoutez!)
Cette question de l'union entre l'Angleterre
et l'Ecosse fut, je crois, la seule qui fut
discutée; et bien qu'ensuite la plus grande
hostilité s'éleva contre cette mesure, et qu'il
fallut envoyer des troupes du nord de
l'Ecosse, ce ne fut qu'après que ce parlement eût été réuni endant quelque temps,
qu'il y fut présenté des requêtes des bourgs
contre l'union. (Ecoutezl écoutez!) L'on
vous a dit dans le cours de ce débat que la
plus grande satisfaction règne dans tout le
pays à propos de cette mesure. Permettez- moi de vous dire que, dans beaucoup de
localités, c'est le silence de l'apathie, et non
une preuve de satisfaction. Cela provient
non pas de ce que le peuple n'éprouve aucun
intérêt dans la question, mais de ce ne l'on
a exercé une pression sur lui pour plusieurs
causes, et qu'il a eu à lutter contre un grand
nombre de difficultés de différente nature,
résultant d'une absence de prospérité sans
exemple. (Ecoutez! écoutez!) Il parait donc
attendre quelque chose,—n'importe quoi,—
qui le fera sortir des diffocultés de sa position
actuelle. Je dis ceci, bien que je serais
heureux si ce n'était pas l'apathie, ni le
calme de la mort, mais le ecntentement,
d'un bout à l'autre du pays, qui conduirait
à l'acceptation générale de cette mesure. Je
crois que dans la partie occidentale du pays,—
je ne puis rien dire de la partie orientale, à
moins que ce ne soit d'après les pétitions
qui nous ont été envoyées et les opinions
qui ont été exprimées dans cette chambre
par les bon. députés du Bas-Canada, —mais
dans la partie occidentale du pays, je suis
convaincu, d'après ce que je sais personnellement du sentiment qui y règne, qu'une
grande majorité de députés, égale sinon
supérieure à celle qui a voté l'autre soir
dans cette chambre, serait élue dans une
nouvelle élection en faveur de ce projet. Et
c'est parce que je le crois, et que je ne
voudrais pas que 'on ptit dire que le peuple
n'a pas eu l'occasion de se prononcer, au
moyen d'une élection, sur une matière d'une
importance aussi vitale, — que je prétends
qu'elle devrait lui être soumise, afin qu'il
puisse déclarer par son vote s'il est en
laveur de cette mesure ou non. (Ecoutez!
écoutez!) En parlant de l'union de l'Ecosse,
de l'union de l'Irlande, et de l'union des
Canadas, nous devons nous rappeler que les
mêmes circonstances existaient jusqu'à un
certain point. Dans le cas de l'union écossaise, il y avait ces désolautes guerres
entre
l'Angleterre et l'Ecosse, durant lesquelles
le meilleur sang des deux pays avait été
versé, — et il existait depuis longtemps des
querelles et des hostilités perpétuelles qui
avaient fait de la frontière —aujourd'hui
si riante et si fertile — un désert aride
et désolé. Puis encore, lorsque l'union
de l'Irlande avec l'Angleterre eut lieu,
l'on venait justement de comprimer une
rebellion, — il y avait 40,000 hommes de
troupes dans le pays,—il avait 116 fonctionnaires publics dans la chambre,—et il peut
y avoir en de bonnes raisons our que la
majorité de 6 ou 7 vox: dans e parlement
irlandais contre l'Union, diminua et disparut
972
session suivante. La même chose avait eu
lieu dans ce pays. L'Union avait été decrétée lorsque les cendres de l'insurrection
de 1837-38 étaient encore chaudes dans
différentes parties du pays, et il y avait en
conséquence de fortes raisous pour lesquelles, au milieu du trouble et de l'agitation—lorsqu'il
pouvait être difficile d'avoir
des élections conduites avec pureté et sans
intervention de la part de l'exécutif—une
pareille question ne devait pas être soumise
au peuple. Mais, aujourd'hui, nous n'avons
rien de semblable a craindre. L'on nous dit
que le peuple est heureux, content et prospère, bien qu'il désire un changement,—
et par conséquent il n'existe aucune cause
d'excitation pour empêcher l'expression libre
et entière de la volonté populaire, au moyen
d'une élection générale,—rien our empêcher que la question ne soit ranchenent
posée devant le peuple,—rien pour empêcher
qu'il ne ohoisisse des représentants à cause de
leurs opinions sur la question de confédération, et sur cette question seule. Vous
n'avez rien pour empêcher que ce nouveau
système ne soit inauguré sur la seule et
véritable base sur laquelle il devrait être
fondé—le voeu opulaire,—et ne reçoive
en conséquence, ès l'abord, la force que le
vœu populaire seul peut lui donner, étant
accepté par ceux qui ont le droit d'envoyer
des représentants en cette chambre. (Ecoutez! écoutez!) L'on a prétendu qu'une
motion de cette nature enlève a la législature,
de fait, le pouvoir qu'elle possède, en lui
niant le droit de faire un pareil changement.
Je ne veux rien' dire contre le pouvoir de la
législature. La législature a, dans les limites
qui lui sont assignées, tous les droits que sa
chatte lui confère. Mais je ne puis m'empêcher de croire que, en nous occupant
de cette question, nous la traitons dune
manière bien différentc de celle dont elle a
été traitée, soit par le parlement indépendant de l'Ecosse soit par le parlement
indépendant de l'Irlande. Nous agissons
en vertu d'une charte et d'une constitution
limitées—n'ayant aucun droit nous-mêmes
de rien dédider finalement par aucun acte
qui nous soit propre—n'ayant que le droit
de nous en occuper au moyen a ces résolutions, et non pas de rien déoréter qui ait
l'autorité de la loi. (Ecoutez! écoutez!)
Nos pouvoirs sont donc limités dès l'abord—
tellement limités qu'il a été décidé à Terre- neuve que les priviléges qui appartiennent
à la chambre des communes et à la chambre
des lords en Angleterre n'ap artiennent pas
entièrement à. nos corps législatifs,—que ces
priviléges ont crû avec le temps jusqu'à ce
qu'ils soient devenus parties intégrantes de
l'existence même du parlement impérial,
tandis que nous possédons nos priviléges
d'une manière tout-à-fait différente, ne se
tenant pas d'une main aussi ferme que la
chambre des communes. Il est clair que
nous n'avons pas les mêmes pouvoirs que
le parlement impérial,—autrement nous ne
serions pas obligés d'aller devant ce corps
pour lui demander de sanctionner ces résolutions. Il y a même des limites au pouvoir
du parlement impérial lui-même, auxquelles
nous sommes aussi assujétis. Nous ne pouvons rendre aucun de nos actes permanent,
pas plus que nous ne pouvons nous rendre
permanents nous mêmes—parce qu'un autre
parlement a le droit d'abroger ce ne nous
avons fait. Nous ne pouvons de nous- mémes décréter ue cette mesure sera loi.
Nous pouvons offrir ces résolutions—nous
avons e pouvoir de faire cela—et le gouvernement et le parlement an lais ont sans
doute le droit d'en faire ce que on leur semblera. Mais la question est celle-ci:—Est-il
sage de donner force de loi à ces résolutions,
est-il convenable de le faire, est-ce la conduite la plus juste envers le peuple de
ce
pays, de déclarer que dans une matière de
cette importance nous légifèrerons pour lui,
jusqu'au point de changer complètement la
constitution, de décréter un a chambre
haute qu'il a déclaré devoir être élective
cesserait de l'etre et serait nommée par la
couronne,—sans le consulter? Je ne veux
pas dire, à l'égard de ce changement, que ce
ne sera pas un changement avantageux.
J'ai été l'un des quelques' membres de
cette législature qui ont combattu le plus
chaudement le changement apporté ans
la constitution du conseil législatif lorsque le principe électif y a été introduit.
J'ai aussi été l'un de ceux qui ont
supporté des résolutions dont l'effet aurait
été de placer le pouvoir populaire dans la
chambre basse, au moyen de le représentation basée sur la population dans cette
branche de la législature, avec égalité de
représentation pour les deux sections de la
province dans la chambre haute. Et je me
souviens que quelques-uns des messieurs
qui sont aujourd'hui sur les banquettes
ministérielles—le président du consei entre
autres, par l'entremise de l'influent journal
qu'il oontrôle——déolaraient que l'idée con
973
tenue dans ces résolutions était absurde et
ne pouvait être mise en pratique, bien
qu'e le soit l'idée même que le gouvernement a incorporé dans ce projet, sous un
autre point de vue. (Ecoutez! écoutez!)
Et le président du conseil a voté comme je
l'ai fait moi-même, contre l'introduction du
principe électif, et en faveur du maintien du
principe de la nomination, non pas pour les
mêmes raisons que moi, mais pour des raisons
tout a fait différentes, ainsi qu'il l'explique
alors. Mais l'opinion qu'il entretient aujourd'hui en faveur d'un conseil législatif
nommé par la couronne est l'opinion qu'il partageait alors, et je serai heureux de
voir
s'opérer ce changement. Mais c'est un
changment dont le peuple n'avait aucune
idée ors de la dernière élection. Et les
changements survenus dans l'esprit de nos
hommes publics ont été si grands, depuis
très peu de temps, que je maintiens que
nous avons le droit de penser, de nous arrêter
et de réfléchir. (Ecoutez! écoutez!) Voyez
le programme qui a été présenté sur ce sujet,
par le comité constitutionnel demandé par le
président du conseil. La partie du rapport
de ce comité qui souleva a plus d'opposition est celle qui recommande une confédération
de l'Amérique Britannique du Nord.
Et l'on sait parfaitement que ce que le gouvernement a offert, à l'époque de sa formation,
était que le moindre projet d'une
fëdérstion des deux Canadas aurait lieu
d'abord, et le plus vaste projet d'une federation de toutes les provinces viendrait
ensuite. Il devait d'abord chercher a organiser
un gouvernement fédéral pour le Canada seul,
et l'étendre ensuite, a mesure que les circonstances le permettraient, a toutes les
colonies de l'Amérique Britannique du Nord.
Eh bien! dans le court espace d'un peu
moins de trois mois, les idées se sont trouvées tellement changées que l'on cessa
de
parler de la confédération des Canadas, et
qu'elle fut remplacée par la confëdération
de toutes les provinces. Ce projet de la
confédération de l'Amérique Britannique du
Nord, qui paraissait avoir si peu de partisans
il n'y a que quelque temps encore, nous
fut subitement présenté avec l'appui d'un
grand nombre de partisans. Comment savons- nous s'il ne se fera pas un autre changement
dans quelque temps—que tout le système
dont nous nous occupons maintenant, et sur
lequel les hon. messieurs ont exprimé leurs
opinions devant le pays, ne sera pas changé
de nouveau, sans que le peuple, que l'on
prétend être si satisfait de ce projet, ait eu
'ccœsion de prendre la chose en considération, ou de voter pour ou contre ce projet?
Je crois donc qu'il serait plus sage, et qu'il
vaudrait mieux, dans l'intérêt de tout le
pays,—et que cela augmenterait considéralement la force que possédérsit ce gouvernement
confédérê,—que le peuple votât sur
ce projet par le moyen constitutionnel d'une
élection générale, avant qu'il ne soit définitivement décrété comme constitution de
ces
colonies. Je crois que, si vous voulez l'enreeiner dans l'esprit du peuple, vous ferez
disparaitre l'objection qui peut s'élever en
tout temps et servir d'instrument, entre les
mains de gens mal disposés, pour créer du
mécontentement plus tard. Et je dis que,
afin de faire accepter ce projet par les
provinces d'en—bas, Il est désirable de suivre
cette conduite. Quelle est la raison de la
méfiance avec laquelle on re arde ce projet
dans les provinces d'en-bas? Elles disent que
le gouvernement du Canada le pousse si rapidement qu'il doit y avoir quelque arrière
pensée,—qu'il y a quelque chose là dedans
qui le mettra dans une meilleure position,—
qu'en conséquence, il en presse l'adoption
parle peuple du Canada et des provinces
'en-bas sans lui donner le temps de l'examiner franchement. L'une des objections
que l'on fait dans les provinces d'en-bas est
que notre intérêt dans cette question est si
grand, et ne nous sommes embarrassés de
tout de di cultés, que nous désirons que les
autres provinces s'unissent a nous afin que,
au moyen de leur crédit réuni au nôtre, nous
puissions contracter de plus fortes dettes, et
mettre à exécution nos projets de travaux
publics, dont nous retirerons tous les avantages, bien que les provinces maritimes
supporteraient leur partie de la dépense.
Pour le moment, donc,—à moins que le
parlement impérial ne fasse un grand deploiement de pouvoir,—il sera impossible de
'imposer aux provinces d'en bas. Elles
disent que le Canada, en le pressant comme
il le fait, doit avoir d'autres objets en vos,
ui ne sont pas visibles pour le moment.
entrons-nous croire pour un instant que les
messieurs qui doivent se rendre en Angleterre pourront presser le gouvernement
impérial d'imposer cette mesure coûte que
coûte,—que les provinces inférieures en
veulent ou non,—en disant que comme le
Canada possède la plus nombreuse population—les deux tiers de toutes les provinces—s'il
désire l'avoir, les autres oivent
974
l'avoir bon gré mal gré,? Si l'on suivait
cette ligne e conduite, il faudrait d'abord
les priver de leurs constitutions. et déclarer
ensuite qu'il faut qu'elles s'unissent a nous—
que la volonté de la majorité doit dominer
les désirs de la minorité, exactement comme
dans les Etats-Unis, où tout dépend de la
volonté de la majorité, et où la minorité n'est
censée avoir que peu de droits, s'il elle en a
du tout. Mais si vous pouvez montrer que non
seulement la majorité de ce parlement, mais
aussi la majorité du peuple du Canada, sont
en faveur de ce projet, et si vous pouvez
faire voir en même temps ce que pensent les
majorités dans les provinces d'en bas,—si
vous pouvez de cette manière faire voir
quelle est la volonté de la majorité de
toute la population de ces provinces,—
vous aurez beaucoup plus de force, lorsque
vous irez en Angleterre, si vous voulez dire
que parce que le Canada le demande, et que
la majorité de tout le peu le des provinces
le demande, il faut forcer es revinces d'en
bas d'y accéder. L'adoption de cette résolution, suivant moi, n'entmverait nullement
l'adoption du projet. Elle n'empêcherait
pas les messieurs qui doivent se rendre en
Angleterre d'adopter telles mesures, devant
le parlement impérial, qu'ils croiraient désira le d'adopter, ou uils recevraient
instruction d'adopter ar e gouvernement dont
ils font partie. Que le parlement impérial
décrète cette mesure, conformément aux
vues des délégués, confirmées par l'action de
notre parlement, mais qu'il dise en même
temps qu'elle ne deviendra en force, dans
toutes les colonies, que lorsque chaque parlement l'aura adoptée. Et que chaque parlement
soit élu par le peuple, qui lui donnera
spécialement instruction de déclarer si cette
nouvelle constitution sera en non la constitution de ces colonies. Tous ceux qui veulent
le bien du pays, qui désirent le voir progresser
et prospérer, qui croient que la concentration
du pouvoir entre les mains d'un seul gouvernement exécutif pour toutes ces colonies,
nous mettra dans une position à prendre un
nom et un rang armi es nations du monde,
seront heureux de voir notre puissance consolidée de cette manière. Et, si nous basons
notre édifice, comme il devrait être basé, sur
la volonté du peuple librement exprimée,
alors je crois que nous lèguerons à ceux qui
nous suivront, un héritage dont chacun
devrait être fier, et qui attrrera sur nos rives,
de la Grande-Bretagne et des autres parties du
monde, des populations qui voudront obtenir
ici,—en même temps que tous les avantage
qui découlent de l'établissement de nos
terres, — les bienfaits d'une constitution
libre que nous avons rendue aussi semblable
que possible a celle de la mère-patrie. Mais,
quoique je sois moi-même en faveur des résolutions dela confédération, et que je désire
vivement les voir adopter, je désire u'elles le
soient de manière à servir les plus chers intérêts du pays, et qu'elles soient usées
sur l'expression cordiale de l'opinion du peuple, au
moyen d'une élection éuérale. J'ai promis
de ne pas retenir la c ambre endant longtemps, et après avoir présenté es arguments
que j'ai cru nécessaire d'apporter a l'appui
de ma résolution, je reprends mon siége.
(Applaudissements.)
M. M. C. CAMERON.—M. l'ORATEUR:
—Je seconde avec plaisir la résolution qui
vient d'être mise devant la chambre, parce
que je crois qu'il est très désirable qu'avant
d'effectuer un changement du genre de celui
qu'on nous propose, le peuple, qui se trouve
affecté par ce changement, ait le loisir de
faire connaitre son opinion d'une manière
plus explicite que peuvent le faire des députés envoyés ici pour toute autre chose
ne
pour modifier la constitution. Il ne signifie
rien, suivant moi, que les circonstances qui
ont accompagné l'union de l'Ecosse avec
l'Angleterre, ou de l'Irlande avec l'Angleterre, ne fournissent aucune raison d'en
avoir
appelé au peuple de ces changements, car ces
circonstances ne ressemblent en rien à celles
au milieu desquelles nous nous trouvons aujourd'hui. Quand même nous manquerions
de récédents our appuyer notre conduite,
j;affirme qu'à l'époque de lumières où nous
vivons et u moment que le peuple intervient
et a raison d'intervenir dans l'administration
de ses affaires, il ne doit se faire aucun changement de l'importance de celui-ci,
sans lui
enner occasion d'exprimer ce qu'il en pense.
Je ne crois pas, avec l'auteur de cette résolution, qu'il y ait nécessité absolue
d'une
dissolution de la chambre afin d'obtenir ce
résultat, car je ne vois pas qu'il soit inconstitutionel de faire directement voter
le peuple
par oui ou par non. (Ecoutez!) D'ai leurs,
je découvre dans la législation du pays, l'établissement d'un précédent par lequel
les
contribuables, que la chose concerne, ont le
droit d'exprimer leur approbation ou leur
désapprobation de certaines mesures ayant
trait a leurs affaires financières. C'est ainsi
que dans la constitution des corporations
créées par le peuple, telles que les conseils
975
de canton et de comté, et qui sont des institutions aussi représentatives un le parlement,
il est statué que chaque cis qu'il s'agit
d'engager dans des dé enses d'un certain
chiffre les localités soumises au contrôle de
ces conseils, la question doit d'abord être
soumise aux électeurs avant qu'elle puisse
devenir loi. Le peuple y députe des représentants pour y gérer ses affaires, absolument
comme il nous envoie ici pour régler celles
de tout le pays: la seule différence est ne
les premiers cor s sont moins considérables
que celui-ci. es représentants, dans le
premier comme dans le second cas, le sont à.
des titres égaux. Lorsque nous décrétons
qu'ils soumettront les règlements qu'ils
teront a un vote direct du peuple, peut-on
nous reprocher de vouloir agir au mépris de
la constitution. ou même d'adopter une ligne
de conduite injuste ou inconvenante, ne de
vouloir faire également voter le peuple sur
des matières aussi graves que celles-cr? Eh
bien! quand même une telle conduite serait
sans exemple, quand même notre législation
ne nous servirait de rien our démontrer que
c'est le droit du peuple d'être consulté sur
toutes les questions qui l'intéressent essentiellement, je répète que nous devrions
établir la chose comme précédent. (Ecoutez!
écoutez!) Je suis loin de vouloir dire, cependant, que je suis le moins du monde opposé
a une dissolution des chambres, mais
je suis convaincu que dans ce cas une foule
d'autres questions secondaires au iraient et
empêcheraient le peuple de s'exprimer aussi
directement que si la question lui était posée
purement et simplement. Il est de la plus
rende importance qu'avant le règlement
final de cette question, elle soit soumise au
pays d'une manière ou d'une autre. Je suis
en faveur de toute proposition ni a pour but
de mettre la uestxon devant le peuple, de
n'importe quelle façon, plutôt que de consentir à. voir le projet voté sans cette
sanction
des électeurs, de même que je voudrais voir
le public secouer l'apathie dont s'est plaint
l'hon. député de Peel, et que je regarde
comme existant a un degré malheureusement
trop vrai. L'hon. représentant du comté de
Peel a prétendu qu'on ne trouverait pas six
députés dans cette chambre qui diraient que
ce pays peut continuer de prospérer (moi je
dis qu'il le peut) codant encore dix ans
comme durant les dix dernières années, sans
changements; mais je suis de ceux, en petit
nombre il est vrai, qui croient qu'il serait très
désirable d'avoir un changement dans la
représentation dans cette chambre des diverses
sections de la province, et que le Haut- Canada, contribuant plus largement au revenu
public que le Bas-Canada, devait conséquemment avoir plus d'influence dans la disposition
de ce revenu. Ceux qui partageaient
cette opinion ont agité la question de changer
la constitution en ce sens, mais je n'ai jamais
songé que le Bas-Canada se considérât pour
cela a la veille d'une révolution nique le
Haut-Canada se crût arrivé au point de ne
pouvoir obtenir justice sans recourir à cette
extrémité. Tout en croyant le jour venu de
s'unir avec les provinces d'en-bas pour en
retirer un accroissement de cree et de stabilité, accroissement qui ne résultera certainement
pas des résolutions qui viennent d'être
votées, cependant je ne désire pas qu'il soit
fait aucun changement constitutionnel sans
donner au peuple la plus entière faculté de
faire connaitre son sentiment sur son opportunité. Je voudrais que le projet fût présenté
au peuple en même temps qu'une proposition
d'union législative, afin de s'assurer s'il
préfère ou non celleci a l'union fédérale.
On m'a reproché d'avoir, dans la discussion
que j'ai faite des résolutions, apporté des
arguments qui étaient aussi favorables et
applicables a l'union fédérale qu'à l'union
législative, et que je n'ai rien dit qui ptit
faire pencher la lance en faveur d'un
projet plutôt que de l'autre. J'avoue en effet
qu'en choisissant trois ou quatre endroits
isolés de l'argumentation de n'importe qui
on peut arriver a lui faire dire précisément
le contraire de sa pensée; mais, je soutiens
qu'en coordonnant et en résumant toutes mes
o servations, on verra qu'elles sont plutôt en
faveur d'une union législative. On trouvera
sans doute que tous les arguments que j'ai
apportés au soutien de la fédération sont
également des arguments en faveur d'une
union législative, mais on se rappellera aussi
ne j'ai surtout appuyé sur l'économie considérable n'on réaliserait par ce dernier
projet. Je regarde cette raison comme tout
à. fait concluantc dans la conjoncture où se
trouve placé le pays, par suite du manque de
récoltes et de la dépression des affaires causée
par les troubles des Etats-Unis. La situation
économique du Canada ne lui permet pas
d'encourir de nouvelles charges, et si notre
constitution doit subir des changements, qu'ils
aient lutôt pour effet d'alléger son fardeau
que de l'augmenter. S'il nous faut grever
d'amta le budget pour armer le pays,
qu'on diminue les dépenses sur d'autres
976
chefs, afin de réduire le plus ossible le coût
du fonctionnement du pouvoir, et alors seulement nous aurons trouvé la forme d'union
qui rencontrera l'approbation du peuple et
offrira des caractères de stabilité. Considérons un peu maintenant les évènements
qui
ont amené ce changement que l'on regarde
comme si nécessaire. Que les hon. ministres
répondent et qu'ils disent si de tous côtés on
ne s'accordait pas à proclamer que la diminution des dépenses était absolument nécessaire,
et'que si nous n'avions des réformes
en ce genre, ou si le Haut-Canada n'obtenait
pas, sur la disposition des fonds publics, le
contrôle équitable auquel lui donnait droit
l'excédant de sa contribution, que nous
aurions une révolution. N'est-ce pas là la
manière dont s'y est pris l'hon. président du
conseil pour agiter la question pendant qu'il
siégeait sur les bancs de la gauche? Je
ne dirai pas qu'il y eut un danger pareil
à redouter, non; car c'était précisément à
cause même de la justice qu'il avait dans
cette agitation que le langage de l'hon. président du connseil était si énergique
et si
violent. Passant à un autre ordre de
considérations, j'aimerais à savoir—ce que
personne n'a pu m'apprendre dans cette
enceinte—s'il y avait raison de croire
que nous n'obtiendrions pas tout aussi
bien le changement demandé dans le système
de la représentation, que celui qu'on nous
offre aujourd'hui. C'étaient des questions
de parti qui divisaient le peuple, mais admirez combien tout cela fut rejeté dans
l'oubli le jour où les chefs se donnèrent la
main et où ils déclarèrent qu'il fallait s'occuper d'autre chose. Leur union eut pour
but avoué de trouver un remède aux difficultés existantes et de rendre justice au
Haut-Canada;—ils prétendent aujourd'hui
que tout cela peut s accomplir par le moyen
de la confédération. Pourquoi, tandis qu'ils
y étaient, n'ont-ils pas adopté le plan plus
économique d'une union législative entre les
provinces? On allèguera peut-étre que les
hon. députés d'origine française du Bas- Canada étaient tellement opposés aux demandes
du Haut-Canada qu'il était impossible de ne rien obtenir pour ce dernier sans
une union fédérale des colonies. Je crois,
pour ma part, qu'étant tous des hommes
d'intelligence s'ils eussent vu les Haut- Canadiens déterminés à lutter pour leurs
droits jusqu'à ce qu'ils les eussent obtenus,
le résultat aurait été tout à fait différent de
ce qu'il a été; et les hon. députés d'origine
française du Bas-Canada eussent fini par
s'apercevoir qu'ils pouvaient à tout moment
disparaître devant l'union des députés
anglais du Haut et du Bas-Canada. Si
on leur avait mis la question toute nue
sous les yeux, si on leur avait fait voir que
les choses en étaient rendues à un tel point
qu'un changement était devenu indispensable et que la population des cantons de
l'Est était prête à se coaliser contre eux
avec celle de la partie est du Haut-Canada,
ils n'eussent pas manqué de s'apercevoir
qu'il y avait dans cette enceinte un élément
assez vigoureux soit pour leur imposer l'union
législative avec les provinces du golfe, soit
la représentation basée sur le chiffre de la
population avec le Haut-Canada. Je ne sais
pas s'il nous eût été possible d'obtenir des
provinces d'en-bas l'union législative avec la
représentation d'après le chiffre de la population pour base, mais je suis porté à
croire
qu'elles désiraient une union législative tout
autant que le Haut-Canada, d'autant qu'elles
étaient sur le point de l'effectuer entr'elles.
Or, si l'Ile du Prince-Edouard et Terreneuve
ne s'opposaient pas à une union législative
avec a Nouvelle-Écosse et le Nouveau- Brunswick, je ne vois pas comment l'adjonction
d'une province de plus aurait modifié si
complètement leurs intentions. Aussi, ma
conviction est-elle que si les ministres qui
représentent plus spécialement les intérêts
du Haut-Canada se fussent sérieusement mis
à l'œuvre pour avoir ce qu'il y avait de mieux
à obtenir pour le peuple, s'ils s'étaient
efforcés de faire prévaloir les droits du Haut- Canada, ils auraient réussi à effectuer
le
projet le plus avantageux aux provinces- unies et à écarter à jamais les disputes
qui
s'élèveront de toute nécessité aussitôt que
l'on aura individualisé chacune des provinces
en lui accordant sa législature séparée. Par
le projet actuel, au contraire, vous n'aurez
réussi qu'à augmenter le fardeau des impôts
et multiplié les causes de mécontentement.
Vous avez donné jurisdiction égale à la
législature générale, et aux législatures
locales, ou du moins vous avez donné a
toutes deux le droit de légiférer sur les
mêmes questions;—n'avez-vous pas, en agissant ainsi, laissé entre les mains de toutes
ces législatures des germes de dispute qui
prouvent que vous êtes loin d'organiser un
gouvernement ferme et stable? (Écoutez!
écoutez!) On prétend ensuite que l'une des
raisons les plus convaincantes en faveur de
l'union est la nécessité de mettre le pays sur
977
un pied de défense;—mais je ne vois pas
que nous ne puissions faire la même chose
avec notre forme de gouvernement actuel.
Qu'on nous dise ce qu'il faut faire et on
verra si les diverses législatures ne voteront
pas les crédits nécessaires. Si nous pouvons
nous faire aider par la métropole, montrons- lui que nous sommes prêts à le reconnaitre
et à voter les fonds, pourvu qu'elle nous
prête sa garantie. Si Angleterre juge à
propos d'en agir ainsi, elle verra que les
provinces de l'Amérique du Nord sont
prêtes it prendre toutes les mesures nécessaire our se mettre sur un pied d'armement
et de éfense. Le Canada ne forme qu'une des
provinces qui sont toutes également tenues
à se défendre avec nous, et qui, je crois,
sont prêtes a le faire, car j'imagine qu'il y
autant de loyauté dans les provinces d'en-bas
qu'ici en Canada, et que du moment que
nous offrirons notre coopération it la mère- patrie elles le feront aussi. Ayant avec
Angleterre les mêmes liens que nous, la
confédération ne saurait avoir pour résultat
d'améliorer notre position à l'égard des
défenses, car elle ne saurait nous rendre plus
forts du moment que la mère-patrie reste
tojours le lien qui nous tient réunis. C'est
de a métropole, en effet, que nous devrons
attendre les ordres lorsque le moment d'agir
sera venu. Je ne suis pas de ceux qui
songent à une séparation entre l'Angleterre
et cette colonie, mais je dis que si le fardeau
du Haut-Canada se trouve encore plus lourd
que par le passé pour faire fonctionner le
nouveau régime fédéral, il y a beaucoup a
craindre de voir se renouveler le même état
de choses qui a rendu inévitables les changements qui s'opèrent aujourd'hui. On ne
peut se cacher que le projet actuel ne vise
aucunement à rendre le gouvernement moins
coûteux, ni même à effectuer le mode d'union
le meilleur possible, mais qu'elle n'est qu'un
expédiant et le fruit d'un compromis. Le
Canada se trouve obligé de recourir a des
changements, et si les provinces du golfe les
adoptent c'est qu'ils leur seront imposés en
quelque sorte par nous. Voici que l'on vote
un projet de constitution qu'on croit le plus
convenable aux circonstances actuelles; mais
ne doit-on pas se demander s'il ne devra pas
subir des modifications avant peu lors- qu'il nous aura jetés en milieu des querelles
et du malaise où nous nous trouvons depuis
dix ans? Pourquoi se bater; pourquoi ne
pas mûrir cette question par la discusion;
ne pas en faire disparaître les défauts, afin
de combiner de suite une constitution durable
et ne pas se lancer dans une union coloniale
susceptible de se briser, et de forcer une
grande partie d'entre-nous à chercher un
régime plus calme et plus tranquille dans
l'annexion à la république voisine,—annexion
que je regarde comme le plus grand des malheurs qui pourrait arriver a notre Canada?
(Ecoutez, écoutez!) Je vais maintenant,
M. l'ORATEUR lire un article du
Globe pour
montrer combien il est nécessaire que la
récente question soit soumise a la sanction
du peuple avant d'être réglée définitivement.
On se rappellera que ce journal est aujourd'hui l'organe du gouvernement, et a toujours
passé pour exprimer les vues de l'hon.
député d'Oxford Sud (M. BROWN), aujourd'hui président du conseil. L'article ne je
vais lire se rapporte au chemin de fer intercolonial, que tant de gens s'imaginent
aujourd'hui pouvoir être construit sans causer aucun
détriment pour le pays du moment que nous
sommes pour jouir de tous les avantages que
l'on en suppose avoir résulter de la confédération. Voici ce que ce journal écrivait
au
moment où s'ouvraient les premières négociations à propos du chemin de fer intercolonial:—
"Le Haut-Canada, parait-il, n'a pas encore
assez souffert dans l'opinion des membres Haut- Canadiens du ministere, de sa liaison
avec une
pauvre reviens de l'est, et il faut en ajouter trois
autres à son pardeau. Notre législature est un
corps qui cher pas encore assez lourd, ni assez
ingouvernable, ni assez dispendueir, il faut encore
y ajouter la représentation de trois autres peuples tous divisés d'intérêts entr'eux
et tous puisant a la meme source. Comme preuve de ce que
l'avenir nous réserve, nous allons être obligés de
contribuer eur les quatre-douzièmes du prix d'un
chemin de qui servira à nous mettre en communication avec ces nouveaux alliés, en
sus de
l'obligation de tenir le chemin en opération. En
vérité, n'est-ce ne le un rejet ravissant?—(écoutez! écoutez!) de la part un gouvernement
d'économie, de la part d'un gouvernement dont le seul
but était le réduire les dépenses et de corriger les
abus de l'administration? On se prépare donc à
imposer au peuple du Haut-Canada des charges
pour un montant énorme, on se prépare a faire une
nouvelle entreprise de chemin de fer qui promet
d'être aussi rulneuse et aussi déshonorante que le
Grand Tronc, et à tripler les difficultés d'un système politique déjà si impraticable
et tout cela
pourquoi? pour tirer MM . Sicotts et Samfield
MacDonald du beurbier où ils se trouvent empêtrés."
978
M. M. C. CAMERON.—Je ne la connais
pas précisément, car l'extrait que je cite se
trouve reproduit par un autre journal.
L'écrit date d'environ deux ans.
L'
HON. M. BROWN. —Oh! mais cet
écrit est passé de date, et ne s'applique plus
du tout aux nouvelles circonstances de la
situation.
L'
HON. M. HOLTON.—L'extrait en
question parle du projet comme ayant été
proposé par un gouvernement d'économie,
et on se rappellera que celui-ci n'en est pas
un.
M. M. C. CAMERON.—Je lirai un autre
extrait du même journal portant la même
date:
"Le sang froid avec lequel en demande au
Canada d'aider à construire ce chemin de fer destiné à distraire le commerce de ses
routes naturelles, est quelque chose de vraiment admirable.
Nous avons complété la navigation du St. Laurent
à des frais immences et avons eu à soutenir la concurrence avec le canal de l'Hudson
et de l'Erié,
lorsque, suivant feu l'hon. M MERRITT, il eut suffi
de lignes de vapeurs pour atteindre au même résultat. Or, voilà que le ministère se
propose de
retirer les vapeurs du St. Laurent;—s'il réussissait, ce serait ni plus ni moins pour
le Canada
qu'un coup de mort: mais, comme il ne peut
réussir, la chose n'en reste pas moins une absurdité. * * * * *
Il peut être difficile de se dégager maintenant des
promesses données aux représentants des provinces d'en bas; mais que les membres soient
bien
persuadés qu'ils seront récompensés de l'abandon
ou de l'ajournement de la mesure par l'approbation de leurs électeurs et du pays en
général."
(Ecoutez! écoutez!)
Eh bien! M. l'ORATEUR, en supposant
maintenant que l'auteur de cet article fût
un homme qui eut sérieusement à cœur les
intérêts du pays et exprimât les opinions de
l'hon. président du conseil, j'aimerais à savoir
ce qui peut réellement avoir eu lieu depuis
deux ans pour rendre nécessaire un chemin
de fer que l'on s'accordait alors à déclarer si
désastreux pour le Canada, et pour en faire
commencer de suite la construction? L'élévation du rédacteur de ce journal en poste
de président du cabinet serait-il, par hasard,
le seul changement qui aurait eu lieu? Il a
pente qu'il ne lui conviendrait pas de se
rallier à ce vieux et respectable corrupteur
(corruptionist) qui comparaît le Haut- Canadien aux morues de la Baie de Gaspé
sans donner comme excuse quelque chose de
plausible et de sonnant: c'est alors que fut
trouvée l'idée d'une " nouvelle nationalité."
Cette invention devait faire disparaître toutes
les anciennes divisions et avait pour but de
dissimuler au Canada ses vrais intérêts en
affirmant que quelqu'extravagant que puisse
être un gouvernement, du moment qu'une
union de ce genre sera consommée, nous
pourrions dépenser tous les ans des millions
de plus que notre revenu pour construire et
entretenir un chemin de fer destiné à ruiner
notre commerce, et tout cela pour ajouter à
notre population environ 800,000 âmes.
(Écoutez! écoutez!) Eh bien! en présence
de tels faits et avant qu'un tel changement
ne s'effectue, changement qui a été condamné dans son point essentiel—le chemin
de fer intercolonial,—et qui a été si fortement
combattu par la presse libérale du Haut- Canada, avant qu'un tel changement ne
s'opère, je repete que nous devons consulter
le peuple; car il peut bien se faire que les
arguments du Globe aient fait une impression
sur l'esprit des populations du Haut-Canada
et qu'elles n'aient pas été par la suite favorisées des lumières nouvelles qui ont
changé
l'opinion de l'hon. président du cabinet. On
nous dit à l'heure qu'il est:—Pas de chemin
de fer, pas d'union! Mais si ce chemin de
fer était une si grande calamité qu'on ne dût
pas l'entreprendre lorsqu'on ne nous demandait que d'y contribur pour les cinq-dousièmes,
il faut qu'on ait de bien graves
raisons à nous faire connaître pour justifier
l'acte de la confédération, accompagnée
qu'elle est du décrêt de la construction du
chemin de fer intercolonial qui devra nous
coûter cette fois les dix-douzièmes du prix.
Quelle est donc cette différence si grande
dans la situation présnte du pays pour que
l'on n'ait plus à craindre la ruine qui serait
resultée de la construction de ce chemin il
y a deux ans? L'hon. président du conseil ne
juge pas à propos de répondre à ma question parce qu'il connaît l'excellent corps
de partisans sur lesquels il s'appuie. Il se
les est attachés en leur disant qu'il fallait des
changements et ils sont préts à suivre
partout l'hon. président du conseil par
amour de la nouveauté et du changement,
car, on dit que si vous inventer quelque
petite chose pour amuser les gens pendant
un temps, ils resteront tranquilles et s'occuperont peu de l'orage qui suivra le temps
calme. Lors de la réunion des chambres,
au commencement de cette session, je remarquai le grand nombre d'adversaires qu'avait
le projet, puis peu à peu je pus observer la
rapidité avec laquelle cette opposition avait
979
disparu chez plusieurs. Il y en a qui prétendent que plusieurs des hon. députés de
cette chambre avaient des haches à aiguiser
et qu'ils n'en tenaient la poignée qu'afin ne
le taillant atteignit plus de perfection. (On
rit.) Quelques temps après la réunion du
parlement, on vit l'hon. président du conseil
parcourir les rangs de ces hon. députés et
en apprit bientôt qu'il s'y était opéré un
changement de front. Il faut, M. l'Orateur, que le souffle de l'hon. président du
conseil ait des propriétés bien délétères puis- qu'on a vu des hou. députés arriver
dans
cette enceinte armés de discours tout faite
de deux heures de durée, se lever pour les
débiter et se trouver si faibles sur leurs
jambes qu'ils étaient obligés de se rasseoir
après avoir dit quelques mots signifiant tout
le contraire de ce qu'ils avaient préparé,—
et tout cela arrive sous l'influence du souffle
de l'hon. président du conseil. (On rit.)
C'est pourquoi, connaissent les ravages
qu'exerce ce souffle puissant sur tout ce
qu'il atteint, j'avertirai mes hon. amis de s'en
tenir à une assez bonne distance et de ne
pas permettre à l'hon. président du conseil
de les approcher de trop près. (Ecoutez!
écoutez!)
Six heures sonnent et l'Orateur laisse le
fauteuil jusqu'à sept heures et demie.
A la reprise de la séance,
M. CAMERON continue en ces termes:—
Lersque la chambre ajeurna a six heures,
j'en étais à faire remarquer le singulier effet
de l'influence exercée auprès de plusieurs
députés par le président du conseil; et, à cet
égard, je me permettrai d'observer qu'il
semble exister une pratique qui devient en
faveur, mais qui, selon moi, mérite d'être
censurée. Par cette prati ne, j'entends que
les hon. membres du ca inet s'adressent
privément à certains députés pour leur faire
connaitre les raisons qu'ils ont d'agir de telle
et telle manière; lesquelles raisons ne sont pas
énéralemcnt communiquées aux membres
cette chambre. Tout député représente
une partie du peuple du pays, et toute partie
de la population a autant droit aux renseignements que possède le gouvernement
que les colléges électoraux représentés
par d'autres membres de la chambre. Si
le gouvernement donne à quelques-uns des
renseignements qui ne sont pas communiqués à ceux qui sont hostiles à certaines
mesures, cela met ces bon. membres dans
une fausse position, cela les porte à agir
contrairement à ce qu'ils feraient peut être
si tous les faits leur étaient communiqués;
en un met, ce procédé nuit aux intérêts
du pays. (Ecoutez! écoutez!) Si un ministre me donnait à moi des raisons qu'il
cache aux autres hon. membres, je croirais
qu'il cherche à me tromper, car, en vertu
de son serment d'office, il est tenu de garder
les secrets du cabinet, et s'il me les divulguait, je lui imputerais de mauvaises
intentions, comme celles de me porter à agir
contrairement à mes convictions. (Ecoutez!
écoutez!) Quant à l'hon. président du conseil, j'avais formé l'espoir, voyant qu'il
avait
enterré son tomahawk, enlevé de son visage
les couleurs guerrières et fumé le calumet de
la paix avec ses ennemis politiques, que
nous ne verrions plus, par l'intermédiaire de
la feuille qui lui sert organe, se répandre
de fausse nouvelles par le pays. Je ne
m'attendais pas à ce que dans ce journal on
dédierait une colonne entière à un humble
individu comme moi, et cela parce qu'il lui
est arrivé d'exprimer des vues contraires a
celles que propose actuellement cet hou.
monsieur. Au sujet des récents débats de
cette chambre sur la question de la confédération, ce journal rn'attaque en disant
que
j'ai trahi mes mandataires en agissant à l'encontre de la promesse que je leur au
faite
avant mon élection. A cela, je répondrai
que mes cemmettants savent bien ce que je
leur ai promis, et qu'il n'est pas nécessaire
que le
Globe se charge de leur apprendre
que j'ai manqué à cette promesse, attendu
qu'aussi bien que ce journal ils sont capables
de juger eux—mêmes si j'y ai ou non manqué. Si, pour justifier la position ne j'ai
prise à l'égard de cette question, jai fait
usage de quelque argument qui n'atteignait
pas ce but, la critique était permise sur ce
int; mais il était tout-à-fait inutile de
sur dire que j'avais manqué à mon engagement, vu qu'aussi bien que quiconque ils
sont capables de juger de cette question.
C'est cependant ce que fait l'organe de
l'hon. monsieur, qui se charge par là de
montrer que l'ancien esprit de parti existe
toujours chez lui et que les éléments de discorde sont aussi vivaces en cette chambre
qu'ils l'étaient avant la coalition. (Ecoutez!
écoutez!) Durant la scène à la fois amusante et instructive qui s'est passée l'autre
jour entre l'hon. député de Carleton et
l'hon. procureur-général du Haut-Canada,
ce dernier a fair une déclaration qui, d'après
980
mon sens de la moralité politique, n'aurait
pas du sortir de la bouche d'un ministre
de la couronne. Il a déclaré qu'il était du
devoir des députés de son parti de suivre
leur chef en toutes choses—qu'ils ne devaient
pas exercer leur jugement sur aucune matière qui pouvait venir devant la chambre,
mais se soumettre à sa volonté et croire
que toute proposition faite par lui ne pouvait
tendre qu'à un bon but.
M. M. C. CAMERON—Lorsqu'il fut fait
motion pour la question préalable, l'hon. proc.- gén. du Haut-Canada a quasi réprimandé
le député de Carleton, parce que cet hon.
monsieur s'est permis d'exprimer une opinion
indépendante à ce sujet, et c'est à la suite
de cela qu'il a dit que le partisan devait
obéir au chef, vu que l'on devait supposer
que celui-ci n'agissait jamais sans de bonnes
raisons. (Écoutez! écoutez!) Il me semble,
pourtant, que le peuple ne nous a pas députés
à cette chambre pour suivre les chefs d'un
parti, mais plutôt pour le représenter au
meilleur de notre jugement. Je pense de
même que nous ne sommes pas tenus de
céder à un chef de parti, ni a qui que ce
soit, ce droit de juger de toute question
soumise à la chambre; au contraire, je crois
que nous devons l'exercer nous-mémes.
(Écoutez! écoutez!) En présentant une
mesure à la chambre, le chef du gouvernement devrait étre capable de convaincre les
députés de la bonté et de l'utilité de cette
mesure. Il ne devrait demander ni recevoir
d'autre appui, que celui que peut obtenir
son habileté à créer cette conviction. (Écoutez! écoutez!) A mon sens, la doctrine
promulguée par le procureur-général est, à
la fois pernicieuse et nuisible aux véritables
intéréts du pays, car elle enlève aux députés
le droit d'exercer leur propre jugement.
M. M. C. CAMERON—En induisant les
membres à agir en toute chose contrairement
à leur volonté, et cela parce que le chef du
parti auquel ils appartiennent leur dit de le
faire.
M. M. C. CAMERON—C'est ce que
l'hon. monsieur m'a fait comprendre le jour
de son amusante altercation avec le député
de Carleton, et si ce n'est pas ce qu'il à voulu
dire, je regrette de lui avoir imputé cette
opinion. (Écoutez! écoutez!) Cela dit, je
reviens à la question de soumettre au peuple
cette mesure avant son adoption par la
chambre. J'ai cité déjà des raisons que me
fournit le
Globe à ce sujet. Je ne fais pas,
M. l'ORATEUR, des extraits de ce journal
exprès pour mettre l'hon. président du
conseil dans une fausse position, mais bien
pour porter les hon. députés à réfléchir sur
l'effet probable du vote qu'ils pourront donner.
Si le
Globe a autrefois plaidé en faveur de
mesures qui rencontraient l'approbation du
peuple, et si, comme on le dit, sa circulation
et son influence sont si grandes, les haines
qu'il a soulevées dans le pays, par des articles
en faveur de eertainee doctrines, n'ont pas
disparu par le fait qu'il a changé de politique.
Les hon. messieurs feraient donc bien de
réfléchir, avant d'en venir à une décision,
que les anciennes haines suscitées par le
Globe ont en un écho jusqu'à l'étranger, que
ce journal a encore prise sur l'opinion publique, et qu'il pourrait leur nuire sérieusement
lorsqu'ils auront à se présenter à leurs
électeurs. Je vais maintenant faire la lecture
d'un autre extrait, par lequel on verra que,
sur ce sujet, l'opinion de ce journal était
tout le contraire de celle que professent
aujourd'hui le cabinet et l'hon. président du
conseil:—
"Nous avons une dette de 70 millions et un
déficit de trois ou quatre millions créés par des
entreprises qui n'ont pas méme rapporté assez
pour payer le prix de revient de la construction.
Mais nulle entreprise dont nous nous sommes
chargés ne saurait étre comparée à celle du chemin de fer interecolonial sous le rapport
improductif. Elle ne contribuera pas même a l'établissement d'un seul acre de terre;
elle ne facilitera
pas notre commerce et ne rapportera pas même
assez pour subvenir a ses frais d'exploitation. . . .
Les quelques acres d'un sol désert à l'est absorberont $50,000 par année de notre
argent, tandis que
la moitié d'un continent jusqu'à l'ouest ne recevra
en échange que quelques paroles adressées au
ministre des colonies. "
Telle était sur ce point l'opinion du Globe
et du président du conseil il n'y a encore
que deux ans. Si cette opinion était alors
bien fondée, elle doit l'être encore, et le
public devrait avoir une occasion de se prononcer sur elle et de dire si ce chemin
de
fer doit être construit, surtout depuis que
par ce projet de confédération nous allons
avoir à payer au-dela de trois millions par
année pour le soutien des gouvernements
locaux. Si on avait raison de s'opposer alors
à se chemin de fer, assurément que cette
981
même raison doit exister avec encore plus
de force, maintenant que la dépense annuelle
qu'il faudra faire pour lui sera au moins le
double du chiffe qu'elle eut atteint si sa
construction eût été alors entreprise. (Ecoutez! écoutez!) Peut-être le peuple verra-t-il
que ce grand projet de confédération, qui, au
dire du président du conseil, est destiné à lier
ensemble le lion et l'agneau, lui a fait oublier
cette prudente économie qui occupait une
si grande place dans l'opincn du Haut- Canada, une place que le président du
conseil avait peut-être lui-même créée; et
si cela était aussi véridique que le disait cet
hon. monsieur dans son journal, cela doit
l'être davantage maintenant, et il doit être
encore plus important que le peuple puisse
se prononcer. Bien qu'il diffère d'avec moi
dans ses conclusions, j'adopte, M. l'ORATEUR, l'opinion de l'hon. député de Peel;
car si nous imposons ce projet au peuple
sans son consentement, lorsque les lourdes
charges qu'il n'avait jamais prévues le feront
sortir de l'apathie où il semble aujourd'hui
plongé, il se déclarera contre l'union avec
bien plus de force que s'il l'avait lui-même
acceptée; et j'appréhende que le mécontentement que produira chez lui le poids du
fardeau immense dont on l'aura chargé aura
pour le pays de très fâcheux résultats. ((Ecoutez!)) Il est encore une autre raison
qui
milite en faveur de l'appel au peuple: les
autres provinces ont rejeté le projet, et je
présume que leurs gouvernements n'oseront
pas insister sur l'introduction de cette mesure contrairement au désir du peuple.
Cependant, lorsque les hon. messieurs de
l'autre côté ont présenté ce projet, ils ont
déclaré qu'ils ne permettraient pas qu'un
seul amendement lui fut fait, et cela parce
qu'il fallait tenir la promesse faite aux provinces inférieures de l'adopter dans
toute
son intégrité. J'aime à voir que l'hon. président du conseil ne se sent pas aussi
empressé
à manquer de promesse à ces provinces qu'il
l'était il y a deux ans, à l'égard d'un des
points les plus essentiels de ce projet, le
chemin de fer intercolonial. (Écoutez!
écoutez!) J'aime, M. l'ORATEUR, que l'on
tienne à ses engagements, mais je ne pense
pas que pour les tenir à l'égard de ce projet
il soit nécessaire que la chambre l'adopte
ainsi que le veut le gouvernement,—car,
comme ceux des autres provinces, il n'était
tenu que de soumettre la mesure au parlement; il devait, ainsi que l'ont fait les
autres gouvernements, la laisser libre d'en
faire ce qu'il voudrait. Il n'était nullement
nécessaire qu'il vînt dire à la chambre qu'il
lui fallait ou l'adopter ou le rejeter dans son
entier. Tout ce qu'il avait à faire—ses
membres n'ayant pas été délégués à la conférence par le peuple ni même nommés par
le parlement, car ils y sont allés avec l'entente tacite de la part des représentants
du
peuple seulement pour voir si quelque projet
d'union avantageux a toutes es provinces
pourrait être adopté—tout ce qu'il avait à
faire c'était de convenir de quelque plan et
de laisser à la chambre de décider sur son
mérite; il n'avait aucun pouvoir de mettre
cette législature dans l'impossibilité de
refuser ou d'amender le projet adopté par
la convention. (Écoutez! écoutez! Nous
voyons des hon. messieurs qui plaident en
faveur de cette mesure, déclarer en même
temps qu'elle est loin d'être parfaite, que ce
n'est pas ce qu'aucune des provinces pouvait
désirer en accepter d'elle-même, mais qu'il
est néanmoins nécessaire d'accepter cette
constitution difforme parce qu'il est des
difficultés qu'il faut à tout prix faire disparaître. Conçoit-on cela? On admet son
imperfection, mais on nous refuse le droit
de dire si ses dispositions sont bonnes ou
mauvaises. A mon sens, agir ainsi c'est
faire insulte à l'intelligence des membres
de cette chambre et commettre une erreur
que ces hon. messieurs auront plus tard lieu
de regretter. (Écoutez! écoutez!) Plusieurs
ont travaillé en faveur de cette mesure avec
zèle et sincérité, et aussi, je pense, avec le
patriotique désir de servir avantageusement
les intérêts du pays. Il y a, par exemple,
l'hon. député de Lanark Sud (M. MORRIS)
qui, il y a bien des années, dans un de ces
rêves que nous savons par expérience appartenir au jeune âge, a conçu l'idée qu'une
union de ces provinces serait éminemment
avantageuse à leurs populations; et comme
cette idée lui est en quelque sorte venue
avant que ses compatriotes y eussent songé,
il a cru que pour notre prospérité il était absolument nécessaire qu'elle se réalisât;
mais
il oublie que pour assurer le bon fonctionnement du système fédéral il est nécessaire
d'en bien ajuster les rouages, et au lieu
d'avoir cette confédération qui serait avantageuse au peuple, il n'aura qu'un simulacre
d'union et très peu de ses avantages. Si cet
hon. monsieur était laissé à son choix, je
ne doute nullement qu'il saurait choisir un
système à la fois puissant et stable, et non
, celui qui n'aurait que les qualités contraires;
982
car, ainsi que l'a dit l'hon. député de Peel
et d'autres hon. membres, le projet qui nous
est offert n'est qu'une mesure temporaire, un
expédiant à l'aide duquel on compte surmonter nos difficultés, un projet d'union qui
doit faire pour le présent, mais sur la durée
duquel on ne compte pas. (Écoutez!
écoutez!) De fait, nous n'aurons pas là une
constitution qui pourra durer, mais une
œuvre qu'il faudra changer de temps en
temps jusqu'à ce qu'on soit parvenu à la
détruire de fond en comble ou à en faire
quelque chose de passable. (Écoutez! écoutez!) Il me semble, M. l'ORATEUR, que
lorsque le gouvernement responsable a été
donné à ce pays, et que l'on a appris à
son peuple qu'à l'avenir il allait exercer
le droit de penser pour lui-même; il me
semble, dis-je, que ce droit est foulé aux
pieds, lorsqu'un certain nombre d'hommes
du Canada passent un contrat avec certaines autres personnes des provinces inférieures,
— au nombre de trente-trois, —
qu'ils le signent et déclarent ensuite que les
représentants du peuple de ces provinces
devront d'abord s'y soumettre, et après eux
le peuple; que ni le peuple ni ses représentants n'auront le pouvoir de le changer
ou
amender, et que si nous insistons sur notre
droit de l'amender, nous allons retomber
dans les difficutés que des hon. messieurs se
sont plu à exagérer; car on a été jusqu'à
dire que le pays était à la veille d'une
révolution, qui éclatorait certainement si la
mesure n'était pas acceptée dans son entier.
(Écoutez! écoutez!) Je pense que cette
proposition ne passera pas, qu'elle ne sera
pas acceptée avec autant d'empressement
que se l'imaginent les hon. messieurs. Le
peuple est trop intelligent, pour confier le
règlement d'une question aussi importante
que celle-ei,—car elle est intimement liée a
sa prospérité et à son bonheur futurs, — à
un petit nombre d'hommes quelque puissent
être leurs talents et leur capacité; et si le
projet est accepté sans que le peuple ait eu
l'occasion de se prononcer à ce sujet, les hon.
messieurs, lorsqu'ils retourneront auprès de
leurs électeurs, s'entendront dire que le
peuple a des droits qui doivent être respectés; qu'il aime à être consulté sur le
caractère de la constitution qui doit le gouverner, et qu'avant qu'elle ne soit définitivement
adoptée, il tient à dire si elle lui
convient et s'il est satisfait de ceux qui se
chargent d'agir pour lui.
L'
HON. M. McGEE—Ce qu'il avait à dire
il l'a dit en approuvant ce que nous avons
fait. (Écoutez! écoutez!)
M. M. C. CAMERON—Ce que je voudrais,
c'est qu'il eut pleine occasion d'approuver ou
d'improuver ce qui a été fait, et je pense que
si elle lui était donnée, son approbation ne
serait pas aussi spontanée que paraissent le
croire les hon. messieurs de l'autre côté.
(Écoutez! écoutez!) On a dit que j'avais
manqué à ma promesse en me déclarant
contre ce projet, et que mes commettants
m'avaient envoyé ici parce qu'ils me croyaient
partisan de cette mesure; eh bien! à cela je
réponds que je suis encore à attendre leur
reproche sous ce rapport; que je n'ai encore
entendu de leur part aucune plainte sur ma
conduite politique; que j'ai au contraire
reçu une lettre qui l'approuve, et que le
hasard veut que cette lettre m'ait été écrite
par celui qui était jadis un zélé partisan du
président du conseil. (Écoutez! écoutez!)
Je ne sache pas que nulle part le peuple ait
approuvé le projet, ainsi que nous le dit
le ministre de l'agriculture; à la prochaine
élection, il manifestera certainement son
approbation, mais il est probable que ce sera
dans un tout autre sens. Parce je viens de
dire, le président du conseil va peut-être
croire que j'ai quelque animosité personnelle
contre lui...
M. M. C. CAMERON -—Mais s'il le croit
il se trompe grandement. Je n'ai rien contre
lui. Quant à ce qui me regarde personnellement, il peut rester dans le gouvernement
aussi longtemps qu'il le pourra; je lui assure
qu'il ne me verra jamais lui faire d'opposition
factieuse. (Écoutez! écoutez!) Si je ne
m'abuse pas, mon seul désir est de favoriser
les intérêts et la prospérité de mon pays;
mais je suis loin de croire que l'on arrivera
à ce résultat par l'adoption du projet.
(Écoutez! écoutez!) Je suis bien d'avis
qu'un projet d'union avantageuse à toutes
ces provinces serait possible, mais je ne crois
pas que la confédération soit ce projet là.
Je ne crois pas qu'il soit logique d'adopter
celui-ci quand on sait que plus tard il faudra
courir risque de pouvoir ou de ne pouvoir
pas lemodifier. Les hon. messieurs du Bas- Canada ne font que retarder l'époque où
ils
seront sur _un pied d'égalité avec le reste de
la population. Mais en-changeant aujourd'hui la constitution, est-il sage ou prudent
de le faire d'une manière incomplète, qui
nous forcera à demander plus tard de nouvelles modifications, c'est-a-dire à la suite
982
d'une agitation créée par le mécontentement?
ne vaudrait-il pas mieux s'enforcer de faire
bien ce que nous allons faire? (Écoutez!
écoutez!) Et comme il est des éléments à
l'aide desquels une union de ces provinces
pourrait s'opérer d'une manière durable et
avantageuse pour ce pays, les hon. ministres
eussent mieux prouvé leur patriotisme en
remettant à un peu plus tard son accomplissement.
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD—Mais
mon hon. ami ne sait-il pas que le Bas- Canada et toutes les provinces inférieures
y
sont opposés? Où pourrait-être, alors, la possibilité de l'accomplir?
M. M. C. CAMERON—Je ne sais rien
de positif à cet égard; j'ai seulement entendu dire ici que les provinces inférieures
n'en voulaient pas; mais, ce que je sais,
c'est que dans ce parlement réuni il y a
assez de membres qui sont prêts et disposés
à nous accorder la représentation d'après le
nombre.
M. M. C. CAMERON—Parce qu'ils n'en
ont pas eu l'occasion. Je crois pouvoir
démontrer que le peuple des provinces maritimes est plutôt en faveur d'une union législative
que fédérale, (écoutez! écoutez!) et
cela par le fait qu'elles ont nommé des
délégués devant se réunir a Charlottetown à
l'effet d'établir une union législative entre
elles.
L'
HON. M. BROWN—Je ne doute nullement de la sincérité de l'opinion exprimée
par l'hon. préopinant. Il est vrai qu'une
union des provinces maritimes aété projetée,
mais il n'a pas été spécifié quelle espèce
d'union ce devait être.
M. M. C. CAMERON—Cela ne fait rien.
D'après tout ce que j'ai pu voir, ma conviction est que c'était une union législative
que
l'on projetait, et lorsque les délégués à la
convention de Québec se présentèrent à leurs
électeurs, ils déclarèrent qu'une union législative eut été préférable à celle proposée.
Dans tous les cas, ce projet a été rejeté par
l'une des provinces, et s'il est mis en opération, il faudra donc qu'il soit imposé
à son
peuple? Et si vous faites tant que d'imposer
une constitution à aucune partie du peuple,
il faudrait que c'en fut une meilleure que
celle-là, une qui, selon l'opinion exprimée
par vous, serait avantageuse au pays. ((Ecoutez! écoutez!)) Le peuple du Bas-Canada
paraissait être contre la représentation d'après
le nombre; il avait dans l'idée qu'avec elle
disparaîtraient ses institutions particulières;
que par elle ses lois seraient changées, sa
langue et sa religion détruites; et, cependant, il s'est empressé de consentir à ce
principe dès qu'il s'est agi de la confédération.
Il a consenti à la re représentation d'après le
nombre dans la chambre basse de la législature fédérale. (Ecoutez! écoutez!) Or,
pourquoi y a-t-il consenti? parce que sous
le gouvernement local, a-t-il dit, nos affaires,
nos intérêts, nos lois, notre langue et notre
religion seront sous notre sauvegarde; eh
bien! s'il était certain que tous ces intérêts
lui seraient également assurés sous aucune
forme de gouvernement qui pourrait être
choisie pour le bien du pays en général,
quelqu'un oserait-il affirmer qu'il s'opposerait alors à cette forme de gouvernement?
(Ecoutez! écoutez!) Chacun sait que le
peuple et les députés du Bas-Canada ont été
élevés dans la crainte du Haut,—s'entend
pour le cas où la représentation d'après le
nombre serait accordée,—et la raison de cette
crainte vient de la manière dont le journal
de l'hon. président du conseil et les autres
journaux de son parti ont agité autrefois
cette question; mais quand le peuple Bas- Canadien verra qu'une occasion se présente
d'accorder ce qu'il a jusqu'ici refusé, et cela,
tout en conservant ces droits et priviléges
qui lui sont si chers, je ne puis croire qu'il
s'opposera encore à ce qui finira par exister
tôt ou tard. (Écoutez! écoutez!) Il doit
voir que maintenant il vaut mieux pour lui
de faire des conditions, puisqu'il en a la
faculté; car je suppose qu'il ne voudrait pas
s'opposeràun juste principe jusqu'au point
de créer une révolution, d'autant plus qu'il
ne gagnerait rien à en venir 1à, étant incapable de devenir une puissance indépendante
dans ce pays pendant que le Haut-Canada
et les autres provinces continueraient à
faire partie de lempire britannique; il ne
pourrait pas non plus s'annexer aux Etats- Unis, car, sous ce gouvernement, ses lois,
sa
langue et sa religion seraient beaucoup plus
en danger que sous un gouvernement dont
le Haut-Canada aurait l'entier contrôle. Je
crois donc que les hon. messieurs du Bas-
Canada auraient consenti à la représentation
d'après le nombre, si les députés du Haut- Canada leur eussent démontré qu'il ne pou
984
vaient accepter aucun changement devant
augmenter nos difficultés et ajouter au
fardeau de nos dépenses,—résultat devant
découler de ce projet; car dans les élections
du Haut-Canada, ce dont on se plaignait le
plus, c' étaient les fortes dépenses auxquelles
nous avons été forcés de subvenir sous différents gouvernement, et ar l'influence
de
la province inférieure. (Ecoutez! écoutez!)
Je ne puis croire, M. l'Orateur, que des
députés a cette chambre, sous la constitution
actuelle, feront à cette constitution des changements que n'ont pas demandé leurs
manda taires, sans d'abord les leur soumettre. Il n'a
pas été question de ces changements aux
élections, et le peuple semble croire qu'il a
droit d'étre consulté; l'apathie qu'il montre
ici et la n'est pas non plus une preuve
qu'il soit en faveur du projet. Il est vrai
qu'on l'a dit généralement favorable a cette
mesure, et l'on cite une récente assemblée
tenue a Toronto comme établissant cette
preuve. Les hon. députés de Lambton et
de Kent assietaient a cette assemblée, et ils
ont dit, ce qu'ils croyaient sans doute, que
ceux qui la composaient étaient des personnes
très distinguées. (On rit.) Et parce que des
personnes distinguées se sont trouvées là et
que des résolutions ont été adoptées en faveur
de la confédération, on a immédiatement
conclu que tout le pays consentait au projet;
cependant, on ne doit pas oublier que cette
assemblée a été organisée par des jeunes
gens, de talents il est vrai, mais enthousiastes,
—lesquels se sont associés pour former en
réorganiser une société réformiste,—et que
cette assemblée ne se composait que de ces
jeunes gens et de leurs amis politiques, et non
de citoyens de Toronto réunis à l'effet de
décider si le projet devait ou non être adopté.
On ne saurait donc prétendre qu'une assemblée ainsi composée ait été l'expression
véritable de l'opinion du peuple de Toronto;
le seul fait de savoir qu'un assistant a fait
rire de lui en proposant que le projet de
confédération fut soumis au peuple, suffit
pour mettre à méant cette prétention. Est-il
a présumer qu'une proposition de cette sorte
eut été reçue par es rires, si l'assemblée
n'eut pas été entièrement composée de partisans de la confédération? (Ecoutez! écoutez!)
Et si vous lisez le compte-rendu des
discours prononcés à. cette assemblée, vous
verrez qu'ils ne contiennent presque rien à
l'égard du vrai mérite du projet; vous y
verrez ce langage ampoulé que vous entendez
en cette chambre à propos des grands et
glorieux résultats que cette mesure doit
produire. (Ecoutez! écoutez!) De sa mise
à exécution, et des avantages en désavantages
qu'elle vaudra au peuple, il n'en a pas été
dit un mot dans un langage modéré, et, comme
à cette assemblée, nous avons vu ici des hon.
membres discuter cette question dans un
style entré. (Ecoutez! écoutez!)
L'
HON. M. McDOUGALL—Les différents discours prononcés sur ce sujet par
l'hon. préopinant m'ont fait comprendre qu'il
préférerait une union législative, et qu'il
voterait pour un chan eurent dans ce sens.
L'
HON. M. McDOUGALL—Eh bien!
alors, j'aimerais à savoir sur quelle autorité
il s'appuierait pour voter en faveur d'une
union législative plutôt que d'une union
fédérale, et d'où il infère que le peuple soit
en flaveur de la première? (Ecoutez! écoutez!)
M. M. C. CAMERON—Lorsque j'ai dit
que je voterais pour une union législative,
cela n'impliquait pas que je fasse rêt a
adopter ce système sans qu'il fut d'abord
soumis au peuple. (Ecoutez! écoutez!)
On a dit que les provinces inférieures ne
voulaient pas d'une union législative; cependant, un ami vient justement de me passer
un discours renoncé par le Dr. Tupper, de
la Nouvelle-Ecosse, dans lequel ce monsieur
se déclare en faveur d'une union législative.
L'
HON. M. BROWN — Je comprends
facilement qu'a une assemblée tenue a Halifax au sujet de l'union des provinces maritimes,
le peuple de cette cité se soit montré
en faveur d'une union législative, car Halifax devait être la capitale de l'union
projetée; mais je n'ai non plus aucun doute que
dans ces provinces il s en trouve qui soient
plutôt en faveur d'une union législative que
fédérale.
M. M. C. CAMERON—Dans la correspondance mise devant cette chambre, au sujet
d'une union des provinces maritimes, je me
souviens que les mots employés étaient
" union législative " et on ne voit pas qu'il
soit question du peuple de ces provinces
comme désirant l'union fédérale plutôt que
législative. Dans cette correspondance, je
pense que les mots employés sont " union
léfislative "; il n'est pas question d'union
fédérale, et je crois que c'est ta l'espèce
d'union que ces hon. messieurs auraient du,
dans l'intérêt de ce pays, s'efforcer d'obtenir.
Mais parce que quinze en seine personnes qui
ont bûclé cette constitution aï'aide d'un si
985
grand nombre d'éléments discordants, n'ont
pas jugé à propos de nous la donner, ce
n'est pas une raison pour ne nous l'ayons
pas. Tout ce que nous désirions c'était
d'avoir un gouvernement fort, et avec ce
gouvernement fort nous pouvions bien nous
passer de changement constitutionnel. (Ecoutez! écoutez!) Mais les hon. messieurs
appelés à former cette coalition avaient formulé tant d'accusations les uns contre
les
autres qu'il fut jugé nécessaire de les faire
oublier au peuple au moyen de quelque
grand projet, et j'ai l'espoir que cette leçon
profitera à l'hon. président du conseil, lequel
s'abstiendra à l'avenir de recourir à cet expédient. (Écoutez! écoutez! et rires.)
L'
HON. A. A. DORION—Je n'ai pas
l'intention, M. le PRÉSIDENT, de discuter
cette motion de l'hon. député de Peel, mais
je veux seulement expliquer aux députés du
Bas-Canada que cette motion a pour but de
demander qu'avant qu'aucune mesure passée
par le gouvernement impérial, ne soit mise
en force en Canada sans être soumise au
peuple de cette province. Ceux qui sont
d'opinion que la législature ne doit pas passer
une mesure aussi importante—et qui n'est
rien moins qu'une révolution dans notre constitution,—ceux qui croient que cette mesure
est assez importante pour ne pas demander à
l'Angleterre d'opérer cette révolution sans
que le peuple ait été consulté, doivent voter
en faveur de cette motion. (Écoutez! écoutez!) En supposant même que le peuple
soit en faveur de la confédération, il y
aurait encore un grand avantage à soumettre
la question aux électeurs. Jusqu'à présent,
la question n'est pas comprise. Les journaux
ont dit d'un côté que c'était une bonne
mesure, d'un autre côté qu'elle était mauvaise,—mais, en réalité, il n'y a pas eu
de
discussion sérieuse, et l'on peut dire en toute
sûreté que le peuple ne la connait pas encore.
(Écoutez! écoutez!) Les membres de cette
chambre prennent sur eux une très grande
responsabilité s'ils votent cette mesure sans
consulter le peuple, et l'avantage d'un appel
au peuple,—même en supposant qu'il lui tût
favorable,—serait de faire disparaître cette
responsabilité. (Écoutez! écoutez!) Et si
la mesure n'est ni comprise ni approuvée par
le peuple, l'on court le danger, en la votant
ainsi, de faire naître des préjugés que la
discussion ferait peut-étre disparaître. Il
est donc de l'intérêt de la mesure autant que
des députés qu'elle soit soumise au peuple
avant que d'être définitivement votée,—et,
pour ma part, je voterai en faveur de l'amendement de l'hon. député de Peel. (Écoutez!
écoutez!)
L'
HON. M. EVANTUREL—M le PRÉSIDENT:—Je prendrai la liberté de demander
a mon hon. ami le député d'Hochelaga
pourquoi ceux qui, comme lui et toute
l'opposition, ne cessent de dire que la confédération est maintenant une question
morte,
et qu'il n'y a plus qu'à l'enterrer,—pourquoi
ils veulent soumettre la question au peuple?
Je n'en vois pas la nécessité, si la question
est morte. (Écoutez! écoutez! et rires.)
L'
HON. A. A. DORION—Je répondrai à
mon hon. ami que nous voulons qu'elle soit
soumise au peuple afin de démontrer que la
mesure n'est pas populaire. Il croit me
placer dans un dilemme, mais il se trompe.
Il croit que la mesure sera passée en Angleterre telle qu'elle est actuellement, et
c'est
afin de nous mettre en garde contre cette
éventualité que nous voulons un appel au
peuple.
L'
HON. M. EVANTUREL.—Je ne crois
pas qu'elle sera décrétée par l'Angleterre
telle qu'elle est.
L'
HON. A. A. DORION—Eh bien! si
elle peut être amendée en Angleterre en
notre faveur, elle pourra aussi être changée
dans un autre sens. Mais ce n'est pas là la
question. Je dis que nous devrions la soumettre au peuple, afin que s'il est favorable
à la mesure, elle soit portée au gouvernement
impérial avec la sanction du peuple et de la
chambre,—et si le peuple y est opposé, il
ne faut pas que les délégués puissent dire
qu l'opinion publique en Canada lui est
favorable. (Écoutez! écoutez!)
M. DENIS—Je crois, M. le PRÉSIDENT,
que les appréhensions de l'hon député d'Hochelaga n'ont pas le moindre fondement.
Pour faire un appel au peuple avec quelque
utilité, il faudrait que le plan fut connu dans
son entier; car, comment le peuple pourrait—
il en juger sainement si on ne lui soumet
qu'un plan vague de confédération, c'est-à- dire les résolutions actuelles telles
qu'elles
sont, sans lui faire connaître en même temps
la constitution des gouvernements locaux et
tous les autres détails de la mesure, qui
l'intéressent le plus et qu'il a le droit d'attendre? Attendons que le plan soit connu,
et le peuple sera appelé à se prononcer en
temps et lieu. (Écoutez! écoutez!)
986
M. J. B. E. DORION—Nous venons
réellement, M. le PRÉSIDENT, d'avoir du
neuf, si l'hon. député de Beauharnois a
parlé sérieusement. Mais, en vérité, je ne
puis le croire, et je pense qu'il n'est pas sérieux en nous disant qu'il faut attendre
que
les projets de constitutions des gouvernements
locaux nous soient soumis, pour nous permettre de juger du mérite des résolutions
actuelles. Cependant, en supposant qu'il soit
sérieux, et qu'il n'ait pas voulu nous faire un
badinage, comme il en fait quelque fois,
croit-il pouvoir nous faire accepter comme
plausibles les raisons qu'il donne pour nous
faire voter contre l'appel au peuple? Dans
ce cas, il se trompe étrangement. (Ecoutez!
écoutez!) Je conçois parfaitement qu'il soit
dans l'embarras, et qu'il cherche à se payer
de mauvaises raisons pour voter contre cette
motion d'amendement, parce qu'il a promis
dans deux assemblées d'électeurs de voter
pour l'appel au peuple. (Ecoutez! écoutez!)
Il dit qu'il ne veut pas voter pour l'apel au
peuple, parce qu'il ne connait pas les détails
de la mesure; mais, alors, pourquoi veut-il
voter sur la question principale sans connaître
ces détails? Il sait que le gouvernement a
dit à la chambre qu'il fallait voter la confédération avant qu'il ne soumît la constitution
des gouvernements locaux, et qu'il irait en
Angleterre pour en obtenir la nouvelle
constitution, sans nous soumettre le plan des
constitutions locales. Il sera trop tard,
lorsque les délégués seront de retour et que
l'Angleterre nous aura donné une nouvelle
constitution, pour soumettre les résolutions
actuelles au peuple. (Ecoutez! écoutez!)
Et si nous pouvons voter et juger ici le grand
plan de contédération,—-comme dit l'hon.
député,—sans avoir les détails de l'organisation des gouvernements locaux, pourquoi
le peuple ne serait-il pas de même appelé à
formuler son opinion sur ce plan? Les
raisons de l'hon. député sont donc parfaitement futiles! (Ecoutes! écoutez!)
M. GIBBS—Avant que cette motion ne
soit mise aux voix, je crois de mon devoir
de faire quelques observations à l'effet de
motiver mon vote. Dans mon discours de
l'autre soir, j'ai dit que j'avais promis à mes
commettants de voter pour la proposition
ayant pour but de soumettre au peuple de
cette province le projet d'union des provinces de l'Amérique anglaise. Les termes
que j'ai employés en cette occasion équivalaient à ceux-ci: bien qu'en faveur d'une
union fédérale, j'insite pour que la question
soit soumise au peuple, attendu que la mesure affectera non seulement les habitants
actuels de ces provinces mais encore les
générations futures. Dans ma tournée électorale, j'ai dit que je considérais ces résolutions
comme la base d'une convention que
des individus voulant entrer en société
auraient pu faire et qu'aucun d'eux ne
pourrait changer sans le consentement des
autres. A l'ouverture de la discussion, je
ne fus donc pas surpris d'entendre l'hon.
procureur-général du Haut-Canada déclarer
que nous ne pouvions changer ce traité,
qu'il fallait en l'adopter ou le rejeter dans
son entier. Bien que j'aie pensé que l'on
hâterait l'adoption des résolutions, je n'ai
jamais cru qu'il n'y serait fait aucun amendement, et, quoique l'on ait dit que le
parlement ne pouvait ameuder le projet, je ne
suis pas sans espérer qu'une fois la députation en Angleterre, certains amendements
nécessaires seront introduits par le gouvernement de la Grande-Bretagne. Bien des
membres qui objectent aux détails du projet
sont en faveur du principe fédéral; ces
membres soutiennent le gouvernement, et
voilà ce qui me fait espérer que les résolutions ne devieadront pas loi exactement
dans la forme qu'elles ont été présentées a
la chambre. Comme représentant du peuple,
et reconnaissant que la question est des plus
importantes,—car elle affecte matériellement
la constitution sous laquelle nous vivons,—je
me ferai un devoir de voter pour tout amendement analogue à celui de l'hon. député
de
Peel. Pour agir ainsi, je me guide sur
l'opinion de lord DURHAM, au sujet de
l'Union du Haut et du Bas-Canada. Le
noble Lord avait recommandé l'adoption
d'une union législative de toutes les provinces de l'Amérique Britannique du Nord,
et il voulait aussi que la question tut soumise au peuple de ces provinces. "Mais,"
dit-il. "la condition de la province inférieure, bien qu'elle justifie la proposition
d'une union, ne justifierait pas cependant
que cette union fut mise à effet sans le
consentement du peuple de ces colonies."
Dans cela, M. l'ORATEUR, je comprends
qu'il s'agit du consentement des législatures
de ces provinces. Si cette chambre était
dissoute et que la mesure passée en Angleterre fut d'un caractère conditionnel, une
fois notre chambre réélue, elle pourrait être
acceptée ou rejetée par elle, et les collèges
électoraux se trouveraient ainsi avoir été
consultés à. l'égard de cette mesure. (Ecou
987
tez! écoutez!) Cette nécessité a été démontrée par quelques unes des observations
faites par ceux qui ont parlé sur ce sujet
Plusieurs hon. députés, partisans de la mesure, ont dit avoir déjà fait connaître
à leurs
commettants les dispositions de ce projet et
avoir obtenu d'eux de voter dans le sens
qu'ils se proposent de le faire. Cela est très
bien quant à eux, mais cela ne fait que
démontrer que ces hon. messieurs ont jugé
nécessaire de consulter leurs mandataires.
(Écoutez! écoutez!) On dit qu'entre eux
les médecins ne s'accordent pas, mais je crois
que l'on peut en dire autant des avocats,
car nous voyons l'hon. député de Peel dire
qu'il serait inconstitutionnel de suivre la
conduite adoptée par l'hon. député d'Ontario Nord; mais je préfère le mode d'appel
au peuple proposé par l'hon. député d'Ontario Nord, " oui " ou " non ", à celui de
l'hon. député de Peel. Le principe a été
reconnu par le parlement canadien; il a été
introduit dans nos conseils de comté lorsqu'il
s'agit d'une somme excédant $20,000, laquelle ne peut être prélevée sans avoir
obtenu, au préalable, le consentement du
peuple. Je crois que nous devons être pour
la confédération, sinon les craintes manifestées par plusieurs pourraient se réaliser,
c'est à-dire, que le rejet de cette union ferait
croire à une tendance à l'annexion. Je n'ai
pas hésité à donner mon adhésion aux résolutions de la conférence, car je crois que
leur adoption sera profitable à ces provinces
tout en reserrant les liens de ce pays avec la
Grande-Bretagne. Mon attachement aux
institutions britanniques n'est pas simulé;
c'est un principe que je porte en moi.
(Écoutez! écoutez!) Je crains que si ce
projet n'est pas adopté et que les choses
continuent comme à présent; que si l'on
refuse au Haut-Canada ses justes droits; et
que si le traité de réciprocité est abrogé, il se
formera une agitation assez grande dans cette
province pour nous alarmer sinon pour nous
étonner. Une chose m'a frappé, c'est que
nul individu dont les tendances en faveur
des institutions américaines étaient connues,
ne s'est exprimé en faveur du projet actuellement devant la chambre. Je vois dans
ce
fait un puissant argument en faveur de la
mesure Comme je l'ai déjà dit, M. l'ORATEUR, et bien que je sois pour la mesure, je
crois qu'il ne serait que juste qu'elle fut
soumise à l'approbation du peuple avant
d'être mise à effet, et, par conséquent, je me
ferai un devoir de voter pour l'amendement
de l'hon. député de Peel. (Écoutez! écoutez!)
M. JACKSON—M. l'ORATEUR—Je n'ai
qu'un mot ou deux à dire avant qu'on ne
vote sur cette motion. Je ne puis concilier
la conduite de l'hon. député de Peel, qui
vote pour qu'une adresse soit présentée à
Sa Majesté en faveur du projet, et qui
ensuite propose que ce projet soit soumis au
peuple. A l'égard des résolutions adoptées
par cette chambre, cet hon. député a dit que
le peuple haut-canadien était en faveur du
projet; que, pour sa part, il n'y avait aucune
objection, qu'il y adhérait même. Je comprends facilement que mon hon. ami d'Ontario
Nord puisse voter pour cette résolution;
mais ce que je ne comprends pas, c'est que
l'on puisse voter pour qu'une adresse soit
présentée à Sa Majesté lui demandant de
soumettre le projet à la législature impériale,
et qu'après cela l'on fasse volte face et que
l'on vote pour la question de soumettre le projet au peuple. Je ne puis comprendre
cela. Si
je votais pour la motion devant la chambre,
je croirais agir à l'encontre du vote que j'ai
auparavant donné. (Écoutez! écoutez!) J'ai
dit l'autre soir que mes commettants étaient
pour que la chambre adoptât cette mesure,
et qu'ils ne considéraient pas nécessaire un
appel au peuple. J'ai voté selon leur volonté,
et je vais actuellement voter contre la motion
de l'hon. député de Peel. Si cela était nécessaire, je crois que je pourrais démontrer
à la
chambre que si la question était soumise au
peuple il en surgirait des résultats tout-à-fait
étrangers à la question principale, et que
nous n'en connaîtrions pas mieux son opinion. Je pense que tout hon. membre qui a
donné son appui aux résolutions doit voter
contre la proposition de l'hon. député de
Peel. (Écoutez! écoutez!)
L'
HON. M. BROWN — En prenant la
parole, mon intention n'est pas de retarder
de plus de quelques minutes la division de
le chambre; mais je pense que les débats ne
doivent pas se terminer sans qu'il soit dit
quelques mots de ce côté-ci de la chambre.
Parlons d'abord du discours de l'hon. débuté
d'Ontario-Nord (M. M. C. CAMERON.) Dans
le cours de ses observations, cet hon. monsieur
a dit n'avoir contre moi aucune animosité
personnelle. Cela je le crois, _et je crois de
même que l'hon. monsieur avait le droit de
jouir de tous les petits succès qu'il a obtenus
en m'attaquant ainsi que l'hon. secrétaire- provincial (M. MCDOUGALL.) À mon avis,
aucune de ses autres observations méritent
988
que l'on s'y arrête—(on rit) car elles ne
sont qu'une répétition de ce qui a été dit
mainte fois par d'autres hon. membres dans
la première partie de ces débats. Mais
quant à l'hon. député de Peel, (M. J.
HILLYARD CAMERON), je dois dire que l'argumentation qu'il a fait entendre ce soir,
est pour moi, unique, car jamais je n'en
avais entendu de pareille de la part d'aucun
autre membre de cette chambre. Voyons
dans quelle position est placé cet hon. monsieur; il a commencé par dire que pour
faire
justice au Haut-Canada il fallait une réforme
parlementaire, et que dans ce projet le Haut- Canada avait cette mesure de justice;
il a
dit qu'il fallait que la province fut défendue;
que la question la plus urgente et la plus
importante dont nous avions à nous occuper
en ce moment, était celle des défenses, auxquelles cette mesure pourvoyait on ne peut
mieux. Il a dit qu'il fallait empêcher l'abolition du traité avec les États-Unis dont
nous
sommes menacés; que, par la révocation de
ce traité, les meilleurs intérêts de cette province seraient en danger et que, selon
lui,
cette mesure parait complétement à cette
difficulté. Il a aussi dit que nous ne pouvions
rester comme nous sommes, qu'il était impossible que l'état de choses actuelles se
maintînt, et que ce que l'on proposait par
cette mesure était le changement le plus
à désirer. Il a dit qu'il ne nous restait
que deux alternatives; une dissolution de
l'union ou l'adoption du principe fédéral;
que, pour lui, il considérait qu'une dissolution de l'union était la dernière chose
à
adopter et que le système fédéral était le
meilleur remède auquel on pouvait recourir
dans les circonstances particulières où nous
nous trouvons.
L'
HON. M. BROWN —Dans tous les cas,
au comité constitutionnel, l'hon. monsieur à
voté pour une union fédérale, et signé le
rapport déclarant que cette mesure était la
seule qui pouvait être adoptée et dont l'adoption était à désirer.
L'
HON M. BROWN - Il ne s-agit pas de
cela. L'hon. monsieu a dit ensuite que
pour toutes ces raisons, cette mesure se recommande d'elle-méme à tout véritable ami
de son pays. Cependant, après avoir fait un
ausei grand éloge de la mesure, que vient-il
nous dire? Qu'il n'en veut pas maintenant;
qu'il n'en veut pas avant que le pays ne se soit
prononcé à son égard! Si ces difficultés ne
sont pas réglées, dit-il, nous sommes menacés
de l'annexion aux États-Unis; que cette
mesure peut parer à ce danger et, cependant,
il ne veut pas qu'elle serve maintenant de
remède. Or, quelles sont les raisons de l'hon.
monsieur pour refuser de donner effet à une
mesure pour laquelle il paraît autant porté?
Comme l'hon. député d'Ontario, nie-t-il au
parlement le pouvoir de passer cette mesure?
Pas du tout; il reconnait que nous avons ce
pouvoir, mais, personnellement, entretient il
quelque doute quant à l'avantage de la
passer maintenant? Au contraire, il est
très porté pour la mesure, car il déclare que
comme électeur il voterait pour elle sans y
demander aucun changement; veut-il que
son adoption soit retardée? Au contraire,
il demande qu'elle soit adoptée avec toute
la diligence possible. (Écoutez! écoutez!)
Il dit que le plus tôt les membres du gouvernement seront en Angleterre le mieux se
sera pour le euple canadien; que les questions de fédération, des défenses et de la
réciprocité devraient, sans une heure de
retard inutile, être portées à l'attention du
gouvernement impérial. Il affirme que du
sort de cette mesure dependent quelques- uns des intérêts les plus vitaux de la province,
et cependant il n'en veut pas avant
que des mois ne s'écoulent, c'est-à-dire, avant
que le pays n'ait subi une élection générale,
et qu'un nouveau parlement ait pu la sanctionner; et ce qu'il a y de plus curieux
dans
tout ceci, c'est que l'hon. monsieur ne veut
pas maintenant de l'appel au peuple; il veut
qu'il soit remis à plus tard.
L'
HON. J. H. CAMERON—C'est tout
le contraire; j'ai dit que l'appel au peuple
ne devrait pas être retardé d'un jour et que,
comme le gouvernement nous avait dit qu'il
devait convoquer le parlement en juillet,
rien n'empêchait la dissolution de celui-ci et
la convocation de l'autre vers ce temps.
L'
HON. M. BROWN—Oui, mais en
même temps l'hon. monsieur nous a dit qu'il
fallait que la députation partit sans retard
pour l'Angleterre. Croit-il qu'une élection
générale se ferait en l'absence des principaux
membres du cabinet? S'il le croit, je luis dis
qu'il se trompe. Est-ce que l'hon. monsieur
entretient quelque doute sur les sentiments
du peuple canadien à l'égard de cette
mesure? Nullement. Il est, au contraire,
convaincu que si elle était soumise au peuple,
une immense majorité se prononcerait en sa
989
faveur. Ce qui est encore étrange, c'est qu'il
donne cette certitude d'approbation comme
principal argument à l'appui d'une élection.
" Soumettez-là au peuple, dit-il, et ne craignez
rien quant au résultat. Les mêmes représentants reviendront, ou d'autres dont l'opinion
est la même viendront l'adopter. "Pouvait-on imaginer quelque chose de plus
absurde? Avec cet argument ne se contredit- il pas lui-même? Si l'hon. monsieur eut
dit:
" le peuple et ses représentants approuvent
cette mesure; si vous avez une élection, les
mêmes hommes vont revenir, ou d'autres
qui pensent comme eux; une grande dépense
inutile en résultera; beaucoup de temps
précieux sera perdu; il vaut bien mieux ne
pas perdre un moment et adopter cette mesure sans plus tarder! (Applaudissements.)
Mais, au lieu de cela, il veut l'appel au
peuple, et l'argument qu'il a employé à cet
effet m'a paru étrange, venant surtout de sa
part. L'hon. député de Peel dit n'avoir
aucun doute quant a l'opinion du Haut- Canada; il est très certain qu'il se prononcerait
presque unanimement pour la mesure,
mais il a des doutes sur ce que le peuple
bas-canadien en pense; il aimerait peut-être
avoir l'occasion de lui donner son coup de
mort, et il voudrait, dit-il, que cette occasion
lui fut donnée! Eh bien! M. l'ORATEUR,
c'est encore là un argument qui m'a paru
singulier, vu qu'il vient d'une personne très
portée pour la mesure et qui ne paraît guère
s'accorder avec la majorité bas-canadienne en
matières politiques, et surtout sur cette question particulièrement. (Écoutez! écoutez!)
Qui se serait attendu que l'hon. député de
Peel se serait un jour chargé d'exprimer les
sentiments de la population bas-canadienne,
et qu'il se serait constitué le gardien de ses
droits? (Écoutez! écoutez!) I1 me semble
qu'il aurait pu laisser les Bas-Canadiens parler pour eux mêmes. (Ecoutez! écoutez!)
En
face du vote de la dernière séance sur cette
mesure, pour laquelle le Bas-Canada a donné
une majorité de douze, je pense que l'hon.
député de Peel aurait dû accepter ce fait
comme l'expression des sentiments de cette
section. (Écoutez! écoutez!) Lors de la
division, samedi matin, trois députés du Bas- Canada étaient absents, et s'ils eussent
été
ici, la majorité bas-canadienne en faveur de
la mesure eut été de treize.
L'
HON M. BROWN.—Je crois que M.
DAOUST et l'hon. M. ABBOTT se sont déclaré pour la confédération. M. DUNKIN
eut probablement voté contre. Quant au
député d'Argenteuil (l'hon. M. ABBOTT), je
le vois à son siége et il peut dire comment
il eut voté. Avec M. DUNNIN votant contre
la mesure, on eut en 13 voix de majorité
dans le Bas-Canada. (Écoutez! écoutez!)
L'
HON. M. BROWN.—L'hon. monsieur est
d'âge à pouvoir répondre si ça lui plaît, mais
je ne lui fais pas le mauvais compliment de
croire qu'il eut voté contre la mesure. Je
suis certain qu'il aurait voté du bon côté.
(Écoutez! écoutez!)
L'
HON. M. HOLTON.—Moi aussi. j'en suis
certain, mais pas dans votre sens. (Hilarité.)
HON M. BROWN.—Je répète qu'en face
de cette majorité de 13 dans le Bas-Canada,
et de 5 parmi les députés Franco-Canadiens,
il n'y avait que la tendresse de l'hon. député
de Peel pour les Bas-Canadiens qui pût le
porter à demander une élection générale.
(Écoutez!) Et, cependant, l'hon député de
Peel a été témoin de l'espèce d'agitation qui
se fait en Bas-Canada contre la mesure; il a
entendu la manière dont on répand les pétitions dans tout le pays, et dont on presse
les hommes, les femmes et les enfants de les
signer; il a vu ces pétitions nous arriver ici
portant à peine une signature authentique,
et il n'a pu rester sourd aux appels fanatiques
et aux arguments sur lesquels on a basé cette
agitation. (Écoutez! écoutez!) Est-ce pour
aider et fortifier cette agitation qu'il demande
des élections générales? À-t-on exprimé une
seule idée un seul fait contre la mesure qui
pût autoriser l'agitation qu'on cherche à
soulever dans le Bas-Canada? À-t-on essayé
de faire valoir contre le projet un seul argument qui en attaquât le mérite réel?
I1 me reste
encore à les apprendre, dans le cas où il y en
aurait eu. (Écoutez! écoutez!) Cependant,
M l'ORATEUR, la partie la plus curieuse du
discours de l'hon. député de Peel, est l'attitude qu'il voudrait que nous prissions
au
sujet de la Reine. Nous avons déjà voté une
adresse demandant à Sa Majesté de passer
un statut impérial pour sanctionner le résultat de la conférence de Québec; or, l'hon.
député de Peel veut que maintenant nous
votions une seconde adresse pour demander
que l'acte impérial soit sujet à l'approbation
de leurs Altesses, les cent trente députés à
990
qui il sera donné de siéger dans le prochain
parlement canadien. (Ecoutez! écoutez!)
Il voudrait que nous nous présenterions
devant Sa Majesté et que nous lui porterions
la parole en ces termes:—" Qu'il plaise à
Votre Majesté:—Voici la constitution qu'ont
adoptée les gouvernements des cinq provinces
anglo-américaines; nous vous déclarons que
c'est là la nouvelle constitution n'il faut a
l' Amérique Anglaise, et nous supplions Votre
Majesté de l'approuver, que le parlement
impérial passe un acte lui donnant force de
loi pour toutes ces provinces, et que Votre
Majesté sanctionne le tout; cependant, nous
prions Votre Majesté de le faire à une condition, c'est'que la législature du Canada,—
pas celle d'aujourd'hui mais celle qui lui
succèdera,—ait la liberté de critiquer et examiner l'ouvrage du parlement anglais
et de
jeter au panier l'acte de Votre Majesté le
premier jour qu'elle se réunira." (Ecoutez!
écoutez! et rires.) L'hon. député de Peel
me permettra de lui dire que s'il s'imagine
ne ce soit le moyen propre de se présenter
devant la Souveraine, il a une étrange idée
du respect dû par ses sujets au premier
fonctionnaire de l'empire dont nous avons le
bonheur de faire partie. (Ecoutez! écoutez!)
J'irai plus loin, et j'ajouterai que si l'hon.
député en tout autre de son avis, s'attend a
ce ne d'hon. personnages s'acheminent vers
le siege de l'empire pour aller dire au cabinet
de St. James:—" Nous vous prions de prendre le soin de combiner cette mesure, de vous
l'approprier et de la faire passer dans les
deux chambres et malgré toute l'opposition:
—mais, en même temps, nous voudrions que
vous rédigiez une clause portant que la législature canadienne aura le pas sur le
parlement impérial, sur la Souveraine, et fera de
votre loi ce que bon lui semblera,"— eh
bien! je dirai à la chambre qu'elle trouve
pour transmettre son message des individus
dénuée de dignité personnelle et de toute
notion de respect envers ceux qui occupent
les plus hautes charges du royaume. (Applaudissements.) Je déclare donc, qu'on
ne saurait infliger à la Reine une insulte
plus grave que celle que propose l'hon député de Peel . Mais, ce n'est pas tout; une
autre singularité du discours de l'hon. député
de Peel, est que tout en essayant de faire voter
non-confiance au gouvernement,—car c'est
au moins le renversement de la politique du
gouvernement,—il déclare en même temps
le désir dont il est animé, de consolider l'administration. (Ecoutez! écoutez) Il
s'ima
gine ou feint d'imaginer que si sa proposition
est emportée, le gouvernement rendra la
chose bénévolement et s'achemmera vers
l'Angleterre, portant niaisement avec lui la
déclaration officiellc de sa défaite. Voici ce
qu'il nous dit:-—" Je ne veux pas, malgré ce
vote, vous voir hésiter à prendre la route de
Londres:—Non, car votre présence y est nécessaire au plus tôt. Vous devez donc partir
de suite pour aller faire valoir nos droits,
indiquer la manière de régler la question
des défenses, celle de la réciprocité, et le
reste. Vous devez parler au nom du peuple
canadien d'un ton ferme et décidé, d'accord
avec les sentiments du pays." L'hon. député
veut nous voir aller en Angleterre possédant
la confiance du peuple, et la façon dont il s'y
prend pour déclarer que nous la possédons,
est de nous soumettre à un vote de censure
la veille même de notre départ. (Ecoutez!
écoutez!) Car, enfin, ne veut-il pas que
nous portions une adresse à Sa Majesté d'une
main et notre défaite de l'autre? (Ecoutez!
écoutez!) Si l'hon. député croit appuyer
l'administration avec sa proposition actuelle,
pour ma part, je lui dirai que je ne lui ai
aucune reconnaissance pour son appui.
(Ecoutez! écoutez!) L'hon. député peut emporter sa résolution s'il en est capable,
mais
je lui dis que le gouvernement d'aujourd'hui
ne confiera a personne le soin de porter un
message aussi irrévéreneieux que celui-ci
aux pieds du trône, car la chambre doit
savoir que si le ministère actuel a quelque
adresse à transmettre à Sa Majesté, ce doit
être celle qu'il propose en ce moment au
parlement. L'hon. député de North Ontario
(M. M. C. CAMERON) dit que nous essayons
de dicter sa conduite à la chambre, de nous
attribuer les droits des membres de cette
législature: tel n'est pas le cas. Les membres de la législature peuvent agir suivant
ce qu'ils croient juste. et voter ou rejeter
notre adresse, la modifier ou y ajouter ce
qu'ils voudront, mais nous déclarons que
nous ne saurions nous faire les porteurs d'un
message conçu dans les termes proposés par
l'hon. député de Peel. Que cette chambre
déclare qu'elle veut en appeler au peuple et
demain elle aura des élections générales,
(écoutez! écoutez!) mais cela sans obliger
le gouvernement d'aller en Angleterre, pour
demander à la fois que le projet de loi actuel
devienne et ne devienne pas loi. (Ecoutez!
écoutez!) L'hon. député de Peel a ajouté
que l'appel au peuple se fait dans les autres
provinces et demande pourquoi il n'en serait
991
pas ainsi de nous? Or, il me semble que
l'hon. député devrait savoir la différence de
situation de ces législaturcs avec la nôtre.
C'est ainsi, par exemple, que le terme du
parlement du Nouveau-Brunswick expire en
mai; les députés n'étant pas revenus devant
leurs électeurs depuis quatre années, et
devant subir une élection sous peu, ont cru
qu'il valait mieux faire la chose de suite.
Il en est de même de Terreneuve, où le
terme de dissolution du parlement était
proche et où l'on a suivi la même ligne de
conduite. Mais l'hon. député ajoute que si
la législature de la Nouvelle-Ecosse n'approuve pas les résolutions. le gouvernement
y conseillera la dissolution des chambres:—il est probable que c'eut été la notre
conduite dans les mêmes circonstances. Si
la législature n'eut pas approuvé notre'projet,
nous en eussions assurément, du consentement de Son Excellence, appelé au pays de
la décision de la chambre. Mais aujourd'hui,
quelle necessité y a-t-il d'un appel au peuple?
Voilà ne nous discutons cette question
depuis des années...
L'
HON. M. BROWN—L'hon. monsieur
peut faire—oh! oh!—ce qui ne m'empêchera
pas de lui dire que le peuple du pays entier
comprend la question tout aussi bien que les
députés de la législature. Il n'y a que ceux
qui ne le veulent pas qui ne la comprennent
pas. L'hon. député de Cornwall lui-même a
compris jadis la question, et s'il n'en est pas
ainsi aujourd'hui c'est ne la mémoire lui
fait défaut. (On rit). S'il pouvait y avoir
quelque doute sur le sentiment du peuple à
cet égard, alors il y aurait lieu d'en appeler
au pays; mais est-ce le cas? Je ne m'oppose
pas à la résolution de l'hon. monsieur sur
des motifs constitutionnels pas plus que je
nie les droits du peuple, car si j'avais le
moindre doute sur le verdict du peuple, je
serais le premier a dire que nous devons avoir
des élections; mais, c'est précisément parce
que je sais que le peuple se déclarersit en
masse pour la mesure que je crois inutile
d'en appeler aux électeurs. Le meilleur moyen
de juger de l'opinion du pays n'est—il pas le
vote des représentants qu il envoie ici? Or,
jamais le parlement canadien ne s'est déclaré
sur une matière aussi grave avec une plus
forte majorité, laquelle a été dans la chambre
haute dans une proportion de trois à une
voix, et ne s'en est pas éloi née dans la
chambre basse. Sur les dix hon. députés
qui n'ont pu prendre part au vote,—l'hon.
ORATEUR et cinq absents,—pas moins de
cinq auraient voté dans l'affirmative et un
seul dans la négative, la chambre s'étant
divisée comme suit, savoir:—94 oui, et 36
non. Sur les 36 députés qui ont voté contre
la mesure, pas moins de la moitié ont déclaré
à la chambre qu'ils acceptaient les principes
généraux du plan, mais qu'ils le repoussaient
à cause de quelques uns de ses détails. Je
le répète donc, jamais le parlement n'a voté
avec une telle unanimité un aussi grand
changement constitutionnel. D'un autre
côté depuis que le ministère a fait connaître
sa politique il n'y a pas en moins de 50 comtés
où le peuple a pu faire connaître son opinion
soit dans l'une soit l'autre chambre: or, sur
tous ces candidats, quatre seulement se sont
présentés comme des adversaires de la mesure,
deux ont été élus et un de ces deux a voté la
mesure. (Ecoutez! écoutez!) On m'apprend
que l'hon. député de Wentworth (M. RYMAI.)
a fait une assertion sur laquelle j'attirerai
son attention, vu que je n'ai pû l'entendre
pendant que je portais la parole. Je fesais
la remarque que je n'avais pas entendu dire
à un seu député du Haut-Canada qu'il n'y
avait pas une forte majorité de ses électeurs
favorable au projet, c'est alors que l'hon.
député a prétendu le contraire pour son
comté.
M. RYMAL. Je n'ai pas dit s'ils étaient
ou non favorables au projet. Je crois qu'il
existe parmi eux une grande diversité
d'opinion.
L'
HON. M. BROWN—Ah! Eh bien!
M. l'ORATEUR, il y a deux membres de la
législature, l'un dans cette chambre et l'autre
dans la chambre haute, qui arrivent des
élections, l'un pour la cité de Hamilton,
située dans le comté que représente l'hon.
monsieur (M. RYMAL), et lautre pour le
district électoral qui embrasse également le
comté de Wentworth, et ces deux membres
déclarent qu'ils n'ont pas le moindre doute
sur le sentiment de leurs électeurs-lequel est
énergiquement favorable à la mesure. Je
répète donc que je n'ai pas entendu un seul
hon. député déclarer que ses électeurs étaient
opposés à la mesure actuelle.
M. RYMAL—Au sujet du témoignage
de l'hon. député de la division de Burlington
(M. BULL), et de l'hon. député de Hamilton
(M. MAGILL), qu'il me soit permis de dire
ne je connais mieux le Riding Sud de
Wentworth qu'aucun d'eux. Ni l'un ni
l'autre n'ont a confiance des électeurs de
992
Wentworth Sud. L'un a été défait l'automne dernier par 300 voix de majorité;
l'autre a couru les chances d'une élection, i
y a quelques années, sans avoir une ombre
de succès en sa faveur.
L'
HON M. BROWN—Cela peut-être vrai:
mais l'hen. député aurait pu ajouter aussi
que le Dr. SMITH, l'adversaire de l'hon. M.
BULL, s'est déclaré en faveur des principes
généraux de la mesure, en disant que si les
détails lui laisaient il les appuierait. Ainsi
donc, les aux candidats de cette divisiou,
y compris tout Wentworth et la ville de
Hamilton, se sont déclarés favorables au
gouvernement.
M. RYMAL——Je prendrai la liberté de
dire que j'ai entendu le Dr. SMlTH dire,
pas rien qu'une fois, mais plusieurs fois,
qu'il ne croyait pas que la mesure pourrait
fonctionner.
M. A. MACKENZIE—Ça été la cause de
sa défaite, je suppose? (Ecoutez! écoutez!)
L'
HON. M. BROWN—Il est fort possible
que le Dr. SMITH ait pu dire cela depuis sa
défaite; mais j'ai conversé avec lui lors de
son élection, et il s'est exprimé en sens tout
à. fait contraire. D'ailleurs, il sied peu a
l'hon. monsieur de parler en tels termes du
témoignage de ces messieurs parce qu'ils
n'ont pas triomphé en telle ou telle occasion.
Qu'il se rappelle les difiicultés de sa propre
élection et la faible majorité qui l'a fait
triompher, et il verra combien peu il lui
convient de jeter à cette occasion du discrédit sur les assertions d'hon. députés
qui
viennent d'être élus, et cela après ne la
n esure actuelle a été exposée au peup 9 qui
s'est déclaré presqu'unanime en sa faveur.
L'hon. député de Hamilton a été élu à une
immense majorité, et il n'est pas juste pour
l'hon. député de s'en moquer parce qu'il
avait été malheureux dans une occasion précédente. (Ecoutez! écoutez!) Je pourrais,
M. l'ORATEUR, retenir encore longtemps
la chambre a répliquer a tout ce n'ont dit
les hou. orateurs qui ont pris qla parole
pendant ce débat; mais je ne veux pas
retarder le vote de la chambre, et je rappellerai simplement a cette chambre que si
jamais il s'est présenté une occasion d'agir,
et cela sur le champ, c'est bien au sujet de
la uestion actuelle.
L'
HON. M. HOLTON—Au contraire,
cela empêche la possibilité d'agir sur le
champ.
L'
HON. M. BROWN—L'hon. monsieur
va voir si nous pouvons oui ou non a ir
immédiatement. Il doit savoir que si les
élections du Nouveau-Brunswick ont tourné
en apparence contre la confédération, il y a
encore un nombre considérable de députés
favorables a la confédération qui ont remporté leur élection, et qu'il s'y rencontre
un
parti non moins considérable qui, faivorable à
l'union, ne s'y cet opposé qu'à cause de
certains détails. D'ailleurs, il y a ceci à
considérer, c'est qu'on y a présenté la mesure
sous un jour tout à fait différent de celui
sous lequel elle s'offre a rous. En effet,
cette question nous occupe depuis plusieurs
années, et il n'y a pas une seule objection
qu'on puisse soulever qui ne l'ait pas déjà
été ailleurs. Nous sommes donc dans une
situation différente, à part cette considération
faite par l'hon. député de Peel, que nous ne
pouvons reculer, mais qu'il nous faut avancer,
qu'il nous faut en arriver a quelque décision
sur le sujet et que nous ne saurions laisser
les choses dans leur état actuel. Il ne sert
donc de rien a l'hon. député de North
Ontario (M. M. C. Cameron) de prétendre
que les choses peuvent continuer d'aller
comme ci—devant:—-ct puis, telle n'était pas
son opinion en 1862. (Ecoutez! écoutez l)
Arrivé en chambre comme appui du gouvernement conservateur d'alors, le premier
vote qu'il donne est pour le condamner, parce
qu'il n'a pas présenté de mesures pour régler
la question Il n' a qu'à. relire le discours qu'il
fit en cette occasion our dénoncer l'hon. procureur—général du aut-Canada et ses collègues
parce qu'ils ne voulaient pas donner la
représentation d'après le chiffre dela population, et que l'opinion publique s'était
déc arée
si énergiquement qu'il n'y avait pas un moment à perdre pour régler la question, il
trouvera la réponse à ce qu'il prétend en ce
moment, savoir: que nous pouvons laisser la
aestion de côté et continuer l'ancien ordre
de choses. (Ecoutez! écoute:!)
M. M. C. CAMERON—Je n'ai jamais
dit, a l'époque ci—dessus, qu'in avait danger
de révolution ni rien de semblable; je pressais
le règlement de la question comme une justice due au Haut—Canada et cela contre mes
hou. amrs qui ne le voulaient pas.
L'
HON. M. BROWN—L'hon. député voulait alors renverser ses amis parce qu'ils ne
993
voulaient rien faire:—aujourd'hui, c'est tout
le contraire, il veut les renverser parce qu'ils
veulent agir. (Ecoutez! écoutez!)
L'
HON. M. HOLTON—L'hon. monsieur
voudra bien me permettre de lui faire une
observation. Il me paraît tomber dans une
illusion complète en prétendant que la mesure actuelle est analogue à celle de la
représentation d'après le chiffre de la population,
avec laquelle il a agité le pays depuis tant
d'années: or, la question est loin d'être la
même. La question de la confédération n'a
pas encore été mise devant le pays et elle ne
l'était pas aux dernières élections générales.
Il sait que le parti dont il est membre s'est
prononcé à plusieurs reprises et par son
propre journa contre ce projet de confédération, et doit se rappeler que la convention
réformiste de 1859 a agi de même.
M. A. MACKENZIE—Ayea donc les
résolutions et preuves ce que vous dites, si
vous le pouvez.
L'
HON. M. HOLTON- Quels sont les
faits? Le gouvernement d'alors avait proposé une confédération des provinces pour
remédier aux difficultés de la politique canadienne - le parti libéral n'en voulut
pas.
Si, au contraire, il en avait voulu, il est probable que vous auries la confédération
depuis
longtemps du consentement des provinces
d'en-bas. Le rti libéral rejeta donc la mesure. Cepen ant, il est bon d'ajouter qu'il
déclara aussi qu'une fois nos dificultés réglées,
et non pas comme moyen de les résoudre, on
pourrait s'occuper de cette uestion dans un
avenir plus ou moins éloigné. luis ce n'est pas
de cela que je voulais parler en me levant;
je voulais faire remarquer combien mon bon.
ami s'abasait a prétendre que la mesure actuelle est la même que celle pour laquelle
il
a agité le pays si longtemps, et que l'hcn.
député d'Ontario Nord défendait dans la
circonstance qu'il a voulu lui rappeler.
L'
HON. M. BROWN—En vérité, l'hon.
député s'est levé pour bien peu de chose.
Au lieu d'acce ter son explication, je déclare au contraire qu'elle est inexacte du
premier au dernier mot, car les faits sont
précisément le contraire de ce qu'il prétend. Il dit que la mesure actuelle est
une mesure tout à fait difi'érente: je le nie
et afirme qu'elle nous donne ce que nous
demandions, mais sous une autre forme.
En effet, nous demandions que la re .
sentation législative fut basée sur le chlfifre
de la population: nous l'avons. (Ecoutez!
écoutez!) Et l'hon. monsieur devrait être
le dernier à s'opposer à la mesure actuelle
puisqu'elle est basée sur les mêmes éléments
adoptés par l'administration Brown-Dorion,
celle-ci ayant accepté la mesure en l'enfeurant
du contrôle et des garanties qui raitraient
nécessaires. (Ecoutez:! écoutez!) Voilà ce
que l'hon. monsieur a dit en outre, que j'avais
parlé contre la confédération des provmcea:
eh bien! il ne trouvera aucun des discours
que j'ai faits depuis mon entrée en parlement,
dans lesquels, en parlant de la con édération,
je n'ai pas pris un soin particulier de dire
que je regar ais l'union de toutes les provinces comme la destinée future de ces provinces.
A ceux qui en voulaient faire le
moyen de résoudre nos difiicultés, je répondais
que je n'y eonsentirais pas; mais je prenais
soin de ne rien dire de contraire à. la chose,
quoiqu'en aient dit ou écrit les autres. Je
outais d'abord que nous fusions assez
forts pour supporter les charges que la confédération nous imposerait; en second lieu,
connaissant l'opinion des autres provinces à
ce sujet, je ne savais pas de quel œil elles
envisageraient le projet. C'est pourquoi je
pensais qu'il faudrait des années pour lui
permettre de s'accomplir, et je ne voulais
pas qu'aucun rti en fit son cheval de
bataille, et perdit son temps en négociations
avec le gouvernement anglais et ceux des
provinces, car c'était s'exposer à. perdre le
seul remède praticable que nous demandions.
L'
HON. M. BROWN—L'hon. monsieur
se trompe, car il ne peut désigner seul
membre du ministère qui veuil e retarder la
mesure d'un seul moment. (Ecoutez! écoutez!) C'est la, d'ailleurs, la base de notre
politique actuelle. Lorsqu'eurent lieu les
négociations qui aboutrrent a la coalition
d'aujourd' hui, je tombai d'accord qu'il était
bon et désirable de s'occu er de l'avenir de
ces provinces dans le sens 'une union, mais
je prétendis aussi qu'il y avait un moyen
actuel que nous pouvions combiner en attendant l'autre. Tout le monde conviendra que
nous avons été prodigieusement favorisés! par
les circonstances dans le succès qu'a eu la
politique que nous inaugurames °en° juillet
dernier:- je suis prêt à répéter ce que j'ai
toujours dit, à savoir: que si la dernière
mesure est possible elle vaut encore mieux
994
que la première. Loin d'admettre qu'elle en
est différente, je dirai même qu'elle n'en est
qu'une extension et que nous, qui demandons
depuis si longtemps que la représentation
soit basée sur le chiffre de la population,
avons obtenu ce que nous voulions et même
au-delà. (Ecoutez! écoutez!) D'un autre
côté, nos amis du Bas-Canada ont obtenu les
garanties suffisantes pour leurs institutions
locales, et pour ma part j'en suis bien aise.
(Ecoute! écoutez!) C'est ce que j'ai toujours
désiré, et je puis prendre à témoin mon hon.
ami de Kamouraska (M. CHAPAIS) si,
depuis treize ans, je ne lui ai pas dit chaque
année que j'étais disposé à avoir égard aux
institutions locales du Bas-Canada et à leur
accorder toute la protection raisonnable.
C'est pourquoi, j'affirme que le compromis
qui est le fruit des circonstances du jour est
admirable, et que ce sera un jour néfaste
pour le Canada que celui où la mesure présente sera rejetée. (Ecoutez! écoutez!) (J'affirme
que celui qui, jetant un coup d'œil
rétrospectif sur les douze ou treize années
passées de notre politique et sur les époques d'agitation que nous amas traversées
est prêt à courir le risque de nous y trouver
engagés de nouveau, celui n'est pas,—pour
me servir de l'expression de l'hon. député
de Peel,—un ami sincère de son pays.
(Applaudissements). Après un Vote aussi
important—les trois quarts des deux branches de la législature—en faveur de la mesure,
je regarde comme des plus inconsidérées la tentative de la minorité de mettre
de nouveau en danger la mesure au moyen de
préjugés et de questions incidentes qu'on ne
manquerait pas de soulever par tout le pays,
afin de représenter faussement le résultat
d'élections générales comme une désapprobation du projet par le peuple. Supposez
que quelqu'un au commencement de la
derniére session eut proposé la même mesure
à cette chambre, que tous les députés du
Haut-Canada l'eussent acceptée à l'exception
de huit, et que tous les députés du Bas—
Canada s'y fussent de même déclarés favorables moins treize, je demande à mes hon.
auditeurs si nous n'aurions pas regardé,
comme ayant perdu la raison, celui qui aurait
proposé d'ajourner la question après les
élections générales? (Ecoutez! écoutez!)
Et lorsque la chambre approuva dans la
dernière session la résolution du gouvernement de s'occuper de la question et de combiner
au projet digne d'être adopté, je
demande aux hon. députés s'ils s'attendaient
a voir ce projet sanctionner par le vote des
trois quarts des deux branches de la légisture? (Ecoutez! écoutez!). Le fait est que
nous avons été singulièrement favorisés par
le succès. Quant à consulter le peuple, je
dirai que le peuple ne peut que rire du zèle
qu'on montre en certains quartiers pour ses
droits: ce qu'il veut c'est l'amende et non
l'écorce; mais il ne veut pas, sous prétexte
de formes constitutionnelles, risquer le succès
de la mesure actuelle, risquer l'existence de
la combinaison ministérielle qui lui a donné
naissance, ni risquer de se trouver ramené à.
toutes les crises et les difficultés dont il se
croyait débarassé au moyen de ce projet.
(Applaudissements.)
L'
HON. M. J. H. CAMERON—L'hon.
monsieur a mal défini mon attitude sur cette
question. J'ai voté les résolutions sur
lesquelles on a basé une adresse, et la proposition que j'ai faite n'est tout simplement
qu'un amendement à la motion demandant la
nomination d'un comité pour rédiger cette
adresse, et ne comporte d'insulte pour personne. Elle n'empêche en aucune façon les
ministres d'aller porter ces résolutions aux
pieds du trône, et dont une copie se trouve déjà
déposée sur les bureaux du parlement impérial. L'hon. monsieur doit donc avoir mal
compris mes paroles, car je ne fais que
demander pour le peuple la faculté dont j'ai
joui moi-même: de voter la mesure. (Ecoutez! écoutez!) L'hon. monsieur dit qu'il ne
me doit aucune reconnaissance pour mon
appui:—mais qu'il sache bien que ce n'est
pas à lui que je donne mon appui, mais au
gouvernement comme tout et à la cause qui
a présidé a sa formation. Il n'ignore pas
que mes opinions politiques out toujours
diff'éré d'avec les siennes à tel point que rien,
excepté l'importance des évènements, n'aurait
pu lui permettre de me porter impunémeut
le défi qu'il vient de me porter, qu'il n'a
aucune raison d'être mon obligé, et que
je donne mon appui au ministère non parce
qu'il en fait partie mais en dépit de ce qu'il
en fait partie. (Ecoutez! écoutez!)
L'
HON. M. HOLTON—Je veux, M.
l'ORATEUR, borner mes observations à la proposition placée entre vos mains, et parlerai
d'abord de ce qui m'a fait interrompre l'hon.
député d'Oxford Sud, avec sa permission.
J'ai accusé l'hon. monsieur de prétendre
que la question discutée maintenant dans
cette enceinte est absolument la même que
celle par laquelle il a agité le pays depuis
quelques années, et pour laquelle a voté l'hon.
995
député d'0ntario Nord en 1862. J'ai à
la main le rapport de la discussion qui
ont lieu dans cette chambre au sujet de
l'union fédérale en 1858. L'hon. M. GALT
ayant proposé la fédération des provinces de
l'Amérique du Nord, l'hon. M. BROWN
proposa en amendement l'adoption d'une
résolution tendant à baser le chiffre de la
représentation sur celui de la population
N'était-ce pas là indiquer la difiérence des
deux propositions que de les placer en antagonisme? Et, cependant, l'hon. monsieur
essaie ce soir de convaincre la chambre que
la mesure actuelle est exactement celle qu'il
demandait, et de prouver l'inconséquence de
l'hon. député d'Ontario Nord en lui reprochant d'avoir voté en 1862 contre ses propres
amis sur la représentation basée sur le chiffre
de la population et de voter aujourd'hui contre
la mesure actuelle.
L'
HON. M. BROWN—Mon hon. ami ne
voudra assurément pas intervertir les faits,
car il doit aussi se rappeler que lorsque cette
proposition fut faite il y avait deja en deux
autres amendements de rejetés, et je me
rappelle qu'à la fin de mon discours je
conclus en disant que je voulais la représentation basée sur la population, que je
l'accepterais seule, que je l'accepteraie avec
l'union fédérale et avec n'importe quelle
autre mesure.
L'
HON. M. HOLTON—L'hon. monsieur
confond ce qui s'est pausé en 1856 avec ce
qui s'est passé en 1858 . En 1856, il se montra
disposé ou effet à accepter une fédération
canadienne pourvu que les députés du Bas- Canada y consentissent; mais je parle en
ce
moment de 1858, alors qu'au lieu d'accepter la
proposition de l'hon. M. GALT, de confédérer
toutes les provinces, il y proposa un amendement, prouvant qu'en 1858 comme en 1859
il ne regardait ce moyen comme
pouvant résoudre nos diffiicultés politiques.
Je crois, ensuite, que l'hon. monsieur, dans
sa réponse plus ou moins heureuse à l'hon.
député de Peel (M. J, H. CAMERON), n'a
pas du tout entamé l'argumentation énergique de l'hon. député d'Ontario Nord. Je
suis aussi favorable que n'importe qui a la
doctrine de la re résentation en opposition
à celle de la délégation; et nous sommes
chargés par nos électeurs de remplir certains
devoirs suivant les dictées de la constitution;
mais je tiens que nous outrepassons notre
mandat en touchant à la constitution elle- même. Un député élu par la peuple pour
faire fonctionner une constitution, ne pas le
droit d'en voter la déchéance. (Ecoutez!
écoutez!) Telle est la doctrine que je
professe, et je crois que les bon. messieurs
trouveront très difficile de la renverser. Il
a été ensuite prétendu qu'il n'y a aucune
raison d'en appeler au peuple, parce que
dans toutes les élections qui ont en lieu, il
s'est montré favorable au projet. Je ne
connais pas le chiffre des comtés ui ont
fait des élections depuis le mois a juin
dernier.
L'
HON. M. HOLTON—C'est bien; cinquante ou soixante. L'hon. M. président du
conseil à cité l'hon. M. BULL comme ayant
été élu pour appuyer la mesure actuelle, et
un peu plus loin a parlé de l'adversaire de ce
dernier, le Dr. SMITH, comme s'étant déclaré
lui aussi favorable à la mesure en général,
mais qu'il se rencontrait des détails qu'il ne
pouvait approuver, fesant voir ainsi qu'au
moment de l'élection le peuple ne connaissait
aucun des détails de la mesure. Lorsque
mon hon. ami d'Oxford Sud s'est présenté
pour se faire réélire dans son comté, est-ce
qu'il y avait aucun détail devant le peuple?
(Ecoutez! écoutez!) Le rejet d'une fédération générale était alors evant le public,
mais on donnait la prééminence au plan plus
rétréci de la fédération des Canadas, et nul
détail n'avait transpiré. Comment done s'appuyer sur cette élection ou sur aucune
autre,
y compris celles du conseil législatif, à part
peut-être celles de la ville d'Hamilton et de
l'hon. maître-général des postes, qui ont eu
lieu après la publication des résolutions,
pour avancer que le peuple a voté avec connaissance des détails de la mesure? Ces
élections ne prouvent pas plus que le peu le
est en faveur du projet que l'élection des
membres de l'administration MACDONALD- SICOTTE en 1862-ministère formé, comme
on le sait, sur le principe de l'économie et
de la double majorité et en opposition à la
représentation basée sur le chiffre de la
population,—ne prouva que le peuple était en
faveur de ce système ou voulait s'opposer a
ce qu'on fit de la dernière de ces questions
une question ajournée. Il y a encore un autre
point dont je vais parler. L'hon. procureur- général du Haut-Canada, dans le cours
de
sa discussion avec l'hon. député d'Ontario
Nord, a dit que le peu de toutes les provinces ne voulait pas l'union législative.
L'
Hon. Proc.-Gén. MACDONALD—Je
n'ai pas dit cela. L'hon. député parlait des
996
diverses provinces représentées à la conférence de Québec, dont tous les délégués
rejetaient l'union législative.
L'
HON. M. HOLTON—L'hon. monsieur
a dit qu'il était impossible d'inaugurer une
union législative. Or, j'aimerais à savoir
de lui ce qu'il pense de sa sagacité politique
en avouant ce soir qu'il s'est trompé pendant
vingt années de sa vie? N'a-t-il pas déclaré
maintes et maintes fois qu'il voulait une
union législative? A la dernière réunion
du comité constitutionnel de la dernière
session, appelé " comité BROWN," auquel on
attachait beaucoup d'importance, mais qui
en réalité n'en avait aucune; est-ce que
l'hon. monsieur, sur la proposition de l'adoption du rapport du dit comité, n'a pas
voté
contre la fédération sous toutes les formes.
(Ecoutez! écoutez!)
L'
HON. M. HOLTON—La chambre apprit le jour même de la crise qui aboutit à
la formation de la présente coalition, que
l'hon. monsieur avait voté en comité contre
le principe fédéral appliqué soit au Canada,
soit à toutes les provinces, parce qu'il voulait
une union législative. Lui, le chef de cette
chambre, qui se donne comme le politique le
plus sage du pays, avoue aujourd'hui que ce
n'est que depuis le 14 juin dernier qu'il
a compris quel était le meilleur moyen de
modifier la constitution de cette province!
(Ecoutez!) Il ne voulait pas de l'union
fédérale et le voilà qui, au nom du gouvernement, prétend qu'il est absurde de parler
d'union législative, qu'il s'est trompé toute
sa vie et qu'il était impossible de mettre en
pratique ce vues qu'il avait partagées jusqu'au 14 juin dernier! C'est pour rappeler
de tels faits que je me suis levé, M. l' ORATEUR, pour prendre la parole; ç'a été
pour
dire que l'hon. président du conseil n'a
aucunement abordé la question soulevée par
la proposition actuelle; qu'il n'y a pas eu
appel au peuple dans les élections dont on
a parlé sur les détails du projet actuel; que
la question n'a pas été mise devant les électeurs aux dernières élections générales;
que
tout le parti libéral y était opposé comme
moyen de résoudre nos difficultés politiques;
quon n'en a parlé qu'au 14 juin dernier,
que par conséquent le peuple n'a eu aucun
moyen de faire connaître son opinion, et
enfin que nous n'avons pas le droit de
passer outre sans fournir au peuple l'occasion de se prononcer sur une mesure qui
entraîne la déchéance de la constitution.
(Applaudissements.)
M. MAGILL—Ce n'était pas mon intention de prendre ce soir la parole; mais mon
nom se trouvant mêlé au débat, je dirai que
lorsque la question actuelle fut soumise au
peuple de la ville d'Hamilton, il n'y eut
qu'une voix pour se prononcer en faveur de
l'union fédérale. (Ecoutez! écoutez!) Je
crois que le peuple voulait un changement
et j'aurais manqué à mes devoirs envers mes
électeurs si je ne fesais connaître les opinions
que j'ai exprimées il n'y a pas longtemps
devant eux. Je pense que le peuple canadien a été satisfait de la conduite des hommes
publics de ce pays, qu'il a été fier de la fermeté et de l'abnégation qu'ils ont montrées
en
mettant de côté leur intérêts personnels ou
de parti et en s'unissent comme un seul
homme pour le bien du pays. (Ecoutez!
écoutez!) Ils se sont montré disposés pour
le bien et la prospérité de tous à sacrifier
toutes leurs antipathies d'autrefois. (Ecoutez! écoutez!) Mon honorable ami de Wentworth
Sud (M. RYMAL) a parlé des sentiments de ses électeurs; il est possible qu'il
les connaisse mieux que moi, mais, d'après
ce que j'en connais. je puis dire sans hésiter
qu'ils sont fortement en faveur d'une union
de toutes les provinces. (Ecoutez! écoutez!)
Quant à l'élection de l'hon. M. BULL, rien,
suivant moi, ne l'a tant aidé à triompher
que la promesse qu'il a faite d'appuyer le
gouvernement sur cette mesure. Aussi, mon
avis est-il qu'il sied peu a l'hon. député de
Wentworth Sud, l'un des huit députés du
Haut-Canada qui ont voté contre la mesure
actuelle, de parler comme il l'a fait aujourd'hui. Je crois que ce projet sera suivi
des
résultats les plus avantageux. Mon hon.
ami de Wentworth Sud (M. RYMAL) s'est
servi d'une image pour prouver les inconvénients de l'union projetée, et l'a comparée
aux bouts que l'on ajoute à une perche de
ligne; il est dommage que cette comparaison
se soit trouvée défectueuse dans les conclusions qu'il en a tirées. (Ecoutez!) Le
peuple
canadien a, en tout temps, prouvé qu'il possédait cette énergie indomptable qui ne
recule devant rien, et l'union de pareils
matériaux ne peut manquer de lui donner
plus de pouvoir pour résister à l'agression,
conserver et transmettre à ses descendants
les droits et privilège qu'il est si fier de
posséder. (Ecoutez! écoutez!) Ce n'est
pas les affaiblir que de réunir plusieurs
hommes forts ensemble. Qu'est-ce qui a
997
donné à l'Angleterre le nom qu'elle possède
par toute la terre? L'union—et c'est là ce
qui fait la gloire de sa constitution. L'union
ait la force dit une vieille maxime, et je crois
qu'elle sera vraie au sujet de l'union des
provinces anglaises de l'Amérique du Nord.
(Ecoutez! écoutez!)
M. JOLY—M. l'ORATEUR:-—Je regrette
que cette résolution n'ait pas été proposée
plus tôt, quoique je sois content de la voir
proposer maintenant, car elle montrera au
dehors la façon dont on s'y est pris pour faire
voter le rejet à cette chambre Lorsque le
peuple des provinces d'en-bas et d'Angleterre verra la répugnance du gouvernement
à permettre au peuple de se prononcer sur
ce projet au moyen d'élections générales, la
manière dont on s'y est pris pour faire voter la
mesure par une si grande majorité dans les
deux chambres cessera d'être un mystère
pour personne. (Ecoutez! écoutez!) La
chose est d'autant plus importante qu'on ne
peut pas s'attendre à ce que des gens vivant
hors de ce pays entendent mieux nos affaires
que nous les leure. Comme exemple de la
manière dont on peut se tromper sur les
sentiments d'un autre peuple, je citerai
l'hon. ministre d'agriculture (M. MCGEE),
qui prétendait si bien connaître les provinces
d'en-bas qu'il n'hésitait à prédire que le
résultat des élections du Nouveau-Brunswick serait en faveur de la confédération;
or, l'évènement ayant détruit ses prédictions,
nous avons tous pu l'entendre essayer de
nous expliquer comment il se faisait que
cela était du aux tendances annexionnistes et
à l'influence des idées américaines.
M. JOLY.— D'un autre côté, tous ceux
qui s'opposent au Canada au projet de
confédération sont accusés des mêmes tendances annexionnistes que le peuple du Nouveau—Brunswick.
C'est vraiment chose
extraordinaire de voir de quelle façon différents individus professant la même politique
peuvent envisager le même point de
vue d'une question. (Ecoutez!) Je viens
d'être frappé de quelques lignes assez singulières du
Daily News de cette ville. (L' hon.
député lit un passage d'un article du
Daily
News du 10 mars, au sujet de l'abolition du
system des passeports, et continue ensuite
son discours.) Il a deux manières d'envisager ceci. Voici un journal qui appuie le
gouvernement, et qui dit que si les provinces
d'en—bas n'ont pas été débarassées du système
des passeports comme le Canada, c'est que
leurs relations avec les Etats—Unis ne sont
pas aussi bonnes que les nôtres. Car ce n'est
que depuis que nos relations sont devenues
amicales avec nos voisins, depuis que nous
avons voté la loi des aubaine et les fonds enlevés aux banques de St. Alban, ce n'est
que
depuis que nous nous sommes courbés devant
eux que nous avons obtenu l'abolition de ce
système restrictif Les provinces du golfe
s'étant montrées plus fermes, le gouvernement des Etats—Unis a refusé de leur faire
la
même concession. Je crois donc qu'on se
trompe en disant que la défaite des amis de
la confédération au Nouveau—Brunswick est
due à l'influence ou aux tendances annexionnistes. Les seuls actes que nous ayions
faits
envers l'étranger ont été la passation de la
loi des aubaine et la remise des fonds pillée
dans les banques de St. Alban: c'est à cet
égard que nos relations avec les Etats—Unis
sont plus amicales et plus étroites que celles
des provinces du golfe. Il me semble donc bien
plus raisonnable de supposer que l'influence
américaine a subi un échec pluto qu'elle n'a
triomphé au Nouveau—Brunswick. L'hon.
président du conseil explique la différence
qu'il y a entre le Canada et le Nouveau- Brunswick au sujet de l'opportunité de nouvelles
élections générales, en disant que les
élections n'ont eu lieu dans cette dernière
province que parce que le terme de la légisature était sur le peint d'y expirer. Mais,
la présente session aurait été également notre
dernière si le projet de confédération était
devenu loi, et c'est pourquoi en supposant
que le projet de confédération fut entré en
opération aussitôt que le gouvernement l'espérait, nous nous serions trouvés exactement
dans la méme position que le Nouveau- Brunswick au sujet des nouvelles élections.
Les mêmes raisons qui existent là existent
ici aussi, et on n'a pas de meilleures raisons
à faire valoir pour refuser au peuple canadien
de se prononcer sur le projet qu'aurait en le
Nouveau—Brunswick pour refuser une dissolution de la législature de cette province.
Lorsque nous voyons le gouvernement de
cette dernière province disposé à donner au
peuple l'occasion d'exprimer son opinion, en
ne peut s'empêcher de réfléchir sur la façon
différente dont nous sommes traités. (Ecoutez! écoutez!) L'hon. président du counseil
a fait allusion a la majorité des Canadiens—Français qui avaient voté le projet; or,
le vote a été de vingt-six contre vingt—deux,
et parmi ces vingt—six sa trouvent trois
998
membres de l'administration qui ont combiné
le plan et qui sont tellement intéressés dans
le résultat du vote, qu'en toute justice ou
peut bien ne pas en tenir compte. Cette
déduction faite, il ne reste plus que vingt- trois contre vingt-deux.
L'
HON. Proc.-Gén. CARTIER—Mais si
vous faites abstraction des membres du gouvernement, vous deves également faire abstraction
des chefs de l'opposition. (On rit.)
M. JOLY—Je ne crois pas, parce qu'ils
n'étaient pas plus intéressés dans l'affaire
que les autres députés de cette chambre. Et
puis, sur ces vingt-six, il s'en trouve au moins
six dont la conduite a été condamnée
de la manière la plus directe par leurs électeurs dans des assemblées publiques tenues
expressément dans le but de considérer la
question de la confédération. Je citerai
entr'autres les députés de Joliette, Rouville,
Chambly, l'Assomption, etc. Ainsi donc, en
prenant l'élément canadien-français et en
envisagent les choses à leur juste point de
vue, on verra que ses représentants sont à peu
près divisée l'élement et qu'il serait assez difficile de dire si la majorité du peuple
est avec ou
contre ses représentants dans cette enceinte.
Il est impossible de connaitre en ce moment
l'opinion des Canadiens-Français si on ne leur
donne pas l'occasion de l'exprimer par des
élections générales. Ils forment un peuple
d'environ un million et ont par conséquent
droit d'être consultés sur ce projet autant
que les provinces du golfe, et n'y aurait-il
que ce motif pour justifier des élections générales qu'il faudrait y recourir. J 'afirme
que
la rapidité avec laquelle ce projet a été placé
devant la chambre et voté nous a pris par
surprise. On nous a dit que nos chefs n'ayant pas voulu consentir à un arrangement
avec le Haut-Canada pour régler les demandes
en tout ou en partie de ce dernier, le projet
nous avait été imposé; mais si cette alternative nous avait été offerte plus tôt,
je n'ai
pas le moindre doute qu'il eut été possible
de nous entendre avec nos amis du Haut- Canada dans une mesure de conciliation qui,
sans vouloir contenter tout le monde, nous
aurait cependant rapprochés les uns des
autres. Le principal grief du Haut-Canada
était, par exemple, que contribuant pour les
deux tiers au revenu public il n'avait de
contrôle que sur la moitié des dépenses:—
je ne dirai pas que j'aurais accepté la représentation basée sur la population de
préférence à ce projet de confédération, mais
j'avouerai que je trouve la réclamation du
Haut-Canada au sujet des finances, juste et
équitable. Telle est mon opinion comme
membre de cette chambre. Je serais très disposé à accepter un plan qui donnerait au
Haut-Canada une plus grande part dans les
dépenses, d'accord avec l'excédent de se population, et ne craindrais pas de courir
les
chances d'une ré-élection après cette déclaration. (Ecoutez! écoutez l) Sans doute,
il
se trouverait en Haut-Canada un certain
nombre que cela ne satisferait point encore:
pour ma part, je ne crois pas avoir le droit de
leur offrir davantage Je veux prouver que
les Bas-Canadiens n'ont pas assez perdu le
sentiment de justice pour refuser de reconnaître ce principe et ne sont pas aussi
éloignés de faire des concessions aux Haut- Canadiens que ceux-ci se l'imaginent.
Si
nous aussions été informés de ce qui se préparait, je crois qu'il nous eut été facile
de
combiner quelque arrangement pour tomber
d'accord avec le Haut-Canada et augmenter
sa part de contrôle sur le trésor public, plutôt
que l'être forcés d'accepter ce projet de confédération. Le motif le plus puissant
qui ait
été donné pour passer cette mesure, est que
les relations du Bas et du Haut-Canada
avaient atteint une phase telle que le gouvernement du pays ne pouvait plus fonctionner
en paix et dans l'ordre. Je ne crois pas
qu'il en soit ainsi, ni que le Haut-Canada
soit prêt a se lancer dans la guerre civile, pas
plus qu'aucun député de cette partie de la
province soit sous l'impression qu'il n'est
plus possible d'obtenir justice par des
moyens constitutionnels. Il me répugne de
penser qu'aucun d'eux ait songé à venir
ici décidé à revendiquer les droits du Haut- Canada par le meurtre, l'effusion du
sang et
la guerre civile; c'est pourquoi. je suis
d'avis qu'il est bien malheureux que l'hon.
président du conseil ait essayé de nous
effrayer en se servant de telles expressions.
L'
HON. M. BROWN — L'hon. monsieur
fait erreur, car jamais je ne me suis servi
de telles expressions en défendant les droits
du Haut-Canada.
M. JOLY—J'en demande pardon à l'hon.
monsieur, mais je l'ai entendu se servir de
ces expressions plusieurs fois dans cette
enceinte.
L'
HON M. BROWN—Ce doit être alors
que je parlais de la guerre des Etats-Unis.
M. JOLY — L'hon. monsieur nous a certainement dit dans son discours à l'ouverture de ces
débats que le pays était à la
veille d'étre plongé dans la guerre civile
999
L'
HON M. BROWN—Ce n'est certainement pas moi, et l'hon. monsieur fait erreur
de personne. L'hon. deputé de Richelieu
s'est servi d'expressions e ce genre; quant
à moi, jamais je n'ai prononcé de telles
paroles au sujet de nos difficultés constitutionnelles.
M. PERRAULT — En effet, j'ai dit que
la constitution telle qu'elle était pouvait
nous suffire encore des siècles sans avoir à
redouter la guerre civile. (On rit.)
L'
HON M. BROWN — Eh bien! l'hon.
député devrait retirer ce qu'il a dit de moi,
jusqu'à ce qu'il le prouve. Ce n'est pas
l'hon. premier qu'il a accusé d'avoir employé les mots de guerre civile au sujet de
ce pays, mais moi-méme.
M. JOLY.—Je sais ce qu'un hon. député
de cette chambre doit un de ses collègues, et
je retire avec plaisir ce que j'ai avancé puisque
je n'ai passous la main le compte-rendu du discours de l'hon. monsieur; mais, j'attirerai
son
attention sur le sujet aussitôt que je pourrai
lui prouver la vérité de mon assertion. J'ai
toujours été sous l'impression qu'il s'était
servi de ces expressions (Ecoutez! écoutez!)
Cependant, j'ai la même accusation à porter
contre un membre de la même administration et qui occupe encore une plus haute
position dans le conseil. Voici es expressions du chef du gouvernement en s'adressant
à la chambre haute; — à la neuvième
page des
Débats Parlementaires sur la Confédération, je trouve le passage suivant de
l'hon. chevalier et premier ministre:
"Dans le temps où ces mesures furent gaitées,
le pays était réellement à la veille d'une guerre
civile, et je demanderai si ce n'était pas le devoir
des deux partis de la chambre de faire tout ce qui
était en leur pouvoir pour prévenir les résultats
malheureux qui s'en seraient suivis."
Je le repete, il est trés malheureux
d'entendre les hon. ministres, dépesitaires
de la réputation du pays, faire connaître
au monde entier que le Canada que
l'on s'était plu à regarder comme un
pays libre, heureux et prospère, était à la
veille de la guerre civile; et c'est d'autant
plus malheureux, que je me suis trompé sur
la personne qui a fait usage de ces expressions, car au lieu de l' hon. président
du
conseil c'est à l'hon. premier ministre qu'il
faut attribuer ces paroles. Si le premier de
ces hon. ministres avait dit ne que chose
approchant de ce dont je n'aurait pas nié
comme il l'a fait, et qu'il aurait plutôt
regardé au sens de mon accusation qu'à la
lettre. Mais je ne fatiguerai pas davantage
l'attention de la chambre. J'ai voulu dans
les quelques paroles que je viens de prononcer montrer par quels moyens peu honorables
le gouvernement avait réussi à faire
voter sa mesure de confédération par la
chambre. (Applaudissements.)
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD —Je
crois, M. l'ORATEUR, que mon hon. ami qui
vient de porter la parole, s'est trompé sur le
sens d'un mot anglais dans l'accusation qu'il a
dirigée contre l'hon. président du conseil au
sujet de la guerre civile, et que ses observations ont été peu parlementaires en ce
qu'elles avaient trait aux débats de l'autre
branche de la législature. (Ecoutez! écoutez 1)
Il a accusé mon hon. ami d'avoir dit que le
pays était à la veille d'une révoluion et d'une
guerre civile; mais en cherchant des preuves
il s'est trouvé que les mots sur lesquels il a
basé son accusation ont été proférée par un
autre orateur dans l'autre branche de la
législature. Le passage qu'il cite parle d'un
état de troubles civils: mais il n'y a la rien
que de très-vrai Ne sommes-nous pas dans
les troubles, et les disputes et les contentions
civiles depuis bien des années? Une élection
est un trouble civil, une poursuite judiciares
est un trouble civil, mais la guerre en est
un des moins civils.
L'
Hon. J. S MACDONALD—Mon hon.
ami veut-il ranger les poursuites judiciaires
dans la classe des troubles civils?
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD - Il
est vrai que ces poursuites sont parfois inciviles, et mon hon. ami sait ce qui en
est car
c'est à ce genre de troubles qu'il s'engraisee.
(Rires.)
M. JOLY—Je prendrai la liberté de demander comment l'hon. monsieur appelle la
guerre des Etats-Unis: n'est-ce pas là des
troubles civils? (On rit.)
L'
HON. M. BROWN —Non, non, non;
c'est une guerre civile, parce que c'est la
nation qui se fait la guerre.
M. JOLY—Je ne crois pas néanmoins
qu'on se trompe en l'appelant troubles civils,
car je regarde ces termes comme synonimes.
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD—La
guerre qui sévit en ce moment aux Etats- Unis, est une guerre des plus désastreuses
et des plus barbares, et le mot trouble ne dit
pas assez pour l'exprimer. J'ai déjà expliqué
la valeur de ce terme et maintenant que mon
hon. ami voit son erreur, il abanonnera,
1000
j'espère, la guerre qu'il fait au gouvernement.
(Ecoutez! écoutez!) M. l'ORATEUR, au
nom du caractère de cette chambre et de
l'économie publique, je dois protester contre
la direction prise par le débat qui s'est élevé
sur la proposition de mon hon. député de
Peel. Je croyais la discussion terminée, et
comme chacun avait eu la faculté de prendre
la parole plusieurs fois, le débat se trouvait
clos par un vote de la chambre extrêmement
favorable au gouvernement auteur de la
mesure, de sorte qu'il était généralement
compris que l'on avait fini de discuter le sujet
de la confédération; (écoutez!) mais ne
voilà-t-il pas que les observations des hon.
messieurs de la gauche tendent à rouvrir
la discussion, et cela après que la chambre
a décidé sur ma proposition de nommer un
comité, chargé de rédiger l'adresse dans
laquelle doivent entrer les résolutions votées?
En verité, monsieur, c'est la ce que j'appelle
un abus des priviléges parlementaires, une
perte de temps pour la chambre et un gaspillage des deniers publics, qui ne doivent
aboutir à rien: aussi, m'est—il permis d'espérer que la chambre ne permettra pas que
cela continue. Mais il est une chose que je
regrette surtout, c'est que malgré la longueur
des débats, et parmi tous ceux qui ont parlé,
nous n'ayons pas eu l'avantage d'entendre
les arguments que nous avait promis mon
hon. ami de Chateauguay sur la question.
(Ecoutez! écoutez!) Pour une raison ou
pour une autre, nous en avons été privés.
Semblable à Moïse qui, ayant gravi le sommet
de Pisgah, aperçoit dans le lointaiu le sol de
la terre promise, l'hon. député ne nous a
laissé entrevoir que quelques—unes des lueurs
de son discours promis, et nous a laissés pour
le reste dans le plus amer désappointement.
On nous l'a cependant promis eux ou trois
fois durant le cours du mois dernier, et l'hon.
député devrait se rappeler que " l'espoir
remis rend le cœur malade." J'aurais voulu
jouir du plaisir et de l'avantage d'entendre
les remarques que l'hon. monsieur aurait pu
faire, car, quoique jeune d'années, il est déjà
vieux en sagesse politique, et passé maître
en cette sagacité politique qu' s'obstine à
me refuser. Je le répète, je suis fiché, et
la chambre doit l'être aussi de même que
tout le pays, que l'hon. monsieur ait poussé
l'abnégation si loin que de ne pas permettre
à son esprit de jeter quelqu'éclat nouveau
sur la question. J'ai toujours cru que ce
qui neutralisait beaucoup le talent de l'hon.
monsieur était son extrême modestie. (Rires)
Eh! quoi, lorsqu'il se vit obligé de
venir au secours de notre trésor ruiné, au
moyen de grands sacrifices personnels, afin de
sauver le pays de la banqueroute où l'avaient
amené les folles extravaganees de mon hon.
ami le ministre actuel des finances, et qu'avec
le talent de financier qui le distingue, après
avoir scruté tous les recoins de la caisse
publiqne, il eût découvert où était le mal
dont le pays se plaignait, qui ne sait que
c'est ce moment que sa modestie avait chosi
pour lui fermer la bouche et l'empêcher de
nous enseigner le remède? (Rires.) Le même
cas se renouvelle encore aujourd'hui. Il nous
a promis de nous faire connaître ses vues sur
la question; nous avons passé quatre semaines
à l'attendre, et voilà qu'aujourd'hui il se lève
et, avec cette noble indignation qu'il sait si
bien jouer il nous dit que l'hon. proc.-gén.
du Haut-Canada a essayé de suspendre la
publication des débats, qu'il a lui-même à
faire sur la question un discours qu'il n'a
pu prononcer samedi dernier à cause de
l'heure avancée, tout cela en annonçant qu'il
va se borner à parler de la résolution actuelle.
C'est ce qu'il a fait, il faut avouer qu'il s'est
en effet très-borné à cette seule chose.
(Ecoutez! écoutez!) Et puis, je ne sais ni
comment ni pourquoi, mais l'hon. député
s'est constitué le gardien de ma réputation
publique. Voilà deux ou trois fois qu'il
m'avertit que la conduite que je tiens est
peut—être celle d'un homme pratique, celle
d'un homme qui veut simplement rester au
pouvoir et être renommé pour son habileté
publique, mais que jamais elle ne m'assurera
la réputation d'un grand politique. Eh
bien! M. l'ORATEUR, je me contente en effet
de me borner aux choses pratiques et à assurer au pays les mesures pratiques qu'il
demande; quant à la réputation homme à
système et à idées visionnaires aboutissant
tantôt a l'annexion, tantôt ». la fédération et
tantôt à l'union législative et toujours à des
utopies irréalisables, je l'abandonne à l'esprit
poétique et plein d' imagination de l'hon.
député de Chateauguay. Cet hon. monsieur,
dans le cours de l'un de ses tits et nombreux
discours d'occasion, a dit l'autre jour qu'en
me déclarant pour l'union fédérale au lieu
de l'union législative, j'avais foulé aux pieds
tous les principes de mon passé à ce sujet.
Il est vrai M. l'ORATEUR, que l'examen
approfondi de la constitution des Etats-Unis
dans son fonctionnement et dans la guerre
civile qu'elle a causée m'ayant convaincu des
nombreux endroits faibles du système fédéral
1001
en ce pays, j'ai voulu, autant ne qui que ce
soit dans la conférence de Québec, éviter ces
défauts de la constitution américaine dans la
nôtre et la rapprocher le plus possible de la
forme législative. Je n'aime pas à rappeler
ce que j'ai dit autrefois; mais, comme on
m'a accusé, je lirai, avec la permission de
cette chambre, un passage de l'un de mes
discours sur la représentation basée sur la
population, et j'ajouterai que c'est peut- être le seul de ma vie que je me sois donné
la
peine de reviser. Ce passage montrera a
mon hon. ami ce que je pensais de la question actuelle en 1861, et il était fait en
réponse a un discours de mon collègue actuel,
l'hon. ministre de l'agriculture:—
"Le seul plan possible qui s'offre il moi
de remédier aux maux dont on se plaint, est
une confédération de toutes les provinces, (écoutez! écoutez!) non pas cependant telle
qu'elle
existe par delà la frontière, car elle n'a pas
réussi. Et, en disant cela, je n'exprime aucune
satisfaction qu'il en ait été ainsi; au contraire,
je suis d'accord avec l'un des députés de Montréal (l'hon. M. MCGEE) et me joins aux
regrets qu'il a exprimées de l'état de choses lamentable qui y règne, car le même
sang coule dans les
veines du peuple américain et dans les nôtres. Je
crois en de meilleurs jours pour les Etats-Unis; il y
a dans le caractère et les institutions angle-saxons
des Etats-Unis une vigueur, une vitalité qui leur
fera traverser cette grande convulsion comme elle
n' jadis fait traverser les mêmes époques à la métropole. (Vifs applaudissement des
deux côtés de
la chambre.) J'espère avec l'hon. monsieur (M.
MCGEE que si la république se scinde en deux,
ce qui devra arriver, ce sera deux nations grandes
nobles et libres qui existeront au lieu d'une.
(Ecoutez! écoutez!) Cependant, malgré mes
sympathies, tâchons de profiter de l'enseignement
que cette leçon nous donne et n'allons pas nous
briser sur le même écueil. Leur erreur fatale,
erreur qu'ils ne purent peut-être pas éviter par
suite de l'état des colonies à l'époque de la révolution fut de faire de chaque état
une souveraineté distincte et de lui attribuer un pouvoir
souveraln distinct à l'exception des cas spécialement réservés par la constitution
au gouvernement général. Le principe véritable qui doit
servir de base à une confédération, consiste à
donner au gouvernement général toutes les attributions et les pouvoirs de a souveraineté,
et aux
états subordonnés ou séparés ceux seulement qui
leur sont expressément délégués. Nous aurions
de cette manière un gouvernement central fort,
une législature centrale puissante et un système
décentralisé de petites législature pour les fins
locales.
Telles étaient, M. l'ORATEUR, les opinions
que j'avais en 1861, et je dis que la constitution que cette chambre a votée, à une
majorité de trois contre un est, esprit et
lettre, celle dont je parlais alors. Qu'on
remarque bien, cependant, que ce n'a pas été
là le résultat de mon expérience, de mes
méditations et de mes idées à moi seul, mais
de l'expérience, des méditations et des idées
de tout homme qui a étudié le caractère de
la constitution des Etats-Unis. Je sais fort
bien que je tombe en ce moment dans la
faute que je viens de reprocher aux hon.
députés de revenir sur la discussion, mais
j'ai cru que je me devais à moi-méme de
lire cet extrait à la chambre, parce que l'hon.
député de Chateauguay, avec ce langage plein
de douceur et d'amabilité qui plait tant,
(rires) m'a reproché d'avoir renié mon passé
politique en proposant l'union fédérale des
provinces, et que c'est là ce qui a rendu
mon discours si faible lorsque j'ai déposé les
résolutions actuelles devant la chambre. Je
suis bien disposé à reconnaître la faiblesse
et le peu d'effet de mon discours; mais quant
à mes opinions sur la confédération, elles ont
été celles de ma vie, celles que j'exprime en
parlement depuis des années, que j'ai portées
à la conférence et que je défends encore
dans le moment actuel. (Ecoutez! écoutez!)
M. l'ORATEUR, je m'incline, avec toute la
déférence possible devant la décision que vous
avez rendue, que la proposition de l'hon.
député de Peel est dans l'ordre; mais
c'est un point si douteux que je ne devrais pas
exprimer d'opinion contraire à la vôtre, car
l'on sait que chacun est enclin à décider en
sa faveur les cas douteux. Il eut été fort
agréable au gouvernement de voir cette proposition déclarée hors d'ordre, et c'est
peut- être ce qui nous a fait adopter une opinion
moins impartiale que la vôtre: aussi, nous
sommes—nous fait un devoir d'obéir à votre
décision du moment que nous avons cru que
notre conscience ne nous fesait pas voir à
l'évidence que vous vous trompiez. La proposition ayant été déclarée d'ordre, je dirai,
néanmoins. qu'elle est tout à fait incompatible avec les votes de son auteur sur la
question de la confédération. (Ecoutez!
écoutez!) Je ne puis comprendre qu'un
hon. député, après avoir une semaine voté
deux fois de la même manière sur la même
question, puisse faire la proposition d'amendement dont nous nous occupons en ce
moment. (Ecoutez! écoutez!) Il est bien
vrai que je l'ai entendu dire qu'il ne donnait
pas à sa proposition l'effet d'un amendement,
mais qu'il la considérait comme une proposition séparée et indépendante: je regrette
cependant qu'après avoir résolu d'appuyer la
1002
mesure du gouvernement il n'ait pas jugé à
propos d'approuver les moyens de la mettre
à exécution, et ne se soit pas rendu à mon
invitation de faire sa proposition à la chambre
d'une manière distincte et séparée au lieu
d'en faire un amendement à l'adresse qu'il a
lui même votée. (Ecoutez! écoutez!) Tout
en exprimant le regret que me cause la conduite de mon hon. ami, je dois en même
temps le féliciter de la solidité des arguments de son discours; car, cussions—nous
demandé, la chambre eut-elle demandé un
argument en faveur de la mesure ministérielle mise devant la chambre qu'ils nous eût
été difficile d'en trouver un plus éloquent et
plus serré que celui qu'a adopté mon hon.
ami dans son discours sur la confédération.
Mon hon. ami est toujours éloquent et
toujours convaincant, mais il s'est surpassé
dans ce discours.
L'
HON. Proc.-Gén MACDONALD—
C'est peut-être un compliment, mais ce n'est
pas une flatterie. Un compliment est l'expression d'une vérité agréable; une flatterie
est l'expression d'un mensonge agréable. Si,
par exemple, je disais que mon hon. ami de
Cornwall a fait un discours plein de force et
d'éloquence, je me rendrais coupable d'une
flatterie (on rit); mais en disant en toute
sincérité que l'bon député de Peel a fait un
tel discours, je puis faire un compliment,
mais non une flatterie. (Ecoutez! écoutez!)
Cependant, ce qui m'a le plus étonné ç'a été
de voir que mon hon. ami tout en déclarant
qu'il n'était pas homme a faire de propositions
inconstitutionnelles ou tendant a enfreindre
les usages constitutionnels, mais ne voulant
rien autre chose qu'un appel au peuple,
s'oppose néanmoins à la motion devant la
chambre; et je sais, qu'en effet, mon hon.
ami n'est pas homme à commettre d'erreur
fondamentale contre les institutions constitutionnelles et libres. Il savait bien,
et cela
fait honneur à sa réputation de juriste
constitutionnel, ne quoiqu'il eut a rédiger
sa proposition à a hate il devait en la présentant se mettre en garde contre les erreurs;
aussi, a-t-il pris soin que l'appel au peuple
proposé sur cette question fut un appel
constitutionnel par a voie des élections.
(Ecoutez! écoutez!) Mais, alors, pourquoi
le député qui a secondé la proposition et
qui a demandé à la chambre de la voter, a-t-il
dit qu'il n'en croyait pas un mot? (Rires.)
Sa première phrase ne veut rien dire autre
chose; en effet, il nous a dit qu'il voulait
soumettre la question directement au peuple
et la lui faire voter par oui ou non, et non
de la manière proposée par l'hon. député de
Peel, qui est—cependant la seule qui soit
conforme à notre constitution.
M. M. C. CAMERON—Je ne suis pas
du tout disposé à voir le sens de mes paroles
torturé par mon hon. ami. J'ai dit que je
ne considérais as ce moyen comme le seul
de s'assurer de l'opinion du peuple, ni que je
croyais erroné de le faire voter par oui ou
non sur la question.
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD—Il
n'en est pas moins vrai que mon hon. ami de
Peel demande que l'appel soit fait d'une
manière constitutionnelle, et que l'hon.
député d'Ontario Nord en préfère une
autre. Comment mon hon. ami peut—il croire
qu'on puisse faire voter de cette manière
dans un pays dont la constitution est calquée
sur celle de l'Angleterre? Par quel moyen
admis et reconnu par notre constitution
pourrions-nous prendre un tel vote? Il n'y en
a pas, et pour le faire il nous faudrait
fouler aux pieds les principes de la constitution anglaise. L'hon. monsieur sait qu'il
n'y a pas moyen de faire autrement. Nous
pourrions sans doute passer une loi déclarant
que le peuple votera oui ou non sur la
question, mais cette loi serait elle-même un
changement dans notre constitution, et j 'aimerais à voir un représentant de Sa Majesté
en cette province disposé à sanctionner une
mesure de cette espèce, une mesure qui
serait le renversement des principes du gounement constitutionnel anglais! M. l'ORATEUR,
nous sommes ici les représentants du
peuple et non ses délégués, et en donnant
notre concours à une telle ici nous nous
dépouillerions de notre caractère de représentants et adopterions une ligne de conduite
que désapprouverait mon hon. ami de Chateauguay, bien qu'il soit prêt à l'appuyer
de
son vote sur les instances des autres. Cet
hon. député connait trop bien les principes
de la constitution anglaise pour appuyer
lui-même un tel procédé, mais il encourage les autres à le faire et à dire ce qu'il
n'oserait avancer lui-même. (Ecoutez! écoutez.) Un appel direct au peuple sur une
question de cette espèce peut bien être le
moyen que prend un despote, un monarque
absolu, pour faire sanctionner son usurpation par le peuple:—ce peut-être de cette
manière qu'un despote soutenu de baïonnettes peut demander au peuple de voter
1003
oui ou non sur les mesures qu'il propose,
mais dans les pays libres soumis à une constitution, tout vote doit être reçu par
les
autorités constituées, les représentants du
peuple, et ne pas devenir un vaine forme
pour dissimuler la tyrannie mais une mesure
conforme au jugement calme et délibéré
du peuple exprimé par ses députés. (Ecoutez! écoutez.) Je ne cacherai que je fus un
peu effrayé en parcourant l'avis de motion
donné par mon hon. ami de Peel, qu'il ne
voulût prendre la ligne de conduite conseillée
par l'hon. député d'Ontario Nord, sa teneur
ne définissant rien à ce sujet. J'avais
néanmoins confiance dans les principes constitutionnels, les principes conservateurs,
de
l'hon. monsieur, en dépit du manque de
clarté de ses expressions: aussi, quelle ne fut
pas ma satisfaction de lui entendre lire sa
proposition à la chambre dans sa forme
actuelle. J 'admets que tout hon. député
de cette chambre pouvait proposer qu'elle
fut dissoute ou non, et que l' hon. député
de Peel avait le droit de faire cette
proposition afin de renvoyer la question au
peuple, et je fus soulage de mon anxiété
lorsque je vis que c'était en effet ce qu'il
proposait, de même que je regrettai de voir
l'hon. député d'Ontario Nord se souvenir si
peu de ses anciens principes conservateurs
et conseiller la voie différente. Or, nelle est
l'opinion sur ce suiet en Angleterre? J'ai eu
le vif plaisir de lire dernièrement un compte- rendu d'un discours renoncé devant
les
électeurs de Huddersfield par M. LEATHAM,
député au parlement impérial, beau—frère, je
crois, de M. JOHN BRIGHT, et disciple de
cette classe d'économistes libéraux avancés
connue sous le nom d'école de Manchester.
Quoique nourri des doctrines de cette école,
cet homme distingué n'en a pas moins pris
la parole devant les électeurs les plus radicaux peut-être de toute l' Angleterre,
et s'est
élevé avec force contre le bill de tempérance facultative, ressemblant à celui qu'a
fait passer ici l'hon. député de Brome (M.
DUNKIN), parce qu'il prétendait qu'il était
inconstitutionnel de remettre au peuple le
pouvoir de voter directement sur une loi
avant de la laisser venir en opération. Il
prétendit que la responsabilité de voter
une mesure était tout entière à la chambre
et non au peuple. Or, si un libéral aussi
avancé que M. LEATHAM admet ce principe,
il est facile d'en conclure quelle est l'opinion
de la majorité en Angleterre. Permettez- moi de citer un court passage du discours
de M. LEATHAM. Ce passage est, selon
moi, rempli de hauts enseignements. Je le
trouve cité dans un article du
Times que
voici:—
"L'argument de M. LEATHAM a ce sujet est
digne d'attention, parce qu'il s'applique non seulement à la question de la temérance
obligatoire,
mais à une foule d'autres. " Dans un gouvernement représentatif, dit-il, il est essentiel
que la
classe des électeurs, qui est la même que celle
des contribuables, n'ait pas de pouvoir législatif
direct, et, dans la représentation parlementaire,
le principe représentatif même ne doit pas seul
légiférer. Les droits et la propriété du peuple
Anglais sont protégés par les prérogatives de la
couronne, les privilèges des lords et l'autorité
d'une assemblée représentative, qui composent le
triple bouclier par lequel sont protégés les droits
du plus humble sujet dans le royaume. Mais
voici une proposition qui, dans sa simplicité révolutionnaire, a pour but de confier
la propriété et le
maintien des droits d'une classe nombreuse et des
parlements microscopiques, homogènes, démocratiques et sans responsabilité, répandus
dans le
pays au lieu d'un parlement central, complet et
constitutionnel. Il me semble que cette propositions attaque dans sa racine le système
représentatif."
Telles sont, M. l'ORATEUR, les paroles
d'un des réformistes anglais les plus avancés.
Ces paroles sont d'une haute portée et doivent.
faire réfléchir tout admirateur des institutions représentatives qui veut éviter la
ruine de ces institutions dans ce pays et
faire des représentants de simples délégués sans pouvoirs. (Ecoutez!) Pourquoi
sommes-nous envoyés ici!—N'est-ce pas
dans la supposition que nous sommes prêts à
raisonner, à. comparer notes et documents
pour arriver à une sage détermination? Et,
en hommes honnêtes et consciencieux, nous
changerons d'opinion toutes les fois que nous
serons convaincus que nous sommes dans
l'erreur. Mais si on adoptait l'autre principe et si, au lieu d'étre cs représentants,
nous n'étions plus que de simples délégués,
nous n'aurions plus qu'à voter les mesures
sans aucune discussion et d'après les instructions de nos électeurs. (Ecoutez!)
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD—
Elle n'a pas été votée sans discussion, et les
hon. membres ont en toute liberté d'exprimer
leur pensée avant le vote. Je disais, M.
l'ORATEUR, que l'hon. membre pour Peel
en proposant cet amendement, après avoir
voté pour les résolutions, n'a pas fait preuve
de beaucoup de logique. Que signifient en
effet les résolutions? L'hon. monsieur a voté
1004
pour une adresse à la Reine la priant de faire
mettre devant le parlement impérial une
mesure pour l'union des colonies anglaises de
l'Amérique du Nord d'après les principes
adoptés par la conférence de Québec. Il a
donné ce vote parce qu'il approuvait la proposition, et si nous avions suivi la pratique
du parlement anglais, l'adresse serait maintenant expédiée en Angleterre pour être
soumise à l'approbation de la Reine. Dernièrement, en a adopté un nouveau mode de
procéder qui consiste à renvoyer l'adresse à
un comité lequel fait rapport à la chambre.
Mais j'en reviens à la motion de mon hon.
ami; par son vote, il a aflirmé que l'adresse
en question devait être soumise à Sa Majesté;
par cet amendement, il affirme qu'elle ne doit
pas être envoyée; il y a contradiction flagrante et cela m'étonne de la part de l'hon.
monsieur.
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD —
Uniquement parce que l'ORATEUR en a ainsi
décidé; mais je maintiens que la motion de
mon hon. ami est en contradiction flagrante
avec son vote.
L'
HON. J. H. CAMERON—Mon hon.
ami prétend que c'est une affaire de forme
de renvoyer à un comité une adresse adoptée
par la chambre, et que la chose est ainsi considérée en Angleterre. Qu'il me permette
de lui rappeler que le 7 février dernier
l'adresse en réponse au discours du trône
fut unanimement votée, puis renvoyée à un
comité qui la présente de nouveau, et qu'alors
M. SCULLY proposa un amendement à
l'adresse au sujet de l'Irlande. (Ecoutez!)
L'
HON. J. H. CAMERON—Oui, un vote
unanime, je puis d'ailleurs, si mon hon.
ami le désire, lui citer un autre cas.
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD—Si
M. SCULLY eût été présent lors du premier
vote sur l'adresse, il aurait, sans doute,
voté contre. C'est la première fois que
je vois un hon. membre voter pour une
motion, puis proposer un amendement;
j'ai cru, dès l'abord, qu'un pareil procédé
était contre la règle parlementaire, l'ORATEUR
en a décidé autrement, et je m'incline devant
sa décision. Pour noi l'hon. membre n'a- t-il pas, dès l'abord, voté contre l'adresse,
puisque pour une raison ou pour une autre
il ne voulait pas qu'on la présentàt à Sa
Majesté? Il a d'abord voté pour une adresse
à la Reine la priant de mettre devant le parlement impérial une mesure ayant pour
objet
la confédération des colonies basée sur les
résolutions de la conférence de Québec;
mais, un instant après, il se lève et, comme
l'enfant qui souffle sur un château de cartes,
fait motion pour une adresse à Son Excellence le gouverneur-général, lui demandant
de ne point envoyer à la Reine l'adresse qu'il
venait de voter. (Ecoutez!) Il a d'abord
voté une adresse à la Reine, puis il ne veut
plus de cette adresse, il veut que la chambre
soit dissoute et que l'adresse soit présentée à la. Reine par un autre parlement.
(Ecoutez! écoutez!) Or, à mon avis, c'est la
faire une insulte à la Reine. L'inconséquence
de mon hon. ami avec lui-même est donc
palpable. (Ecoutez!) M. l'ORATEUR, je
n'aborderai point la question de l'appel au
peuple. Le petit paragraphe que j'ai cité
du discours de M. LEATHAM contient, a cet
égard, la solution la plus sage, qui a été
appuyée par les hommes politiques les plus
éminents d'Angleterre a différentes époques.
PITT et les hommes d'état les plus célèbres
en Angleterre, ne se sont jamais arrêtés à
cette idée. Mon hon. ami rappelle que lors
de l'union de l'Ecosse avec 'Angleterre ou
a fait appel au peuple. Mais il sait bien
qu'à cette époque les institutions représentatives de l'Ecosse étaient une moquerie,
que les différentes bourgs dépendaient de
petites corporations, et qu'une élection ne
donnait point l'opinion réelle du peuple.
L'
HON. Proc.-Gén. MACDONALD.—
La constitution de l'Ecosse jusqu' a 1832, fut
pleine de restrictions de toute espèce.
Mais l'hon. membre aurait dû nous dire si, en
Angleterre, il eut une élection au sujet de
l'union avec l' Ecosse. Or, il sait bien que
cette élection n'a pas eu lieu et qu'on aurait
ri, dans les cercles politiques, d'une semblable
proposition. (Ecoutez!) M. l'ORATEUR,
lorsque le parlement impérial vota le bill
septennal pour sauver l'Angleterre du règne
désastreux des STUARTS,—je l'appelle désa.
treux: bien que je sois Ecossais,—lorsque les
membres élus pour trois ans se déclarèrent
élus pour sept sans appeler au peuple,
quelqu'un a-t-il jamais prétendu que cette
décision fut inconstitutionnelle? Mon hon.
ami n'a-t-il pas fait voir que Sir ROBERT
1005
PEEL, le grand protecteur des libertés anglaises, citait ce fait pour montrer quels
étaient les pouvoirs de la chambre des communes. L'hon. membre pour Montmorency
a cité WILLIAM PITT qui, malgré quelques
actes désapprouvés par les conservateurs, a
toujours été le chef de ce parti et a combattu jusqu'a la mort pour les doctrines
de
son père, le comte de CHATHAM. Tout son
parti le soutint lorsqu'il prétendit que le
parlement irlandais pouvait voter l'abandon
des droits qu'il avait mission de défendre.
Si le temps me le permettait, je citerais encore ses paroles, parce qu'elles étaient
dictées
par la sagesse même. Mon hon. ami de Peel
dit: ' C'est très bien, mais on ne peut
prendre l'union de l'Irlande pour terme de
comparaison, parce que notre constitution est
limitée par l'acte même qui l'a établie."
C'est vrai, mais c'était la même chose en Irlande jusqu'en 1782, où on abolit l'appel
au
parlement anglais pour les mesures qui
n'étaient auparavant soumises aux chambres
d'Irlande qu'après avoir été approuvées par
le parlement impérial. Mon hon. ami
cite l'acte constitutionnel; mais les termes
de cet acte nous donnent, de la manière la
plus explicite, le droit de faire des lois pour
la paix, le bien-être et le bon gouvernement
des populations du Canada. On ne pouvait
nous donner de plus grands pouvoirs; il est
vrai que notre existence politique est fondée
sur un statut; que nos juges n'ont point le droit
de condamner pour mépris et que nous n'avons pas les droits de prescription que possède
le parlement impérial; mais, vis-à-vis des po-
pulations du Canada, nous occupons le même
rang que le parlement anglais vis-à-vis des
électeurs de la Grande Bretagne. (Ecoutez!) Tout homme qui apprécie le gouvernement
représentatif refusera toujours de
voir restreindre ces droits. Mais mon hon.
ami dit que nous ne pouvons que passer ces
résolutions en demandant à la Reine de leur
donner effet, et il en conclut qu'il faut avoir
un nouveau parlement. Or, ces nouvelles
chambres n'auront pas plus de pouvoir que
nous. Cette chambre, plus que toute autre
depuis 1841, représente réellement les populations du Canada. Si les membres de cette
chambre ne représentent pas les diverses
classes et les diverses intérêts du pays, le
pays n'a jamais été représenté. (Ecoutez!)
Si nous sommes les représentants du Canada,
nous avons droit de faire des lois pour la
paix, le bien-être et le bon gouvernement
de ce pays; sinon, nous avons été par le
passé de bien grands criminels! Si nous
ne sommes pas les représentants du peuple,
nous n'avons plus le droit de passer un seul
bill, ne fût—ce que pour établir un moulin-à- scie. Si nous ne sommes pas les représentants
du Canada, nous n'avons point le droit
de siéger en cette chambre. Mais si nous
avons le mandat de représentant du peuple,
nous avons le droit d'agir pour lui, d' aller
déclarer au Souverain que l'union demandée
est dans l'intérêt des provinces de l'Amérique du Nord et assure notre protection
à
l'avenir; et si nous pensons que ce droit
ne nous est pas acquis, eh bien! nous
sommes indignes du mandat que nous avons
reçu des populations canadiennes. (Ecoutez!
et applaudissements.)
M. M. C. CAMERON—Je demanderai à
l'hon. membre pourquoi il a soutenu le bill
de tempérance de M. DUNKIN?
M. M. C. CAMERON—Si l'hon. membre
a voté pour le bill, il a appuyé ce qui, d'après
la règle établie par lui, est une violation de
la constitution.
M. M. C. CAMERON—L'hon. monsieur
a donc violé la règle établie par lui-méme.
(Ecoutez!)
L'
HON. M. HOLTON — Je dois un mot
d'explication a l'hon. procureur-général du
Haut—Canada. Je n'avais pas l'honneur d'être
en parlement en 1861, et je n'ai jamais lu
le discours qu'il a cité. Je ne voudrais pas
faire une assertion erronée; mais je crois ne
point me tromper en disant que lors de la
Ligue Américaine Anglaise, il y a environ
quinze ans, il vota une union législative.
L'
HON. M. HOLTON — Cette réunion
passa, en tous cas, des résolutions en faveur
d'une union législative. L'hon. membre
faisait partie de la Ligue, il vota pour ou
contre ces résolutions, il nous le dira. En
tous cas, à la dernière session, lors de la
motion de l'hon. membre pour South-Oxford,
il était en faveur d'une union législative.
C'était peu de temps avant le changement de
ministère, et il y eut une discussion entre
l'hon. procureur-général du Haut-Canada, et
l'hon. procureur-général du Bas-Canada qui
étaient alors de ce côté de la chambre. Dans
1006
le comité fermé sur motion de l'hon. membre
pour South-Oxford, il vote pour l'union légisative nettement distinguée de l'union
fédérale, et je croyais qu'il avait toujours été de
cette opinion. Dans son discours de 1861,
il indiquait, parait-il, la possibilité d'une
fédération, mais bien différente de celle que
veut l'hon. membre pour South-Oxford, qui
prétend que c'est celle de la convention
de 1859.
L'
HON. M. HOLTON—C'est vrai, mais
dans l'une c'est l'autorité fédérale, et dans
l'autre l'autorité locale, qui a la prépondérance.
L'
HON. M. HOLTON—Je n'entrerai pas
dans plus de détails. J'ai seulement voulu
faire quelques observations sur le discours
que l'hon. pro.-gén. du Haut—Canada fit en
1861. (Cris de "continuez!") En vérité, les
messieurs de la droite sont difficiles à contenter. L'autre jour, l'hon. président
du
conseil, qui était probablement de mauvaise
humeur ce jour-là, prétendait que je parlais
trop souvent; aujourd'hui, il veut me donner,
malgré moi, la parole. (Rires.) J'avais
l'intention de faire un discours sur la question. Mais je crois, avec l'hon. proc.-gén.
du Haut—Canada, que ce débat ne doit point
être recommencé. Telle a été l'opinion exprimée cette après—midi par mon chef (l'hon.
M . A. A. DORION); aussi, en bon partisan,
je m'obstiendrai de prononcer mon discours,
d'autant plus que mes vues sur cette question
sont parfaitement connues (Rires.) Si les
hon. membres de la droite avaient aucun
doute à mon égard, je suis prêt à leur donner
aussi brièvement que possible toutes les
explications qu'ils pourront désirer. (Ecoutez!)
L'
HON. J. S. MACDONALD—Mon hon.
ami a fidèlement exprimé l'intention de la
gauche. Nous ne voulons point prolonger
la discussion. Mais les hon. membres de la
droite n'ont point été fidèles à la règle
établie par eux a cet égard.
L'
HON. J. S. MACDONALD—Je crois
que l'hon. président du conseil a fait, cesoir
même, un discours très long, dont les conclusions éloquentes suffiraient pour nous
ôter toute envie de parler. (Ecoutez! et
rires.) J'ai également été frappé de la
manière dont l'hon. proc.-gén. du Haut- Canada s'est glorifié de n'avoir pas insisté
sur les objections soulevées par la motion de
l'hon. membre pour Peel, après avoir dit
qu'il aurait recours à tous les précédents
parlementaires pour empêcher cette motion.
L'hon. membre oublie que des autorités
anglaises ainsi que des décisions de cette
chambre même viennent à l'appui de la
motion de l'hon. membre pour Peel. En
1843, lors de l'adresse passée en cette
chambre pour approuver l'attitude prise
par l'hon. M. BALDWIN, au temps de
Sir JOHN METCALFE, un amendement fut
proposé après la passation de cette adresse,
mais l'ORATEUR décida que la motion était
hors d'ordre; mais appel ayant été fait à la
chambre, un amendement de M. BOULTON
fut voté. L'hon. proc.—gén. du Haut—Canada
n'a donc point lieu de se glorifier de n'en
avoir pas appelé de la décision actuelle de
l'ORATEUR, car les précédents sont contre lui.
L'astuce de l'hon. monsieur est bien connue.
Nul que lui ne sait mieux se plier aux
exigences des positions diverses qu'il prend
successivement. Nul homme public en ce
pays n'a été opposé à tant de causes qu'il a
fini par épouser, et par faire triompher
ensuite avec l'aide de ses propres adversaires.
(Ecoutez!) N'a—t-il pas combattu pendant
dix ans,--—de 1844 à 1854,-—la sécularisation
des réserves du clergé, prétendant que c'était
une spoliationl Ne s'est—il pas opposé à
l'abolition de la tenure seigneuriale, qu'il
traitait aussi de spoliation? N 'a—t—il pas joué
le même rôle quand il s'est agi d'introduire
le principe électif dans le conseil législatif,
prétendant que c'était une tentative républicaine n'ayant pour but rien moins que
d'introduire dans ce pays la constitution des
Etats-Unis? Mais après avoir combattu
pendant dix ans ces mesures, savoir: l'abolision de la tenure seigneuriale et la question
des conseillers électifs, qui causèrent la
révolte du Bas-Canada, et la question des
réserves du clergé à laquelle Lord SYDENHAM
attribuait la révolte du Haut-Canada,—questions qui ébranlèrent jusqu'aux fondements
de notre société, qui ont soulevé non seulement
des orages parlementaires, mais allumé la
guerre civile,—tout-à-coup il a cessé son opposition de dix ans, et, afin d'avoir
un portefeuille et de maintenir son parti au pouvoir,
il s'est soumis humblement et a favorisé la
passation de ces mesures. Et il a des prétentions à passer pour conséquent avec lui—même!
Ces trois grandes questions ainsi que plusieurs
1007
autres questions brillantes ont été résolues
par les efforts de l'hon. monsieur agissant de
concert avec des rénégats du parti réformiste,
et c'est ainsi qu'il est resté au pouvoir pendant
dix ans. (Ecoutezl) Or, la formation du
gouvernement actuel est due à une volte-face
du même eure. On a renouvelé en 1864
ce qui fut ait en 1854. (Ecoutez!)
M. A. MACKENZIE—Qui a proposé que
des membres du parti libéral devaient s'unir
au gouvernement?
L'
HON. J. S. MACDONALD—Je les
voyais entraînés à toute vapeur vers le ministère, j'e n'ai pas entrepris de les arrêter.
(Rires) Les roues de la locomotive auraient
brisé tous les freins, j'ai alors dit: " Allez,
et que Dieu vous soit en aide! Votre place
à vous, membres libéraux, est au ministère.
Vous serez trois dans le cabinet, plût a
Dieu que vous fussiez en plus grand nombre;
cela nous permettrait d'espérer un peu de
justice."
M. A. MACKENZIE—Mais vous avez
voté contre la motion à l'effet que la résolution qui demandait l'entrée de trois
membres
de l'opposition au ministère fut rejetée.
M. A. MACKENZIE—Je vous demande
pardon, c'est moi—même qui proposai la
motion.
M. H. F. MACKENZIE—Si l'hon. monsieur veut me le permettre, je vais lire un
extrait du procès-verbal de l'assemblée.
L'hon. monsieur ne vote point contre le
principe de la combinaison:—
"Proposé par M. HOPE F. MACKENZIE, secondé
par M. McGIVARIN,—que nous approuvons la marche
suivie par M. BROWN, dans ses négociations avec
le gouvernement, et que nous approuvons aussi
le projet d'une fédération des Canada, pouvant
comprendre les provinces du golfe et les régions
de l'Ouest; cette fédération étant, selon nous, le
seul moyen de règler nos difficuités actuelles.
Trente—quatre membres votèrcnt pour cette
motion, cinq s'abstinrent et de ce nombre
était l'hon. membre pour Cornwall.
L'
HON. J. S. MACDONALD — Alors
vous admettes ce principe: " Qui n'est pas
pour nous est contre nous." (Ecouter!) Je
vais vous dire pourquoi je ne voulus pas
voter. Je n'ai point accusé l'hon. membre
pour South Oxford de nous avoir trompée en
aucune façon. Mais il nous dit qu'il avait
en mains un document contenant a base de
l'arrangement. Au lieu de nous le lire, il
nous en cita la substance. Ce mode de
procéder me déplut souverainement, et voila
pourquoi je crus devoir m'abstenir.
L'
HON. M. BROWN—Mais aves—vous
parlé dans cette assemblée contre le projet?
L'
HON. J. S. MACDONALD.—C'eût été
parfaitement inutile, tant on était pressé de
conclure. (Rires.) Mais, M. l'ORATEUR,
mon hon. ami, le proc.-gén. du Haut-Canada,
avec sa tactique ordinaire d'éluder la question,
—celle de lappel au peuple,—s'est jeté sur
les digressions. Je n'ai jamais entendu bafouer aussi cruellement un membre de cette
chambre. Il a tourné en ridicule toute la
motion de l'hon. membre pour Peel. Toutefois, il lui a offert une petite consolation:
"Après tout, lui a-t-il dit, et bien que mon
hon. ami pour Peel seit complétement dans
l'erreur, il n'a point en cette circonstance dérogé
à son habileté, son éloquence et sa science des
principes constitutionnels que nous lui connaissons tous,—il a en une excellente idée
en
insérant, dans sa motion, les mots: "mode
constitutionnel."
Ces deux mots ont un charme particulier
pour l'hon proc.—gén. du Haut-Canada. Mais
il devrait bien nous dire où il a pris que,
d'après la pratique parlementaire anglaise,
une mesure comme celle-ci avait jamais été
présentée, et nous expliquer ensuite en quoi
l'hon. membre pour Peel a tort. Une mesure
contraire à la pratique anglaise étant présentée, nous sommes libres de prendre les
moyens d'obtenir l'appel au peuple. Si les
traditions parlementaires permettent que le
gouvernement fasse passer, avec l'aide de ses
partisans, une mesure qui change soudainement notre constitution, ne pouvons-nous
pas
demander si cette mesure sera préalablement
soumise à nos électeurs? Il oublie que si,
conformément à la constitution, nous pouvons
faire et défaire les lois, il ne nous est point
permis de changer par un vote de cette
chambre une constitution qui nous a été
donnée par le gouvernement impérial. Il a
fortement insisté sur ce point: que nous représentons le peuple et que par nous le
1008
peuple parle. Ce principe est vrai, je le
répète, tant qu'il s'agit de lois rédigées conformément à notre constitution, mais
c'est le
pousser beaucoup trop loin que de l'appliquer
au renversement de la constitution elle-même.
(Ecoutez!) Comment justifier un pareil
procédé? L'hon. monsieur nous dit que
l'appel au peuple est inconstitutionnel. On
ne pense pas ainsi à la Nouvelle—Ecosse. Les
hon. ministres répondent que la Nouvelle- Ecosse ne fait pas nos lois.
L'
HON. J. S. MACDONALD —Il est
est bien malheureux que l'hon. ministre de
l'agriculture, par les lectures et les essais
dont il a favorisé ces provinces, n'ait pas
réussi à éclairer davantage leurs populations.
(Rires!) Mais, en tous cas, elles comprennent
la position que leur a faite la conférence de
Québec. Et le Nouveau—Brunswick? Là
aussi, je suppose, les hon. ministres n'ont
trouvé que des ignorants! A ces ignorants
nous avons demandé, en prenant certains
détours, assistance pour sortir de nos difficultés. Mais une fois qu'ils ont vu le
dessous
des cartes, ils ont refusé de reconnaître les
délibérations de la conférence de Québec.
Ce sont là, pour nous, des précédents. Nous
voulons, comme les membres du Nouveau—
Brunswick, exercer nos droits et jouir de
nos privilèges. Les populations et les gouvernements des provinces du golfe sont tour
à tour désignées comme loyales, ou annexionnistes, suivant qu'elles sont pour ou contre
le projet actuel; si elles ne connaissent pas
leurs droits, tâchons de leur apprendre à les
connaître. Mais si c'est un peuple tel que
l'hon. ministre de l'agriculture nous le
dépeint, ne songeons plus à nous unir à
lui. (Rires.) Si, au contraire il est loyal
et intelligent, pourquoi ne pas l'miter?
Qui ose ici s'arroger le droit de dire que
nous ne pouvons pas voter suivant notre
conscience et dans ce intérêts de nos populations? La motion de l'hon. membre pour
Peel est étrange, dit-ên! Mais on oublie que,
lors du dernier appel au peuple, les ministres
actuels furent renversée, et cela pourrait
bien encore leur arriver. (Ecoutez!) L'hon.
procureur-général du Haut—Canada a commencé par dire nettement à l'hon. membre
pour Peel: " Mon cher, vous avez perdu la
carte!" Un instant après il a loué son éloquence, sa vigueur d'argumentation; il lui
a déclaré, en un mot, que son discours était
parfait, qu'il portait un coup violent à la
gauche, puis il a fini en lui disant: " Vous
ne comprenez pas le sens de votre propre
motion " Si l'hon. membre pour Peel est
flatté du compliment, j'avoue qu'il est de
bonne composition. Je trouve que l'hon.
membre a très bien soutenu sa motion. Il
a fait un bon discours d'élection. Aux
hustings, avant les élections, les candidats
s'engagent à agir en parlement d'accord
avec les vœux de leurs électeurs. Mon hon.
ami pour Peel a souvent dénoncé les tentatives faites contre les droits de l'église
d'Angleterre. Lorsqu'on sécularisa les biens du
clergé, je me rappelle qu'une motion fut faite
dans cette chambre pour demander l'appel
au peuple. Il ne s'agissait que d'une mesure
pour ainsi dire locale et personue, si je me
souviens bien, ne prétendit que cette motion
fut inconstitutionnelle. L'hon. président du
conseil a souvent dit que tout gouvernement
qui ne mettrait pas, dans son programme, la
question dela représentation d'après la population, était indigne de l'appui de cette
chambre,
mais, à mon avis, il est bien plus indigne
de soutenir un gouvernement qui veut changer toute notre constitution sans en appeler
au peuple. Un membre qui promet à ses
électeurs de voter dans tel ou tel sens, et qui
vient ici voter en sens contraire devrait,
selon moi, résigner immédiatement, ne fût- ce que par respect pour la chambre et pour
lui-même. Mon hon. ami le procureur-général du Haut-Canada dit qu'il n'est pas constitutionnel
de faire voter le peuple dans le
sens indiqué par l'hon. membre pour Ontario Nord. Je tiens autant que personne
au maintien de la constitution; mais, lors- qu'il s'agit d'une question comme celle—ci,
je l'appuie sans m'occuper de savoir comment
se fera la votation. L'hon. procureur—général
du Haut-Canada a violé la constitution anglaise en proposant cette mesure, et je ferai
tout en mon pouvoir pour obtenir l'appel au
peuple avant de renverser notre constitution.
Je suis étonné de voir tant de membres de
cette chambre opposée à cet appel. Cette
conduite singulière est due à certaines influances secrètes, en le prétend du moins,
et parfois ces influences se trahissent. La
coalition actuelle est formée des éléments
les plus hétérogènes et soutenue par un mélange indescriptible de politiqueurs de
toutes
nuances. On suppose qu'avant un an il
y aura des élections générales. Certains
partisans du ministère actuel qui ont naguère subi des élections très—coûteuses,
seront exposés à de nouveaux frais. C'est
1009
bien triste! Mais aussi pourquoi ont-ils
voté contre les vœux de leurs électeurs?
Ils espèrent peut—être, en vertu du principe
que les extrêmes se touchent, être réélus par
acclamation. Vain espoir! Les électeurs
d'Ontario Nord et de la ville de Niagara
sont là pour le prouver. L'hon. secrétaire
provincial a été la première victime; à
l'époque, je crus devoir le plaindre, mais il
est aujourd'hui hors de peine, et il a trouvé
un autre comté qu'il saura garder, espérons- le. Malgré cela, les hon. messieurs comptent
sur un grand triomphe dans les prochaines
élections. Moi j'espère qu'un grand nombre
de collèges électoraux feront sentir à leurs
deputés qu'on ne vote pas impunément
l'abandon des droits et de la constitution
d'un peuple. (Ecoutez!) M. l'ORATEUR,
dans ma carrière politique, j'ai été dix-neuf
ans du côté de l'opposition, et j'y resterais
encore bien plus longtemps pour soutenir les
opinions que je viens d'exprimer. Je suis
ici pour représenter un comté et non pour
le tromper indignement. Si, sur une question de quelque importance, je n'avais pu
exprimer 'opinion de mes électeurs, j'aurais
renoncé à les représenter tant que je n'aurais pu avoir leur avis. Plusieurs membres
ne savent—ils es que leur conduite a été
condamnée de a manière la plus formelle par
les électeurs? Et ce sont ces mêmes hommes
qui se prennent d'une belle indignation
lorsque nous demandons ici l'appel au
peu le!
M. SCOBLE—Faites-vous allusion a
quel ue membre du Haut—Canada?
M. SCOBLE.—Je n'en connais aucun
dans ce cas.
L'
HON. J. S. MACDONALD—M. l'ORATEUR:—Sans vouloir faire de personnalités,
il me semble voir vis—à—via moi une foule de
membres compris dans la catégorie que je
viens de signaler. C'est, selon moi, une
monstruosité de refuser l'appel au peuple
dont on veut changer la constiution. Je
suis heureux d'avoir l'occasion de voter pour
cette motion. Elle est, selon moi, l'expression de notre dévouement au peuple. Jamais,
depuis un quart de siècle, une question n'a
demandé plus impérieusement cet appel. Il
s'agit de changer notre constitution, en veut
forcer la main au peupleen refusant de le
consulter, il saura pro ester dans les élections
prochaines, et faire de tels exem les, que
jamais dans la législature d'une colonie anglaise pareil attentat ne pourra se reproduire.
(Applaudissements.)
M. T. R. FERGUSON.—Les hon. membres'qui soutiennent cette motion ont réussi
à donner aux débats une tournure singulière
et vraiment amusante. L'hon. membre pour
Peel est convaincu que sa motion est bien
fondée et ainsi pense, j'en suis persuadé,
l'hon. membre pour Ontario Nord, qui la
seconde. Mais ces messieurs se placent à
des points de vue très différents. L'hon.
membre pour Peel a fait un long discours en
faveur de la confédération, puis il a proposé
l'appel au peuple, dans l'idée que le pays
sanctionnerait le projet par une large majorité. Mais l'hon. membre pour Ontario
Nord espère, en ascendant la motion, qu'elle
donnera le coup de mort au projet de confédération.
M. M. C. CAMERON—L'hon. membre
se trompe. J'ai demandé simplement qu'on
consultât le peuple, afin de savoir s'i ne
préfèrerait pas une union législative.
M. T. R. FERGUSON—J'en demande
pardon à l'hon. monsieur; mais je ne crois
pas que tel ait été son but en secondant la
motion. S'il n'a pas voulu faire rejeter le
projet, son langage devient inintelligible. Je
suis rarement d'accord avec l'hon. président
du conseil; mais je crois qu'il a parfaitement
signalé la contradiction. L'hon. membre
pour Peel veut l'appel au peuple qui, selon
lui, se prononcera en faveur du projet et
d'une nouvelle nationalité. L'hon. membre
pour Ontario Nord ne veut ni du projet ni
de la nouvelle nationalité, et il espère que
l'appel au peuple mettra fin a ces deux tentatives. L'hou. membre pour Peel demande
une dissolution du parlement afin d'avoir,
dans une élection générale, l'expression
constitutionnelle de la volonté du peuple.
Pour ma part, je doute fort qu'une élection
générale ait ce résultat. Nous aurons encore
la lutte du parti conservateur et du parti
réformiste, les questions locales interviendront, et la vérité aura peine à se faire
jour.
Mon hon. ami pour Ontario Nord demande
l'appel direct au peuple. Ce serait peutiêtre
un bon moyen s'il n'était pas tout à fait inconstitutionnel; on obtiendrait ainsi
l'expression de l'opinion publique. (Ecoutez!)
L'hon. membre pour Peel est certainement
un des hommes les plus distingués de cette
chambre. Je dois avouer, toutefois, qu'il n'y
1010
parait point avec les mêmes avantages qu'au
barreau. S'il avait proposé son amendement
avant que les résolutions fussent adoptées,
j'aurais pu lui donner le mérite de la sincérité, j'aurais même reconnu que sa tactique
était habile; je ne puis exprimer cette opinion puisque cet amendement hostile aux
résolutions n'arrive qu'après qu'elles ont été
votées. J'en viens aux assertions de l'hon.
membre pour Cornwall, et là je trouve une
inconséquence encore plus manifeste. L'hon.
membre prétend que si on en appelle au
peuple et qu'il rejette ces résolutions, tous
les membres qui ont voté pour l'affirmative
devront immédiatement résigner leurs sièges.
Or, appliquant ce principe à l'hon. membre
qui a proposé l'amendement dont il s'agit,
et à son collègue qui le seconde, on arrive à
la conclusion que l'un ou l'autre de ces hon.
messieurs doit immédiatement résigner. Et
s'il y avait une élection générale, ces deux
messieurs plaideraient devant les électeurs
deux causes différentes; ils sont tous les
deux en contradiction flagrante, et ils iraient
jeter la confusion dans le pays. L'hon. procureur-général du Haut-Canada et l'hon.
président du conseil n'ont dit que la pure
vérité en parlant de l'inconséquence de ces
messieurs. L'autre soir nous avons voté ces
résolutions par une forte majorité. J'ai, dès
l'abord, été en faveur de l'appel au peuple, je
l'avoue. Mais en face de l'abrogation du traité
de réciprocité et du système de transit, dans
la perspective d'avoir sur nos lacs des
navires de guerre américains, de souffrir le
maintien du système des passeports et de ne
pouvoir parvenir à l'océan qu'avec la permission des Américains, j'ai cru qu'il était
important pour nous de prendre des mesures
pour nous assurer l'appui de l'Angleterre,
de sa garantie, de son armée et de sa flotte
en vue de notre protection. Voilà pourquoi
j'ai voté en faveur de ces résolutions! J'ai
cru que le cas était urgent et que nos ministres devaient se rendre le plus tôt possible
en Angleterre, afin d'en venir à un arrangement avec la mère-patrie, sans perdre un
seul instant. Mais, maintenant, on vient nous
dire que rien ne presse, et qu'il faut d'abord
de nouvelles élections. Et pendant tout ce
temps, c'est-à—dire, un an au moins, nous
resterons dans le
statu quo, sans moyens de
défense! De deux choses l'une, ou ces résolutions ont été votées par la chambre ou
elles ne l'ont pas été. Si elles ont été votées
nous ferions un acte de folie en votant pour
cet amendement, et nous insulterions par
là Sa Majesté en nous rendant à jamais
ridicules. (Ecoutez!) L'hon. membre pour
Peel a, comme moi-même, admis dès le
début le principe de l'appel au peuple.
Mais, après avoir reconnu par son vote la
nécessité d'adopter immédiatement ces résolutions, il se met en contradiction manifeste
avec lui-même, par la proposition de cet
amendement. Du reste, je suis forcé de le
dire, depuis qu'il est en Parlement il a rendu
bien peu de services à son parti et à ses
électeurs. (Ecoutez!) J'ai voté vendredi
dernier, pour ces résolutions, je ne contre- dirai pas mon vote en appuyant lundi
un
amendement qui le condamne. (Ecoutez!)
On a dit avec raison qu'un nouveau parlement aurait à reprendre tout le débat. L'hon.
membre pour Cornwall ne semble pas désirer
précisément une élection générale, il voudrait que le peuple fût directement consulté
et se prononçât explicitement pour ou contre
le projet. En pareil cas, plusieurs membres
devraient résigner leurs siéges. Il faudrait
les remplacer. Ces élections occuperaient
une partie de l'été. Les chambres réunies,
nous aurions à expliquer de rechef toute la
question aux nouveaux membres, en sorte
qu'un vote définitif ne pourrait être pris
avant six mois au moins. (Ecoutez!) Je ne
pense pas qu'il serait fort peu judicieux
d'adopter cette motion. Je cis dire toutefois que si les arrangements relatifs aux
gouvernements locaux ne sont pas de nature a
satisfaire les populations du Haut-Canada,
je voterai contre. Mais j'ai confiance dans
l'habileté des ministres actuels, je leur laisse
pour le moment la responsabilité de ces
arrangements, je les attends à l'œuvre; s'ils
n'agissent pas conformément à nos intérêts,
je saurai, en votant contre eux, leur faire
connaître mon opinion. (Applaudissements.)
L'
HON. M. HUNTINGTON—Je ne veux
as abuser de l'attention de la chambre.
Une chose me sur rend, c'est l'anxiété que
manifestent tant d'hon. membres de parler
sur une question qu'on dit unanimement
résolue, car j'en vois une demi—douzaine se
lever à la fois pour parler. (Rires.) Il y a
quelques jours, j'ai signalé quelques détails
que j'avais l'intention d'aborder; mais je
m'en suis abstenu. Je tiens néanmoins à
dire quelques mots sur certains points qui se
rattachent à la motion. Je n'ai pas été surpris de voir l'hon. président du conseil
se lever pour intervenir au nom du gouver
1011
nement. Il a de bonnes raisons pour ce
faire, car il appartient à une partie du pays
où l'opinion publique est tant soit peu chatouilleuse. Quant à l'hon. procureur—général
du Bas—Canada, loin de vouloir consulter le
pays, il a dit, paraît-il, au déjeuner de Montréal, qu'il ne consultait personne quand
il
s' issait de prendre une détermination.
L'
HON. M. HUNTINGTON—Je dis que
l'hon. procureur-général du Bas—Canada ne
tient aucun compte des opinions du peuple,
sachant mieux que les électeurs mêmes ce
qu'il faut au pays. Mais l'intervention de l'hon.
président du conseil m'a un peu surpris. Il
a été beaucoup trop sévère à l'égard de
l'hon. membre pour Peel. Les arguments
et l'éloquencc de cet hon. monsieur ont
souffert de la grande amitié qu'il porte au
gouvernement, puisqu'il a été jusqu'à dire
que des élections générales seraient favorables
au ministère. Mais on n'a point encore
répondu à un de ses arguments que je
vais signaler. "Il a dit que vu les dispositions des provinces du golfe et l'accueil
favorable que le projet a reçu dans
cette chambre, il était inutile de se trop
presser. (Ecoutez!) C'est plus qu'inutile,
c'est absurde de prétendre que le peuple
demande à grands cris que cette mesure
soit immédiatement mise en opération.
L'hon. membre pour Peel, qui a beaucoup
étudié l'opinion publique à cet égard,
dit que la plus grande apathie existe parmi
le peuple sur cette question. J'ajoute
ne cette apathie existe même dans cette
chambre et que plusieurs membres ont
voté sans avoir foi au projet, mais par pures
convenances de parti. (Ëcoutez!) Il fallait
prendre un parti; ils ont voté pour la mesure
du ministère. L'hon. président du conseil
a cherché à nous jeter de la poudre aux
yeux pour nous convaincre qu'il n'était
point nécessaire de consulter le peuple.
L'hon. procureur-général du Haut—Canada a
eu recours à un autre moyen, il a cité des
précédents. Il a parlé de l'union de l'Irlande,
et a cité PITT. Or, cet homme d'état célèbre
a, par plusieurs de ses actes publics qui sont
néanmoins admirés en Europe. produit une
réaction qui a arrêté pendant plusieurs
années le progrès de l'Angleterre. Il en
résulta que plusieurs réformistes se joignèrent à l'école de PITT; nos ministres
actuels arrivent au même résultat. Et voilà
le précédent qu'on chercher à nous imposer.
La France n'est pas aujourd'hui en révolution, mais l'Amérique est en feu. Les
ministres nous disent, et on les applaudit
quand ils parlent ainsi, que nous avons à
choisir immédiatement entre l'annexion et
la confédération. Savons-nous si, a leur
retour d'Angleterre, nos ministres ne
trouveront pas le drapeau des Etats—
Unis flottant sur la citadelle? (Ecoutez!
écoutez!) Le danger, sous ce rapport, n'est
pas plus grand que lors de la formation
du ministère actuel au printemps dernier.
Lorsque l'hon. chevalier qui est le chef de
l'administration, nous proposa la combinaison
actuelle il ne nous dit pas: " Le ministère
ou l'invasion!" Le gouvernement ne nous
menaça pas de l'annexion si nous rejettions
son programme. Ces menaces sont dues aux
difficultés que les hon. messieurs ont rencontrées depuis le mois de juin dernier.
Mais,
monsieur l'ORATEUR, cette habile manœuvre
aboutira. malgré tout, à une réaction conservatrice dans le pays. Me fera-t—on croire
que des membres réformistes ont voté sincèrement l'abandon du principe électif dans
le conseil, ce principe si cher à tous les libéraux!
Abuno disce omnes! L'hon. procureur- général du Haut—Canada, peut, comme chef
des conservateurs, se réjouir de la réaction
qui se prépare. Il nous a cité une des époques les plus sombres de l'histoire d'Angleterre,—époque
où les tories, profitant de la
révolution française,—gouvernèrent l'Angleterre pendant cinquante ans et retardèrent
d'autant son progrès. C'est à. cette époque
que l'hon. procureur—général va chercher ses
précédents. Allons-nous, par une vaine crainte
du peuple américain, renouveller en Canada
les abus réactionnaires du temps de PITT en
refusant de consulter le peuple? (Ecoutez!)
Au printemps dernier, le pays fut surpris du
tremblement de terre politique qui eut lieu.
A l'étonnement général on répondit que la
combinaison nouvelle était nécessaire pour
la défense du pays. Et maintenant, lorsqu'on
demande l'appel au peuple, on nous dit que
des précédents s'y opposent et on cite l'union
de l'Ecosse et de l'Irlande; ces arguments
doivent avoir un effet magique principalement sur l'hon. ministre à l'agriculture.
On nous dit encore d'accepter sans délai le
projet, parce que cette belle occasion ne se
représentera jamais. Or, monsieur l'ORATEUR, le principe qui guide l'opposition est
1012
celui-ci: que les membres du parlement
doivent certains égards au peuple qui, lui,
a le droit de contrôler leur conduite politique. Si le parlement est tout-puissant,
comme le prétendent les hon. ministres, il
peut aussi bien lui prendre fantaisie de nous
annexer un jour aux Etats-Unis. S'il peut
renverser la constitution actuelle, il pourra
en renverser une autre. La doctrine est nouvelle. On peut s'appuyer de forts précédents,
mais elle sera toujours en désaccord avec la
pratique constitutronnelle suivie dans le pays
où l'on croit que les membres ne sont point élus
pour faire des constitutions. L'hon. membre
pour South-Oxford prétend que, dans les
élections qui ont en lieu dernièrement, le
peuple s'est montré en faveur du projet. Or,
il n a en que quelques élections au conseil
législatif, et, dans la chambre basse, le candidat conservateur pour Ontario Sud—comté
anciennement représenté par le vice chancelier du Haut—Canada,—a été défait, et le
candidat de l'opposition a été élu. Ce monsieur
encore tout frais sorti des élections vient ici
nous dire qu'il s'est en agé envers ses commettants de voter en faveur de l'appel
au
peuple—bien plus il nous assure qu'ils redoutaient de le voir supporter le gouvernement
dans les détails de la mesure. Il est triste
qu'on soit obligé de citer des précédents tirés
de l'époque la plus sombre de l'histoire de
l'Europe pour appuyer cette mesure. (Ecoutez!)
M. J. DUFRESNE (Montcalm)—Je tiens
seulement à relever une assertion de l'hon.
membre pour Lotbinière. Il a dit que, dans
le Bas—Canada, les partis étaient à peu près
divisés sur cette question. Or, je nie cette
assertion. La majorité du Bas-Canada est
opposée à une élection qu'elle considère, en
principe, comme immorale. Il y a, dans le
Bas-Canada, des gens qui veulent une élection
générale mais ces gens-là. ne sont pas le
peuple. Je puis dire également que les hon.
membres de cette chambre qui demandent
une élection ont tort. Il est facile de désigner ceux qui, dans le Bas-Canada, demandent
une élection. Ce sont d'abord les " rouges."
Ils se disent ceci:" Nous sommes ici quinze
où seize, qu'importe que nous perdions cinq
ou six combattente; peut—être les Etats-Unis
récompenseront-ils un jour notre courage par
une pluie de
greenbacks! (Rires.) Viennent
ensuite les gens qui vendent des boissons
sans licence;—ceux-là veulent des élections.
En troisième lieu, les ivrognes demandent
aussi des élections, parce qu'ils pourront boire
gratis pendant cinq ou six jours. (Rires.)
Ces paroles ne s'appliquent, comme de
raison, à aucun membre de cette chambre.
Mais la majorité du peuple considère l'élection comme une immoralité. Si quelqu'un
en doute qu'il aille s'informer dans mon
comté. (Ecoutez!)
M. A. MACKENZIE—Le langage de
l'hon. membre pour Ontario Nord demande
réplique. Il a dit que le Haut—Canada
s'inquiétait peu des changements constitutionnels. Or, en 1862, il disait ceci dans
son
discours sur l'adresse:—
"En refusant de justes demandes en s'expose à
de pénibles querelles. 300,000 Haut-Canadiens
demandent en ce moment à être représentés dans
cette chambre, si on leur refuse cette demande, ou
peut s'attendre aux conséquences les plus désastreuses."
Tel est le langage de l'homme qui nous
accuse aujourd' hui de faire des discours à
sensation. C'est encore lui qui, en 1862,
disait, au sujet de la représentation basée sur
la population, "qu'aucun homme qui sent
couler dans ses veines le sang angle—saxon ne
se soumettrait à l'état de choses alors existant." (Ecoutez!) Et, maintenant, il nous
accuse de récipitation. Quel rôle a-t—il joué
à l'égard e l'hon. M. MCDOUGALL, lorsque
ce monsieur faisait partie du gouvernement
MACDONALD-SICOTTE? Il prédit que cet
hon. monsieur ne serait jamais réélu par le
Haut—Canada. A cette époque, je m'exprimai
moi-même assez énergiquement, et je dis
que le projet de fédération pouvait seul nous
sauver. (Ecoutez!) Je tiens à rappeler ici
un incident de la réunion des membres libéraux qui précéda la formation du ministère
actuel. L'hon. membre pour Cornwall approuvait la combinaison. Il refusa de se prononcer,
il est vrai, en votant oui ou non,
parce que la motion reconnaissait d'une
manière précise la part que M. BROWN
avait rise dans cet arran amont. (Ecoutes!) Ceci est démontré par sa termes de la
seconde résolution proposée par l'hon. député
de Cornwall lui-même. La voici: "Qu'au
moins trois membres de l'opposition acceptent
des portefeuilles" M. MACKENZIE, de Lamb.
ton, proposa en amendement: " Que cette
proposition soit rejetée et qu'on en appelle à.
l'autre parti pour régler nos difficultés section." L'hon. membre pour Cornwall vote
contre cette résolution, et proposa: "Qu'il
est très Important que M. BROWN soit un des
1013
membres de l'opposition qui entrent au
ministère." Trois hon. membres votèrent
contre cette motion, savoir: MM. BROWN,
BURWELL et SCATCHERD. Or, comment
l'hon. membre pour Cornwall explique—til sa
conduite d'aujourd'hui, après avoir pris une
part si active dans la formation du gouvernement actuel? Nous trompait—il alors, ou
ignore-t-il ce qu'il dit aujourd'hui? (Ecoutez!) Si l'on songe au rôle qu'il a joué
alors, l'on s'étonne de le voir nous reprocher
aussi fréquemment d'avoir formé une coalition.
M. A. MACKENZIE—Peut-on supposer qu'il ait demandé la formation de ce gouvernement our jeter ensuite
la pierre aux
libéraux qui y sont entrés? J'ai cru que,
dans ce cas, le parti conservateur devait être
appuyé fermement. Je me suis toujours
opposé aux coalitions. Je croyais alors,
comme aujourd'hui, qu'elles euvent mener
à des résultats imprévus. Tout ce que je
voulais c'est ne le parti libéral donnât son
appui à l'administration pour régler les diificultés actuelles, faisant toutes nos
restrictions
pour l'avenir. C'est pourquoi je trouve
étrange la conduite de l'hon. membre pour
Cornwall qui vient maintenant dénoncer ces
messieurs. Il ne saurait dire qu'il n'a pas
voté, car j'ai conservé des copies certifiées
du procès-verbal de ce caucus, et je crois que
l'hon. membre pour Cornwall aurait meilleure grace a être conséquent avec lui-même.
(Ecoutez!)
DR. PARKER—Monsieur l'ORATEUR:
j'avais l'intention de voter pour l'amendement qui nous occupe, mais depuis que j'ai
entendu le discours de l'auteur de cet amendement j'ai changé d'opinion. (Rires.)
Tous
les arguments de l'hon. monsieur me prouvent la nécessité immédiate d'une confédération.
Mais, M. l'ORATEUR, quel serait
l'effet de sa résolution, si elle état adoptée,
c'est-à-dire si la chambre était dissoute et s'il
y avait de nouvelles élections avant de pouvoir passer la mesure? La chambre des communes
serait dissoute, et il se passerait peut- être plus d'une année avant que le parlement
impérial s'en occupât,—(écoutes!)-de sorte
que, en recourant a cette démarche, le pays
se verrait encore pendant longtemps exposé
aux dangers et aux difficultés dont l' hon.
député de Peel a parlé avec tant d'éloquence.
(Ecoutez!) Si cet hon. monsieur eut voté
contre la question préalable et par ce fait
affirmé le droit d'amender ou de renvoyer
l'adresse au peuple avant son adoption,
pourrait avec raison nous demander notre
appui à cette résolution. Mais non seulement il a voté pour la question préalable,
mais encore pour l'adresse, et il vient
aujourd'hui délibérément présenter cette
motion. Sous ces circonstances, je déclare
que la chambre aurait tort de l'appuyer.
(Ecoutez!) Après avoir pris un engagement
solennel avec la chambre sur la nation
principale, voilà maintenant qu'il fait voite- face et qu'il cherche à bouleverser
les arrangements qu'il a lui-méme acceptés. Un
exemple fera mieux comprendre la position
qu'il occupe en ce moment. Supposons que
quatre ou cinq individus aient, à l'unanimité,
conclu une convention et que plus tard l'un
d'eux vienne dire aux autres: " J'étais et je
suis en faveur de la convention qui a été
faite; mais si vous n'y insérez pas cette
condition, je me retire de l'entreprise. "
(Ecoutez!) Une pareille conduite ne saurait
être approuvée ni dans les affaires publiques
ni dans les affaires particulières. (Ècoutes)
La position prise par l'hon. député qui a
secondé la résolution—l'hon. membre pour
Ontario Nord—est tout à fait différente, en
ce sens que, comme moi, il a par son vote
sur la question préalable affirmé le principe
qu'il devait nous être permis d'apporter des
amendements à la mesure. L'hon. député
de Peel nous a dit, même aujourd'hui, qu'il
considérait que l'occasion était opportune de
saisir la chambre de sa motion. A mon avis,
cette motion est très rationnelle, et je n'aurais
certainement pas manqué de l'appuyer de
mon vote si elle eût été présentée avant l'adop
tion de l'adresse. (Ecoutez!) Aujourd'hui,
elle n'a pas de raison d'étre. L'hon. député
d'Ontario Nord a observé dans le discours
qu'il vient de prononcer, ue si cette constitution est adoptée, il faudra bientôt
y faire
subir des amendements; telle est, a—t—il dit, la
raison pour laquelle nous devions la rejeter.
Je diffère entièrement de cette opinion. La
constitution anglaise, M. l'ORATEUR, n'est- elle pas une série entière d'amendements
qui
ont surgi des nécessités de chaque époque?
La raison apportée par mon hon. ami est
précisément celle qui me fait accepter le
projet. Je crois que nous pourrons le modifier
dans le cours du temps, et qu'ainsi nous
réussirons à le rendre conforme aux vœux et
aux exigences du peuple. Mon hon. ami de
1014
Ontario Nord a parlé de l'influence séductrice
de l'hon. président du conseil, et de l'effet
magique qu'elle exerçait sur l'esprit de
certains députés, et, pour joindre le geste à la
parole, il a porté ses regards sur l'hon. député
d'Elgin Ouest. (Rires.) Or, M. l'ORATEUR,
je déclare que j ai toujours considéré l'hon.
député d' Elgin Ouest comme l'un des
membres les plus indépendants de cette
chambre. (Rires.) La question qui se
présentait à nous en cette circonstance était
simplement celle—ci: devons—nous adopter ou
rejeter les résolutions? Convenant avec
l'hon. député de Peel qu'il fallait immédiatement trouver la solution de nos difficultés
j'ai voté dans l'affirmative. Je pense que
ce serait une contradiction monstrueuse de
notre part, après avoir accepté ce principe et
l'avoir sanctionné de nos votes, ne de
chercher à en nullifier l'effet par l'adoption
d'une autre ligne de conduite. Si les
résolutions devaient être soumises au peuple,
le moment opportun était avant leur sanction
par cette chambre. Allons-nous aujourd'hui
détruire ce que nous avons fait samedi
dernier? Je le répète, M. l'ORATEUR, ces
résolutions, selon moi, auraient dû être
soumises au peuple, mais aujourd'hui que la
chambre les a sanctionnées, recourir à ce
moyen serait tout simplement appeler le
ridicule sur les délibérations de cette
chambre. Notre devoir maintenant consiste
à les mettre à exécution scrupuleusement et
sans sourciller, évitant bien de souffler le
chaud et le froid en même temps. Je
tiens donc, M. l'ORATEUR, à. la position
que nous avons prise; je m'y cramponne et
je repousse l'amendement de l'hon. député
de Peel, qui, je le crains bien, s'est fourvoyé
en cette circonstance. (Ecoutez!) Cet hon.
membre a déclaré qu'il votait l'adresse
comme un simple particulier, en un mot,
comme il l'eùt fait en dehors de la
chambre. Or, M. l'ORATEUR, peut-il être
permis à un membre de cette chambre
d'avoir recours à de pareils subterfuges
a l'aide desquels il devlent possible d'établir une ligne de démarcation entre le
caractère privé et le caractère public d'un
représentant du peuple? Si les explications apportées par l'hon. député de Peel
doivent constituer la doctrine générale qui
doit prévaloir dans le parlement, j'aimerais
n'on me le dise, parce qu'il se présentera
des occasions où il sera très avantageux de
bénéficier de cette innovation. (Ecoutez!)
Je considère la motion et la conduite de
l'hon. député de Peel comme une tentative
de faire du capital politique au dépens de
certains membres de cette chambre. L'hon.
député de Peel a fait une sombre peinture
de l'état précaire et dangereux dans lequel
nous nous trouvons; il nous a parlé du nuage
menaçant qui planait au-dessus de nos têtes;
et il nous a conjurés de mettre un terme à
nos luttes intérieures en consommant sans
retard l'union des provinces. Eh bien! je
vous le demande, M. l'ORATEUR, convient- il à un homme qui professe de pareilles doctrines,
qui voit du danger partout, convient- il, dis-je, de venir susciter des délais à la
passation d'une mesure destinée à rétablir
la paix et l'harmonie dans ce pays? Une
motion de cette nature doit être repoussée
de la manière la plus énergique, et la
chambre manquerait à ses devoirs en ne le
faisant pas sans retard. Si elle eût été proposée avant la question préalable, je
l'aurais
appuyée de mon vote, mais maintenant que
les résolutions sont adoptées, je déclare
qu'elle doit être considérée comme non- avenue,—et je suis prêt à accepter les conséquences
du vote solennel que cette chambre
a donné en faveur de la mesure, et a
repousser toute proposition qui viendrait à
l'encontre (Ecoutez!)
M. RYMAL.—Etant un des huit membres
Haut—Canadiens qui ont voté contre les résolutions de la conférence de Québec, et
dont
les noms, j'en ai l'espoir, seront longtemps
bénie par le peuple e cette partie du pays,
je pense. M. l'ORATEUR, qu'il pourra m'être
permis d'inscrire ma voix en faveur de
'amendement que vous tones actuellement
en vos mains, sans encourir le reproche
d'inconséquence comme d'autres députés
l'ont encouru dans le cours de ce débat. Je
n'aurais certainement as porté la parole en
cette circonstance, M. l'ORATEUR, n'eût été
certaine affaire d'une nature personnelle que
l'on a soulevée à mon sujet comme député
du collége électoral que je représente, ou
que je ne représente pas, comme on a bien
voulu le dire. (Rires.—Ecoutes!) Selon
la doctrine du procureur-général du Haut- Canada, il semblerait qu'une fois élu membre
de cette chambre, je n'ai que faire de consulter le peuple qui m'a envoyé ici, mais
que je ne dois consulter que moi-méme
quand il s'agit de ses intérêts les plus chers.
Permettez—moi de ne pas accepter cette
doctrine; si je me suis vu obligé d'ex
1015
ercer mon jugement, je l'ai fait honnètement, librement et sans crainte, me souciant
fort peu des conséquences qui pouvaient
m'être personnelles et des menaces qu'on
fesait entendre à demi-voix. Ces choses, M.
l'ORATEUR, n'ont aucune influence sur moi,
et toujours je suivrai la ligne de conduite
qui me paraîtra la plus avantageuse aux intérêts de mon pays et de mes commettants.
(Ecoutez!) Peu m'importe que ces derniers
me renvoient en parlement ou non; tant que
j'agirai comme représentant du peuple, je le
ferai sans peur. (Ecoutez!) Je regrette de
voir que l'hon. président du conseil, en
parlant de mon comté et de moi-même, ait
jugé à propos de s'acharner a moi personnellement, et de rappeler qu'à certaines occasions
je n'ai dû mon siège en cette chambre qu'à
des majorités bien minimes.
M. RYMAL.—Mais je déclare que c'est
vrai, car, M. l'ORATEUR, je me rappelle
parfaitement bien qu'un hon. député qui
occupe aujourd'hui un rang élevé dans le
gouvernement a été deux fois battu, (Ecou:
tes et rires!)-—et je dois avouer que l'appui
que je lui ai donné en certaines occasions a
puissamment contribué à amoindrir mes majorités. (Ecoutez et rires.)
La question est alors mise aux voix sur
l'amen «ment de l'hon. M. CAMERON, qui
est négativée sur la division suivante:
POUR. — MM. Biggar, Bourassa, Cameron
(Ontario Nord), Cameron (Peel), Caron, Coupal,
De Boucherville, Dorion (Drummond et Arthabaska), Dorion (Hochelaga), Dufresne (Iberville),
Fortier, Gagnon, Gaudet, Geoffrion,
Gibbs, Halton, Houde, Huntington, Joly, Labreche—Viger Laframboise. Lajoie, Macdonald
(Cornwall) Macdonald (Toronto Ouest), Morrison, O'Halloran, Pâquet, Perrault Pouliot,
Ross (Prince—Edouard) Rymal, Scatcherd, Thibaudeau, Wallbridge (Hastings Nord), et
Webb.
35.
CONTRE.—MM. Abbott, Alleyn, Archambeault,
Ault, Beaubien, Bellerose, Blanchet, Bowman,
Bown, Brousseau, Brown, Burwell, Carling,
Proc.-Gen. Cartier, Cartwright, Cauchon, Chapais, Cockburn, Cornellier, Cowan, Currier,
Denis, De Niverville Dickson, Duckett, Dufresne
(Montcalm), Dunsford, Evanturel Ferguson
(Frontenac), Ferguson (Simcoe Sud), Galt,
Gaucher, Harwood, Haultain, Higginson, Howland, Huot, Irvine, Jackson, Jones (Leeds
Sud),
Knight, Langevin, LeBoutilier Proc .- Gén.
Macdonald, MacFarland, Mackenzie (Lamberton)
Mackenzie (Oxford Nord), Magill, McConkey,
McDougall McGee, McGiverin, McIntyre,
McKellar, Morris, Parker, Pinsonneault, Pope,
Poulin, Poupore, Powell, Raymond, Rémillard,
Robitaille, Rose, Ross (Champlain). Ross (Dundas), Scoble, Shanly, Smith (Durham Est),
Smith (Toronto Est), Somerville, Stirton, Street,
Sylvain, Thompson, Tremblay, Walsh, Wells,
White, Willson, Wood Wright (Comté d'Outaouais) et Wright (York Est).—84.
L'
HON. M. HOLTON.—-Je vais, M.
l'ORATEUR, présenter un amendement qui,
je l'espère, ne sera pas ouvert aux objections
soulevées contre le dernier par l'hon. proc- gén. du Haut—Canada. Je vais donner lecture
de ma motion et l'accompagner de quelques
remarques seulement, vu que je n'entends
provoquer une discussion oiseusse ce sujet.
Je propose donc, M. l'ORATEUR:
"Que tous les mots après "Que" soient retranchés, et qu'ils soient remplacés les suivants:
" la dite résolution soit renvoy à un comité
général, afin qu'elle y soit amendée de manière à
exprimer l'espoir de cette chambre qu'aucun acte
(fondé sur les résolutions de la conférence des
délégués tenue à Québec en octobre dernier) qui
pourra être passé par le parlement impérial,
n'entrera point en opération avant que le parlement du Canada n'ait eu l'occasion
d'en examiner
les dispositions, et n'ait, après la prochaine élection générale, prié Sa Majesté
de lancer sa proclamation royale pour donner effet on dit acte."
L'
HON. M. HOLTON— D'hon. députés
disent que c'est le même, mais ils ne tarderont pas à voir le contraire. La présente
résolution n'affirme pas le contraire de la
proposition votée par cette chambre, mais
elle la complète, en ce sens qu'elle est à
l'effet de demander que tout acte passé par
le parlement impérial et fondé sur les résolutions de la conférence, soit soumis à
la
chambre et au pays avant son adoption finale.
(Ecoutez!) M. l'ORATEUR, il s'agit ici d'une
question bien importante, mais je ne désire
pas énoncer autre chose ne la teneur de
cette résolution, car je l'ai dit, mon but n'est
pas de provoquer une longue discussion.
Tout l'échafaudage de mon argumentation
repose sur la théorie que le peuple du
Canada désire a porter des modifications à
sa constitution. Naturellement, nous savons
que la souveraineté suprême appartient
au parlement impérial; naturellement, nous
savons que nous tenons de ce dernier le
pouvoir de changer notre constitution et
1016
de la remanier d'une manière ou d'une
autre, — mais nous supposons toujours
pour le moment que le parlement impérial
acquiescera à notre demande. Or, M.
l'ORATEUR, nos ministres qui possèdent
la confiance de la majorité de cette chambre,
et probablement aussi la confiance de la majorité du peuple de cette province, vont
s'aboncher avec le gouvernement de Sa Majesté en
Angleterre, et lui demander de soumettre au
parlement impérial l'opportunité d'opérer un
changement de la constitution de pays;—
mais M. l'ORATEUR, les ministres ne nous
ont sufisamment expliqué comment ces
résolutions vont être transformées en un acte
du parlement; ils ne nous ont pas dit
lesquelles de ces résolutions devront former
partie de notre nouvelle constitution, et
quelles devront être mises à exécution
d'une autre manière—mais, M. l'ORATEUR,
il importe grandement au peuple de cette
province de savoir ce que sera réellement sa
constitutlon avant qu'elle ne soit finalement
adoptée. (Ecoutez!) Je désire en cette
circonstance rappeler aux hou. députés du
Bas-Canada l'expérience du passé sur cette
question. En 1862, le gouvernement de
M. HINCKS réussit à faire voter dans cette
chambre une adresse en faveur d'un changement dans la constitution du conseil législatif.
Cette adresse ne demandait qu'un amendement à l'acte d'union en vue de modifications
à supporter dans la constitution du conseil
législatif seulement—mais au lieu de ce
simple changement dans l'acte constitutionnel tel qu'amendé par la chambre,
pouvoir fut conféré à la legislature d'effectuer ce changement, et, en même temps,
la
clause de l'acte d'union relative au vote des
deux tiers fut abrogée, sans que personne
jusqu'à ce jour ait encore pu savoir pourquoi.
(Ecouter!) Quelle garantie avons-nous
qu'un pareil événement ne se reproduire
pas? Les hon. députés du Bas-Canada
doivent encore avoir présente à la mémoire
l'expérience encore toute récente de nos
changements constitutionnels. La modification que l'on a fait subir a l'acte d'union
en 1852 fut désavouée par tous les représentants du Bas-Canada—par le peuple du
Bas—Canada sans exception—et a été le
résultat de négociations inexpliquées jusqu'à.
ce jour. Eh bien! M. l'ORATEUR, présupposant que le peuple de ce pays désire se
donner une nouvelle constitution—reconnaissant au gouvernement impérial le pouvoir
de
décréter tout changement qu'il peut juger à
propos, mais admettant en même temps le
désir bien connu de ce dernier de concourir
dans nos vues à ce sujet,—je propose que cette
chambre demande dans cette adresse que
tout acte fondé sur les résolutions de la conférence tenue à Québec, en octobre dernier,
ne
soit mis en force qu'à la réquisition des deux
branches de la législature du Canada. Après
avoir ainsi en quelques mots expliqué la
résolution que j'ai l'honneur de reposer, je
la place entre vos mains, M. l'ORATEUR.
(Ecoutez!)
L'
HON. A. A. DORION—De même que
pour l'amendement preposé par l'hon. député de Peel, je ne désire pas discuter au
long le mérite de l'amendement de mon
bon ami le député de Chateauguay, mais je
veux seulement en expliquer le but en
quelque mots. La chambre vient de rejeter
un amendement par lequel l'on demandait
qu'un appel au peuple fût fait en cette province avant que le gouvernement impérial
ne fût appelé a légiférer sur l'adresse de
cette chambre. Maintenant, le but de
l'amendement proposé par l'hon. député de
Chateauguay est de demander que a constitution qui sera adoptée en Angleterre ne
devienne en force qu'après qu'elle y aura été
soumise a la législature de cette province,
après la prochaine élection générale, et
qu'une adresse aura été adoptée demandant
de la mettre en force. Nous demandons
aujourd'hui au gouvernement impérial, par
l'adresse qui vient d'être adoptée, de soumettre à sa législature impériale un acte
de
confédération des provinces de l'Amérique
Britannique du Nord. Si au lieu d'une
confédération, le parlement décrétait une
union législative entre les colonies, je demande aux membres de cette chambre qui
protestent contre une union législative, avec
quelle grâce ils se présenteraient devant
leurs électeurs,— après avoir refusé de les
consulter,—s'ils refusant encore eux—mêmes
de vouloir reconsidérer la mesure lorsqu'elle
nous reviendra après avoir été passée par
le parlement impérial? Tout ce que nous
demandons par cette motion, c'est que l'acte
qui sera passé soit soumis à notre législature et ratifié et approuvé par nous avant
qu'il ne sort définitivement mis en force.
En un mot, nous demandons qu'il nous soit
permis de refuser la nouvelle constitution
si elle ne nous convient pas. (Ecoutez!
écoutez!) Qu'on se rappelle ce qui a été
1017
fait en 1866, lorsque nous avons demandé
au parlement impérial de changer la constitution du conseil législatif et de le rendre
électif,—(écoutez! écoutes!)—qu'on se rappelle qu'il nous a donné une mesure différente
de celle que nous avions demandée.
L'on nous a bien donné le droit de rendre
le conseil législatif électif, c'est vrai, mais
en même temps l'on a fait disparaitre de
l'Acte" d'Union la disposition qui décrétait
que la base de représentation dans l'assemblée
législative ne pourrait être changée-qu'avec
le concours des deux tiers des membres de
la législature. Et, en face de ce fait, qui
nous dit qu'aujourd'hui le gouvernement
impérial ne nous donnera as une union
législative, avec la représentation basée sur la
population, au lieu d'une confédération? Qui
nous dit que l'on ne changera pas la clause
relative au conseil législatif et qu'on n'y
appliquera pas aussi le principe de la représentation d'après la population? (Ecoutez!
écoutes!) Eh bien! c'est afin de nous mettre
en garde contre la possibilité de changements de cette nature que nous proposons
maintenant cet amendement. Il y a beaucoup
de membres de cette chambre qui craignent
encore que l'Angleterre, voyant le refus des
provinces maritimes d'accéder à ce projet de
confédération, ne nous donne une confédération des deux Canadas. Et je le demande
quand nous voyons le ministère nous dire
sur tous les tons qu'il faut absolument opérer
des changements constitutionnels, qu'il y a
urgence, que l'on ne peut même retarder
d'une semaine ni prendre le temps de discuter
les amendements que nous aurions à proposer
au projet, qu'il leur faut une mesure de suite,
sans quoi il arrivera des choses dont la pensée
seule fait trembler,—je le demande, est—il
croyable que le gouvernement impérial
consente à imposer la confédération aux
provinces inférieures, et ne pourra-t—il pas
changer ce projet de manière à l'appliquer
aux deux Canadas seuls? (Ecouter! écoutes!) Voici ce qui arrivera, au moins ce
qui pourrait fort bien arriver, c'est que
lorsque nos ministres seront rendus en Angleterre et auront exposé au gouvernement
impérial l'urgence d'un changement de constitution pour le Canada, celui-la voyant
que
les provinces d'en—bas ne veulent pas de la
confédération, décrétera une mesure de confédération pour les deux provinces, laissant
aux provinces maritimes le droit d'y entrer
quand elles le jugemnt convenable. Cela
est très possible,—et le seul moyen de nous
mettre en garde contre une pareille éventualité, c'est de demander à Sa Majesté que
toute mesure impériale au sujet de changements constitutionnels ne puisse devenir
en
force sans être soumise et ratifiée par la
législature du Canada. (Ecoutez! écoutez!)
L'
HON. Proc.—Gén.CARTIER—M. l'ORATEUR, —- En répsone à ce que vient de dire
l'hon député d' Hochelaga, je me contenterai
de faire observer aux membres de cette
chambre qu'ils n'ont pas besoin de s'effrayer
des appréhensions ni des prédictions de
l'hon. député. J'ai déjà déclaré, en mon
nom et au nom du gouvernement, que les
délégués qui iront en Angleterre n'accepteront aucun acte du gouvernement, impérial
qu'un acte basé sur les résolutions adoptées
par cette chambre, et ils n'en rapporteront
pas d'autre. (Ecoutez! écoutes!) J'ai engagé ma parole d'honneur et celle du gouvernement
à cet effet,—et ma parole d'honneur
veut, je pense, devant la chambre et devant
le pays, toutes les appréhensions de l'hon.
député d'Hochelaga (Applaudissements.)
M. MACFARLANE— J'avais eu l'intention, M. l'ORATEUR, d'expliquer la ligne de
conduite que j'ai suivie avant ne le dernier
vote eut été enregistré, mais l'hon. député
de Chateauguay me fourniten ce moment l'occasion de le faire avec avantage. (Ecoutez!)
Il fallait certainement avoir une bonne dose
de courage pour voter contre le dernier
amendement, car il était à coup sûr très
rationnel. A première vue, je fus presque
tenté de l'accepter, et ce ne fut qu'après en
avoir tout à fait compris le sens et la portée
que je me décidai à m'y opposer. L'on se
rappellera qu'avant l'adoption des résolutions, j'avais exprimé l'espoir qu'il y aurait
appel au peuple, et c'est avec cet objet en
vue, M. l'ORATEUR, que je votai contre
votre décision relativement à un amendement qui fut fait avant la passation de la
mesure. Cette chambre ayant ratifié le
jugement que vous avis: prononcé, il ne
me restait plus, comme représentant du
peuple, qu'à décider si nous devions accepter
le projet de confédération ou le rejeter.
(Ecoutez!) Je n'étais pas prêt à recourir
au dernier de ces moyens, et je me décidai
à donner mon appui au gouvernement,
déclarant qu'une union des provinces de
l'Amérique Britannique du Nord étant une
sage mesure. Ces résolution adoptées, l'on
nous demande aujourd'hui de voter une
1018
adresse à Sa Majesté fondée sur les dispositions qui y sont énoncées. A cette adresse,
et non pas aux résolutions, l'hon. député
de Peel proposa un amendement; or,
appuyerce dernier, aurait été simplement
nulifier mon premier vote, et formuler une
adresse différente des résolutions mêmes sur
lesquelles la présente adresse doit être basée;
c'était sacrifier un grand projet politique
pour supporter une motion qui, n'étant pas
approfondie, semblait au premier coup- d'œil une motion bien populaire et légitime,
mais-qui de fait était une motion propre a
détruire l'effet des résolutions et dont la
seule valeur consistait à pouvoir fournir des
armes inégales sur le champ clos d'un tournois populaire. (Ecoutez!) Si l'hon député
de Peel eut en le désir de faire triompher son amendement, pourquoi, lui, ancien
membre de cette chambre et si bien versé
dans les usages et la tactique parlementaires,
ne nous l'a-t—il pas soumis avant de permettre au procureur—général de proposer la
question préalable, et au moment opportun
où vous—même, M. l'ORATEUR, l'auriez
déclaré admissible? (Ecoutez!), L'eût—il
fait alors, il est certain que nous aurions été
en mesure de voter sur le mérite de l'amendement même. Mais aujourd'hui que les
résolutions sont passées, il n'a plus le droit
de réclamer ce privilège. Après toutes les
difficultés qui ont embarrassé la marche du
gouvernement de ce pays, qui ont existé
pendant si longtemps, et qui, je puis le dire,
ont produit la présente coalition, il était
nécessaire de songer à opérer certains changements dans notre constitution. Il nous
était impossible de continuer a légiférer au
milieu des sentiments hostiles qui régnaient
dans cette chambre, ou à essayer de gouverner
un peuple dans l'esprit duquel les animosités
étaient aussi acerbes qu'elles paraissaient
l'être chez ses représentants. Pour remédier à cet état de choses, je vous le demande,
M. l'ORATEUR, quelle mesure pouvait—être
plus acceptable que la mesure actuelle?
(Ecoutez!) La question de confédération
n'est pas nouvelle, pour moi toujours. C'est
un plan que, durant le peu de temps que j'ai
été dans la vie publique, j'ai toujours été
disposé à appuyer,—-un plan qui plus que tout
autre devait contribuer au développement du
pays, et à notre prospérité comme nation.
Après avoir, il y a quelques minutes, sanctionné ce principe par notre vote, en déclarant
que ces résolutions soient adoptées;
après avoir entendu le gouvernement nous
dire qu'il ne consentira jamais à apporter
de modifications à la mesure; et sachant
bien que l'effet du rejet de cette adresse
serait de nous replonger dans les difficultés
politi nes dont nous commoncions à sortir,
j'en viens à la conclusion qu'il m'est impossible d'appuyer cet amendement ou toute
autre motion de cette nature. (Ecoutez!)
Envisageant cette question au point de vue
du passé et de l'avenir, je ne puis m'empêcher de' songer aux avantages militaires,
politiques et nationaux que nous retirerons
de cette mesure; placés comme nous le
sommes sur la frontière d'une nation dont
les citoyens connaissent bien l'art de la
guerre et dont les légions portent actuellement la mort sur les champs de bataille,
isolés du peuple auquel nous devons allégeance, le protecteur de nos droits, à la
vérité, mais dont les actes peuvent occasionner l'invasion de notre pays et en faire
le champ de bataille entre l'Angleterre et
les Etats-Unis, il nous importe de combiner
nos forces individuelles, de concentrer nos
moyens épars et ainsi de concentrer avec la
mère-patrie pour repousser énergiquement
toute aggression de l'étranger. (Ecoutez!
écoutez? (Ce n'est pas en perpétuant l'état
de choses actuel, ou en renouvellant les
les luttes entre le Haut et le Bas-Canada, que
nous accroîtrons la force de nos armes ou la
grandeur de notre nom; ce n'est pas ainsi
que nous développerons nos ressources et en
retirerons des revenus nécessaires pour les
défenses; ce n'est pas ainsi que nous pourrons
devenir un peuple libre et indépendant, au
cas où l'An ieterre nou—; effacerait de la liste
de ses colonies. Mais en cimentant nos relations locales, en concentrant sous un seul
gouvernement les vastes territoires du Nord- Ouest et les provinces maritimes si populeuses,
n'ayant que les mêmes intérêts à
servir, un seul objet en vue, nous nous trouverions placés de manière à nous maintenir
indépendants de toute puissance étrangère,
à perpétuer les biens qui nous attachent à la
Grande-Bretagne; et si l'heure venait à
laquelle il faudrait rompre ces liens, les
provinces de l'Amérique Britannique du
Nord ne constitueraient pas une suite de colonice isolées et sans défense, mais une
puissante nation, composée à l'ouest de robustes
cultivateurs faisant valoir le sol productif,
et a l'est de braves marins récoltant les
richesses de la mer, les uns prêts a défendre
1019
nos foyers, les autres à protéger nos droits
sur les côtes, tous s'unissent au besoin pour
appuyer l'Angleterre dans ses bons comme
dans ses mauvais jours. (Applaudissements.)
Je pense que le moment est venu de prendre
une pareille détermination, et de faire disparaître les hostilités qui ont existé
entre le
Haut et le Bas—Canada, et de nous rendre
plus puissants en nous unissent aux autres
provinces. Je pense que j'exprime la pensée
de tout le peuple du Haut—Canada, au moins
celle de l'arrondissement que j'habite, quand
je dis que l'opinion publiques est unanimement favorable au projet de confédération
des provinces. (Ecoutez!) A part cela,
M. l'ORATEUR, bien que certains détails de
la mesure soient ouverts aux objections, je ne
suis pas prêt à sacrifier le principe admis
dans ces résolutions, principe ui accorde au
Haut-Canada ce qu'il demande depuis des
années,—je veux parler de la représentation
d'après la population,—concession que le Bas- Canada n'a pas cessé de nous refuser;
je ne
saurais donc, à cause de ces détails que
l'on pourra perfectionner plus tard, compromettre les succès que nous avons obtenus
dans cette direction. (Ecoutez!) Et loin
de vouloir, comme mon hon. ami de South- Hastings, affirmer que la mesure sera le
tombeau du Nord Ouest, je crois, au contraire, que l'établissement de ce vaste territoire
ne s'en effectuera que plus promptement. Avant longtemps nous verrons ces
vastes pleines habitées par une population
dense établie sur le haut du Winipeg et la
Vallée de la Saskatchewan, jusqu'à Vancouver. Ce qu'il nous manque pour atteindre
ce but, c'est un gouvernement prêt a y encourager la colonisation, car la contrée
est fertile autant que notre province, et d'une aussi
vaste étendue. Au Nord—Ouest, se trouve sous
la dépendance de l' Angleterre, un immense
territoire qui n'a pas encore été réclamé,
dont la richesse minérale et agricole est
incalculable,—un territoire offrant à l'immigrant le choix de ses plaines fertiles,
et au
mineur la richesse de ses trésors cachés. La
mesure actuelle aura donc l'effet de faire établir cet immense territoire, de dévélopper
ses ressources inconnues, d'ouvrir ses mines
inépusiables et en même temps de créer un
peuple nouveau, accroître les revenus, et donner à l'élément anglais sur ce continent
un
nouvel essort et une influence plus décisive.
Tout en dévéloppent nos ressources dans
l'ouest, ce projet offre un nouveau débouché
aux produits de nos pêcheries, dont la presse
tion est aussi nécessaire que leur valeur est
incaculable. (Ecoutez!) Croyant encore que
la mesure actuelle produira la réforme sociale
des Canadiens et fera taire nos hostilités
politiques; qu'elle ouvrira un champ plus
vaste à nos travaux et à nos opérations agricoles; que les relations commerciales
qu'elle
aura l'effet de créer accroîtront nos revenue,
je le déclare, je suis prêt à l'adapter même
à ce point de vue égoïste; mais j'y vois également une politique plus élevée et un
champ
plus vaste ouvert à notre énergie et à nos
capitaux; c'est le premier pas fait pour
fonder sur le territoire Britannique une
ligne de communication du Pacifique à l'Atlantique, et nous assurer le commerce de
transport de l'Asie et de l'Est avec tous les
profits qu'il nous garantit. En un mot, M.
l'ORATEUR, cette mesure contient le germe
d'un gouvernement bien puissant pour la
prospérité des colonies, elle embrasse tout,
depuis les affaires civiles jusqu'aux défenses
militaires, sans compter qu'elle ajoute un nouveau prestige à l'empire, et qu'elle
ne saurait manquer d'exercer une profonde infinence sur les destinées de ce grand
continent.
C'est pour ces raisons que j'ai voté contre
le dernier amendment, et que je me déclare
également prêt à voter contre celui—ci aussi.
(Ecoutez!)
La chambre alors se partage sur l'amendement de l'hon. M. HOLTON qui est rejeté
sur la division suivante .
POUR.—MM. Biggar, Bourassa, Cameron (Ontario Nord), Caron, Cornellier, Coupal, DeBoucherville,
Dorion (Drummond et Arthabaska),
Dorion (Hochelaga), Dufresne (Ibervllle), Fortier,
Gaudet, Geoffrion, Gibbs, Halton, Houde, Huntington, Labrèche-Viger, Laframboise,
Lajoie,
Macdonald (Cornwall), Macdonald (Toronto
Ouest), Morrison, O'Halloran, Pâquet, Perrault,
Rymal, Scatcherd Thibaudeau, Tremblay et
Wallbridge (Hastings Nord).—31.
CONTRE.—MM. Abbott, Alleyn, Archambeault,
Ault, Beaubien, Bellerose, Blanchet, Bowman,
Bown, Brousseau, Brown, Burwell, Carling, Proc.—
Gén. Cartier, Cartwright, Cauchon. Chapais,
Cockhurn. Cowan, Currier, Denis, De Nivervllle,
Dickson, Duckett, Dufresne (Montcalm), Duneford,
Evanturel, Ferguson (Frontenac), Galt, Gaucher,
Harwood, Haultain, Higginson, Howland, Jackson, Jones (Leeds Sud), Knight, Langevin,
Le
Boutillier, Proc.—Gén. Macdonald. MacFarland,
Mackenzie (Lambton), Mackenzie (Oxford Nord),
Magill, McConkey, McDougall, McGee, McIntyre,
McKellar, Morris, Parker, Pinsonneault, Pope
Poulin, Poupore, Powell, Raymond, Rémillard,
1020
Robitaille, Rose, Ross (Champlain) Ross (Dundas), Ross (Prince-Edouard), Scobie, Shanly,
Smith (Durham Est), Smith (Toronto Est), Somerville, Stirton, Street, Sylvain, Thompson.
Walsh,
Webb, White, Willson, Wood et Wright (York
Est). —79.
L'
HON. J. S. MACDONALD—Je me
lève, M. l'ORATEUR, pour proposer un autre
amendement. (Signes d'impatience.) Je dois
déclarer à cette chambre qu'il ne m'a jamais
été donné de voir une mesure d'une aussi
importance que celle-ci passer sans
qu'on n'ais tenté d'y apporter plus d'amende
ments. Je ne propose pas non plus cette
motion dans le simple but de la faire inscrire
sur les journaux de cette' chambre, car je
sens bien que les vues que je vais exprimer
et auxquelles j'ai toujours tenu depuis que
j'ai l'honneur d'être membre, ne seront peut- être pas pa partagées par un bien grand
nombre
de députés. Je ne désire pas que l'on porte
atteinte aux droits de la minorité catholique
romaine du Haut-Canada, pas plus qu'aux
droits et priviléges de toute autre dénomination. Mais je veux rappeler à cette chambre
que l'expérience que nous fournit ce pays—
pour ne pas aller chercher d'exemple chez
la république voisine—prouve que chaque fois
que l'on a refusé à la majorité le droit de
légiférer sur un sujet donné, cette tentative
a toujours été suivie des conséquences les
plus graves. Qu'il me suffise de mentioner
la question des réserves du clergé. L'on se
rappelle qu'aux termes de l'Acte d'Union il
était défendu de légiférer sur cette question,
cependant elle a donné lieu à des luttes sérieuses pendant plusieurs années. La coustitution
primitive des Etats-Unis ne permettait pas au congrès de s'occuper de la
question de l'esclavage, cependant le peuple
ne tarda pas à en demander la suppression, et cette agitation a produit la guerre
civile. (Ecoutez! écoutez!) La question des réserves du clergé a amené la
rébellion dans le Haut-Canada. J 'affirme
donc, M. l'ORATEUR, qu'en imposant une
restriction constitutionnelle au sujet des
écoles de la minorité, nous semons la discorde qui ne tardera pas à produire les plus
vives animosités, à moins d'amender la constitution. La minorité sera toujours bien
protégée dans les questions qui touchent de
près à sa foi ou à son système (d éducation
dans une colonie vivant à l'ombre du drapeau anglais; mais si vous soustrayez expressément
cette question au contrôle de la
majorité, les droits de la minorité ne seront
pas suffisamment sauvegardés ni dans l'une
ni dans l'autre section de la province, car
vous auras démontré que vous ne croyes pas
à la justice de la majorité. Il est donc de
notre devoir, M. l'ORATEUR, de veiller à ce
qu'une question qui nous touche de si près
que celle de l'éducation de nos enfants—
une question qui a déjà causé tant d'excitation dans le Haut-Canada—ne soit pas soustraite
au contrôle de la législature locale.
Nous ne devons pas enlever a cette dernière
un pouvoir qn'e le désirera exercer précisément parce qu'on voudra l'on priver. Soyez-
en persuadé, M. l'ORATEUR, les autres corps
religieux ne manqueront pas de protester
contre les droits exclusifs ou les priviléges
quelconques que l'on pourra conférer à une
croyance religieuse en particulier. Je serais
étonné de voir un membre de cette chambre
se lever et dire à la minorité protestante du
Bas-Canada ou à la minorité catholique du
Haut-Canada: " Ne comptes pas sur la
justice de la majorité." A-t-on jamais connu
un pays où la majorité ne possédait pas le
contrôle des affaires et où la minorité ne s'y
soumettait pas? Est-ce qu'en Angleterre et
en France la majorité ne gouverne pas et
que la minorité n obéit pas? Je n'ai jamais
connu de pays où il n'en était pas ainsi. La
minorité est il. l'abri de tout empiétement
sur ses droits, et je suis prêt pour ma part
à me confier à la justice de la majorité du
Haut-Canada quand il s'agira de la protection des libertés civiles et religieuses
des
catholiques romains de cette section du pays.
Je suis rendu à un âge asser avancé, et je
désire d'autant plus faire inscrire mes opinions dans le journal de cette chambre
qu' avant longtemps j'aurai la satisfaction de
pouvoir dire— peut-être pas dans l'enceinte
de cette chambre—que j'ai protesté contre
des résolutions destinées à empêcher la majorité du peuple du Haut-Canada d'exprimer
librement son opinion et d'exercer un pouvoir
qui lui revient de droit. Mon amendement
est a l'effet que:—
"Les mots suivants soient ajoutés à la motion
principale: " et qu'il soit donné instruction au
dit comité d'examiner si aucune restriction constitutionnelle qui enlèversa à la législature
locale
du Haut-Canada l'entier contrôle et la direction
de l'éducation, sujet seulement à l'approbation ou
à la désapprobation du parlement général, n'aura
pas l'effet de créer beaucoup du mécontentement
et de jalousie entre les divers corps religieux dans
cette section de la province."—
1021
Si l'on croit que l'on va apaiser l'aigreur
des sentiments produits dans le Haut-Canada
par la tentative de perpétuer un certain
système d'éducation, l'on se trompe grandement. Je désire donc connaître l'opinion
des membres de cette chambre sur le sujet,
je désire savoir s'ils sont d'avis que la restriction proposée ar la constitution
est de nature
à produire l' harmonie, ou s'il ne vaut pas
mieux laisser les catholiques du Haut-Canada
et les protestants du Bas Canada se protéger
eux-mêmes, ou plutôt compter pour cette
protection sur le bon sens et la justice de
leurs concitoyens. (Ecoutez!)
M. A. MACKENZIE—Ayant déja, M.
l'ORATEUR, voté en faveur des résolutions
dans leur ensemble, je ne saurais avoir
d'hésitation à repousser cet amendement,
mais en le faisant je désire expliquer la
position que je prends. (Ecoutez! écoutes!)
Si l'hon. député de Cornwall (M. J. S.
MACDONALD) eût déployé le même gèle
contre le système des écoles séparées, alors
qu'il avait le pouvoir d'empêcher toute
législation à ce sujet, il se serait évité ainsi
qu'au parti qui l'a maintenu au gouvernement
une somme considérable de troubles. Il
semble bien singulier que lui, qui s'est montré
si disposé à encourager le système des écoles
séparées, soit aujourd'hui si gélé pour le
contraire. (Ecoutez!) La motion de l'hon.
député n'a d'autre but que de susciter de
l'opposition à la mesure, et de placer autant
de Haut-Canadiens que possible dans une
fausse position; mais je me bornerai à lui
dire, quant à moi, qu'après avoir combattu
autant que qui que ce soit pour empêchcr la
passation de toute loi qui aurait l'effet
de désorganiser notre système d'écoles communes, et ayant constaté que tous mes efforts
étaient vains, "en suis venu à la conclusion
que notre position ne saurait être pire quand
même les résolutions seraient mises à effet.
(Ecoutez!) J'ai dit dans une autre occasion
que je ne pensais pas que le système des écoles
séparées pût entrainer des conséquences
désastreuses, pourvu qu'il ne fut pas encouragé davantage. Je ne crois pas que ces
écoles puissent produire beaucoup de mal, si
elles ne prennent pas plus de développement
qu'elles n'en ont aujourd'hui; c'est pourquoi,
tout en étant opposé à ce système, je suis prêt
à accepter ce projet de confédération, bien
qu'il ait l'efi'et de perpétuer un petit nombre
d'écoles séparées. (Ecoutez!) Sons l'union
législative actuelle, il nous est impossible de
songer à l'abrogation de la loi concernant…
les écoles séparées; il est même fort douteux
ne nous puissions opposer une digue à
l' envahissement de ce principe. (Ecoutez!)
Notre position ne sera pas plus mauvaise
sous la nouvelle constitution, et sous un
rapport nous aurons un avantage incontestable, en ce sens que les partisans des écoles
séparées se verront dans l'impossibilité d'opérer des modifications à la loi. C'est
tout
simplement substituer le certain à l'incertain.
Je regrette vivement que l'hon. député ait
cru nécessaire de proposer cette résolution.
L'amendement de l'hon. J. S. MACDONALD
est alors mis aux voix et rejeté sur la division suivante:—
POUR.—MM. Biggar, Biggar, Burwell Macdonald
(Cornwall), Macdonald (Toronto Ouest), Ross
(Prince-Edouard), Rymal Scatcherd et Wallbridge (Hastings Nord) .—8.
CONTRE. — MM. Abbott Alleyn, Archanbeault, Ault, Beaubien, Bellerose, Blanchet,
Bourassa, Bowman, Bown, Brousseau, Brown,
Cameron (Ontario Nord), Carling, Caron, Proc.- Gén. Cartier, Cartwright, Cauchon,
Chapais,
Cockburn, Cornellier, Coupal. Cowan, Currier,
De Boucherville, Denis, De Niverville, Dickson,
Dorion (Drummond et Arthabaska) Dorion
(Hochelaga). Duckett, Dufresne (Iberville),
Dufresne (Montcalm), Dunsford, Evanturel,
Ferguson (Frontenac), Fortier, Galt, Gaucher,
Gaudet, Geoffrion, Gibbs, Harwood, Haultain,
Higginson, Holton, Houde, Howland, Jones
(Leeds Sud), Knight, Labreche-Viger, Laframboise, Lajoie, Langevin, Le Boutillier,
Proc.- Gén. Macdonald, Mackenzie (Lambton), Mackenzie (Oxford Nord), Magill McConkey,
McDougall, McGee, McGiverin, McIntyre, McKellar. Morris, Morrison, Pâquet, Parker,
Perrault, Pinsonneault, Poulin, Poupore, Powell,
Raymond, Rémillard, Robitaille, Rose, Ross
(Champlain) Ross (Dundas), Scoble, Shanly,
Smith (Durham Est), Smith (Toronto Est),
Somerville, Stirton, Sylvain, Thompson, Tremblay, Walsh, Webb, Wells, White, Willson
et
Wood—95.
M. BOURASSA propose alors pour amendement:—
"Que les mots suivants soient ajoutés à la
motion principale: ' Et qu'il soit donné instruction au dit comité de pourvoir à ce
que la minorité catholique romaine du Haut-Canada soit mise
sur le même pied, quant à l'éducation, que la
minorité protestante du Bas-Canada. sous les
gouvernements locaux de la confédération des
provinces de l'Amérique Britannique du Nord."
POUR.—MM. Bourassa, Caron, Coupal, Dorion
(Drummond et Arthabaska), Dorion (Hochelaga),
Dufresne (Iberville), Fortier, Geoffrion, Holton,
1022
Houde, Labreche-Viger, Laframboise, Lajoie,
Macdonald (Cornwall), O'Halloran, Pâquet,
Perrault, Pinsonneault, Rymal et Sylvain — 20.
CONTRE.—MM. Abbott, Alleyn, Archambeault,
Ault, Beaubien, Bellerose, Biggar, Blanchet,
Bowman, Bown Brousseau, Brown, Burwell,
Cameron (Ontario Nord), Carling, Proc.-Gén.
Cartier, Cartwright, Cauchon, Chapais, Cockburn,
Cornellier, Cowan, Currier, De Boucherville,
Denis, De Niverville, Dickson, Duckett, Dufresne
(Montcalm), Dunsford, Evanturel, Ferguson
(Frontenac), Ferguson (Simcoe Sud), Galt, Gaucher, Gaudet Gibbs, Harwood, Haultain,
Higgisson, Howland, Jones (Leeds Sud), Knight,
Langevin, Le Boutillier, Proc.-Gén. Macdonald,
Macdonald (Toronto Ouest), Mackenzie (Lambton), Mackenzie (Oxford Nord), Magill, McConkey,
McDougail, McGee, McGiverin, McIntyre,
McKellar, Morrîs, Morrison, Parker, Poulin, Pouore, Powell, Raymond, Rémillard, Robitaille,
Rose, Ross (Champlain), Ross (Dundas), Ross
(Prince-Edouard), Scatcherd, Scoble, Shanly,
Smith (Durham Est), Smith (Toronto Est),
Somerville, Stirton, Thompson, Tremblay, Wallbrige (Hastings Nord) Walsh, Wells, White,
Willson, Wood, et Wright (York Est).—85.
La motion principale est alors adoptée sur
division, et un comité spécial est nommé
en conséquence.
A SA TRÈS-EXCELLENTE MAJESTÉ LA REINE.
TRÈS-GRACIEUSE SOUVERAINE,
Nous, les très-fidèles et loyaux sujets de Votre
Majesté, les Communes du Canada, en parlement
réunies, approchons humblement de Votre Majesté
pour prier Votre Majesté qu'il lui plaise de faire
soumettre au parlement impérial une mesure ayant
pour objet l'union des colonies du Canada, de la
Nouvelle - Ecosse, du Nouveau - Brunswick, de
Terreneuve et de l'Ile du Prince-Edouard nous un
même gouvernement, la dite mesure devant être
basée sur les résolutions ci-jointes qui ont été
adoptées à une conférence des délégués de ces
colonies, tenue en la cité de Québec, le 10 octobre
1864. Et nous, les Communes du Canada, prions
humblement Votre Majesté de vouloir bien prendre
le tout en Votre gracieuse et favorable considération.
1. Une union fédérale sous la couronne de la
Grande-Bretagne aurait l'effet de sauvegarder les
intérêts les plus chers et d'accroître la prospérité
de l'Amérique Britannique du Nord, pourvu
qu'elle puisse s'effectuer à des conditions équitables pour les diverses provinces.
2. Le meilleur système de fédération pour les
provinces de l'Amérique Britannique du Nord, le
plus propre, dans les circonstances, à protéger les
intérêts des diverses provinces et à produire l'efficacité l'harmonie et la stabilité
dans le fonctionnement de l'union, serait un gouvernement chargé
du contrôle des choses communes a tout le pa s,
et des gouvernements locaux pour chacun des
deux Canadas, et pour la Nouvelle-Ecosse, le
Nouveau-Brunswick et l'Ile du Prince-Edouard,
lesquels seraient chargés du controle des affaires
locales dans leurs sections respectives,—des dispositions étant faites pour admettre
dans l'union, à
des conditions équitables, Terreneuve, le territoire
du Nord-Ouest, la Colombie Anglaise et Vancouver.
3. En rédigeant une constitution pour le gouvernement général, la convention ayant
en vue de
resserrer autant que possible les liens qui nous
unissent à la mère-patrie, et de servir les plus
chers intérêts des habitants de ces provinces,
désire, autant que le permettront les circonstances, prendre pour modèle la constitution
britannique.
4. Le pouvoir du gouvernement exécutif, résidera dans le souverain du royaume-uni
de la
Grande-Bretagne et d'Irlande, et sera administré
par le souverain ou le représentant du souverain,
suivant les principes de la constitution britannique.
5. Le souverain ou le représentant du souverain
sera le commandant en chef des milices de terre
et de mer.
6. Il y aura pour toutes les provinces fédérées
une législature ou parlement général, composé
d'un conseil législatif et d'une chambre des communes.
7. Pour former le conseil législatif, les provinces
fédérées seront considérées comme formant trois
divisions: 1°. Le Haut-Canada; 2°. Le Bas- Canada; 3°. La Nouvelle-Ecosse, le Nouveau-
Brunswick et l'Ile du Priuce-Edouard,—chaque
division ayant un égal nombre de représentants
dans le conseil législatif.
8. Le Haut-Canada sera représenté dans le
conseil législatif par 24 membres, le Bas-Canada
par 24, et les trois provinces maritimes aussi par
24, dont dix pour la Nouvelle-Ecosse, dix pour le
Nouveau-Brunswick et quatre pour l'Ile du Prince- Edouard.
9. La colonie de Terreneuve aura droit d'entrer
dans l'union projetée avec une représentation de
quatre membres dans le conseil législatif.
10. Les conditions d'admission ans l'union, du
territoire du Nord-Ouest, de la Colombie Britannique et de Vancouver, seront déterminées
par le
parlement fédéral et approuvées par Sa Majesté;
en ce qui regarde l'admission et les conditions
d'admission de la Colombie Britannique ou de
Vancouver, il faudra le consentement de la législature locale.
11. Les conseillers législatifs seront nommés à
vie parla couronne, sous le grand sceau du gouvernement général; mais ils perdront
leurs sièges
par le fait d'une absence continue de deux années
consécutives.
12. Les conseillers législatifs devront être sujets
britanniques nés ou naturalisés, avoir au moins
30 ans, posséder et continuer à posséder en propriétés foncières, une valeur de $4,000,
en sus de
toute hypothèque, dettes et obligations; mais en
ce qui a rapport à Terreneuve et à l'Ile du Prince—
Edouard, la propriété pourra étre réelle ou personnelle.
1023
13. Le conseil legislatif décidera toute question
relative à l'éliglbilté ou a l'inéligibilité de ses
membres.
14. Les premiers conseillers législatifs fédéraux
seront pris dans les conseils législatifs actuels
des diverses provinces, execpté pour ce qui regarde
l'ile du Prince—Edouard. S'il ne s'en trouvait pas
assez parmi ces conseillers qui fussent éligibles
ou qui voulussent servir, le complément devrait
nécessairement être pris ailleurs. Ces conseillers
seront nommés par la couronne à la recommandation du gouvernement général, et sur
la présentation des gouvernements locaux respectifs. Dans
ces nominations, on devra avoir égard aux droits
des conseillers législatifs qui représentent l'opposition dans chaque province, afin
que tous les
partis politiques soient, autant que possible, équitablement représentés.
15. Le président du conseil législatif fédéral,
usqu'à ce qu'il en soit autrement décidé par le
parlement, sera choisi parmi les conseillers législatifs et nommé par la couronne,
laquelle pourra, à
volonté, lui conserver ou lui ôter sa charge. Il
aura droit seulement d'une voix prépondérante
dans le cas d'une égale division des votes.
16. Chacun des vingt-quatre conseillers législatifs représentent le Bas-Canada dans
le conseil
législatif de la législature fédérale, sera nommé
pour représenter l'un des vingt-quatre collèges
électoraux nommés dans la cédule A du premier
chapitre des Statuts Refondus du Canada, et ce
conseiller devra résider en posséder son cons
d'éligibilité dans le collége dont la représentation
lui sera assignée.
17. La représentation, dans la chambre des
communes, aura pour base la population dont le
chiffre sera déterminé par le recensement officiel
fait tous les dix ans; et le nombre des représentants sera d'abord de 194, distribués
comme suit:
Haut-Canada... |
82 |
Bas-Canada... |
65 |
Nouvelle—Ecosse... |
19 |
Nouveau-Brunswick... |
15 |
Ile de Terreneuve... |
8 |
Ile du Prince—Edouard... |
5 |
18. Il ne pourra pas y avoir de changement
dans le nombre des représentants des diverses
provinces avant le recensement de 1871.
19. Immédiatement aprés le recensement de
1871 et chaque autre recensement décennal, la
représentation de chacune des provinces, dans la
chambre des communes, sera répartie de nouveau
en prenant pour base la population.
20. Pour les fins de ces nouvelles répartitions,
le Bas-Canada n'aura jamais ni plus ni moins que
65 représentants, et chacune des autres sections
recevra, a chaque telle nouvelle répartition, pour
les dix années qui suivront, le nombre de membres
auquel elle aura droit en prenant pour base de
calcul le nombre d'âmes représenté, suivant le
recensement alors dernier, par chacun des 65
membres du Bas-Canada.
21. Nulle réduction n'aura lieu dans le nombre
des représentants élus pour une province quelconque, à moins que le chiffre de sa
population n'ait
décru de 5 pour cent, ou plus, relativement à la
population totale des provinces fédérées.
22. En supputant, a chaque période décennale,
le nombre de représentants auquel chaque section
aura droit, on ne prendra en consideration les
fractions que lorsqu'elles dépasseront la moitié du
nombre qui donnera droit à un représentant, auquel cas ces fractions auront, chacune,
droit d un
représentant.
23. Les législatures des diverses provinces diviseront respectivement celles-ci en
comtés et en
définiront les limites.
24. Les législatures locales pourront, de temps
à autre, changer les districts électoraux pourles
fins de la représentation dans la législature locale,
et distribuer, de la manière qu'elles le jugeront
convenable, les représentants auxquels elles auront
respectivement droit.
25. Le parlement fédéral pourra, quand il le
jugera convenable, augmenter le nous des membres, mais il devra conserver les proportions
alors
existantes.
26. Jusqu'a ce qu'il en soit autrement décidé
par le parlement fédéral, toutes les lois qui, à la
date de la proclamation de l'union. seront en force
dans les'diverses provinces relativement à l'éligibilité ou l'inéligibilité des personnes
à siéger ou à
voler dans les assemblées législatives de ces provinces, ainsi qu'à la capacité ou
à l'incapacité des
électeurs, aux serments exigés des votants, aux
officiers-rapporteurs ou à leurs pouvoirs et devoirs,
aux élections, au temps que celles-ci peuvent
durer, aux élections contestées et aux procédures
y incidentes, aux vacations des siéges en parlement, à l'émission et a l'exécution
es nouveaux
brefs dans les cas de vacations occasionnées par
d'autres causes que la dissolution du parlement;
toutes ces lois s'appliqueront aux élections des
représentants de la chambre des communes, suivant la province pour laquelle ces représentants
seront élus.
27. La durée de chaque chambre des communes
sera de cinq ans, à compter du jour du rapport des
brefs d'élection, à moins que le parlement ne soit
dissous plus tôt par le gouverneur-général.
28. Il y aura une session du parlement fédéral
au moins une fois par année, de manière qu'il ne
devra jamais s'écouler plus de douze mois entre
la dernière séance d'une session et la première
séance de la session suivante.
29. Le parlement général aura le pouvoir de
faire des lois pour la paix, le bien-être et le bon
gouvernement des provinces fédérées (sans, toutefois pouvoir porter atteinte à la
souveraineté
de l'Angleterre), et en particulier sur les sujets
suivants:
l. La dette et la propriété publiques;
2. Le commerce;
3. L'imposition ou le règlement de droits de
douane sur les importations et sur les
exportations, excepté sur les exportations du bois carré, des billots, des
mâts, des espere, des madriers, du bois
acié, du charbon et des autres minéraux du Nouveau-Brunswick et de la
Nouvelle-Ecosse;
1024
4. L'imposition ou le règlement de droits
d'acciee;
5. Le prélèvement de deniers par tous autres
modes ou systèmes de taxation;
6. Les emprunts d'argent sur le crédit public;
7. Le service postal; _
8. Les lignes de bateaux à vapeur ou d'autres
batiments, les chemins de fer, les canaux et autres travaux qui relieront
deux ou plusieurs provinces ou se prolongeront au-delà des limites de l'une
d'elles;
9. Les lignes de bateaux vapeur entre les
provinces fédérles et d'autres pays;
10. Les communications té1égraphiques et l'incorporation des compagnies télégraphiques;
11. Tous autres travaux qui, bien que situés
dans une seule province, seront spécialement déclarés dans les actes qui
les autoriseront être d'un avantage
général;
12. Le recensement;
13. La milice, le service militaire et naval, et la
défense du pays;
14. Les amarquee, les bouées et les phares;
15. La navigation et ce qui a rapport aux bâtiments (shipping);
16. La quaranta ne;
17. Les pêcheries des côtes de la mer et de l'interieur;
18. Les traverses entre une province et un pays
étranger ou entre deux des provinces;
19. Le cours monétaire et le monnayage;
20. Les banques, l'incorporation de banques et
l'émission du papier-monnaie;
21. Les caisses d'épargne;
22. Les poids et mesures;
23. Les lettres de change et les billets promissoiree;
24. L'intérêt;
25. Les offres légales;
26. La banqueroute et l'insolvabilité;
27. Les brevets d'invention et de découverte;
28. Les droits d'auteur;
29. Les sauvages et les terres réservées pour
les sauvages;
30. La naturalisation et les aubains;
31. Le mariage et le divorce:
32. La loi criminelle, excepté la constitution
des cours de juridiction criminelle,
mais y compris la procédure en matière
criminelle;
33. Toute mesure tendante à rendre uniformes
les lois relatives à la propriété et aux
droits civils dans le Haut-Canada, la
Nouvelle—Ecosse, le Nouveau—Brunswick, l'Ile du Prince-Edouard et l'ile
de Terreneuve, ainsi que la procédure
de toutes les cours de justice dans ces
provinces. Mais nul statut à cet effet
n'aura force ou autorité dans aucune
de ces provinces avant d'avoir reçu la
sanction de sa législature locale;
34. L'établissement d'une cour générale d'appel
pour les provinces fédérées;
35. L'immigration;
36. L'agriculture;
37. Et, généralement, toutes les matières d'un
caractère général qui ne seront pas
spécialement et exclusivement réservées au contrôle des législatures et
des gouvernements locaux.
30. Le gouvernement général et le parlement
auront tous les pouvoirs dont ils auront besoin,
comme portion de l'Empire Britannique, pour remplir, envers les pays étrangers, les
obligations
naissant des traités qui existeront ou pourront
exister entre la Grande-Bretagne et ces pays.
31. Le parlement fédéral pourra aussi, quand
il le jugera convenable, créer de nouveaux tribunaux judiciaires, et le gouvernement
général
nommer en conséquence de nouveaux juges et de
nouveaux officiers, si la chose parait avantageuse
au public ou nécessaire à la mise en force des lois
du parlement.
32. Toutes les cours, les juges et les officiers
des diverses provinces devront aider le gouvernement générai et lui obéir dans l'exercice
de ses
droits et de ses pouvoirs; pour ces objets, ils
seront considérés comme cours, juges et officiers
du gouvernement général.
33. Le gouvernement général nommera et
paiera les juges des cours supérieures, dans les
diverses provinces, et des cours de comté, dans le
Haut—Canada, et le parlement déterminera leurs
salaires.
34. Jusqu'à ce qu'on ait refondu les lois du
Haut—Canada, du Nouveau—Brunswick, de la
Nouvelle-Ecosse, de Terreneuve et de l'Ile du
Prince-Edouard, les juges de ces provinces, qui
seront nommés par le gouvernement général,
seront pris dans leurs barreaux respectifs.
35. Les juges des cours du Bas—Canada seront
choisis parmi les membres du barreau du Bas- Canada.
36. Les juges de la Cour d'Amirauté, qui reçoivent maintenant des salaires, seront
payés par le
gouvernement général.
37. Les juges des cours supérieures conserveront leurs charges durant bonne conduite,
et ne
pourront être déplacée que sur une adresse des
deux chambres du parlement.
38. Chaque province aura un officier exécutif
appelé lieutenant-gouverneur, lequel sera nommé
par le gouverneur-générai en conseil, sous le
grand sceau des provinces fédérées. et durant bon
plaisir; mais ce bon plaisir ne devra pas être
exercé avant cinq ans accomplis, à moins qu'il n'y
ait cause, et cette cause devra être communiquée
par écrit au lieutenant-gouverneur immédiatement
après sa démission, et aussi, par message, aux
deux chambres du parlement, dans la première
semaine de la première session qui suivra.
39. Les lieutenants-gouverneurs des provinces
seront payés par le gouvernement généal.
40. La convention, en réglant ainsi les salaires
des lieutenants-gouverneurs, ne prétend pas porter préjudice à la réclamation de l'Ile
du Prince- Edward auprès du gouvernement impérial pour
le salaire maintenant payé à son lieutenant- gouverneur.
41. Les gouvernements et les parlements des
diverses provinces seront constitués en la manière
que leurs législatures actuelles jugeront respectivement à propos de les établir.
1025
42. Les législatures locales auront le pouvoir
d'amender ou changer de temps à autre leurs
constitutions.
43. Les législatures locales auront le pouvoir de
faire des lois sur les sujets suivants:
1. La taxation directe, et dans le Nouveau- Brunswick, l'imposition de droits sur
l'exportation du bois carré, des billets,
mâts, repars, madriers et bois sciés,
et dans la Nouvelle—Ecosse, du charbon
et des autres minéraux;
2. Les emprunts d'argent sur le crédit de la
province;
3. L'établissement de charges locales, et la
manière dont elles seront tenues, la
nomination et le paiement des officiers
locaux;
4. L'agriculture;
5. L'immigration;
6. L'éducation, (sauf les droits et priviléges
que les minorités catholiques ou protestantes dans les deux Canadas possèderont par
rapport à leurs écoles
séparées au moment de l'Union);
7. La vente et l'administration des terres publiques, moins celles qui appartiendront
au gouvernement général;
8 Les pêcheries des côtes de la mer et de l'intérieur;
9. L'établissement, l'entretien et la règle des
pénitenciers et des prisons de réforme;
10. L'établissement, l'entretien et la régle des
hôpitaux, des salles, des lazareis et
des institutions de charité quelcon—
ques;
11. Les institutions municipales;
12. Les licences de boutiques, d'auberges, d'encanteurs et autres licences;
13. Les travaux locaux;
l4. L'incorporation de compagnies privées ou
locales, excepté celles qui auront pour
objet des matières assignées sur parlement fédéral;
15. La propriété et les droits civils, moins
ce qui est attribué au parlement
fédéral;
16. Les punitions par amendes, pénalités, emprisonnement ou autrement, pour contravention
aux lois qui sont de leur
compétence législative;
17. L'administration de la justice, y compris la
constitution, le soutien et l'organisation des cours de juridiction civile et
criminelle, ainsi que la procédure en
matière civile;
18. Et généralement toutes les matières d'une
nature privée ou locale non-assignées
au parlement général.
44. Le pouvoir de pardonner aux criminels, de
commuer ou de remettre en tout on en partie
leurs sentences, ou de aurasoir à leur exécution,
lequel pouvoir appartient de droit à la couronne,
résidera dans la personne des lieutenants—gouverneurs en conseil; mais ceux-ci devront
se conformer aux instructions qui pourront leur être
adressées, de temps à autre, à cet égard, par le
gouvernement général, ainsi qu'aux lois du parlement général.
45. Pour tout ce qui regarde les questions soumises concurremmment au contrôle du
parlement
fédéral et des legislatures locales, les lois du parlement fédéral devront l'emporter
sur celles des
législatures locales. Les lois de ces dernières
seront nulles partout où elles seront en conflit
avec celles du parlement général.
46. Les langues anglaise et française pourront
être simultanément employées dans les délibérations du parlement fédéral ainsi que
dans la législature du Bas—Canada, et aussi dans les cours
fédérales et les cours du Bas—Canada.
47. On ne pourra taxer les terres ou propriétés
qui appartiendront au gouvernement fédéral ou
aux gouvernements locaux.
48. Tout bill qui aura pour but d'approprier
une portion quelconque du revenu public, de créer
de nouvelles taxes ou de nouveaux impôts devra,
suivant le cas, être présenté d'abord dans la
chambre des communes féderales ou dans l'assemblée législative locale, suivant le
cas.
49. Tout vote, résolution, adresse ou bill des
communes fédérales ou des assemblées législatives locales, qui aura pour but l'appropriation
d'une partie quelconque un revenu, ou la création
d'une taxe ou d'un impôt par un objet quelconque,
devra, suivant le cas, être précédé d'un message
du gouverneur—général ou du lieutenant—gouverneur, présenté durant la session même
où sera
passé tel vote, résolution, adresse ou bill.
50. Tout bill de la législature générale pourra
être réservé en la manière ordinaire pour la sanction de Sa Majesté, et les bills des législatures
locales pourront aussi, de la même manière, être
réservés pour la considération du gouverneur- général.
51. Les bills de la législature générale seront
sujets au désaveu de Sa Majesté, durant les deux
ans qui suivront leur passation, comme l'ont été
jusqu'à présent les bills passés par les législatures
des dites provinces, et ceux des législatures
locales seront sujets au désaveu du gouverneur—
générai durant les douze mois qui suivront leur
adoption.
52. Outaouais sera le siège du gouvernement
fédéral,—sauf l'exercice de la prérogative royale.
53. Sauf les mesures que pourront adopter par
la suite les divers gouvernements locaux, le siége
du gouvernement local du Haut—Canada sera
Toronto, et Québec sera celui du gouvernement
du Bas—Canada; rien n'est changé en ce qui
regarde le siège de chacun des gouvernements
locaux des autres provinces.
54. Tous fonds, argent en caisse, balances entre
les mains des banquiers et toutes autres valeurs
appartenant a chaque province, à l'époque de
l'Union, appartiendront au gouvernement général,
excepté en ce qui est ci-dessous mentionné.
55. Les travaux et propriétés publiques de chaque
province, dont suit l'énumération, appartiondront
au gouvernement général, savoir:
1. Les canaux;
2. Les havres publics;
3, Les phares et les jetées ou quais;
4. Les bateaux à vapeur, les cure-môles et les
autres vaisseaux publics;
5. Les améliorations des rivières et des lacs
8. Les chemins de fer et actions de chemin de
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fer; les hypothèques et autres dettes
de: compagnies de chemin de fer;
7. Les routes militaires;
8. Les maisons de douane, les bureaux de poste
et les autres édifices publics excepté
ceux qui seront réservés par le gouvernement général pour l'usage des législatures
et des gouvernements locaux;
9. Les propriétés transférées par le gouvernement impérial, et connues sous le nom
de propriétés de l'ordonnance.
10. Les arunaux, les salles d'exercice, les habillemente, accoutrements militaires,
munitiens de guerre, etc.;
11. Et les terres réservées pour les objets
publics.
56. Toutes les terres, mines, minéraux et réserves royales qui appartiennent à Sa
Majesté dans
les provinces du Haut-Canada du Bas-Canada,
du Nouveau-Brunswick, de la Nouvelle-Ecosse et
de l'ile du Prince-Edouard, pour l'usage de ces
provinces, appartiendronts respectivement aux gouvernement locaux des territiores
où ils sont située;
assujétis néanmoins aux fidéicommis et aux intrêts d'autres tiers qui pourront exister
relativement à ces terres.
57. Toutes les sommes d'argent dues par les
acqnéreurs ou les locataires de ces terres, mines,
minérax, à l'époque de l'Union, appartiendront
aussi aux gouvernements locaux.
58. Toutes valeurs ou proriètés se rattachant
aux parties de la dette pubique d'une province
dont seront chargés les gouvernements locaux,
appartiendront aussi à ces gouvernements respectivement.
59. Les diverses provinces demeureront respectivement en possession de toutes les
autres
propriétés publiques situées dans leurs limites;
mais la confédération aura le droit de prendre
les terres ou les propriétés publiques dont elle
aura besoin pour les fortifications ou la défense du
pays.
60. Le gouvernement général devra rendre
comme siennes toutes les dettes et les oblgation:
des diverses provinces.
61. La dette du Canada qui ne sera pas spécialement à la charge du Haut ou du Bas-Canada
respectivement, ne devra pas au temps de l'Union,
dépasser $62,500,000, la dette de la Nouvelle- Ecosse $8,000,000, et celle du Nouveau-Brunswick
$7,000,000.
62. Dans le cas où la Nouvelle-Écosse ou le
Nouveau-Brunswick ne contracteraient pas d'obligations au-delà de celles auxquelles
ces provinces
sont actuellement assujéties, et que leurs dettes
seraient respectivement moindres que sept millions et huit millions, à l'époque de
l'Union, elles
auront droit à 5 par 100 sur la différence qui
existera entre les chiffres réels de leurs dettes et
ceux de huit millions et sept millions respectivement de la même manière qu'il est
établi ci- dessous pour Terreneuve et l'ile du Prince- Edouard. Cette resolution n'a
nullement pour
but de restreindre les pouvoirs donnés aux gouvernements respectifs de ces provinces,
par autorité
législative, mais seulement de limiter le maximum
de la dette dont devra se charger le gouvernement
général. Pourvu tourjours que les pouvoirs ainsi
conféres par les lésgislature respectives seront
exercés dans le cours des cinq années qui suivront
ce jour, sans quoi ils cesser-ont d'exister.
63. Comme Terreneuve et l'Ile du Prince- Edouard n'ont pas contracté de dettes égales
à
celles des autres provinces, leurs gouvernements
respectifs auront droit de recevoir a l'avance,
du gouvernement général, en paiements semi- annuels, l'intérêt de 5 par 100 sur la
différence
qui existera entre le montant de leurs dettes respectives, l'époque de l'union, et
la moyenne du
chiffre de la dette, par tête, en prenant la population du Canada, de la Nouvelle-Ecosse
et du Nouveau-Brunswick.
64. En considération de la transmission générale faite si la législature du pouvoir
de taxer, les
provinces auront droit respectivement à un octroi
annuel de 80 centins par chaque tête de la population, d'après le recensement de 1861.
La population de Terreneuve est évaluée, pour cet objet,
à 130,000 âmes. Les provinces ne pourront rien
réclamer de plus à l'avenir du gouvernement
général pour les objets locaux, et. cette aide sera
payée à chacune d'elles semi-annuellement à l'avance.
65. Comme la position du Nouveau-Brunswick
est telle que cette province devra faire peser
immédiatement des dépenses considérables sur son
revenu local, elle recevra annuellement durant
dix ans, une somme additionnelle de $63,000.
Mais, tant que ses obligations resteront au-dessous
de sept millions de plastres, en déduire, sur cette
somme de $63,000, un montant égal d l'intérêt, à
5 par 100, sur la différence entre le chiffre réel de
sa dette provinciale et le chiffre de sept millions
de plastres.
68. Terrenenve, en considération de l'abandon
de ses droits sur les mines, les minéraux et les
terres de la couronne qui ne sont encore ni vendue: ni occupées, recevra annuellement
$150,000
en paiements semi-annuels. Mais cette colonie se
réserve le droit d'ouvrir, construire et contrôler
les chemins et ponts dans les limites de ses dites
terres, lesquels seront, cependant, soumis aux lois
que le parlement général croira devoir adopter à
cet égard.
67. Le gouvernement général devra remplir
tous les engagement: qui pourront avoir été pris,
avant l'Union, avec le gouvernement impérial
pour la défense des provinces.
68. Le gouvernement général devra faire compléter, sans délai, le chemin de fer intercolonial
de la Rivière-du-Loup à Truro dans la Nouvelle- Ecosse, en le fesant passer par le
Nouveau-Brunswick.
69. La convention considère les communications avec les territoires du Nord-Ouest
et les
ameliorations nécessaires au développement du
commerce du Grand-Ouest avec la mer comme
étant de la plus haute importance pour les provinces confédérées, et comme devant
mériter l'attention du gouvernement fédéral, aussitôt que le
permettra l'état des finances.
70. L'on devra réclamer la sanction du parlement impérial et des parlements locaux,
pour
l'union des provincee, sur les principes adoptés
par la convention.
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71. Sa Majesté la Reine sera priée de déterminer le rang et le nom de: provinees fédérées.
72 Les délibérations de la convention seront
signées par les délégués et soumises, par chaque
délégation locale, à son gouvernement respectif,
et le président de la convention est autorisé à en
soumetre une cople au gouverneur-général, pour
que celui-ci puisse la transmettre au secrétaire
d'Etat pour les colonies.
L'adresse étant lue une seconde fois, est
adoptée sur division.
L'hon. M. le proc.-gén. MACDONALD
propose que la dite adresse soit grossoyée.—
Adopté sur division.
Sur motion de l'hon. M. le proc.-gén.
MACDONALD, il est voté une humble adresse
à Son Excellence, priant Son Excellence de
vouloir bien transmettre l'adresse précédente
au principal secrétaire d'état de Sa Majesté
pour les colonies, pour qu'elle soit déposée
un pied du trône.
Sur motion do l'hon. M. la proc.-gén.
MACDONALD, il est ordonné que l'adresse
précédente soit grossoyée
Ordonné, Que la dite adresse soit présentée
à Son Excellence par toute la chambre.
Ordonné, que les membres du conseil
exécutif que sont membres de cette chambre
se rendent auprès de Son Excellence pour
savoir quand il plaira à Son Excellence
recevoir la dite addresse.
L'Hon. M le pro.-gén. MACDONALD informe alors la chambre qu'il plaira à Son
Excellence recevoir la chambre avec son
adresse, demain, à 3.30 heures P M.
La chambre alors s'ajourne.