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Assemblée Législative, 3 Février 1865, Provinces de L'Amérique Britannique du Nord, Débats de la Confédération.

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ASSEMBLÉE LÉGISLATIVE.

VENDREDI, 3 février 1865.

L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.-M. l'Orateur ayant éxprime le désir que nous ne commençions pas aujourd'hui les débats sur l'adresse relative à l'union des colonies, je propose de les différer jusqu'à lundi. Mais comme le sujet est de la plus haute importance, il serait peut-être bon d'établir la marche que l'on devra suivre pour la discussion. Je propose que la discussion, une fois commencée, se continue de jour en jour, et pour qu'il y ait plus de régularité, que l'Orateur ne laisse pas son siége. En même temps, je propose qu la règle que enlève aux membres le droit de parler plus d'une fois, lorsque l'Orateur es au fauteuil, soit suspendue, afin que chaque membre ait la même liberté de discuter, que si la chambre était formée en comité général.
L'HON. J. S. MACDONALD.-Je pense que la proposition de l'hon. proc-gén. Ouest, qu la discussion se continue de jour en jour en jour, doit être, selon moi, rejetée par la chambre. Cette question est très-importante; je pense que le peuple de ce pays a le droit d'examiner attentivement les vues exprimées par ses représentants sue cette question. Je regrette que le proc.- gén. ait annoncée que le gouvernment avait l'intention de presser cette mesure, en met tant de côte tout autre sujet.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.-Ce n'est pas l'intention que j'ai exprimée. Mon idée est qu'une fois les débats commencées, ils se continuent chaque jour à la séance du soir, laissant l'après-midi pour les autres affaires. Si l'on ne permettait la discussion qu'aux jours du gouvernment, les débats du mardi seraient oubliés le vendredi; les mêmes 15 arguments seraient constamment répétés, et il faudrait siéger toute l'année pour terminer cette mesure.
L'HON. J. S. MACDONALD.-Des changements aussi importants que celui que l'on propose, tels que ceux relatifs aux réserves du clergé, au conseil législatif, à la tenure seigneuriale, ont été devant le peuple, un quart de siècle, et discutés de session en session, avant qu'on ne les ait définitivement réglés. De cette manière, l'opimon publique avait pu se mûrir sur ces questions. Mais aujourd'hui, on nous donne à peine quelques jours d'avis pour changer entièrement la constitution sous laquelle nous vivons, et on ne laisse pas au peuple le temps d'exprimer son opinion. Je m'objecte aussi à la suspension des règles du parlement, afin de permettre la discussion devant l' 0rateur, au lieu de la permettre devant la chambre réunie en comité général. S'il est une question à l'égard de laquelle la chambre doive suivre les formes prescrites, c'est certainement celle-ci, lorsque le gouvernement a une majorité aussi outrageusement forte (rires). La minorité a le droit de se protéger en faisant observer rigoureusement toutes les règles de la chambre. Je m'aperçois que le président du conseil se laisse aller à la gaieté; j'ai beaucoup appris de lui à exiger l'observance des règles de la chambre. Mais maintenant le loup et l'agneau paissent ensemble, et le gouvernement, sachant qu'il en a le pouvoir, veut l'emporter par la force brutale, la force de la majorité.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.-Il n y a rien d'irrégulier dans cette proposition, que la discussion se fasse en présence de l'Orateur. J'ai proposé de suspendre les règles de la chambre dans le dessein de protéger la minorité, et de permettre aux membres qui la composent, de parler et de faire des objections autant de fois qu'il leur plaira.
L'HON. J. H. CAMERON.-J'approuve la proposition de discuter la question en présence de l'Orateur. Quant à l'autre proposition, de débattre la question de jour en jour, je suggère qu'après les explications que donnera au long le proc-gén. lundi prochain, on ajourne les débats pour une semaine au moins, pour que le peuple connaisse les vues du gouvernement avant de commencer les débats sur le sujet. Cet espace de temps expiré, on pourra débattre la question de jour en jour.
L'HON. M. HOLTON.-Je ne considère pas la proposition de l'hon. proc.-gén. au même point de vue que le membre pour Cornwall, mais je veux bien l'accepter comme une marque, de la part du gouvernement, du désir qu'il a de faciliter une libre et entière discussion. Mais je pense, cependant, qu'il serait avantageux, après une discussion générale sur le sujet, que la chambre se formât en comité pour en examiner les détails. Je pense que trois jours par semaine seraient suffisants pour la discussion.
L'HON. M. BROWN.-Le membre pour Chateauguay a certainement bien compris le but du proc.-gén., quand il dit que la proposition de ce dernier avait pour but de faciliter la plus entière discussion sur cette importante question. Le gouvernement n'a certainement pas l'intention de presser la mesure par la force brutale, comme l'a dit le membre pour Cornwall. Quoique le proc.- gén. ait proposé de continuer la discussion de jour en jour, il n'a pas dit, un seul instant, que l'on devait presser le vote. Les débats, à n'importe quel temps, pourront être ajournés, s'il est jugé nécessaire, pour permettre au peuple d'exprimer son opinion. Il y a 130 membres; presque tous voudront parler sur la question, et je pense que la meilleure marche à suivre est d'employer chaque séance du soir à la discussion, ce qui permettra aux membres des deux côtés de la chambre d'exprimer leurs opinions afin que le peuple en ait connaissance. Je trouve beaucoup de force dans la suggestion du membre pour Peel, d'ajourner les débats pour quelques jours, après que le gouvernement aura expliqué ses vues. Sans doute le proc.-gén. Est, le proc.-gén. Ouest, le ministre des finances et moi-même, aurons chacun le désir d'exprimer notre opinion sur le projet. Après que le gouvernement aura fait connaître ses vues, il ne pourra y avoir aucune difficulté d'ajourner les débats pendant quelque temps, afin que le pays connaisse parfaitement le sujet.
M. POWELL.-Je demanderai au gouvernement s'il entend que la chambre adopte le projet en entier, ou s'il lui sera permis d'en adopter une partie et de rejeter l'autre.
L'HON. M. HOLTON.-Cctte question n'est pas loyale.
L'HON. M. BROWN. --Parfaitement loyale.
M. POWELL.-Je trouve que l'hon. M. Holton pousse son amour de la loyauté de discussion un peu trop loin, puisqu'elle le porte à intervenir en faveur du gouvernement.
L'HON. M. HOLTON-Je pense qu'il 16 ne serait pas loyal de répondre à une telle question.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.-La proposition de M. Cameron me semble raisonnable. Le gouvernement devra d'abord exposer sa cause devant la chambre, et par l'entremise de la presse, devant le peuple, puis accorder ensuite un temps raisonnable pour que le pays puisse en juger. Bien entendu, je ne l'exposerai pas seul, comme vient de le dire le président du conseil. Le sujet est si vaste de lui-même, et comprend une si grande variété de détails, que tous les membres du gouvernement devront exprimer leurs vues sur différentes parties du projet. En réponse au membre de Carleton, le gouvernement dira qu'il présente le projet comme un tout et qu' il cmploiera toute son influence pour le faire adopter sans changement, pour une raison toute simple: c'est que le projet n'a pas été préparé par le gouvernement du Canada ou par le gouvernement de la Nouvelle- Ecosse, mais c'est un traité entre les différentes colonies, dont chaque clause a été amplement discutée, et qui a été adopté au moyen de concessions mutuelles. Sans doute, la chambre peut voter contre toute la mesure ou y introduire des amendements; mais, si elle le fait, ce sera au gouvernement à voir s'il poursuivra davantage devant la chambre la considération du sujet. Si le projet ne passe pas tel que présenté, il faudra, une fois les changements introduits, recommencer la conférence, et je crois que cette occasion manquée, nous n'en aurons pas d'autre dans le cours de ce siècle. L'entente actuelle est le fruit d'un heureux concours de circonstances, qui ne pourrait peut-être pas se renouveler de sitôt, et je regretterais, pour le bien du pays et de toute l'Amérique Britannique, que le plan ne fût pas adopté cette année. Les résolutions portent en elles-mêmes la preuve d'un compromis. Peut-être que pas un seul délégué d'aucune des provinces n'aurait proposé ce projet exactement tel qu'il est, mais étant convaincus qu'il était nécessaire, afin de maintenir la puissance britannique sur ce continent, qu'il y eut une confédératron et une union de toutes les provinces, la considération des détails fut abordée dans un esprit de compromis mutuel. Pas un seul membre du gouvernement canadien ou des provinces d'en bas n'a pu faire prévaloir toutes ses vues dans les détails; mais, après une discussion de seize jours et après la votation sur les détails, un vote unanime approuva dans son ensemble le projet, chaque délégué, quelque fut ses vues, étant satisfait du projet. parce que tous les détails avaient été acceptés par une majorité, et s'engageant à en presser l'adoption par chaque législature, comme le seul plan réalisable. En présence de ces faits, j'espère que le gouvernement aura le concours d'une grande majorité de cette chambre en faveur de ce projet tel qu'il est, et que les membres sacrifieront leurs opinions individuelles sur les détails, s'ils croient, avec le gouvernement, que la mesure est propre à activer les intérêts du pays.
L'HON. M. HOLTON.-J'aimerais à demander si, selon le mode proposé par le proc.-gén., les différentes résolutions du comité seront soumises séparément à l'approbation de la chambre?
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.- Non; la proposition soumise à la chambre est qu'une adresse soit présentée à Sa Majesté, la priant de faire passer un bill basé sur ces résolutions. Tous les amendements devront se faire sur cette résolution. De fait, ce sera la même chose que de proposer chaque résolution séparément.
L'HON. M. HOLTON.-Je crois que le gouvernement devrait demander un vote affirmatif sur chacune de ces résolutions. Elles ont été préparées et passées par un corps constitué de lui-même, sans l'autorité de la chambre ou du peuple. A moins que la chambre ne soit un mythe ou une moquerie, le moindre égard qu'on pourrait avoir pour elle serait d' obtenir son affirmation directe sur chaque article.
L'HON. M. CAUCHON.-Je désirerais savoir si tout le projet va être discuté dans son ensemble, ou si les membres auront l'occasion d'en examiner chaque partie séparément. Il y a certaines parties des résolutions susceptibles de malentendus et de divergences d'opinions; par exemple, la clause qui soumet les lois civiles au contrôle du gouvernement local, et la clause qui met la loi du mariage parmi les attributions du gouvernement général. La loi du mariage est éparse dans tout le code civil, et je ne vois pas comment on peut la placer sous une législature différente de celle qui doit régler le reste du droit civil. Je ne comprends pas, néanmoins,:comment un vote affirmatif sur chacune des résolutions pourrait permettre à la chambre de se prononcer plus librement sur les détails qu'il ne sera loisible de le faire par le moyen proposé par le pro.-gén.
L'HON. A. A. DORION.-L'hon. député de l'objection de l'hon. M. Holton. Cette 17 objection est que la discussion serait plus libre et que la chambre pourrait mieux exprimer son opinion, en examinant chaque article du sujet séparément, comme la chose se fait pour le vote des subsides. C'est ainsi que l'on a passé l'acte d'union de l'Irlande et le bill pour changer le gouvernement des Indes, l'acte d'union du Canada de 1840, l'acte du conseil législatif et d'autres mesures importantes. C'est la marche uniforme du parlement; et l'on ne trouve aucun précédent d'un mode différent. Je crois donc que la marche proposée par l'opposition est la plus raisonnable; c'est-à-dire, qu'il y ait d'abord une discussion générale où les membres du gouvernement pourront exprimer leurs vues, puis un ajournement d'une semaine, pour laisser au public le temps d'apprécier les discours, et qu'on discute ensuite le projet trois jours par semaine. On accordera par là plus de temps que par le moyen proposé par le président du conseil et la discussion sera plus entière, plus loyale et plus libre.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.-Je comprends le but de l'hon. M. Dorion. Ce monsieur est opposé à la confédération, et la manière de procéder qu'il propose est propre à faire remettre le projet à un autre parlement, et à une autre conférence, afin que la confédération ne se fasse pas avant le grand jour du jugement. Ces résolutions ont le caractère d'un traité, et si elles ne sont pas adoptées dans leur entier, il faudra commencer les procédés de novo. Si chaque province entreprend de changer les détails du plan, il n'y aura plus de fin aux conférences et aux discussions. Quant à discuter trois jours par semaine, c'est un moyen de prolonger la session au-delà de toutes limites, si l'on considère surtout qu'après l'adoption du projet de confédération, le gouvernement se propose de mettre devant la chambre une mesure pour l'organisation des gouvernements locaux.
L'HON. M. HOLTON.-Pouquoi ne pas soumettre les deux projets ensemble?
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.-Ces deux propositions sont différentes et ne peu- vent être considérées que séparément. Si la chambre déclare par son vote que la confédération est désirable, alors il sera temps de considérer l'organisation des gouvernements locaux: mais si la chambre n'accepte pas le principe de conféfération, alors il sera parfaitement inutile de lui soumettre l'autre mesure. De plus, en soumettant les deux mesures à la fois, on créerait de la confusion, car les membres, évidemment, introduiraient dans la discussion de la confédération leurs vues sur la constitution des gouvernements locaux.
L'HON. J. S. MACDONALD commente la prétention que les résolutions de la conférence équivalent à un traité, et demande en vertu de quelle autorité le gouvernement a entrepris de négocier un traité. Il maintient que toutes les règles de la chambre doivent être observées, afin que l'on n'empiète pas sur les droits de la minorité. 
M. T. FERGUSON demande si le gouvernement a l'intention de mettre cette mesure en force sans un appel au peuple.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.-Je puis répondre de suite. Si cette mesure reçoit l'approbation de la chambre, il n'y aura pas de nécessité de la soumettre au peuple. D'un autre côté, si la mesure est repoussée, il appartiendra au gouvernement de juger s'il doit y avoir un appel au peuple ou non.(Ecoutez! écoutez et rires ironiques.)
M. SCATCHERD demande si le gouvernement a l'intention de faire des amendements conformes aux suggestions contenues dans la dépêche du secrétaire colonial.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD-Je ne puis dire quelle sera la politique du gouvernement impérial. Tout ce que je puis affirmer c'est que les délégués des divers gouvernements coloniaux, après que ce traité eût été passé, se sont engagés à faire adopter le projet dans son entier dans leurs législatures respectives, et de présenter des adresses analogues à Sa Majesté dans les législatures coloniales, demandant la passation d'un acte basé sur ces résolutions. Le gouvernement impérial et le parlement d'Angleterre agiront alors comme bon leur semblera. J'espère et crois qu'ils ne feront aucun changement dans le projet de confédération adopté par la conférence. Je pense que si les législatures locales leur demandent de passer la mesure telle qu'elle est, ils nous laisseront juges de nos propres affaires et adopteront la mesure.
L'HON. M. HOLTON.-Il y a quelques jours, j'ai donné avis à la chambre que j'aurais trois questions à poser au ministère avant que la chambre ne se forme en comité des subsides. Aujourd'hui, je me décide à ne pas attendre jusque là, et, comme cette occasion est également favorable, je demaderai au gouvernement la permission de les poser de suite.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.- Nous sommes prêts à vous entendre.
L'HON. M. HOLTON.-La première de 18 ces questions est celle-ci: le gouvernement a-t-il l'intention de soumettre à la chambre ses projets de constitutions locales pour les deux sections de la province, avant de demander à la chambre de débattre la question du projet de confédération? L'hon. proc.- gén. a déjà répondu à cette question, en disant que le gouvernement n'avait pas l'intention d'introduire cette mesure; il a aussi donné les raisons qui l'engageaient à agir ainsi. J'ai quelques observations à faire sur les raisons qui ont été ainsi données à la chambre. Je maintiens que la question qui est maintenant devant nous n'est ni plus ni moins que celle-ci: devons-nous révolutionner le pays ou révolutionner le gouvernement du pays? (Ecoutez! écoutez!) Voilà la question qui nous est posée. Eh! bien! j'aimerais que l'on nous dise distinctement si la forme du gouvernement, local et général, fait partie du même plan?
Pour juger sainement du mérite de tout le projet, il est indispensable, à mon sens, que la chambre soit saisie en même temps d'une manière générale, du moins, de la constitution des gouvernements locaux.
L'autre question a trait au système d'éducation qu'on adoptera pour le Bas-Canada. Dans un discours prononcé à Sherbrooke, l'hon. ministre des finances a promis que le gouvernement soumettrait une mesure à l'effet d'amender les lois concernant l'éducation dans le Bas-Canada  La chambre n'ignore pas que cette question intéresse au plus haut degré la population protestante du Bas-Canada et, bien que je ne désire aucunement soulever de discussions religieuses dans cette chambre, je dois dire qu'il importe que les intérêts de cette classe soient considérés comme ils le méritent, dans la discussion des grands changements qu'on se propose de faire subir à notre forme de gouvernement. De tous ces changements, celui qui excite le plus l'anxiété de la population protestante du Bas-Canada, est, sans contredit, celui qui a trait au système d'éducation. Le ministre des finances a promis solennellement, au nom de ses collègues, que des amendements à la loi d'éducation du Bas-Canada seraient soumis à la chambre avant de changer la constitution du pays-amendements qui, après avoir été adoptés, ne seraient plus révoqués et règleraient à jamais la question d'éducation dans le Bas-Canada. Je demande donc au gouvernement s'il a, en effet, l'intention de soumettre ces amendements avant de demander à la chambre de passer définitivement la mesure de confédération; et, si telle est son intention, à quelle époque il se propose de les soumettre, car cela exercera indubitablement une influence considérable sur la discussion du projet et probablement en dernier ressort sur plusieurs membres du Bas-Canada. (Ecoutez! écoutez!)
La troisième question a trait au chemin de fer intercolonial. C'est la première fois, je crois, qu'on voit un gouvernement constitutionnel insérer dans son programme un article pourvoyant à la construction d'un chemin de fer, d'un canal, d'un chemin à barrières ou de tout ouvrage de ce genre. (On rit.) Mais cette nouveauté vient de se produire et l'on dit qu'une partie de la constitution proposée est la construction du chemin de fer intercolonial, sur l'utilité duquel il existe une grande divergence d'opinions parmi les membres de cette Chambre et dans le pays. Aujourd'hui, le gouvernement vient nous l'offrir comme une partie de son plan de confédération des provinces. Le président du conseil (l'hon. M. Brown) qui était autrefois si fortement opposé au chemin de fer intercolonial, est devenu tellement amoureux de ce chemin et de ses accessoires, depuis qu'il est monté au pouvoir, qu'il a déclaré, dit-on, dans un discours à Toronto, qu'avant de renoncer à ces accessoires, c'est- à-dire à l'union des provinces britanniques -plan qu'il a aussi autrefois combattu avec autant de vigueur que le chemin de fer même,-il consentirait plutôt à construire six chemins de fer intercoloniaux. (On rit.) Je crois que la Chambre a droit de connaître ce qu'on se propose de faire relativement à cette entreprise, avant de se prononcer sur le projet de confédération. Je crois aussi qu' elle a droit à quelques renseignements sur la question du Nord-Ouest,-question qui, autrefois, excitait à un si haut dégré l'intérêt du président du conseil, et à propos de laquelle il déclarait hautement que le Canada avait des droits sur ce vaste territoire. Je pense bien que le président du conseil est encore de cette opinion, mais j'aimerais   à savoir quelle politique le gouvernement propose de suivre à ce sujet. J'aimerais aussi à savoir du gouvernement combien le Canada aura à contribuer pour la défense du pays sous le système qu'il se propose d'introniser sur ce continent.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.-Je répondrai avec plaisir aux questions de l'hon. M. HOLTON. Relativement aux constitutions locales du Haut et du Bas-Canada sous la confédération, l'intention du gouvernement est de soumettre à la chambre, telle que 19 constituée, les projets des constitutions de leurs gouvernements respectifs, qui devront être pris en considération par les membres du Haut et du Bas-Canada, mais il ne sera rien fait à l'égard de ces constitutions avant que le projet de confédération n'ait été accepté par la chambre, car jusqu'à ce qu'il ait été décidé qu'il doit y avoir une confédération, il serait inutile de discuter quelle seront les constitutions des provinces séparées. Relativement à la question de l'éducation, l'hon. M. Galt, dans son discours prononcé à Sherbrooke, à exprimé l'intention du gouvernement à ce sujet en disant qu'une mesure à cet effet serait soumise à la chambre dans le cours de la présente session avant que la confédération n'ait lieu. La minorité protestante du Bas-Canada craint beaucoup que le projet de confédération ne mette en danger ses droits au sujet de l'éducation: mais je dois dire que le gouvernement se propose, si le projet est adopté par la législature, de soumettre à cette session des amendements à la loi sur l'éducation, qui sauvegarderont pleinement ses droits à ce sujet.
L'HON. A. A. DORION.-Ces amendements s'appliqueront-ils au Haut comme au Bas-Canada?
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.- Quant au Haut Canada, je crois que la loi actuelle restera telle qu'elle est, parce qu'elle satisfait la minorité. Pour ce qui est du chemin de fer intercolonial, je crois que les résolutions expliquent parfaitement l'intention du gouvernement à ce sujet. L'hon. M. Holton s'est trompé en disant que ce projet formait partie intégrante de la constitution; il n'est qu'une des conditions auxquelles les provinces d'en bas ont consenti à se joindre à nous dans les changements constitutionnels projetés. Quant à la question du Nord-Ouest, le président du conseil (l'hon. M. BROWN), qui la connaît à fond, se chargera d'y répondre, et nul doute qu'il le fera de manière à satisfaire pleinement l'hon. député de Chateauguay. Relativement aux dépenses de la province, je puis dire que le gouvernement canadien est actuellement en communication avec celui de la mère-patrie, et que la chambre sera mise en demeure de juger et d'apprécier tout ce qui a été fait à ce sujet. En attendant, je puis dire que les provinces d'en-bas, appréciant la position géographique du Canada et le danger où il se trouverait placé en cas d'hostilités, ont cordialement offert de contribuer à la dépense commune si notre gouvernement votait une somme à cet effet.
M. T. C. WALLBRIDGE.-Dois-je comprendre que la constitution fédérale garantira aux catholiques romains la liberté de leurs écoles séparées dans le Haut-Canada? 
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.- Voici ce que j'ai dit, et je ne suis pas allé plus loin: avant l'adoption du plan de confédération, le gouvernement présentera une mesure pour amender la loi des écoles du Bas-Canada, de façon à protéger les droits de la minorité, et en même temps à satisfaire la majorité, qui a toujours montré le plus grand respect pour les droits de cette dernière, et qui, je n'en ai aucun doute, continuera de les respecter.
L'HON. M. BROWN. - L'hon. M. Holton n'a pas été injuste à mon égard, en supposant que j'entretiens les mêmes sentiments qu'autrefois au sujet de la question du Nord-Ouest. Je pense que, dans l'intérêt de la civilisation, des mesures énergiques devraient être adoptées pour coloniser ces régions. Je suis arrivé depuis peu d'Angleterre, où la question a été complètement discutée, mais je n'ai pas encore eu l'occasion de la soumettre à la décision du conseil. Cependant, j'espère que sous peu de temps je pourrai communiquer à la chambre d'amples informations sur les intentions du gouvernement.
La discussion devient alors régulière sur la proposition formelle de l'hon. proc.-gén. Macdonald:-" Qu'une adresse soit présentée à Sa Majesté la priant qu'il lui plaise de soumettre au gouvernement impérial, à sa prochaine session, une mesure pour l'union des colonies en un seul gouvernement, basée sur les résolutions adoptées à la conférence tenue à Québec, le 10 octobre dernier."
L'HON. M. HOLTON.-La loi universelle du parlement relativement aux adresses et aux bills entraînant la disposition de la propriété ou des fonds publics, ou une augmentation de la taxe sur le pays, est que toute telle mesure doit prendre naissance dans un comité de toute la chambre. Ce projet de confération dispose de tout l'actif du pays, et établit des charges dont le produit doit être affecté aux besoins des provinces du Nouveau-Brunswick et de Terreneuve, et donne de plus 80 centins par tête à chacune des province. La mesure a donc évidemment pour but l'emploi des deniers publics, et, en conséquence, elle devrait prendre naissance dans le comité de toute la chambre. L'acte d'union entre l'Angleterre 20 et d'Irlande a été introduit de cette manière, de même que l'acte d'union des deux Canadas, dans la législature du Haut-Canada, sous la direction de M. Poulett Thompson, qui connaissait parfaitement la tactique parlementaire anglaise. Il en a été ainsi pour le bill de réforme, sous le ministère Hincks.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.- Toute mesure pour l'octroi de deniers publics doit prendre naissance dans un comité général, mais ce n'est pas ici une adresse demandant à la couronne de recommander une allocation d'argent. L'adresse proposée demande à la couronne de faire un grand changement constitutionnel. Supposons que l'on demanderait l'abolition complète de la constitution, une telle adresse devrait-elle provenir d'un comité général? Certainement non. L'argent qui sera voté doit l'être par des législatures qui n'existent pas encore.
L'HON. A. A. DORION-Il n'y a rien de plus clair que, conformément à la règle qui prévaut dans la chambre des communes, toute mesure à l'effet de voter de l'argent, ou toute adresse à la couronne demandant une allocation d'argent ou que des dépenses soient encourues, doit prendre naissance dans un comité de toute la chambre. La 80me règle de cette chambre est dans le même sens. Or, personne ne peut nier que les résolutions proposées imposeront de nouvelles charges au peuple. Entr'autres obligations, elles imposent au pays la construction d'un chemin de fer.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.- Cela sera fait par le gouvernement confédéré, non pas par ce gouvernement. Nous ne votons pas d'argent.
L'HON. A. A. DORION.-Vous ne votez pas d'argent non plus lorsque vous demandez à la couronne de recommander une allocation, puisque la couronne peut refuser. Certes, si une affaire de 40 ou 50 piastres doit prendre naissance dans un comité de toute la chambre, à plus forte raison une mesure aussi considérable doit être soumise à la même règle.
L'HON. Proc.-Gén. CARTIER-Les remarques de M. Dorion sont absurdes, vu que pas un denier n'est approprié. Il est vrai que la règle du parlement impérial est telle que M. Dorion l'a dit, mais cette règle n'est pas la nôtre. La règle en Canada est basée sur l'acte d'union, et par cette règle aucune appropriation ne peut être faite, excepté sur un message de son excellence qui doit être référé à un comité. L'acte d'union fait loi, et demain le parlement britannique, avec la sanction de la reine, peut abolir la constitution.
M. DUNKIN.-L'hon. Proc.-Gén. Cartier est toujours prêt à défendre les droits de toutes les petites et grandes corporations qu'il a créées, ou qui jouissent de ses faveurs, il ne voudrait ne leur enlever la moindre partie de leurs priviléges; il vient cependant déclarer que le gouvernement impérial a le droit de nous enlever demain toutes nos libertés. Je nie que nous possédions nos droits durant bon plaisir; mais s'il en était ainsi, cela n'aurait rien à faire à la question. Si nous n'avons pas le droit d'accorder de petites sommes d'argent, excepté d'une certaine manière, assurément nous devons suivre quelque forme pour nous défaire de tous nos droits. Le parlement britannique peut bien déclarer qu'un homme est une femme et décréter que ce titre seul soit légal, mais cela n'en ferait pas une femme.
L'HON. M. GALT.-Il est évident qu'aucune charge nouvelle n'est imposée au peuple par cette adresse; l'on ne pourra prendre un seul denier du coffre public en vertu de cette résolution. Je pense aussi que l'esprit des règles de cette chambre n'est pas plus enfreint que la lettre même par la marche proposée par l'hon. proc.-gén. McDonald, parce que si l'adresse est adoptée, l'acte impérial permettra de nouveau au peuple de disposer des deniers publics par son vote.
L'ORATEUR rend la décision suivante sur le point d'ordre soulevé par l'hon. M. Holton:-
L'hon. député de Chateauguay a prétendu que la motion n'est pas dans l'ordre, "attendu que l'adresse projetée demandant à la couronne de recommander au parlement impérial la passation d'un acte imposant de nouvelles charges sur le peuple de cette province, et établissant des dispositions touchant la propriété publique et les deniers de cette province, la loi du parlement exige que la dite adresse soit basée sur des résolutions proposées originairement en comité général." Maintenant, la 4e clause du chapitre 14 des statuts refondus du Canada, ainsi conçue: " L'assemblée législative ne pourra introduire ni passer aucune résolution, vote ou bill relativement à l'appropriation d'aucune partie du dit fonds consolidé des revenus, et d'aucune autre taxe ou impôt, pour un objet qui n'aura pas au préalable été recommandé par un message du gouverneur à la dite assemblée législative, durant la session pendant laquelle tel vote, résolution ou bill sera passé ";-et la 88e règle de cette chambre conçue comme suit: "Si une motion était faite dans la chambre pour une aide publique ou charge sur le 21 public la prise en considération et la discussion de cette motion peuvent ne pas avoir lieu de suite, mais être ajournées à tel jour subséquent que la chambre juge à propos de fixer; et alors la motion est renvoyée à un comité général de la chambre avant qu'une résolution ou un vote ne soit adopté sur la motion en question," laquelle règle paraît être basée sur la dite clause,-se rapportent à des résolutions ou à des adresses sur lesquelles cette chambre doit baser ultérieurement son action. Or, je ne vois pas par la motion actuelle que cette chambre doive rien faire après la passation de la présente résolution. Comme cette question a été discutée un instant avant que j'aie laissé le fauteuil à six heures, j'ai pu mettre par écrit mon opinion sur ce sujet. Je lirai: " La motion a pour objet une adresse à Sa Majesté dans laquelle les résolutions sur la confédération sont incorporées. En quoi cette adresse diffère-t-elle d'une adresse à Son Excellence, qui est toujours proposée par une motion dont il a été donné deux jours d'avis comme dans le cas actuel? Je ne vois pas comment je pourrais traiter la question comme un point d'ordre autrement que comme dans le cas ordinaire d'une adresse. On prétend qu'il ne convient pas de la traiter ainsi. Il ne s'agit donc pas alors d'une question d'ordre, mais d'une question de convenance. Le cas cité par l'hon. député de Chateauguay de résolutions se rattachant à un bill ayant pour objet de pourvoir au gouvernement de l'Inde, n'a aucune identité avec des résolutions pour une adresse, mais ne se rapporte qu'à des résolutions contenant simplement les principes de bill que l'on voulait introduire. On ne prétend pas, dans le cas actuel, que la chambre ait le droit de passer un pareil bill, ou que l'on se propose d'en présenter un sur ce sujet-ci. La raison pour laquelle il convient de discuter des questions présentées sous forme de résolutions devant servir de base à un bill qui doit-être introduit plus tard, c'est que ces résolutions se prêtent plus facilement à des changements. Or, le gouvernement a exprimé sa détermination de n'admettre aucun changement aux présentes résolutions; il est donc évident que la même raison que l'on invoque pour obtenir que la chambre se forme en comité général ne peut s'appliquer au cas actuel. Le membre qui propose qu'il soit voté une adresse peut exiger la votation sur sa motion telle qu'il l'a proposée, à moins que sa forme ne soit changée par un amendement, et il ne me paraît pas qu'il y ait dans ce cas-ci d'autre mode à suivre. Le fait est que le mot " résolutions" aurait pu aussi bien être omis de la présente motion, et quel qu'eût été le résultat sur une question de pure convenance, il est certain que l'Orateur n'y pouvait rien. Son devoir est de maintenir l'ordre et le décorum, et de décider des questions d'ordre."
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD propose que les débats soient ajournés à lundi, et soient le premier ordre du jour à la séance de 7 1/2 heures p.m.
L'HON. M. HOLTON soulève l'objection que cette motion ne peut-être faite qu'après un avis de deux jours.
L'HON. Proc.-Gén. MACDONALD.- Si c'est là la tactique que se propose de suivre l'opposition, et si l'on cherche à embarrasser le gouvernement à chaque instant, je me verrai obligé de retirer la concession faite à l'hon. membre pour Peel, et je donnerai avis, que mardi je proposerai que les débats soient continués de jour en jour jusqu'à ce que l'adresse soit définitivement adoptée ou rejetée par la chambre.
L'HON. M. HOLTON retire alors son objection, et la motion est adoptée.

Source:

Province du Canada. Débats parlementaires sur la question de la Confédération des provinces de l'Amérique britannique du nord. Quebec: Hunter, Rose et Lemieux, Imprimeurs Parlementaires, 1865. Numérisé par Canadiana.

Credits:

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