CONSEIL LÉGISLATIF.
               
               
               
               
                  VENDREDI, 17 février 1865. 
                  
                  
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Hons. messieurs-   Du consentement de mon hon. ami ( M. 
                  
                  DICKSON ) qui a le droit de la parole après 
                  
                  
                  avoir demandé l'ajournement des débats, je 
                  
                  
                  
                  274
                  
                  
                  me lève pour proposer la résolution qui se 
                  
                  trouve déjà depuis quelque temps sur les 
                  
                  avis de motion du journal de cette chambre. 
                  
                  Cette proposition se recommande d'elle- 
                  
                  même au bon sens et au jugement impartial 
                  
                  de mon hon. auditoire, et je serais surpris 
                  
                  qu'elle rencontrât la moindre opposition des 
                  
                  membres du gouvernement de cette chambre 
                  
                  de la législature. ( Ecoutez ! écoutez !) Je 
                  
                  propose donc qu'il soit résolu : 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Que sur une question d'une aussi grande 
                     
                     importance que celle de la confédération projetée 
                     
                     du Canada et de certaines autres colonies anglaises, cette chambre se refuse à assumer
                     la 
                     
                     responsabilité de consentir à une mesure qui renferme tant de graves intérêts, sans
                     que l'opinion 
                     
                     publique ait loccasion de se manifester d'une 
                     
                     manière plus solennelle. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Le but de cette résolution n'est ni la destruction ni la défaite des résolutions devant
                  
                  
                  la chambre. Je demande simplement que 
                  
                  le vote des résolutions soit remis jusqu'à ce 
                  
                  que le peuple de ce pays fasse connaître son 
                  
                  opinion à ce sujet plus qu'il ne l'a pu jusqu'à ce jour. Dans mon premier discours
                  
                  
                  sur la question qui nous occupe, j'eus l'honneur de vous dire, hon. messieurs, que
                  je 
                  
                  n'étais pas opposé à la confédération des 
                  
                  provinces anglaises en elle-même, mais seulement à plusieurs des détails contenus
                  dans 
                  les résolutions sur lesquelles on nous demande de baser une adresse à Sa Majesté.
                  
                  L'hon. monsieur ( M. ROSS ) qui prit la 
                  parole après moi dans cette occasion, prétendit, entr'autres choses, que j'avais essayé
                  
                  de décrier les provinces d'en-bas ainsi que 
                  le crédit du Canada. Eh ! bien, j'en appelle 
                  aux hons. membres qui eurent la complaisance de m'écouter alors et je les prie de
                  me 
                  montrer un seul mot, dans ce que j'ai dit, 
                  qui pût faire tort à la réputation du peuple 
                  des provinces maritimes. Au contraire, loin 
                  de les avoir décriées, j'ai cru leur faire de 
                  grandes louanges ; loin d'essayer de rabaisser le caractère de leurs hommes publics,
                  je 
                  n'ai prononcé qu'un seul nom, et c'est celui 
                  de l'hon. M. TILLEY, que j'ai cru devoir 
                  placer au premier rang parmi les hommes 
                  d'état les plus éminents de l'Amérique Anglaise. ( Ecoutez ! écoutez !) Quant un 
                  reproche d'avoir tenté de faire tort au crédit 
                  du Canada, j'ai en effet mérité cette accusation, si c'est faire tort au crédit de
                  ce 
                  pays que d'avoir dit la vérité, d'avoir exprimé les convictions d'un esprit impartial,
                  et 
                  d'avoir constaté ce qui se trouve dans les 
                  comptes publics du Canada. Mon hon. 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  contradicteur est encore allé plus loin et a 
                  dit que mon discours manquait tellement de 
                  logique qu'il ne valait pas la peine d'être 
                  pris en considération. 
                  
                  
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—L'hon. monsieur 
                  
                  n'a pas voulu dire autre chose ; et voilà 
                  
                  néanmoins qu'à mon grand étonnement il 
                  
                  croit nécessaire de me répondre par quatre 
                  
                  colonnes de discours sans réussir toutefois 
                  
                  à ébranler une seule des propositions que 
                  
                  j'avais eu l'honneur d'émettre. J'ai été 
                  
                  ensuite accusé d'avoir révoqué en doute les 
                  
                  faits exposés par nos hommes publics. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—L'hon. député de 
                  
                  Toronto dit : écoutez ! écoutez ! mais je 
                  
                  demande s'il n'est pas du devoir de tout 
                  
                  membre de cette chambre de corriger les assertions fausses et erronées qu'on livre
                  au public ? 
                  
                  Ai-je outrepassé mes obligations en essayant 
                  
                  de rectifier des rapports sinon faux du moins 
                  
                  très évidemment incorrects ? Puisque mon 
                  
                  hon. ami, le député de Toronto ( M. 
                  
                  Ross ) a cru devoir me le rappeler, j'affirme 
                  
                  que l'on doit regretter qui ait été fait 
                  
                  certains exposés en ce pays et qu'on les ait 
                  
                  ensuite envoyés à l'étranger, lesquels au lieu 
                  
                  de rétablir notre crédit lui ont fait un grand 
                  
                  tort. ( Ecoutez ! écoutez !) Peut-être ne 
                  
                  me serait-il pas possible de citer rien de plus 
                  
                  fort à ce sujet que le prospectus flamboyant 
                  
                  répandu partout sous les auspices de mon 
                  
                  hon. ami de Toronto, qui promettait aux 
                  capitalistes crédules d'Angleterre des dividendes de 11 1/2 pour cent sur les parts
                  qui 
                  seraient souscrites dans la compagnie de 
                  chemin de fer, le Grand Tronc ! 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Non ; l'hon. 
                  
                  membre ne fut pas si réservé que cela 
                  
                  ( on rit ) : c'était bien 11 1/2 pour cent. On 
                  
                  m'a accusé d'avoir révoqué en doute les 
                  
                  assertions de l'hon. M. TILLEY ; j'ai dit 
                  
                  en effet que l'hon. M. TILLEY avait, dans 
                  
                  une assemblée publique qui avait eu lieu, 
                  
                  je crois, à St. Jean du Nouveau-Brunswick, 
                  
                  prétendu que le tarif du Canada n'était en 
                  
                  réalité que de 11 pour cent : est-ce que 
                  
                  mon hon. ami de Toronto serait du même 
                  
                  avis ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—J'ai dit que la 
                  
                  moyenne des droits sur les importations de 
                  
                  ce pays, en y comprenant les articles admis 
                  
                  en franchise, était de 11 pour cent. 
                  
                  
 
               
               275
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Il ne me reste 
                  
                  plus qu'à reconnaître ce procédé nouveau d'établir le tarif d'un pays, et qui 
                  consiste à prendre d'abord tous les articles 
                  frappés de droits, puis ensuite d'y ajouter 
                  ceux admis en franchise, et à répartir sur le 
                  tout la moyenne des droits. Cette méthode 
                  peut être très-utile, mais elle est ni exacte, 
                  ni honnête suivant moi. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—C'est absolument ce 
                  
                  que l'hon. M. TILLEY à fait, et je n'ai pas 
                  
                  agi autrement. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Mon hon. ami ne 
                  
                  nous a-t-il pas dit que le ministre actuel des 
                  
                  finances du Canada avait établi à 11 pour 
                  
                  cent le tarif de cette province ? J'ai demandé 
                  
                  à mon hon. ami de nous indiquer l'époque 
                  
                  où cela a été dit ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—J'ai dit qu'en prenant 
                  
                  les exposés fournis par l'hon. M. GALT au 
                  
                  sujet du tarif et le montant des importations 
                  
                  des articles frappés de droits et admis en 
                  
                  franchise, et en répartissant sur le tout une 
                  
                  moyenne de 11 pour cent, l'hon. M. TILLEY 
                  
                  avait basé ses calculs sur les chifres mêmes 
                  
                  de l'hon. M. GALT. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Voici ce que dit le 
                  
                  compte-rendu des débats : " l'hon. M. TILLEY 
                  
                  ( c'est l'hon. M. ROSS qui parle ) s'est servi 
                  
                  des chiffres mêmes donnés par notre ministre 
                  
                  des finances " ; or ceci est inexact parce 
                  
                  que l'hon. M. TILLEY se servit en cette 
                  
                  circonstance de statistiques qui lui avaient 
                  
                  été fournies par le contrôleur du Nouveau- 
                  
                  Brunswick. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS— Le contrôleur du 
                  
                  Nouveau-Brunswick n'a pu donner les statistiques du commerce du Canada. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Mon hon. ami ne 
                  
                  se rapellera-t-il pas que, pour donner une 
                  
                  sanction officielle à l'assertion de l'hon. M. 
                  
                  TILLEY, il a dit qu'après que le contrôleur 
                  
                  de la province eut compulsé notre tarif, il en 
                  était venu à la conclusion qu'il n'était que 
                  de 11 p. cent ? Voici ce que rapporte le 
                  compte-rendu :-  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  " L'hon. M. TILLEY a cité les chiffres de notre 
                     
                     propre ministre des finances, et l'hon. membre 
                     
                     l'a représenté comme faussant la vérité en vue 
                     
                     de tromper ses auditeurs. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
               
                  Je voudrais bien savoir quand le ministre 
                  
                  des finances du Canada a dit que la moyenne 
                  
                  des droits perçus dans la province était de 
                  
                  11 pour cent ? Comme je témoignais alors 
                  un vif désir de savoir à quelle époque le 
                  ministre des finances du Canada avait 
                  prétendu que la moyenne des droits de 
                  douane de cette province n'était que de 11 
                  
                  
                  
                  
                  
                  pour cent, il ( l'hon. M. ROSS ) manifesta la 
                  
                  volonté de n'être plus interrompu, et je dus 
                  
                  cesser de l'interrompre sans en avoir pu 
                  
                  obtenir la réponse à ma question. Mais, si 
                  
                  l'hon. député de Toronto veut se rappeler le 
                  
                  discours prononcé l'autre jour seulement à 
                  
                  Sherbrooke par l'hon. M. GALT, il verra que 
                  
                  le ministre des finances établit à 20 p. cent 
                  
                  le tarif du Canada. 
                  
                  
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—Cette assertion du 
                  
                  ministre des finances n'embrasse pas les 
                  
                  articles admis en franchise ; voilà tout. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—En effet :—mais 
                  
                  alors je dis que, s'il avait pris la valeur des 
                  
                  articles frappés de droits telle que la donne 
                  
                  les tablaux du commerce de 1863,—les 
                  
                  dernières statisques annuelles que l'on ait de 
                  
                  complètes, — au lieu de fixer notre tarif 
                  
                  à 20 pour cent seulement, il aurait 
                  
                  trouvé que la moyenne réelle des droits 
                  
                  prélevés aux douanes du Canada en 1863 
                  
                  a été de 22 1/2 pour cent. ( Ecoutez ! écoutez !) 
                  
                  Mon hon. ami de Toronto est ensuite venu 
                  
                  au secours de M. LYNCH, de Halifax ; puis, 
                  
                  non content de cela, il est accouru défendre 
                  
                  le président actuel du conseil ( l'hon. M. 
                  
                  BROWN ) ainsi que le secrétaire provincial 
                  
                  ( l'hon. M. MCDOUGALL). J'avoue que le 
                  
                  spectacle m'a amusé quelque peu et surpris 
                  
                  encore plus de voir l'hon. député de Toronto 
                  
                  devenir l'apologiste et le champion de ces 
                  
                  hon. messieurs qui sont très capables, je 
                  
                  crois, de se défendre même sans l'aide de 
                  
                  mon hon. ami. ( Ecoutez ! écoutez!) Il a 
                  
                  parlé encore de l'utilité et de la nécessité où 
                  
                  nous étions de connaître les ressources 
                  
                  financières et la quote-part de revenu des 
                  
                  provinces avec lesquelles le Canada était sur 
                  le point de contracter une union. Comme 
                  j'avais dit que nous possédions des travaux 
                  publics d'un grand prix et d'une haute importance, dont quelques une produisaient
                  
                  d'assez forts revenus, l'hon. député de 
                  Toronto à cru nécessaire de répondre que 
                  les provinces maritimes se trouvaient elles 
                  aussi dotées de travaux publics d'une nature 
                  profitable ; que le Nouveau-Brunswick avait 
                  dépensé huit millions de piastres en construction de chemins de fer, la Nouvelle-
                  
                  Ecosse six millions, et que ces travaux 
                  donnaient un bénéfice net annuel de $140,000, ou $70,000 chaque, lequel appartiendrait
                  
                  au gouvernement général. Lorsque de telles 
                  assertions se font en chambre, elles n'y 
                  restent pas et se répandent en dehors, c'est 
                  pourquoi il semble que ceux qui les font 
                  devrait être bien convaincus de leur exactitude et de leur véracité. 
                  
                  
 
               
               
               276
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—J'avoue que ces 
                  
                  assertions me surprirent beaucoup et je restai 
                  
                  étonné d'abord de voir que ces provinces 
                  
                  avaient autant dépensé pour la construction 
                  
                  des voies ferrées, puis de ce que ces voies 
                  
                  ferrées fussent plus profitables que celles du 
                  
                  Canada. Or, que trouve-t-on dans les derniers comptes publics de ces provinces ? 
                  
                  Nous voyons que les chemins de fer du 
                  
                  Nouveau-Brunswick ont coûté $4,275,000, 
                  
                  ceux de la Nouvelle-Ecosse $4,696,288 ; et 
                  
                  que les premiers ont payé en 1862 $21,711, 
                  
                  et les seconds $40,739 de benéfice net, ce qui 
                  
                  donne réuni un revenu assez mince de 
                  
                  $62,450 pour les deux provinces, au lieu de 
                  
                  $140,000, comme le prétend mon hon. ami 
                  
                  de Toronto. D'un autre côté, on voudra 
                  
                  bien se rappeler que ces voies ferrées étaient 
                  
                  neuves ou du moins comparativement neuves, 
                  
                  et que pour celui qui prend la peine d'examiner les statistiques officielles de ces
                  provinces il est évident que les frais de 
                  
                  réparation de ces chemins de fer, de même 
                  
                  que de tous les autres, va s'augmentant 
                  
                  d'année en année. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—La chambre se rappellera que les chiffres dont je me suis servi 
                  
                  m'ont été fournie pendant que je parlais. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Je crains bien que 
                  
                  ce genre d'erreur ne se soit propagé durant 
                  
                  tout le cours de cette discussion. ( Ecoutez ! 
                  
                  écoutez !) Nos hommes publics ont montré 
                  
                  certainement trop de négligence dans leurs 
                  
                  statistiques sur la prospérité du Canada, et 
                  
                  sur la richesse, l'étendue et les ressources 
                  
                  des provinces maritimes. Jetons maintenant 
                  
                  les yeux sur nos travaux publics que mon 
                  
                  hon. ami essaie de rapetisser et de décrier. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—Je n'ai jamais prétendu pareille chose ; j'ai dit au contraire 
                  
                  qu'ils étaient indirectement d'une grande 
                  
                  valeur au pays. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Oui et directement aussi ; car je découvre dans les comptes 
                  
                  officiels de la province que le revenu net de 
                  
                  nos travaux publics pour 1863,—qui tous 
                  
                  doivent revenir au gouvernement confédéré,— 
                  
                  s'est élevé à $303,187, et le coût à $25,931,168. C'est là une partie de la mise que
                  le 
                  
                  Canada se prépare à verser dans le fonds 
                  
                  commun de la confédération, du moins en 
                  
                  ce qui regarde les travaux publics. ( Ecoutez ! 
                  
                  écoutez !) Je terminerai les observations 
                  
                  que j'avais à faire sur le discours de 
                  
                  mon hon. ami de Toronto en réponse aux 
                  
                  
                  
                  
                  
                  quelques mots que j'ai adressés l'autre jour 
                  
                  à la chambre, en me contentant d'exprimer 
                  
                  le regret d'avoir non seulement déplu à mon 
                  
                  hon. ami par mes assertions, mais encore par 
                  
                  mon style et la façon dont j'ai parlé. 
                  
                  
                  
 
               
               
               
               L'HON. M. ROSS—Je n'ai signalé que 
                  le caractère et le sens de vos paroles. 
                  
                  
 
               
               
               L'HON. M. CURRIE—L'attention que 
                  m'a accordée alors cette hon. chambre et la 
                  manière dont mes raisons ont été accueillies 
                  et par mes amis et par mes adversaires 
                  politiques, devraient me porter à croire que 
                  je n'ai pas dépasser les bornes de la convenance, et que je n'ai violé les règles
                  parlementaires ni par le ton ni par le caractère 
                  de mes paroles. Cependant, si je l'ai fait, 
                  je le regrette et je puis prendre la liberté 
                  d'espérer que, lorsque mon pays aura fait 
                  pour mon éducation politique le quart de 
                  ce qu'il a fait pour celle de mon hon. ami 
                  de Toronto, si je n'ai pas encore la politesse et 
                  les manières d'un CHESTERFIELD ni l'éloquence d'un PITT, je pourrai néanmoins traiter
                  
                  mes collègues avec courtoisie et convenance. 
                  ( Ecoutez ! écoutez !) Mais laissons ces vétilles 
                  pour nous occuper de la forte pression 
                  que l'on fait peser, d'un côté ou de l'autre, 
                  sur les députés du Canada et sur le peuple 
                  lui-même pour leur faire adopter ce projet 
                  important sans leur donner le temps de 
                  la réflexion et de la délibération que 
                  demande une question de cette importance. Ma conviction est que cette pression 
                  ne vient pas du peuple ; elle ne part pas non 
                  plus de cette branche de la législature, ni 
                  de l'autre, mais je crois, ainsi que je l'ai déjà 
                  dit, qu'elle vient d'ailleurs ; je crois que c'est 
                  du dehors que l'on nous presse d'adopter cette 
                  mesure plus vite, je le crains, que ne le veut 
                  le bien du pays. Il se peut que les hommes 
                  d'état et qu'une grande partie du peuple 
                  anglais désirent vivement voir la réalisation 
                  de ce projet et que la presse anglaise en général 
                  lui donne son approbation : mais lorsque 
                  tous viendront à comprendre ce projet, lorsque 
                  les porteurs de nos effets publics sauront 
                  que la confédération signifie plus de dettes, 
                  plus d'impôts et moins de crédit public, on 
                  entendra alors une autre voix traverser 
                  l'Atlantique. Lorsque l'industriel anglais 
                  saura que la confédération signifie un tarif 
                  plus élevé sur les manufactures anglaises, 
                  nous verrons encore l'expression d'une autre 
                  opinion traverser l'Atlantique. ( Ecoutez ! 
                  écoutez !) Lorsque je quittai ma division, hons. 
                  messieurs, je ne pensais pas que cette mesure 
                  allait être imposée au pays en la manière que 
                  
                  
                  
                  277
                  
                  
                  je vois le gouvernement du jour chercher 
                  
                  à le faire. Je crois que nous devrions 
                  
                  attendre avant de voter ces résolutions, et 
                  
                  que nous devrions avoir besoin d'obtenir 
                  
                  auparavant plus de renseignements sur ce 
                  
                  sujet. Avant d'abolir nos constitutions 
                  
                  locales, avant de décréter la ruine de toute 
                  
                  la constitution, nous devrions, ce semble, 
                  
                  savoir un peu ce que nous aurons pour 
                  
                  remplacer ce que nous détruisons. Est-ce 
                  
                  qu'aucun de mes hons. auditeurs savait 
                  
                  au moment de quitter ses foyers que tout 
                  
                  le projet nous serait soumis, qu'on nous 
                  
                  demanderait de le juger, ou du moins 
                  
                  de l'examiner comme un tout inséparable ? 
                  
                  M'est avis qu'il faut prendre garde lorsqu'on accepte la moitié d'une mesure 
                  
                  jusqu'à ce que l'on sache quelle est l'autre 
                  
                  moitié. ( Ecoutez ! écoutez !) Mes hons. 
                  
                  auditeurs doivent se rappeler avec quelle 
                  
                  précaution le parlement anglais s'occupa de 
                  
                  régler en 1839 les intérêts du Canada. Il y 
                  
                  avait à cette époque grand besoin d'une nouvelle constitution pour le Canada et en
                  particulier pour le Bas-Canada ; et lorsque le 
                  
                  gouvernement d'alors introduisit, sous une 
                  
                  forme assez semblable à celles qui sont actuellement devant la chambre, ses résolutions
                  basées sur le principe d'une union 
                  
                  législative, le chef de l'opposition, lord 
                  
                  STANLEY, demanda que toute la mesure fût 
                  
                  introduite. Telle fut la force de l'opinion en 
                  
                  dedans comme en dehors du parlement que 
                  
                  le ministère dût retirer ses résolutions et présenter toute la mesure. ( Ecoutez !
                  écoutez !) 
                  
                  Devons-nous montrer moins de sollicitude 
                  
                  pour nos droits constitutionnels ;—devons- 
                  
                  nous porter moins d'attention à nos intérêts 
                  
                  comme à ceux de nos enfants et petits 
                  
                  enfants, qu'un peuple qui législate pour 
                  
                  nous à plus de treize cents lieues de 
                  
                  distance ? On veut aussi dans ces résolutions 
                  
                  que nous engagions la province, à quoi ? à 
                  
                  construire le chemin de fer intercolonial, et 
                  
                  cela sans savoir, ainsi que je le disais l'autre 
                  
                  jour, où il doit passer et ce qu'il doit coûter. 
                  
                  Pourquoi ne pas nous communiquer le rapport de l'ingénieur chargé d'explorer la route
                  
                  
                  où doit passer ce chemin de fer ? Pourquoi 
                  
                  ces retards ? Pourquoi essayer de faire passer 
                  
                  précipitamment cette mesure par la législature 
                  
                  et nous laisser dans l'obscurité sur cette grande 
                  
                  entreprise ? Il pourrait bien se faire qu'on 
                  
                  gardât le rapport pour favoriser le projet de 
                  
                  confédération sinon ici du moins ailleurs. 
                  
                  
                  
                  
 
               
               
               L'HON. M. CAMPBELL—Mon hon. 
                  ami va trop loin. Le rapport n'a pas encore 
                  
                  
                  
                  
                  
                  été fait ; comment peut-on dès lors accuser 
                  
                  le gouvernement de le retenir par devers 
                  
                  lui ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—C'est vrai ; le 
                  
                  gouvernement, d'ailleurs, a bien assez des 
                  
                  accusations vraies qu'on porte contre lui, 
                  
                  sans encore lui en imputer de fausses. Je 
                  
                  ne veux pas faire d'assertions fausses, mais 
                  
                  je dirai que j'ai de bonnes raisons d'être 
                  
                  surpris de voir le gouvernement introduire 
                  
                  cette mesure et la proposer à la chambre 
                  
                  avant de connaître lui-même ce qu'il en 
                  
                  coûtera, (écoutez ! écoutez !) et demander 
                  
                  à cette chambre de s'engager avec le pays 
                  
                  à faire une entreprise dont il ne connaît pas 
                  
                  lui-même le coût. ( Ecoutez ! écoutez !) 
                  
                  Cependant, si le rapport n'est point prêt, les 
                  
                  journaux ont répété que l'exploration du 
                  
                  tracé était finie ou sur le point de l'être, et 
                  
                  par conséquent on peut en obtenir communication avant peu : pourquoi dès lors tant
                  
                  
                  de hâte et d'anxiété à faire voter les 
                  
                  résolutions avant de l'avoir ? Et puis, pourquoi le gouvernement n'introduit-il pas
                  les 
                  
                  bills sur les écoles qui ont été promis ? Pourquoi ne pas mettre le peuple ou le parlement
                  
                  
                  en état de juger des projets de loi sur l'éducation dans le Bas et le Haut-Canada
                  avant le 
                  
                  vote des résolutions ? En vérité, je ne vois pas 
                  
                  l'utilité de tenir ces choses dans l'ombre et 
                  
                  je ne crois pas que le gouvernement ait 
                  
                  aucune raison de ne pas les règler de suite. 
                  
                  Hons. messieurs, une autre question sur 
                  
                  laquelle on aurait encore dû nous éclairer 
                  
                  est celle de la division ou répartition de la 
                  
                  dette publique. En ouvrant les comptes 
                  
                  publics que chacun de nous a reçus à 
                  
                  l'ouverture de la session, on voit que le 
                  
                  passif de cette province ne s'élève pas à 
                  
                  moins de $77,203,282. Mais comme il est 
                  
                  réglé que le Canada n'a le droit de porter 
                  
                  au débit de la confédération qu'une dette de 
                  
                  $62,500,000, nous avons le droit de savoir 
                  
                  qui paiera les autres $15,000,000 ? Quelle 
                  
                  sera la partie afférente au Haut-Canada ? 
                  
                  ( Ecoutez ! écoutez ! ) Considérons un moment le pouvoir que nous déléguons au parlement
                  confédéré en votant les présentes résolutions et en fesant passer par la législature
                  
                  
                  impériale une loi qui les contienne. Nous 
                  
                  lui donnons d'abord le pouvoir d'établir des 
                  
                  impôts locaux sur chaque province séparée. 
                  
                  Or, j'aimerais à savoir comment on exercera 
                  
                  ce droit ; j'aimerais à savoir si ce sera une 
                  
                  taxe par tête, ou une taxe par acre sur 
                  
                  les terres des provinces, ou bien encore si 
                  
                  ce sera un impôt sur la propriété en général 
                  
                  
                  
                  278
                  
                  
                  
                  de chaque province ? Quel est celui de 
                  
                  mes hons. auditeurs qui ne serait pas bien 
                  
                  aise d'étre éclairé sur tous ces points avant 
                  
                  de voter ce projet? (Ecoutez ! écoutez !) 
                  
                  Une autre question très importante est 
                  
                  celle des défenses du pays, laquelle depuis 
                  
                  quelques mois a pris un aspect qu'elle n'avait 
                  
                  jamais eu jusqu'ici dans l'histoire du pays. 
                  
                  Je demande à la chambre la liberté de lire 
                  
                  sur cette questions un extrait d'un rapport 
                  
                  qui méritera plus tard d'être classé parmi 
                  
                  les pièces d'état les plus remarquables. Je 
                  
                  veux parler d'un memorandum du conseil 
                  
                  exécutif en date du mois d'octobre 1862, 
                  
                  rédigé par le ministère MACDONALD-SICOTTE. 
                  
                  Quelles que  aient été les fautes de ce gouvernement, quels que reproches qu'on ait
                  eus 
                  
                  à lui faire sur d'autres sujets, je crois qu'il 
                  
                  n'y a eu à l'époque qu'une seule voix dans 
                  
                  l'opinion publique pour approuver la position 
                  
                  digne qu'il prit sur cette question. On lit 
                  
                  dans ce memorandum le passage suivent :-  
                  
 
               
               
               
               
               
                  
                  
                  " La manière dont a été accueilli le projet du 
                     
                     chemin de for intercolonial est la preuve qu'ils 
                     
                     sont disposés à faire tout en leur pouvoir pour se 
                     
                     conformer aux recommandations du gouvernement impérial. Leur conduite dans cette affaire
                     
                     
                     doit les mettre à l'abri de toute imputation. En 
                     
                     même temps,- ils insistent à dire qu'ils sont et 
                     
                     doivent etre réputés les meilleurs juges du degré 
                     
                     de pression que peut supporter le crédit de la 
                     
                     province. Ils sont prêts, sous certaines conditions, à charger ce crédit des responsabilités
                     
                     
                     qu'entrainera le chemin de fer intercolonial, mais 
                     
                     ils ne sont pas disposés à prodiguer les deniers 
                     
                     publics pour édifier un système militaire contraire 
                     
                     aux goûts du peuple canadien, en disproportion 
                     
                     avec ses ressources, et que n'exige point la situation telle ne le connaissent es
                     conseillers de 
                     
                     Votre Excellence." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  C'est-à-dire, l'armement et la mise en service 
                  
                  actif de 50,000 hommes. 
                  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Sa Grâce, tout en promettant une aide généreuse, prétend que quel que soit le corps
                     de 
                     
                     troupes régulières qu'on envoie, il ne saurait être 
                     
                     suffisant pour défendre la province, et que c'est 
                     
                     sur son peuple même qu'un tel pays doit principalement compter. Les conseillers de
                     Votre Excellence ne seraient pas fidèles à leurs propres convictions et trahirsient
                     la confiance placée en eux, 
                     
                     s'ils taisaient que c'est leur croyance que, sans 
                     
                     des secours très—considérables, le peuple de cette 
                     
                     province, en dépit de tous les efforts et de tous 
                     
                     les sacrifices dont il est capable, ne serait pas en 
                     
                     état de repousser avec succès et pendant longtemps une invasion de la république voisine.
                     Il 
                     
                     se repose jusqu'à un certain point pour cette 
                     
                     protection sur le fait que, dans aucun cas imaginable, il ne provoquera la guerre
                     avec les Etats- 
                     
                     Unis, et que conséquemment si le Canada devenait 
                     
                     le théâtre d'hostilités par suite de la politique 
                     
                     impériale,—tout en faisant avec enthousiasme ses 
                     
                     
                     
                     
                     efforts pour défendre le sol,—il serait néanmoins 
                     
                     obligé de compter surtout pour sa protection sur 
                     
                     les ressources de l'empire. Et en pareil cas, vos 
                     
                     conseillers pensent qu'ils pourraient, avec droit, 
                     
                     espérer d'être assistés dans l'œuvre de la défense 
                     
                     de toute la puissance impériale. Il est superflu, 
                     
                     en face de son histoire, de protester de la disposition du peuple canadien à prendre
                     sur lui toutes 
                     
                     les consequences que peut entrainer son état de 
                     
                     dépendance de l'empire. Bon dévouement s'est 
                     
                     trop souvent manifesté pour qu'on puisse le 
                     
                     déprécier ou le révoquer en doute. Le Canada a 
                     
                     fait des sacrifices qui doivent le mettre hors de la 
                     
                     portée du soupçon, et que le gouvernement de Sa 
                     
                     Majesté devrait regarder comme une garantie de 
                     
                     sa fidélité. Nulle partie de l'empire n'est exposée 
                     
                     aux maux et aux sacrifices qu'aurait inévitablement à supporter cette province, en
                     cas de guerre 
                     
                     avec les Etats-Unis: aucune combinaison probable de troupes régulières et de milice
                     ne saurait 
                     
                     protéger notre sol contre des armées d'lnvasion, 
                     
                     et la fortune la plus inespérée ne pourrait préserver nos riches districts de devanir
                     le théâtre 
                     
                     d'une erre qui paralyserait notre commerce et 
                     
                     notre ndustrie, dévasterait nos champs, nos villes 
                     
                     et nos villages, et ferait peser les calamités de la 
                     
                     guerre sur des foyers qui jouissent aujourd'hui 
                     
                     des bienfaits de la paix, et tous ces maux seraient 
                     
                     la conséquence d'évènements auxquels le Canada 
                     
                     n'aurait en aucune part." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Ce langage, hons. messieurs, n'est pas seulement celui des hommes politiques du Canada
                  
                  
                  d'autrefois ;—on se rappelle ce qui a été dit 
                  
                  et écrit dans les provinces maritimes par des 
                  
                  hommes qui occupent aujourd'hui des postes 
                  
                  élevés sous le gouvernement impérial. Je 
                  
                  citerai, entr'eutres, l'hon. JOSEPH HOWE, qui 
                  
                  déclarait qu'on ne devait pas s'attendre à 
                  
                  nous voir nous défendre nous-mêmes contre 
                  
                  un pouvoir étranger, parce que nous n'avions 
                  
                  de voix ni dans la déclaration de la guerre ni 
                  
                  dans les négociations de paix,—et que tout 
                  
                  en étant prêts comme jadis à faire face à 
                  
                  l'ennemi au risque de notre vie et de nos bien, 
                  
                  nous ne voulions pas comme colons assumer 
                  
                  une responsabilité qui n'appartenait qu'à 
                  
                  notre métropole. Or, en quoi de tels sentiments correspondent—ils avec les vues du
                  
                  
                  gouvernement d'aujourd'hui sur la même 
                  
                  question ? Je tiens a la main en ce moment 
                  
                  l'extrait d'un discours prononcé par l'un des 
                  
                  membres les plus éminents du cabinet dans 
                  
                  une resemblée publique qui a en lieu récemment à Toronto—que dit cet hon. monsieur?
                  
                  
                  Parlant de la conférence tenue à Québec, il 
                  
                  ajoute quo-  
                  
               
               
               
                           
                  
                  
                  " Les délégués résolurent à l'unanimité de mettre 
                     
                     sous le plus bref délai possible les provinces unies 
                     
                     de l'Amérique Britannique du Nord sur un pled 
                     
                     de défense complète " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  J'ignorais que le gouvernement anglais eut 
                  
                  jamais secoué le joug de la défense de cette 
                  
                  
                  
                  
                  279
                  
                  
                  province, et voilà un des membres haut 
                  
                  placés dans l'exécutif canadien qui nous 
                  
                  apprend que cette conférence, tout arbitraire 
                  
                  quelle était, et en vertu d'une résolution 
                  
                  qui ne nous est pas communiquée, promet 
                  
                  de mettre la province en état parfait de 
                  
                  défense : qu'est-ce que cela signifie ? Rien 
                  
                  autre chose qu'une dépense de quatre à 
                  
                  cinq millions de piastres de plus par année, 
                  
                  ou bien cette assertion ne voulait rien dire. 
                  
                  L'hon. ministre continue en disant que-  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  " La conférence de Québec ne se sépara point 
                     
                     avant de s'engager à mettre les défenses navales 
                     
                     et militaires des provinces unies dans l'état le plus 
                     
                     complet et le plus satisfaisant. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  C'est pourquoi, avant d'aller plus loin dans 
                  
                  la discussion de ce projet, avant de donner 
                  
                  notre vote, j'affirme que nous devrions en 
                  
                  savoir davantage sur un sujet aussi vital. 
                  
                  ( Ecoutez ! écoutez !) On pourra peut-être 
                  
                  arguer qu'il n'est pas besoin de soumettre la question au peuple ni de lui donner
                  
                  
                  le temps d'examiner les choses : mais tous 
                  
                  les hon. membres qui ont pris la parole dans 
                  
                  cette chambre sur cette question n'ont-ils 
                  
                  pas été unanimes à convenir qu'elle était la 
                  
                  plus importante qui ait jamais été agitée 
                  
                  devant aucune législature des colonies anglaises ? Et cependant ces hons. messieurs
                  
                  
                  ne veulent pas que le peuple ait plus 
                  
                  de temps pour refléchir sur cette importante question, bien que la loi de ce pays
                  
                  
                  exige que toutes les fois qu'une municipalité contracte des engagements pour plus
                  
                  
                  d'une année quelque minces qu'ils soient, elle 
                  
                  soumettra ses réglements à l'approbation des 
                  
                  contribuables. ( Ecoutez. ) D'hons. orateurs 
                  
                  ont donné comme raison de ne pas en appeler 
                  
                  au peuple, est que nous avons eu, depuis 
                  
                  le projet de confédération du gouvernement, 
                  
                  grand nombre d'élections pour cette chambre 
                  
                  qui toutes ont donné des résultats favorables 
                  
                  à la question. Je demanderai quel est de 
                  
                  fait le chiffre réel des élections qui ont eu 
                  
                  lieu depuis que le projet est imprimé et 
                  
                  publié ? J'aimerais à voir se lever ceux de 
                  
                  mes hons. auditeurs qui ont été élus et 
                  
                  envoyés ici pour voter le projet depuis qu'il 
                  
                  a été divulgué. Oui, nous avons eu une 
                  
                  élection en Haut-Canada depuis cette époque : 
                  
                  c'est celle dont a parlé hier mon hon. voisin 
                  
                  ( M. SIMPSON ) et qui s'est faite dans Ontario 
                  
                  Sud, comté que représentait l'un des ministres 
                  
                  auteurs du projet actuel, le vice-chancelier actuel du Haut-Canada, l'hon. M. 
                  
                  MOWAT. Or, quel a été le langage des 
                  
                  candidats dans cette élection ? Tous deux, 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  ainsi que l'a dit mon hon. ami se sont engagés, 
                  en sollicitant les suffrages des électeurs, à voter 
                  en chambre l'appel au peuple sur la question 
                  qui nous occupe à l'heure qu'il est. ( Ecoutez ! écoutez !) C'est là la dernière élection
                  
                  qui ait eu lieu dans le Haut-Canada. Je ne me 
                  cache pas que plusieurs de mes hons. auditeurs, 
                  en se présentant de nouveau aux suffrages de 
                  leurs divisions l'automne dernier, se sont 
                  déclarés dans leurs manifestes électoraux 
                  pour l'union des provinces de l'Amérique du 
                  Nord. Mais quel est l'homme de jugement 
                  dans cette chambre qui ne dirait pas la même 
                  chose ? Je suis pour ma part aussi favorable 
                  à cette confédération aujourd'hui que je l'ai 
                  jamais été, et je défie qui que ce soit 
                  d'avancer qu'à aucune époque de ma vie 
                  publique j'ai jamais dit que ce soit au 
                  contraire. ( Ecoutez! écoutez !) Mais, hons. 
                  messieurs, lorsque je jette les yeux sur le 
                  projet actuel que je regarde comme imparfait, 
                  je sens que je dois m'y opposer, non 
                  parce que c'est un projet de confédération de 
                  l'Amérique du Nord, mais parce qu'il renferme en lui-même les germes de sa propre
                  
                  destruction. C'est pourquoi l'amendement 
                  mis devant cette chambre n'a pas pour but 
                  de renverser le plan ministériel, et j'espère 
                  bien qu'avant la clôture des débats le gouvernement verra la convenance d'accorder
                  le 
                  délai qu'on y demande. En supposant que 
                  le gouvernement retarde d'un mois sa mesure, 
                  quel mal peut-il en résulter ? Car si le projet 
                  est bon , s'il est aussi désirable que les divers 
                  gouvernements provinciaux le prétendent, 
                  un délai d'un mois ne pourra certainement pas l'anéantir. Si, au contraire, il est
                  
                  mauvais, s'il porte avec lui un principe de 
                  mort, il vaut mieux qu'on le sache aujourd'hui 
                  plutôt que demain alors que la mesure fera 
                  partie d'une loi sur laquelle nous n'aurons 
                  plus aucun contrôle. Pour prouver ce que 
                  je pense de la question, je dis ceci :—donnez 
                  un délai raisonnable,—permettez aux électeurs que je représente de faire connaître
                  leur 
                  opinion ; et s'ils déclarent que la mesure 
                  doit être adoptée telle qu'elle est, je cesserai 
                  mon opposition et, au lieu de tout faire pour 
                  l'empêcher de passer, je m'abstiendrai de soulever le moindre obstacle. " Mais, disent
                  
                  d'hon. conseillers, qui dit délai dit renversement de la mesure !"—Si la mesure est
                  
                  bonne ; si elle se recommande d'elle-même 
                  à l'approbation du peuple, défendue qu'elle 
                  est par les hommes les plus éminents du 
                  parlement, je répète qu'elle ne court aucun 
                  risque. Dans la supposition qu'il nous soit 
                  
                  
                  
                  280
                  
                  accordé un mois de délai, nous serons encore 
                  plus avancés alors que les provinces maritimes. Si je ne me trompe, en effet, les
                  
                  brefs d'élection sont rapportables dans le 
                  Nouveau-Brunswick le 25 mars. 
                  
                  
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Alors, ce sera le 
                  
                  21 ou le 22 mars que la législature de cette 
                  
                  colonie siégera. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL — J'ai mal 
                  
                  compris mon hon. ami ; j'ai voulu dire que 
                  
                  la législature suivant toute probabilité pourra 
                  
                  s'assembler le 8 ou le 9 mars. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Alors, c'est qu'on 
                  
                  se prépare à précipiter les choses dans cette 
                  
                  province autant qu'en Canada, dont le peuple 
                  
                  n'a pas eu comme celui du Nouveau-Brunswick l'occasion de se prononcer sur le projet
                  
                  
                  de la confédération. La population de cette 
                  
                  dernière province me paraît comprendre très 
                  
                  bien toute l'importance de la question et 
                  
                  j'espère que son jugement sera réfléchi, car 
                  
                  elle ne se prononcera qu'après avoir eu le 
                  
                  temps et la facilité de discuter la mesure 
                  
                  sous toutes ses faces. Mon hon. ami de la 
                  
                  division Western (M. MCCREA) m'a réellement étonné l'autre jour en disant que le 
                  
                  conseil législatif électif n'avait été ni demandé 
                  
                  ni désiré par le peuple, car je me rappelle que 
                  
                  le conseil, lorsque la nomination appartenait 
                  
                  à la couronne, a été l'un des griefs permanents 
                  
                  du Bas comme du Haut-Canada. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON M. CURRIE — J'assure mon 
                  
                  hon. ami qu'il est dans l'erreur en disant 
                  
                  qu'il ne fut pas adressé des requêtes en 
                  faveur du conseil législatif électif à l'époque 
                  du changement. Il n'a qu'à ouvrir les journaux du parlement pour se convaincre du
                  
                  contraire ;—il verra encore une requête de 
                  la ville de Cobourg demandant de baser 
                  la représentation dans les deux chambres 
                  d'après le chiffre de la population. Dans son 
                  ignorance des faits, mon hon. ami a fait une 
                  assertion sur laquelle il n'a pas eu le temps 
                  de réfléchir avant de l'exprimer dans cette 
                  chambre, quoique à d'autres égards il ait 
                  traité le sujet avec beaucoup d'habileté sans 
                  cependant avoir le succès qu'il remporte 
                  toujours lorsqu'il défend les bonnes causes. 
                  ( On rit. ) Il a prétendu, d'un autre côté, 
                  qu'un conseil nommé par la couronne serait 
                  plus responsable au peuple qu'il ne l'est 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  aujourd'hui: voilà assurément quelque chose 
                  de nouveau pour moi. S'il en est ainsi, 
                  pourquoi ne pas dès lors appliquer ce système 
                  à l'autre branche de la législature ? Je suis 
                  convaincu que dans ce cas le gouvernement 
                  coulerait des jours beaucoup plus heureux 
                  et beaucoup moins agités que celui d'aujourd'hui, tout composé d'hommes distingués
                  
                  qu'il est. ( Rires. ) Mais, dit mon hon. ami, 
                  le peuple est en faveur du projet car il a eu 
                  tout le temps désirable pour tenir des assemblées et adopter des requêtes. Je lui
                  
                  répondrai en lui demandant jusqu'à quel 
                  point la plupart des membres mêmes de cette 
                  chambre connaissaient la mesure avant de 
                  descendre à Québec ? La connaissions-nous 
                  autant qu'aujourd'hui ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Un autre hon. 
                  
                  membre dit " non. " Quant à moi j'avoue 
                  
                  que même le discours de l'hon député de 
                  Toronto m'a appris quelque chose que je ne 
                  savais pas auparavant. Le pays a attendu 
                  que la question fût discutée en parlement et 
                  que tout le projet fut présenté afin de le juger 
                  dans son ensemble ; malheureusement, le 
                  conseil n'en a qu'une partie devant lui. Je 
                  n'ai pas eu le plaisir d'entendre toutes les 
                  remarques de mon hon. ami de Montréal 
                  [ M. FERRIER ], mais ce que j'en ai entendu 
                  m'a vivement intéressé. Je parle de ce qui 
                  se rapportait à la crise ministérielle du mois 
                  de juin dernier. J'avais cru que le célèbre 
                  memorandum que le gouvernement a depuis 
                  répudié en grande partie, renfermait toutes 
                  les explications ; mais la scène décrite si 
                  brillamment par l'hon. membre et dans 
                  laquelle le président du conseil rencontre le 
                  proc.-gén. du Bas-Canada.... 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. FERRIER—Je n'ai pas dit 
                  
                  que je l'avais vue : j'en ai seulement entendu 
                  
                  parler. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Lorsque l'hon. M. 
                  
                  CARTIER reçut dans ses bras l'hon. M. 
                  
                  BROWN. ( Rires. ) 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Et que l'hon. M. 
                  
                  BROWN jura une allégiance éternelle à l'hon. 
                  
                  M. CARTIER. ( Rires. ) 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. FERRIER :—Je ne faisais que 
                  
                  répéter les on-dit du jour, et j'ai dit que je 
                  
                  ne savais rien autre chose que ce que avais 
                  
                  entendu dans les rues. 
                  
                  
 
               
               281
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE— Alors j'ai mal 
                  
                  compris mon hon. ami, mais j'avais cru qu'il 
                  
                  avait assisté à cette scène touchante. ( Rires. ) 
                  
                  Tout cela n'empêche pas cependant mon 
                  
                  hon. ami d'avoir dit ici des choses toutes 
                  
                  nouvelles pour moi et qui doivent l'avoir été 
                  
                  également au dehors, lorsqu'il a déclaré, par 
                  
                  exemple, que le chemin de fer Grand Tronc 
                  
                  ne coûtait que très peu de chose au Canada. 
                  
                  L'hon. monsieur a paru, en même temps, me 
                  
                  prendre pour un ennemi du Grand Tronc ; mais 
                  
                  jamais de ma vie je n'ai dit quoique ce soit 
                  
                  contre ce chemin de fer, comme tel. Bien 
                  
                  plus, je crois qu'il n'est personne qui apprécie 
                  
                  plus que je ne le fais les grands avantages 
                  
                  commerciaux qu'en retire le pays ; mais j'ai 
                  
                  profité de l'occasion, et le ferai encore au 
                  besoin, de parler de quelques uns des actes 
                  qui se rapportent à cette entreprise. Qu'on 
                  appelle l'attention de cette chambre sur ce 
                  chemin de fer aussi bien que sur toute autre 
                  entreprise publique,— et j'y donnerai comme 
                  par le passé toute la considération que de tels 
                  travaux méritent. J'espère que le jour n'est 
                  pas loin où le chemin de fer Grand Tronc sera 
                  ce qu'il doit être, c'est-à-dire une entreprise 
                  entièrement commerciale et que tout le monde 
                  regardera avec plaisir. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. FERRIER—C'est une entreprise exclusivement commerciale à l'heure 
                  
                  qu'il est. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Mon hon. ami a 
                  
                  prétendu que ce chemin de fer coûtait peu 
                  
                  au pays :—pourquoi, faut-il, hélas ! que les 
                  
                  comptes publics ne disent pas la même chose 
                  
                  et ne confirment pas les assertions de mon hon. 
                  
                  ami ? En regardant à l'actif de la province, 
                  
                  on trouve un compte contre le Grand Tronc 
                  
                  de $15,142,000 pour débentures, à part ce 
                  petit article de $100,000 qui a servi à racheter les bons de la cité de Montréal.
                  Il y a 
                  encore autre chose au sujet des lignes d'embranchement. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               L'HON.M. CURRIE — Mon hon.ami pour 
                  la division d'Erié ( M. CHRISTIE) a admis 
                  au commencement de cette discussion que le 
                  plan de confédération pèchait beaucoup par 
                  les détails. En admettant cela, et c'est un 
                  point capital, il est fort à craindre que la 
                  mesure ne fonctionne pas aussi paisiblement, 
                  aussi harmonieusement ni avec autant d'avantages que ses auteurs l'espéraient. Je
                  dois 
                  dire, à ce propos, que dans mon opinion ces 
                  messieurs étaient parfaitement convaincus 
                  des avantages du nouveau plan et qu'ils l'ont 
                  
                  
                  
                  
                  
                  élaboré en vue de la prospérité actuelle et 
                  future du pays et avec le sincère désir de 
                  tirer le meilleur parti possible des circonstances. Leur grande erreur a été selon
                  moi 
                  de faire trop de concessions, de la part du 
                  Canada, aux provinces maritimes, afin d'amener ces dernières à adopter immédiatement
                  le 
                  projet. Si les détails de la mesure sont 
                  tellement défectueux, pourquoi ne pas la 
                  rejeter ? Mon hon. ami a parlé de l'état du 
                  pays avant la formation du présent ministère 
                  en des termes qu'il ne saurait justifier. Il 
                  nous a dit que le pays était dans un état de 
                  confusion et d'anarchie. Pour ma part, hons. 
                  messieurs, je n'ai rien vu de cette anarchie et 
                  bien peu de cette confusion. On a vu dans 
                  d'autres pays ce que nous avons eu ici. Des 
                  gouvernements faibles toujours préoccupés de 
                  se maintenir mois par mois au pouvoir et sans 
                  cesse harcelés par une opposition puissante 
                  et infatigable. Mais, hons. messieurs, peut- 
                  on nous garantir qu'en accordant 17 membres 
                  de plus au Haut-Canada et 47 membres aux 
                  province du golfe, cela nous mettra désormais à l'abri de pareils inconvénients ?
                  L'hon. 
                  membre pour Wellington ( M. SANBORN ) a 
                  très-bien défini la position en disant 
                  qu'un peu plus de patriotisme et un 
                  peu moins d'amour pour l'intérêt de 
                  parti, de la part de nos hommes publics, 
                  nous aurait évité l'état de confusion mentionné par mon hon. ami pour la division
                  
                  d'Erié. Cet hon. monsieur, pour justifier 
                  l'appui qu'il veut donner au projet, a mentionné les résolutions adoptées par la convention
                  de Toronto en 1859, et nous a dit 
                  que j'étais un des délégués à cette couvention ; mais, malgré cela, je n'ai pris aucune
                  
                  part aux délibérations dont je n'ai aucune 
                  connaissance que par les journaux. De plus, 
                  l'hon. monsieur a eu soin de ne lire qu'une 
                  partie des résolutions. Or, ces résolutions 
                  contenaient le principe sur lequel s'est établi 
                  le gouvernement actuel qui n'a été formé 
                  que pour mettre en pratique les dispositions 
                  prises par cette convention. Un comité fut 
                  nommé par la convention de Toronto à l'effet 
                  de rédiger une adresse au public. Cette 
                  adresse fut soumise au comité exécutif et 
                  examinée le 10 février 1860, et publiée 
                  comme l'adresse de la convention dont 
                  l'hon. membre pour Erié était membre et 
                  même un des vice-présidents. Or, que 
                  disait cette adresse ? " Que la convention 
                  ne reconnaissait point au parlement le 
                  droit de changer la constitution ou de 
                  nous en donner une nouvelle sans consulter 
                  
                  
                  
                  282
                  
                  
                  l'opinion publique. " Et que proposait la 
                  
                  convention pour assurer au peuple le droit 
                  
                  de se prononcer sur une question aussi 
                  
                  importante que celle de l'adoption d'une 
                  
                  nouvelle constitution ? Voici ces propositions 
                  
                  imprimées en gros caractères, et je suis persuadé que mon hon. ami les a souvent lues
                  
                  
                  en parcourant sa vaste et prospère division. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Mon hon. ami 
                  
                  me permettra de rectifier son assertion. 
                  
                  L'assemblée eut lieu le 28 septembre 1859 ; 
                  
                  elle était présidée par feu l'hon. ADAM 
                  
                  FERGUSSON ; et mon hon. ami, le membre 
                  
                  pour la division Erié, et M. D. A. MCDONALD, agissaient comme vice-présidents. 
                  Cette assemblée nomma un comité spécial 
                  pour rédiger une adresse aux électeurs du 
                  Haut-Canada sur l'état politique de la province, à l'appui des résolutions alors adoptées.
                  
                  Un projet d'adresse fut soumis au comité 
                  exécutif. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Elle fut publiée, 
                  
                  telle que je l'ai ici, au mois de février 1860. 
                  
                  Voici une des clauses de cette adresse : 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Garantir ces droits par une constitution écrite, 
                     
                     ratifiée parle peuple et qu'on ne s'aurait altérer 
                     
                     sans sa sanction formelle. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  J'ai bien peur que l'hon. membre pour la 
                  
                  division d'Erié n'éprouve une certaine 
                  
                  difficulté à justifier son attitude actuelle par 
                  
                  des arguments tirés de l'adresse ou des 
                  
                  résolutions de la convention de Toronto. 
                  
                  L'hon. monsieur n'aurait jamais songé à 
                  
                  présenter un projet comme celui-ci aux 
                  
                  membres de cette convention. Mais, lors 
                  
                  même qu'un pareil projet eût été présenté, 
                  
                  pensez-vous qu'on n'aurait pas demandé en 
                  
                  même temps l'appel au peuple ? Pensez- 
                  
                  vous, hons. membres, que la convention eût 
                  
                  approuvé le projet dans sa forme actuelle ? 
                  
                  Mon hon. ami, tout plein d'ardeur qu'il est 
                  aujourd'hui, n'aurait pas alors consenti à 
                  cette alternative. Je dirai plus, c'est que 
                  le gouvernement actuel, soutenu par une 
                  large majorité dans les deux chambres et 
                  composé des hommes les plus habiles du 
                  parlement, n'oserait jamais faire de ces résolutions une mesure du gouvernement et
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  demander l'appui de la législature pour les 
                  faire passer sous cette forme. Mon hon. 
                  ami a dit encore que le projet était parfaitement connu de tout le pays. Il est bien
                  
                  vrai, hon. messieurs, que le texte des résolutions a été répandu à profusion dans
                  les 
                  deux provinces ; mais où et quand ont-elles 
                  été discutées si ce n'est dans le Bas-Canada, 
                  où quinze comtés ont tenu des assemblées 
                  pour les rejeter ? Dans le Haut-Canada 
                  il n'y a eu aucune discussion à ce sujet, si 
                  ce n'est à Toronto, et, là encore, elle a été 
                  très-bornée et la seule conclusion pratique 
                  qu'on en ait tiré est que Toronto, comme 
                  Québec, serait le siége d'un des gouvernements locaux. Mon hon. ami pour la division
                  
                  d'Erié a prétendu que le choix des délégués 
                  à la convention n'avait pas été arbitraire, et 
                  il est d'accord en cela avec mon hon. ami de 
                  Montréal. Or, une simple lecture des 
                  résolutions et des dépêches qui les accompagnent établit le fait contraire : et qui
                  les 
                  à délégués pour agir comme ils l'ont fait ? 
                  Le gouvernement, par l'essence même de sa 
                  formation, était-il autorisé à faire ce traité ? 
                  La formation même du gouvernement me 
                  fournit la réponse : le gouvernement a 
                  promis à la population haut-canadienne de 
                  régler les difficultés qui existent actuellement entre le Haut et le Bas-Canada. Il
                  
                  devait former entre ces deux provinces une 
                  fédération dans laquelle les autres provinces 
                  pourraient ultérieurement entrer si elles le 
                  jugeaient convenable. Tel est le principe de 
                  la formation de ce gouvernement,—principe 
                  que les ministres ont fait valoir devant leurs 
                  électeurs respectifs. A l'appui de cette 
                  assertion, il me suffira de citer certains 
                  passages du discours de Son Excellence le 
                  gouverneur-général à la fin de la dernière 
                  session du parlement. Vers la fin de ce 
                  discours il est dit : 
                  
                  
               
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Le temps est arrivé où une question constitutionnelle qui a agité la province pendant
                     
                     
                     plusieurs années, est mûre pour un règlement. "   
                     
                     
                     
                   
               
               
               
               
               A quelle province est-il fait allusion dans ce 
                  passage ? Evidemment, le Canada. 
                  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " C'est mon intention pendant la vacance, " 
                     
                     continue Son Excellence, " de joindre mes efforts 
                     
                     à ceux de mes ministres pour aviser à cette fin à 
                     
                     un plan qui sera mis devant le parlement à sa 
                     
                     prochaine session." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
               
                  Or, messieurs, où est le plan ? où est la 
                  
                  mesure promise par le discours du trône ? 
                  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  
                  
                     " En mettant fin à vos travaux parlementaires," 
                     
                     continue Son Excellence, "je désire vous faire 
                     
                     sentir l'importance de faire servir l'influence que 
                     
                     
                     
                     
                     283
                     
                     
                     vous tenez de la confiance de vos co-sujets à 
                     
                     assurer au projet qui pourra être proposé dans ce 
                     
                     but une considération calme et impartiale tant 
                     dans le parlement que par tout le pays." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Or, que veut dire cette phrase ? Si elle a 
                  
                  un sens elle indique que le gouvernement 
                  
                  s'engage à proposer une mesure qui devra 
                  
                  réaliser la confédération du Haut et du Bas- 
                  
                  Canada. Mais voilà que ces hons. messieurs 
                  
                  nous disent qu'ils " ont soumis à la chambre 
                  
                  un plan plus complet. " Et qui leur a 
                  
                  demandé cela ? On a dit que la chambre ne 
                  
                  fesait pas de différence entre les deux projets. 
                  
                  Cependant cette différence est considérable, 
                  car si les résolutions ne concernaient que le 
                  Haut et le Bas-Canada la chambre aurait 
                  pu y faire des amendements. Mais non, les 
                  ministres ont pris les députés du peuple à la 
                  gorge en leur disant : " Voici un traité qu'il 
                  faut accepter ou rejeter entièrement. " Ils 
                  les ont avertis qu'en essayant de faire 
                  changer un mot à la constitution proposée 
                  ils risquaient leur réputation s'exposant à 
                  passer pour des " sécessionistes " ou quelque 
                  chose de pis encore. Or, si le gouvernement 
                  avait été fidèle à sa promesse nous serions 
                  aujourd'hui occupés à discuter avec calme 
                  et d'un commun accord avec l'administration 
                  une mesure qui serait avantageuse aux deux 
                  provinces. Et pourquoi le gouvernement 
                  persiste-t-il à s'abriter derrière ces résolutions—résolutions qui, telles qu'on nous
                  les 
                  a présentées, sont complétement insoutenables et n'indiquent qu'une suite de concessions
                  faites par le Canada aux provinces 
                  maritimes sans aucune compensation de la 
                  part de ces dernières ? Or, je défie toute 
                  preuve contre l'exactitude de cette assertion. 
                  Et comment était composée la conférence ? 
                  Toutes les provinces y ont envoyé des représentants des deux partis, à l'exception
                  du 
                  Bas-Canada qui n'y a pas délégué un seul 
                  membre du parti libéral. ( Ecoutez !) Le 
                  gouvernement des provinces maritimes a eu 
                  la magnanimité de s'entendre avec les chefs 
                  de l'opposition, mais nos ministres ont complétement mis de côté le parti libéral
                  du 
                  Bas-Canada. ( Ecoutez !) Mon hon. ami 
                  pour la division d'Erié me dit qu'il est 
                  fortement opposé aux détails du projet. 
                  
                  
               
               
               L'HON. M. CHRISTIE—Je demande 
                  pardon à l'hon. monsieur, j'ai seulement dit 
                  que j'étais opposé à l'abandon du principe 
                  électif. 
                  
                  
 
               
               
               L'HON. M. CURRIE—Si l'hon. membre 
                  a les mêmes sentiments que moi à cet 
                  égard, il s'opposera jusqu'au dernier moment 
                  
                  
                  
                  
                  
                  à l'abandon de ce principe. Comme lui, je 
                  
                  dois à ce principe le siége que j'occupe dans 
                  
                  cette chambre, et je combattrai longtemps 
                  
                  avant de voter pour une mesure qui enlève 
                  
                  au peuple le droit de m'envoyer ici comme 
                  
                  son représentant. L'hon. monsieur nous a 
                  
                  dit que tout le pays était en faveur de la 
                  
                  confédération. Je n'en doute pas, mais bien 
                  
                  des gens en Canada sont opposés aux détails 
                  
                  du projet. L'hon. monsieur a également 
                  
                  prétendu que le pays comprenait parfaitement la mesure. Cela est une erreur, et je
                  
                  
                  n'en veux pour preuve que ce qui s'est 
                  
                  passé hier dans cette chambre. Un des 
                  
                  marchands les plus intelligents du Haut- 
                  
                  Canada, l'hon. membre pour la division 
                  
                  d'Ottawa ( M. SKEAD ) nous a dit que depuis 
                  
                  24 heures seulement il comprenait le plan 
                  
                  soumis à cette chambre. Et on nous dira 
                  
                  sérieusement que le pays comprend la 
                  
                  mesure ! Sait-on, par exemple, ce que 
                  
                  coûtera le fonctionnement du système? Les 
                  
                  hommes influents du pays ont déclaré en 
                  
                  diverses circonstances que les subventions 
                  
                  locales seraient plus que suffisantes pour 
                  
                  faire fonctionner les gouvernements locaux. 
                  
                  Or, il faut juger de l'avenir par le passé. 
                  
                  Examinons, par exemple, les comptes publics 
                  
                  du Haut-Canada en l838 ; j'y trouve que, 
                  
                  pour une population de 450,000 âmes, on 
                  
                  dépensait $885,000 par année. On me dira 
                  
                  qu'à cette époque le Haut-Canada payait la 
                  
                  milice et les frais de perception des douanes 
                  
                  et d'autres petits items qui seront laissés à 
                  
                  la charge du gouvernement fédéral. Or, que 
                  
                  coûta la milice en 1838 ? La somme insignifiante de £649 19s. 11 1/2d. Il fut perçu
                  
                  
                  £317 15s. pour honoraires et commissions, 
                  
                  en sorte que le coût total de la milice pour 
                  
                  le Haut-Canada fut de £832 4s. 11 1/2d. 
                  
                  Maintenant pour les douanes : les frais de 
                  
                  perception des douanes pour le Haut-Canada, 
                  
                  en 1838, se montèrent à £2,792 l4s 2d, 
                  
                  c'est-à-dire environ la moitié, à peine la 
                  
                  moitié de ce qu'il en coûte aujourd'hui pour 
                  
                  percevoir les douanes dans le seul port de 
                  
                  Toronto. J'en viens au Bas-Canada ; sa population était alors de 650,000 et les frais
                  du 
                  
                  gouvernement de $573,348. Jamais peuple 
                  
                  ne fut gouverné aussi économiquement que 
                  
                  le Bas-Canada avant l'union. ( Ecoutez !) 
                  
                  Et, en supposant qu'on puisse le gouverner 
                  
                  à aussi bon marché que par le passé, il 
                  
                  faudra $980,000 pour gouverner cette section du pays sans compter l'intérêt d'une
                  
                  
                  partie de la dette qui lui sera imposée. On 
                  
                  nous a dit que dans le Haut-Canada nous ne 
                  
                  
                  
                  284
                  
                  
                  saurions que faire de tout l'argent destiné à 
                  
                  la législature locale. ( Rires. ) 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE — Vous devez l'avoir 
                  
                  lu dans les discours prononcés à la chambre 
                  
                  basse, et, en particulier, dans ceux de l'hon. 
                  
                  M. BROWN. Or, si nous pouvons gouverner 
                  
                  le Haut-Canada aussi économiquement après 
                  
                  qu'avant l' Union, il nous faudra $2,170,000 
                  
                  par année, ou $1,054,000 de plus que la 
                  
                  subvention locale. Personne ne prétendra 
                  
                  que nous serons, à l'avenir, plus économes 
                  des deniers publics qu'aux premiers jours de 
                  notre histoire. On a prétendu que le pays 
                  connaissait parfaitement ces résolutions et 
                  était prêt à les juger d'une façon impartiale. 
                  Les membres du cabinet ont mauvaise grâce 
                  à faire une pareille assertion. Voici ce 
                  dont cette chambre a été témoin : on demandait à l'hon. commissaire des terres de
                  la 
                  couronne comment seraient nommés les 
                  membres des conseils législatifs des diverses 
                  provinces ? L'hon. commissaire nous informa 
                  qu'ils seraient nommés par les gouvernements locaux, et ce renseignement fut confirmé
                  par l'hon. premier ministre qui a eu 
                  l'honneur de présider aux délibérations de la 
                  conférence de Québec. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—J'ai cru qu'il avait 
                  
                  confirmé la déclaration de l'hon. commissaire 
                  
                  des terres de la couronne. En tous cas, il 
                  
                  écouta cette déclaration sans la contredire. 
                  
                  Mais qu'arriva t-il ? Après qu'on eût fait 
                  
                  comprendre à l'hon. commissaire des terres 
                  
                  l'absurdité d'une semblable disposition, il 
                  
                  demanda un jour pour répondre à la question 
                  
                  qui lui était faite, et le lendemain il nous 
                  
                  apportait une réponse toute différente. Quelques jours plus tard, on s'occupait du
                  droit 
                  d'exportation sur les minéraux de la Nouvelle- 
                  Ecosse, et j'ai cru entendre dire à l'hon. 
                  commissaire des terres que tous les charbons 
                  et minéraux exportés en pays étrangers seraient sujets à un droit. Mais, d'après les
                  
                  explications données ultérieurement par 
                  l'hon. monsieur, j'ai compris que le droit 
                  d'exportation s'appliquerait à tous les charbons et minéraux exportés de la Nouvelle-
                  
                  Ecosse. Mon hon. ami nous a expliqué la 
                  nature de ce droit d'exportation, et que nous 
                  a-t-il dit ? que ce n'était qu'un droit régalien ! Le droit d'exportation  ne s'appliquera
                  qu'au charbon qu sortira du pays. A 
                  
                  
                  
                  
                  
                  la Nouvelle-Ecosse, il y a aujourd'hui un 
                  
                  droit régalien qui sera remplacé par le droit 
                  
                  d'exportation, et voici ce qu'y gagnera cette 
                  
                  province : sur le charbon nécessaire à sa 
                  
                  consommation elle n'aura pas de droits, 
                  
                  mais les charbons qu'elle enverra en Canada 
                  
                  seront sujets à un droit d'exportation. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—Mon hon. ami doit 
                  
                  comprendre que si toutes les terres de la 
                  
                  couronne des diverses colonies eussent été 
                  
                  placées à la disposition du gouvernement 
                  
                  général, le gouvernement général en aurait 
                  
                  retiré tous les revenus. Mais elles ont été 
                  
                  laissées aux gouvernements locaux et, de 
                  
                  même que dans le Haut-Canada nous aurons 
                  
                  les droits sur les bois, la Nouvelle-Ecosse 
                  
                  se fera un revenu de ses charbons. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Une personne 
                  
                  étrangère à la question pourrait croire, 
                  
                  d'après les paroles de mon hon. ami, que la 
                  
                  confédération va nous apporter des revenus 
                  
                  tout nouveaux. Mais les terres de la couronne 
                  
                  appartiennent actuellement au Haut et au 
                  
                  Bas-Canada et nous avons droit au revenu 
                  
                  qu'elles peuvent produire. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS —Précisement, comme 
                  
                  la Nouvelle-Ecosse a droit au revenu de son 
                  
                  charbon. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Mais vous lui 
                  
                  accordez un privilége que vous niez aux 
                  
                  autres provinces, celui d'imposer des droits 
                  
                  d'exportation. Hons messieurs, j'aborderai 
                  
                  maintenant une autre question que le pays 
                  
                  semble ne pas bien comprendre, je veux 
                  
                  parler de la répartition de la dette publique. 
                  J'ai déjà dit et je le répète que le revenu 
                  est la vraie base qui devrait régler la position 
                  de chaque province dans la confédération en 
                  ce qui concerne sa dette. Et je pense que 
                  mon hon. ami pour la division de Saugeen 
                  (M. MACPHERSON) a exprimé une opinion 
                  analogue à cet égard. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Et pourquoi non ? 
                  
                  Les tableaux du commerce de la Nouvelle- 
                  
                  Ecosse, du Nouveau-Brunswick et de l'Ile 
                  
                  du Prince-Edouard sont ici à la bibliothèque, 
                  
                  et un comptable expérimenté pourrait, après 
                  
                  24 heures de travail, nous dire exactement 
                  
                  ce que chaque province devra, d'après son 
                  
                  commerce, contribuer au revenu général 
                  
                  avec notre tarif actuel. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—L'hon. monsieur ne voit pas que lorsque les différents 
                  
                  tarifs auront été rendus uniformes, ils 
                  
                  
                  
                  285
                  
                  
                  ne produiront pas les mêmes revenus 
                  
                  qu'aujourd'hui. 
                  
                  
                  
 
               
               
               
               
               L'HON. M. CURRIE—Je comprends très 
                  bien que vous donnez aux provinces maritimes des priviléges que nous n'aurons pas.
                  
                  Les hon. ministres nous parlent des importations que nous ferons des provinces maritimes.
                  En 1863 les importations de charbon 
                  de la Nouvelle-Ecosse se sont montées, en 
                  tout, à $67,000. Ils ont aussi parlé du 
                  commerce des pêcheries, mais pourquoi aller 
                  chercher du poisson sur ces côtes, quand 
                  nous pouvons dans nos eaux prendre le plus 
                  beau poisson du monde ! De plus, la confédération ne nous donnera, pour les pêcheries,
                  
                  aucun privilége que nous n'ayons à présent. 
                  Aujourd'hui nos pêcheurs peuvent pêcher 
                  dans le golfe aussi bien qu'ils le pourront 
                  après la confédération. Nous aurons droit à 
                  ces pêcheries non pas comme membres de la 
                  confédération mais comme sujets anglais. 
                  Mais je reviens au commerce de ces provinces ; 
                  nous ne retirons que peu ou point de droits 
                  du commerce des provinces maritimes, de 
                  plus les revenus de ces provinces se composent 
                  en grande partie des exportations de l'une à 
                  l'autre qui seront perdues pour le gouvernement fédéral, vu qu'il ne pourra percevoir
                  
                  ces droits que sur les marchandises importées 
                  des pays étrangers. On nous a dit aussi que, 
                  dans la confédération, notre tarif serait 
                  considérablement réduit. Je suis fâché 
                  qu'on ait fait cette déclaration, car elle ne 
                  saurait être exacte. Si on a parlé de cette 
                  réduction du tarif, c'est évidemment pour 
                  influencer la législature de Terreneuve et 
                  des autres provinces. Mais si le tarif est 
                  diminué les Canadiens peuvent être convaincus qu'il leur faudra prélever 4 ou 5 
                  millions de piastres par d'autres moyens. 
                  Le tarif étant réduit on aura donc une taxe 
                  sur les terres. J'en suis maintenant à 
                  l'injuste répartition de la dette. J'ai toujours 
                  cru que le revenu était la vraie garantie 
                  qu'un pays peut fournir de payer sa dette. 
                  Or, d'après les tableaux publiés par le 
                  ministre des finances, le Nouveau-Brunswick, avec un revenu de $1,000,000 entrera
                  
                  dans la confédération avec une dette de 
                  $7,000,000, tandis que le Canada, avec 
                  son revenu de $11,500,000 aura une dette 
                  de $62,500,000. Est-ce juste ?—Est-ce 
                  admissible ?—Est-ce même honnête ? En 
                  prenant pour base le revenu, le Canada, 
                  au lieu d'une dette de $62,500,000 aurait 
                  droit d'apporter dans la confédération une 
                  dette de $80,000,000, beaucoup plus forte 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  que sa dette actuelle. On prétend aussi que 
                  le pays comprend parfaitement le mesure et 
                  en est satisfait. Pourquoi donc ces pétitions 
                  qui arrivent tous les jours à la chambre ? 
                  Et qui m'assure que nos populations, surtout 
                  du Haut-Canada, seront satisfaites du projet 
                  lorsqu'elles en connaîtront tous les détails ? 
                  Par exemple, la petite Ile du Prince-Edouard, 
                  avec une population de 80,857 âmes, c'est-à- 
                  dire moindre que celle d'un des colléges 
                  électoraux représenté dans l'autre branche 
                  de la législature, reçoit $153,728, et sera 
                  délivrée d'une dette de $240,633. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               L'HON. M. CURRlE—Elle apporte les 
                  droits de douane et d'accise d'après le même 
                  tarif et d'après les mêmes lois qu'en Canada. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               L'HON. M. CURRIE—Je trouve le revenu 
                  total de l'Ile fixé à $200,000. Mais n'allez 
                  pas croire, hon. messieurs, que toute cette 
                  somme sera pour le gouvernement fédéral, 
                  qui n'aura que la part provenant des droits 
                  d'accise et de douane sur les marchandises 
                  importées des pays étrangers. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               L'HON. M. CURRIE—Mon hon. ami ne 
                  prétendra pas que la population de cette 
                  petite île,—population frugale et industrieuse, il est vrai,—fournit, par tête, au
                  revenu 
                  plus que la population du Haut-Canada. 
                  Parlons maintenant de Terreneuve. Sa population est de 122,600 âmes—c'est-à-dire qu'elle
                  
                  est moindre que celle de Huron, Bruce et 
                  Grey , et moindre que celle du collége électoral représenté par mon hon. ami pour
                  
                  Saugeen ; néanmoins, elle recevra constamment $369,000 par année et sera délivrée
                  
                  d'une dette de $946,000. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               L'HON. M. CURRIE—Mon hon. ami ne 
                  prétend pas que Terreneuve n'a d'autres 
                  sources de revenu que les douanes et 
                  l'accise. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               286
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Terreneuve recevra 
                  
                  $106,000 par année, non seulement cette 
                  
                  année mais toujours. Elle recevra aussi 
                  
                  constamment 80 centins par tête. En outre 
                  
                  elle recevra à l'avenir un bonus de $165,000 
                  
                  par année,—comment mon hon. ami explique- 
                  
                  t-il cela ? Car enfin cette somme capitalisée 
                  
                  représente $3,000,000 ;—il fait bon, à ce 
                  
                  prix, entrer dans la confédération. Or, pourquoi reçoit-elle cette somme énorme ?
                  Mon 
                  
                  hon. ami nous dit que c'est en retour des 
                  
                  riches terres de la couronne et des minéraux 
                  
                  qu'elle remet au gouvernement général. Mais 
                  
                  je ne sache pas que jusqu'à ce jour on ait retiré 
                  
                  de l'île une seule tonne de charbon. Et quels 
                  
                  autres minéraux peut-elle fournir ? Aucun. 
                  
                  Ses terres de la couronne n'ont aucune 
                  
                  valeur, du moins n'ont-elles rien produit 
                  
                  depuis plusieurs années. Nous donnerons 
                  
                  donc à Terreneuve $3,000,000, ou $165,000 
                  
                  par année, pour des terres qui n'ont pas de 
                  
                  valeur. J'exagère peut-être un peu, mais je 
                  
                  suis sûr qu'une loi cède gratuitement ces 
                  
                  terres à toute personne qui veut aller s'y 
                  
                  établir pour cinq ans. Et voilà les riches 
                  
                  terrains pour lesquels nous allons donner 
                  
                  $3,000,000 ! Mais mon hon. ami le commissaire des terres de la couronne nous dira
                  
                  
                  peut-être que ces terres et minéraux, si peu 
                  
                  de valeur qu'ils aient pour Terreneuve, vaudront $3,000,000 pour la confédération,
                  et 
                  
                  que l'île n'ayant pas d'autre source de revenu 
                  
                  doit recevoir, en retour, cette subvention. 
                  
                  Mais pourquoi Terreneuve n'a-t-elle pas 
                  
                  d'autre source de revenu ? Pourquoi 
                  
                  n'y a-t-on pas pris les moyens que nous 
                  
                  avons employés nous-mêmes pour créer 
                  
                  un revenu ? Et nous allons nous taxer 
                  
                  pour lui fournir $165,000 par année ! 
                  Hons. messieurs, j'ai déclaré que l'annonce 
                  du projet de confédération avait surpris le 
                  pays. Je crois que cette déclaration était 
                  fondée. Avant de nous réunir ici nous 
                  n'avons eu que peu d'explications sur la 
                  partie financière du projet—point important. 
                  Je ne suis pas de ceux qui, favorables en 
                  principe à la confédération, y renonceraient 
                  pour un item de quelques centaines de 
                  piastres. Je prétends ceci, c'est que si la 
                  base du projet est injuste en ce qui concerne 
                  certaines parties contractantes, l'édifice qu'on 
                  veut élever tombera au seul souffle de 
                  l'opinion publique. Nous avons dû penser, 
                  en venant ici, qu'on nous soumettrait la 
                  mesure promise à la fin de la dernière 
                  session, mais c'est une toute autre affaire. Or, 
                  supposons que la mesure soit adoptée ici et 
                    
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  que les autres colonies la rejettent, quelle 
                  sera la conséquence ? Si j'ai bien compris, 
                  le consentement de toutes les provinces est 
                  nécessaire et si une seule refuse, la mesure 
                  tombe à plat. Le Canada demandait la 
                  mesure promise qui devait mettre fin aux 
                  difficultés entre les deux sections de la 
                  province. Mais la conférence de Québec a 
                  totalement changé notre position : on nous 
                  apporte un traité que nous devons adopter 
à 
                     priori sans y rien changer. Peu importent les 
                  détails, notre discussion n'est qu'une comédie. 
                  Même le délai raisonnable que je demande 
                  aujourd'hui sera refusé, je le crains bien, 
                  par le gouvernement. Hons. messieurs, 
                  pour vous faire voir combien il est nécessaire que la mesure soit juste et équitable
                  
                  envers tous ceux qui y sont concernés, je 
                  citerai les paroles d'un homme d'état distingué, une des gloires du Canada. Voici
                  
                  ce qu'il disait : 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Les populations du Canada n'approuveront 
                     
                     aucune mesure qui contiendra le moindre germe 
                     
                     d'injustice à l'égard de la moindre fraction du 
                     
                     pays ; et si, dans la mesure soumise aujourd'hui, 
                     
                     un tel germe d'injustice existe, le succès du projet 
                     
                     sera gravement compromis. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Voilà ce que disait, il y a quelques mois, 
                  
                  l'hon. ministre des finances. Je découvre, 
                  
                  dans le projet de confédération, des injustices flagrantes à l'endroit de certaines
                  
                  
                  parties contractantes, et voilà pourquoi j'y 
                  
                  suis opposé. On me dira qu'il n'appartient 
                  
                  pas à cette branche de la législature d'entraver le projet, mais en cela je suis d'accord
                  
                  
                  avec l'un des membres représentant un des 
                  
                  plus grands colléges électoraux du Canada, 
                  
                  ( l'hon. M. MACPHERSON ), quand il nous 
                  
                  dit : 
                  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Bien que la constitution interdise au conseil 
                     
                     législatif de voter des deniers ou d'affecter des 
                     
                     deniers à quelque objet, il lui reste la faculté de 
                     
                     défendre avec zèle vos intérêts, et vous préserver 
                     
                     d'une législation hâtive et irréfléchie, et d'empêcher le gaspillage des deniers publics.
                     " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Je partage entièrement les vues que l'hon. membre pour 
                  
                  Saugeen a exprimées devant ses électeurs à 
                  
                  ce sujet, et, le moment venu, j'espère que 
                  l'hon. membre sera fidèle à sa profession de 
                  foi. Or, qu'arrive-t-il aujourd'hui ? Le 
                  projet est manifestement injuste vis-à-vis 
                  de la section de la province représentée par 
                  cet hon. monsieur. Nous nous engageons à 
                  
                  
                  
                  287
                  
                  construire le chemin de fer intercolonial 
                  
                  sans savoir s'il coûtera quinze, vingt ou 
                  
                  trente millions de piastres. La seule évaluation que nous ayons eue a été mentionnée
                  
                  
                  par l'hon. membre pour Toronto, qui nous a 
                  
                  dit que M. BRYDGES offrait de le construire pour dix-sept millions et demi de 
                  
                  piastres. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Si l'hon. membre 
                  
                  persiste dans cette opinion, il peut s'attendre 
                  
                  à recevoir de rudes leçons au sujet des priviléges de la chambre. Ne devons-nous pas,
                  
                  
                  en législateurs honnêtes, mettre le pays à 
                  
                  l'abri des désastreux effets d'une législation 
                  
                  hâtive et irréfléchie ? Ne peut-on pas appliquer ces deux epithètes au mode de procéder 
                  
                  
                  qu'adopte aujourd'hui le gouvernement ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. MACPHERSON —Je ne me 
                  
                  place pas à ce point de vue et voici pourquoi ; mes électeurs ont examiné la question
                  
                  
                  et sont parfaitement convaincus que cette 
                  
                  mesure doit etre adoptée. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—On nous a dit 
                  
                  que tout le projet reposait sur un système 
                  
                  de concessions mutuelles. Or, quelles concessions a-t-on faites au Canada ? Quelles
                  
                  concessions a-t-on faites, en particulier, au 
                  Haut-Canada ? On comprendra pourquoi le 
                  Canada a tout cédé quand on saura que la 
                  petite colonie de l'Ile du Prince-Edouard, 
                  avec sa population de quatre-vingt mille 
                  âmes, a eu voix égale dans la conférence 
                  en face du Haut-Canada, avec son million 
                  et demi, et le Bas-Canada, avec un million 
                  et un quart d'habitants. ( Ecoutez !) C'est 
                  ainsi qu'a commencé le système des concessions de la part du Canada. Nous lui avons
                  
                  aussi cédé le droit de nous enlever le 
                  conseil législatif électif. ( Ecoutez !) Je 
                  défi aucun hon. membre de cette chambre 
                  d'établir que ce n'est pas à l'instigation des 
                  provinces maritimes que le principe électif 
                  a été abandonné. J'en appelle à ce qu'a dit, 
                  sur ce point, l'hon. ministre des finances 
                  dans son fameux discours à Sherbrooke. 
                  C'était une seconde concession. Mais voyez 
                  la constitution qu'on nous propose ! Les 
                  provinces maritimes n'ont, ensemble, qu'une 
                  population de 700,000 âmes. Cela pourrait 
                  faire croire qu'elles se seraient contentées, 
                  dans le conseil législatif, d'une représentation égale à celle du Haut-Canada, dont
                  la 
                  population est double, et à celle du Bas- 
                  Canada, dont la population est aussi presque 
                  
                  
                  
                  
                  
                  double. Mais non, au lieu de 24 membres, 
                  il leur en a fallu 28. Voilà trois concessions importantes et distinctes faites par
                  le 
                  Canada aux populations des provinces maritimes. De plus, notre part de la dette dans
                  
                  la confédération, sera seulement de $62,000,000 au lieu de $82,500,000, comme 
                  c'est notre droit. En outre, nous assumons 
                  un fardeau de $15,000,000, et nous leur 
                  donnons, en entrant, un bonus annuel que, 
                  nous aurons à prélever dans le Haut-Canada 
                  au moyen de la taxe directe. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. MCCREA—La raison de 
                  
                  cela est que les provinces maritimes nous 
                  
                  aideront à payer notre dette.   
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Mon hon. ami 
                  
                  pour la division Western dit qu'elles nous 
                  
                  aideront à payer les dettes de la confédération. Mais ce n'est pas une raison pour
                  que 
                  
                  nous leur fournissions de quoi payer leur 
                  
                  dette locale. Et n'est-il pas absurde d'accorder à chaque province tant par tête d'après
                  
                  
                  sa population pour défrayer les dépenses des 
                  
                  gouvernements locaux ? Tout le monde sait 
                  
                  que la population des provinces maritimes 
                  
                  n'augmentera pas à beaucoup près aussi vite 
                  
                  que celle de cette province. L'accroissement 
                  de notre population fera donc que nous 
                  paierons beaucoup plus que nous ne recevrons. 
                  C'est une quatrième concession. La cinquième 
                  est faite au Nouveau-Brunswick. Nous lui 
                  donnons un bonus de $630,000, et nous construisons le chemin de fer intercolonial
                  en 
                  faisant croire au peuple que ce chemin traversera toutes les villes du pays. La Nouvelle-
                  
                  Ecosse a le droit d'imposer un droit d'exportation sur ses charbons ou autres minéraux
                  
                  envoyés dans le Haut-Canada ou ailleurs. 
                  Terreneuve reçoit un petit cadeau de trois 
                  millions de piastres, ( en capitalisant la 
                  subvention annuelle comme je l'ai dit plus 
                  haut ), pour l'engager à s'unir à nous. Mon 
                  hon. ami pour Port-Hope nous a parlé des 
                  écoles communes du Canada ; à ce sujet on 
                  enlève, parait-il, d'un trait de plume un 
                  montant d'un million et un quart de piastres, 
                  —c'est encore, je suppose, une concession 
                  faite aux provinces maritimes. Et que nous 
                  donne-t-on en retour ? Rien de ce qui nous 
                  reviendrait de droit. Le Haut-Canada aura 
                  17 membres de plus dans la chambre basse, 
                  c'est justice, mais les provinces maritimes 
                  nous en amèneront 47. On nous dit qu'on 
                  évitera ainsi les petites majorités. Et si tout 
                  va bien, nous aurons toujours, sous la nouvelle constitution, un gouvernement fort
                  
                  comme celui dont le ciel nous gratrifie 
                  
                  
                  
                  288
                  
                  
                  en ce moment. D'hon. membres ont 
                  
                  dit que le peuple comprenait parfaitement la question. Pourquoi craindre alors 
                  
                  de lui donner encore quelques mois pour 
                  
                  l'examiner plus amplement ? Un peu de 
                  
                  prudence et de précaution vaudrait mieux, 
                  
                  ce me semble, qu'une précipitation dont le 
                  
                  pays saura bien se plaindre plus tard lorsqu'il s'apercevra de l'injustice énorme
                  qu'on 
                  
                  lui a faite. ( Ecoutez !) Un fait extraordinaire 
                  
                  est la variété infinie des raisons qu'on donne 
                  
                  pour appuyer la confédération. Les uns la 
                  
                  désirent parce qu'elle crééra sur le continent 
                  
                  une nationalité nouvelle et indépendante. 
                  
                  D'autres parce qu'elle cimentera l'union des 
                  
                  colonies. Enfin un troisième parti appuie 
                  
                  les résolutions parce que tout le système est 
                  
                  si injuste que le peuple dégoûté bientôt, ne 
                  
                  tardera pas à entrer dans la république 
                  
                  Américaine. Pour ma part, je me fais l'idée 
                  
                  suivante de ces résolutions : ce sont autant 
                  
                  de harts et elles vont servir à faire des colonies 
                  
                  un immense et informe radeau qui, dans 
                  
                  peu, s'en ira à la dérive vers la confédération 
                  
                  américaine ! ( Ecoutez ! et rires. ) 
                  
                  
                  
 
               
               
               
               
               L'HON. M. DICKSON—Hon. messieurs, 
                  après quinze jours de discussion, lorsque le 
                  sujet est presque épuisé, chacun sait combien 
                  est difficile la tâche de prendre la parole ; 
                  mais si je me suis abstenu de parler avant 
                  aujourd'hui, c'est que je voulais borner mes 
                  observations en principe de l'amendement 
                  présenté par mon hon. et savant ami de la 
                  division de Niagara. Je vais d'abord dire 
                  quelque mots qui me sont suggérés par la 
                  première partie du discours que l'hon. 
                  chevalier et premier ministre a prononcé en 
                  soumettant le projet aux délibérations de 
                  cette chambre. Cet hon. monsieur nous a 
                  dit que l'état de choses qui a existé durant les 
                  vingt-cinq mois qui précédèrent la formation 
                  du cabinet TACHÉ-MACDONALD avait nécessité l'initiative de mesures énergiques pour
                  
                  mettre fin à nos difficultés politiques. Ces 
                  difficultés, messieurs, qu'étaient-elles ? c'est 
                  que l'un après l'autre cinq gouvernements 
                  se sont succédé, que tous étaient incapables 
                  d'administrer les affaires publiques, si bien 
                  qu'ils eurent à résigner ou à rester avec une 
                  si faible majorité dans la chambre basse 
                  qu'ils ne pouvaient administrer les affaires du 
                  pays d'une manière satisfaisante. Le gouvernement TACHÉ-MACDONALD s'est trouvé 
                  dans la même position que les cinq qui le 
                  précédèrent, et il allait en appeler au pays, 
                  lorsqu'une voix se fit entendre au loin. 
                  Quelle était cette voix et d'où venait-elle ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  Cette voix était celle d'un grand homme, 
                  sollicitant la faveur de verser de l'huile sur 
                  les flots agités de la politique. ( Ecoutez ! 
                  écoutez !) La permission demandée fut accordée ; l'huile fut versée, et l'effet en
                  fut miraculeux, car à la tempête succéda le calme ; 
                  mais la surprise ne fut pas peu grande 
                  lorsque peu de temps après on découvrit 
                  que cette huile magique venait directement 
                  des puits de Bothwell . ( Hilarité générale et 
                  prolongée. ) Ainsi que nous l'a appris l'honorable et vaillant chevalier, le gouvernement
                  
                  reçut une communication du vrai chef de 
                  l'opposition ; car, à n'en pas douter, il en 
                  était le véritable chef, et grâce à son apostasie, 
                  l'individu qui avait fait entendre cette voix 
                  se trouve aujourd'hui le véritable chef du 
                  parti ministériel. ( On rit. ) Cet homme 
                  sincère désirait faire des ouvertures dans le 
                  but, comme nous l'a dit l'honorable et 
                  vaillant chevalier, de mettre fin aux 
                  difficultés existantes. Il est, dit-on, entré 
                  dans le gouvernement pour régler cette 
                  seule question d'une nouvelle existence 
                  politique, et de ce, nous sommes justifiables d'inférer qu'après ce réglement il 
                  va se retirer de l'administration ou y occuper 
                  un plus haut poste. Eh ! bien, messieurs, 
                  quelles difficultés a-t-on reglées jusqu'ici ? 
                  aucune ; on a le projet dont la chambre est 
                  saisie et qui doit, paraît-il, mettre fin à 
                  toutes les difficultés et dissensions qui ont 
                  affligé le pays depuis ces vingt-cinq dernières années ; mais d'où vient ce remède
                  ? 
                  de l'individu même qui, plus qu'aucun autre 
                  a été le fauteur de ces difficultés. ( Ecoutez ! 
                  écoutez !) Parlant de lui, l'hon. monsieur 
                  a dit une fois qu'il était une impossibilité 
                  comme homme d'état, mais il paraîtrait 
                  qu'aujourd'hui il n'en est plus une. Après 
                  que l'huile eut été jetée sur les eaux agitées, 
                  le moment de faire de petits et délicats 
                  arrangements entre le gouvernement et ce 
                  monsieur, dont on entendait toujours la voix 
                  lointaine, ne tarda guère à se présenter. Or, 
                  quels furent ces arrangements ? Le croiriez- 
                  vous ? l'hon. monsieur persista à vouloir 
                  se tenir à l'écart ; pour aucune raison au 
                  monde il ne voulait faire partie du gouvernement. ( Ecoutez ! écoutez !) Non, cent
                  
                  fois non ; il ne le voulait pas. ( Hilarité. ) 
                  Ce que voyant, les membres du gouvernement lui dirent: " Mais il faut que nous 
                  vous ayons parmi nous ; nous connaissons 
                  trop bien la force que vous pouver nous 
                  apporter pour que l'on consente à ce que 
                  vous vous teniez à l'écart. " Eh ! bien, il est 
                  
                  
                  
                  289
                  
                  
                  étonnant de voir de quels sacrifices les 
                  
                  hommes publics sont parfois capables ! 
                  
                  ( Rires ). En vérité, messieurs, il est surprenant de voir à quels sacrifices ils
                  se dévouent 
                  
                  pour le bien de leur pays ! ( On rit. ) Nous 
                  
                  en avons ici un exemple très frappant ; un 
                  
                  exemple des sacrifices que le patriotisme 
                  
                  peut suggérer à un homme pour le salut de 
                  
                  son pays. ( Hilarité. ) Car, à la suite du 
                  
                  dernier des petits arrangements dont j'ai 
                  
                  parlé, le monsieur dont la voix se faisait toujours entendre crut devoir pousser son
                  dévouement jusqu'à accepter un portefeuille. 
                  ( On rit. ) Ce sacrifice étant consommé, il crut 
                  nécessaire de l'appuyer sur un principe, 
                  mais là était le point difficile. Quel principe était susceptible de s'étirer jusqu'à
                  
                  ce cas? ( On rit !) Malgré la difficulté, 
                  cependant, quelque génie inventif vint à son 
                  secours et lui suggéra de recourir au principe homéopathique. En effet, il entra au
                  
                  gouvernement à cheval sur ce principe, après 
                  avoir pris une dose infinitissimale de gritisme. 
                  ( Hilarité prolongée. ) Et voilà comment il 
                  se fait que nous avons aujourd'hui un gouvernement composé de trois ultra-réformistes
                  
                  et de neuf conservateurs. L'hon. monsieur 
                  dont je viens de parler se réprésenta à ses 
                  électeurs, qui lui redonnèrent son siége en 
                  cette chambre. Mon hon. ami de Toronto 
                  dit qu'il a été réélu par acclamation, eh ! 
                  bien, lorsque nous considérons que cet homme 
                  a été pendant des années le chef et le génie 
                  d'un grand parti politique composé de la 
                  majorité des représentants du Haut-Canada ; 
                  quand nous considérons sa haute intelligence 
                  et l'influence qu'il exerçait avec la plume 
                  qu'il maniait avec tant d'énergie, il n'est pas 
                  du tout surprenant qu'il ait été réélu par 
                  acclamation. Il fait aujourd'hui partie du 
                  cabinet, et ici je me permettrai une petite 
                  digression sur la position actuelle du gouvernement. Vous devez vous rappeler, hons.
                  
                  messieurs, que nous jouissons ou plutôt que 
                  nous avons joui d'un système de gouvernement qui compte en ce pays un grand nombre
                  
                  d'admirateurs, mais que quelques hons. messieurs admirent encore plus que la généralité
                  
                  du peuple. Ce système est connu sous le 
                  nom de gouvernement responsable, et si je 
                  comprends bien la valeur de ces mots, on 
                  entend par eux que le gouvernement du pays 
                  doit fonctionner selon les vues bien comprises 
                  du peuple exprimées par ses députés à l'assemblée législative. ( Ecoutez ! écoutez
                  !) Cela 
                  étant admis, je puis donc objecter au gouvernement actuel pour la raison qu'il n'a
                  pas 
                  
                  
                  
                  
                  
                  été formé selon ce principe, pour la raison 
                  
                  qu'il n'émane pas de la volonté du peuple. 
                  
                  Je ne puis avoir pour lui le même respect 
                  que j'avais avant que trois de ses membres 
                  conservateurs du Haut-Canada se fussent 
                  retirés pour faire place à trois ultra-réformistes ; car alors tous les ministres,
                  qui étaient 
                  des hommes conséquents et dont les talents 
                  pouvaient être avantageusement comparés à 
                  ceux des membres d'aucune administration 
                  qui a pu être chargée des affaires de cette 
                  province ou de toute autre, appartenaient au 
                  même parti. Tous étant d'accord sur les principales questions politiques, ceux mêmes
                  qui 
                  leur étaient opposés ne pouvaient s'empêcher 
                  de ressentir pour eux un profond respect 
                  motivé par leur sincérité, honnêteté et fidélité comme conservateurs et comme hommes,
                  
                  je le crois, professant des principes de saine 
                  politique. Mais l'introduction des trois autres 
                  membres a changé du tout au tout le caractère 
                  du gouvernement, et la première œuvre à 
                  laquelle cette alliance impie met la main, 
                  bien entendu à l'instigation du chef à la 
                  voix lointaine, est à l'effet de renverser notre 
                  constitution. ( Ecoutez ! écoutez !) Lorsqu'une 
                  grande question vient devant cette chambre, 
                  et que, comme celle-ci, elle est destinée à 
                  rayer de nos lois toute une constitution pour 
                  lui en substituer une autre, je pense, hons. 
                  messieurs, que vous conviendrez avec moi 
                  que c'est là une des plus importantes mesures 
                  qui puisse émaner d'aucun gouvernement de 
                  la terre. ( Ecoutez ! écoutez !) Eh ! bien, je 
                  demande à ceux qui désirent ardemment de 
                  voir fonctionner le gouvernement responsable 
                  dans toute son intégrité si nous avons là une 
                  administration qui puisse être reconnue 
                  comme l'expression de la volonté bien comprise du peuple ? Un gouvernement qui se
                  
                  dit responsable devrait directement émaner 
                  des élections et non pas être l'œuvre des 
                  ministres. ( Ecoutez ! écoutez !) Je vous le 
                  demande, est-ce qu'à la dernière élection 
                  générale le peuple de l'une ou l'autre section 
                  de la province savait quelque chose de ce 
                  projet ? En élisant ses représentants, avait-il 
                  la moindre idée qu'ils auraient à se prononcer 
                  sur cette question ? La chose me paraît 
                  impossible, d'autant que la mesure est 
                  l'œuvre de l'individu dont j'ai parlé et 
                  qu'elle ne date que de la crise dans 
                  laquelle s'est trouvé le gouvernement TACHÉ- 
                  MACDONALD. A la dernière élection générale, le peuple ignorait que la législature
                  
                  allait être saisie d'une semblable mesure. 
                  Hons. messieurs, je ne me fusse pas levé 
                  
                  
                  
                  290
                  
                  
                  pour dire un seul mot, si le sujet soumis à nos 
                  
                  délibérations ne nécessitait qu'une mesure 
                  
                  ordinaire pouvant être passée à cette session 
                  
                  et révoquée à la prochaine s'il y avait lieu ; 
                  
                  mais si elles sont adoptées par toutes les 
                  
                  législatures, ces résolutions vont faire partie 
                  
                  d'un acte impérial, et tout changement que 
                  
                  le peuple de ce pays pourra désirer sera loin 
                  
                  de pouvoir s'obtenir facilement. La puissance qui établira la confédération en passant
                  
                  
                  l'acte à cet effet sera la seule par laquelle 
                  
                  tout changement pourra être effectué. Ainsi 
                  
                  donc, après avoir adopté ces résolutions, 
                  
                  nous n'aurons pas le pouvoir de les modifier 
                  
                  en quoi que ce soit. Voilà, messieurs, une 
                  
                  des raisons pour lesquelles je me suis abstenu 
                  
                  d'adresser la chambre jusqu'au moment où 
                  
                  serait proposée la résolution que vient justement de présenter mon hon. ami de la
                  division de Niagara, et je prends cette occasion 
                  
                  de dire que je ne pense pas que l'observation faite par un hon. membre, qu'il serait
                  
                  
                  inconsidéré de la part de cette chambre de 
                  
                  suggérer la dissolution de l'assemblée, puisse 
                  
                  influer sur le sort de l'amendement qui est 
                  
                  devant nous, car, messieurs, il ne comporte 
                  
                  rien de pareil. Nous demandons un délai, 
                  
                  et nous sommes entièrement de l'avis que 
                  
                  vous remettiez la mesure jusqu'après la prochaine élection générale. Si le gouvernement
                  croit que ce délai nuira à la mesure, 
                  
                  la constitution lui offre un moyen d'obvier 
                  
                  à ce danger,—un moyen que les convenances 
                  
                  m'empêchent de lui indiquer plus clairement. 
                  
                  Ce n'est pas un délai d'une semaine ou d'un 
                  
                  mois que je veux: il en faut un beaucoup 
                  
                  plus long. Je crois que la question doit 
                  
                  être soumise à l'approbation du peuple, 
                  
                  mais non pas selon la méthode du colportage, 
                  
                  c'est-à-dire en allant de porte en porte pour 
                  
                  connaître l'opinion des électeurs. Si nous 
                  
                  ne pouvons obtenir que le peuple se prononce sur ce projet par la voie des élections,
                  
                  
                  je n'ai que faire d'un délai. Je ne veux 
                  
                  pas que l'opinion du peuple soit consultée à 
                  
                  moins qu'on ne le fasse de manière à ce 
                  
                  que l'on puisse se fier à l'expression de cette 
                  
                  opinion. Si un hon. monsieur consulte une 
                  
                  partie de sa division où les électeurs sont 
                  
                  opposés au projet, tandis que dans l'autre 
                  
                  ils sont en faveur, il ne sera pas plus avancé 
                  
                  que s'il n'avait rien fait. Je ne suis pas non 
                  
                  plus d'avis de faire voter les électeurs par 
                  
                  " oui " ou " non " sur la mesure, ainsi que 
                  
                  cela se pratique pour une loi de tempérance. 
                  
                  ( on rit ). Je veux que l'on recoure au moyen 
                  
                  que nous offre la constitution anglaise, où à 
                  
                  
                  
                  
                  
                  rien du tout. Je ne souris pas à l'idée de 
                  
                  voir les hons. membres aller de porte en 
                  
                  porte demander à leurs commettants : " Etes- 
                  
                  vous pour la confédération ?" ( on rit. ) 
                  
                  J'aimerais autant les voir colportant des 
                  
                  horloges en bois. ( Nouvelle hilarité ). Je le 
                  
                  répète, hons. messieurs, tout le projet est 
                  
                  sorti du cerveau fécond d'un seul individu. 
                  
                  Cet individu a suggéré le projet au gouvernement ; ce dernier s'est adjoint cet individu,
                  
                  
                  qui a proposé le moyen arbitaire dont nous 
                  
                  sommes témoins de faire adopter cette mesure avec l'assistance de ses adhérents, et
                  
                  
                  c'est ce qui va avoir lieu. Je le répète 
                  
                  encore, tout cela nous vient de l'individu 
                  
                  qui, pendant assez longtemps n'a fait que 
                  
                  semer le trouble et la discorde, mais qui, s'il 
                  
                  le peut, compte maintenant recueillir de 
                  
                  meilleurs fruits. Il se peut que ce soit 
                  
                  involontaire de sa part, mais je crois qu'il 
                  
                  nous prépare là des difficultés du genre le 
                  
                  plus grave. Il se peut, cependant, que 
                  
                  cette mesure soit trouvée une des plus avantageuses qui ait encore été présentée à
                  la 
                  
                  législature, et si cela était, l'hon. député 
                  
                  d'Oxford Sud en aura tout le mérite, car 
                  
                  c'est à son initiative qu'elle doit d'avoir été 
                  
                  produite ; mais si au contraire, tel que je le 
                  
                  crains, elle doit avoir pour le pays les conséquences les plus désastreuses, et si
                  elle 
                  
                  n'est pas soumise au peuple constitutionnellement, cet hon. monsieur méritera et subira
                  
                  
                  la plus amère des condamnations. ( Ecoutez ! 
                  
                  écoutez !) Cela dit, je passe à la mesure 
                  
                  elle-même, et veux faire connaître l'attitude 
                  
                  que je compte prendre à son égard. Lorsqu'on proposa de changer le caractère de la
                  
                  
                  constitution de cette chambre, je fis tous les 
                  
                  efforts en mon pouvoir pour empêcher que 
                  
                  cette proposition ne devînt loi, mais tous ces 
                  
                  efforts, joints à ceux de quelques hons. 
                  
                  collègues, ne serviront de rien, et nous 
                  
                  dûmes nous contenter de faire inscrire le 
                  
                  protêt suivant :-  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  " Premièrement.—Parce que l'acte d'union   
                     
                     donné au peuple du Canada, en ce que sa position 
                     
                     coloniale pouvait le permettre, une constitution à 
                     
                     peu près semblable à celle sous laquelle la Grande- 
                     
                     Bretagne a atteint sa grandeur au milieu des 
                     nations, et que le conseil législatif, comme partie 
                     intégrante de cette constitution, a été dès lors 
                     établi sur sa base actuelle pour servir de frein 
                     aussi bien contre l'action trop précipitée de la 
                     branche populaire, que contre l'influence indue de 
                     la couronne. 
                     
                     
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                     " Secondement.—Parce que l'introduction du 
                     
                     principe électif dans la constitution de la chambre 
                     
                     haute, donne une prépondérance dangereuse à 
                     l'élément populaire, diminue l'influence salutaire 
                     
                     
                     
                     
                     291
                     
                     de la couronne, et fait disparaître cette balance 
                     
                     qui a maintenu l'équilibre entre les deux pouvoirs 
                     
                     depuis que des institutions représentatives ont 
                     
                     été introduites dans cette colonie. 
                     
                     
                     
                  
                  
                  " Troisièmement—Parce que la mesure actuelle 
                     tend à l'anéantissement de la responsabilité exécutive ; à l'adoption d'une constitution
                     écrite ; à 
                     l'élection de l'officier le plus haut placé de la couronne ; et à la séparation du
                     Canada de la mère- 
                     patrie.— ( Signé,) P. B. DE BLAQUIÈRE, JOHN 
                     HAMILTON, GEORGES J. GOODHUE, WM. WIDMER, 
                     JAMES GORDON, J. FERRIER, R. MATHIESON, G. S. 
                     BOULTON, et WALTER H. DICKSON. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
               Ainsi donc, hons. messieurs, le changement 
                  eut lieu en dépit de tout ce ne nous avons 
                  pu faire. Je repoussai alors le changement 
                  projeté d'après la propre idée que je m'en 
                  étais faite, car, ainsi que plusieurs hons. 
                  messieurs, je n'avais pas de commettants à 
                  consulter, et c'est encore de la même 
                  manière que je m'oppose au projet en discussion. Je n'objecte pas aussi fortement
                  
                  aux détails de la mesure que certains hons. 
                  messieurs, parce que je tiens compte du 
                  nombre de personnes qui ont pris part à la 
                  conférence et de la capacité de ces personnes ; 
                  je ne voudrais pas, par conséquent, avoir la 
                  témérité de prendre la parole pour indiquer 
                  une erreur ici, une erreur là, quand même 
                  je trouverais réellement des erreurs dans ces 
                  détails, à moins donc d'être convaincu que 
                  non seulement je possède un jugement plus 
                  sain qu'elles, mais encore que je suis plus 
                  qu'elles au fait de toutes les circonstances 
                  qui ont donné lieu à la question, soit directement ou indirectement. Mais, hons. messieurs,
                  laissez-moi vous demander qui va le 
                  plus se ressentir de ces changements ? Le 
                  peuple canadien, et cela étant, il me semblerait juste que nous ayions au moins le
                  
                  droit de nous prononcer sur ce qui nous concerne aussi directement. ( Ecoutez ! écoutez
                  !) 
                  Cela me semble une manière logique d'envisager la question ; je revendique aussi pour
                  moi 
                  le droit d'exercer mon propre jugement dans 
                  la mesure des facultés que la Providence à 
                  bien voulu me donner, car je crois de mon 
                  devoir de me prononcer et d'inscrire mon 
                  vote selon que ma conscience me guide, et 
                  cela afin que tant que je vivrai je puisse 
                  être satisfait de la conduite que j'aurai tenue 
                  comme membre de ce conseil. ( Ecoutez ! 
                  écoutez !) Jamais je ne croirai que certains 
                  hons. membres qui se sont prononcés contre 
                  la continuation du système électif appliqué 
                  à cette chambre ont pu le faire avec la même 
                  satisfaction qu'ils éprouvèrent jadis en plaidant en faveur de l'introduction de ce
                  système. Je me souviens parfaitement d'avoir 
                  
                  
                  
                  
                  
                  dit, lorsque je reconnus que l'on était 
                  déterminé à appliquer le principe électif à 
                  cette chambre : messieurs, si ce principe est 
                  bon dans un cas, il doit l'être dans l'autre ; 
                  rendons aussi la charge de l'orateur élective. Non, non, cela ne ferait pas, me fut-il
                  
                  répondu. C'est du républicanisme que vous 
                  voulez-là. On ne voulut pas consentir à ce 
                  que cette charge devint élective ; le gouvernement eut perdu là une occasion d'exercer
                  
                  son patronage. Depuis ce temps les fonctions 
                  d'orateur sont devenues électives, et la 
                  chambre doit en conséquence admettre que 
                  j'avais alors raison. Je m'opposais à ce que 
                  cette chambre devint élective, mais une 
                  majorité réussit à lui appliquer ce principe, 
                  et voilà maintenant que l'on veut reconférer 
                  à la couronne le droit de nommer à ce 
                  conseil ; de sorte que lors du premier changement j'avais aussi raison de m'y opposer.
                  
                  ( Ecoutez ! écoutez! et rires. ) Lorsqu'il fut 
                  proposé d'accorder trois millions au chemin 
                  de fer Grand Tronc, je vis qu'au fond de tout 
                  cela existait un but politique, et je votai 
                  contre ce crédit. Je m'opposai de même aux 
                  octrois faits aux voies ferrées d'Arthabaska 
                  et de Port Hope à Peterboro, parce que je 
                  considérai que c'étaient là autant de moyens 
                  commodes d'acquérir des adhérants en 
                  chambre sous le prétexte d'obtenir des 
                  fonds pour le Grand Tronc. Ces embranchements furent dénommés voies d'alimentation
                  (feeders ), mais moi je les ai appelés 
                  des gouffres ( suckers), trouvant que cette 
                  qualification leur allait beaucoup mieux. 
                  ( On rit. ) Et je me sens fier d'avoir tenu 
                  cette conduite à l'égard de ces questions. 
                  Je suis prêt à admettre qu'au point de vue 
                  matériel le Grand Tronc est très avantageux 
                  à la province, mais je crois qu'on paie un 
                  peu trop cher le siflet qu'il fait entendre. 
                  ( Hilarité. ) Sachant combien nous a coûté 
                  cette voie ferrée qui traverse la plus belle 
                  partie du pays, je suis disposé à me montrer 
                  très prudent à l'égard de la construction du 
                  chemin de fer intercolonial. ( Ecoutez! 
                  écoutez !) J'ai été souvent à même de 
                  connaître la valeur des renseignements de 
                  mon hon. ami ( M. Ross), et j'aime à me 
                  tenir assez près de lui, car si je sors de la 
                  voie, il a cette heureuse faculté de pouvoir 
                  m'y remettre. Je lui demanderai donc si 
                  dans ses observations de cette après-midi, il 
                  a ou non voulu dire que depuis l'Union le 
                  peuple n'avait pas demandé que la chambre 
                  haute devint élective ? 
                  
                  
               
               
               L'HON. M. ROSS—J'ai dit que le peuple 
                  
                  
                  
                  292
                  
                  du Haut-Canada, généralement, n'avait pas 
                  
                  demandé ce changement : je sais très bien, 
                  
                  par exemple, que dans le Bas-Canada ce sujet 
                  
                  a donné lieu à une agitation. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. DICKSON—Bien ; on voit 
                  
                  dans les journaux du conseil législatif de 
                  
                  1855, que le 21 mai, lorsque la seconde 
                  
                  lecture du bill pour rendre cette chambre 
                  
                  élective fut refusée, les lignes suivantes 
                  
                  furent inscrites par huit hons. membres 
                  
                  comme étant les motifs de leur dissentiment 
                  
                  sur ce vote :-  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  " Parce que l'opinion publique s'est depuis 
                     
                     longtemps et à différentes reprises exprimée sur 
                     
                     la nécessité de rendre cette branche de la législature élective ; parce que le vote
                     presque unanime 
                     
                     de l'assemblée législative, sans égard aux partis, 
                     
                     a, d'une manière non équivoque, ratifié cette 
                     
                     expression du sentiment populaire ; parce que 
                     
                     l'opposition de cette chambre au vœu universel 
                     
                     des habitants du Canada, sans être appuyée par 
                     
                     un parti, soit dans l'autre branche de la législature ou en dehors d'icelle, est sans
                     précédent et 
                     
                     de nature à causer les plus sérieuses appréhensions. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Le premier, hons. messieurs, qui signa ce 
                  
                  protêt, fut l'hon. JOHN ROSS; le deuxième, 
                  
                  mon hon. et vaillant ami Sir E. P. TACHÉ ; 
                  
                  les hon. MM. PANET, BELLEAU, ARMSTRONG, PERRY, LÉGARÉ et CARTIER 
                  
                  venaient après eux. Après avoir pu observer comme je l'ai fait les heureux résultats
                  
                  
                  de l'application du principe électif à cette 
                  
                  chambre, je ne puis faire autrement que 
                  
                  d'exonérer tous ces messieurs d'avoir voulu 
                  
                  introduire ce système ; mais ce que je ne 
                  
                  saurais comprendre, c'est qu'ils aient pu 
                  
                  craindre que le refus d'appliquer ce principe 
                  
                  serait la cause de résultats fâcheux, et qu'à 
                  
                  dix ans de distance, pendant lesquels ce 
                  
                  principe a été mis en pratique avec un heureux succès, ils veuillent que l'on revienne
                  au 
                  
                  système trouvé alors si défectueux et dont le 
                  
                  peuple ne voulait plus. ( Ecoutez ! écoutez !) 
                  
                  
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS —J'étais alors membre 
                  
                  du gouvernement et je cherchais à faire 
                  
                  prévaloir sa politique. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. DICKSON —De ce, je puis 
                  
                  donc inférer que l'hon. monsieur n'exprimait 
                  
                  pas alors ses propres sentiments, mais seulement ceux du gouvernement dont il faisait
                  
                  
                  partie. Je n'ai jamais été membre du gouvernement, et il est probable que pour cette
                  
                  
                  raison on me pardonnera de n'avoir pas 
                  
                  compris que l'hon. monsieur avait deux 
                  
                  manières de voir dont il usait à tour de 
                  
                  rôle, selon que les circonstances l'exigeaient. 
                  
                  ( Hilarité. ) Revenons maintenant au sujet de 
                  
                  
                  
                  
                  l'amendement. Je désire et demande, pour 
                  
                  d'autres motifs que ceux que j'ai déjà fait 
                  
                  connaître, que la discussion du projet soit 
                  
                  remise à plus tard. Dans ses observations 
                  
                  d'hier, mon hon. ami le vaillant chevalier, a 
                  
                  crié de l'incendie du parlement, et comme 
                  
                  lui je déplore sincèrement cet acte de vandalisme ; mais il a ajouté que si les conservateurs
                  du conseil législatif eussent eu un peu 
                  
                  de prudence et le courage de leurs opinions, 
                  
                  ils auraient remis à une autre année le projet 
                  
                  de loi des indemnités de la rébellion, ce qui, 
                  
                  en toute probabilité, eut empêché la perpétration des actes scandaleux qu'il a cités.
                  
                  
                  Eh ! bien, hons. messieurs, je vous demande 
                  
                  d'adopter cette opinion de l'hon. chevalier 
                  
                  et d'agir en conséquence à l'égard du projet 
                  
                  sur lequel nous délibérons. ( Ecoutez ! écoutez ! et rires. ) Vous ne savez pas quelles
                  
                  
                  désastreuses conséquences pourront découler 
                  
                  de ce vaste projet si on l'adopte sans consulter 
                  
                  le peuple selon la constitution. J'entretiens 
                  
                  l'espoir que vous laisserez peser de tout son 
                  
                  poids —sur la question d'ajourner l'adoption 
                  
                  de ce projet—le puissant argument de l'hon. 
                  
                  chevalier. ( Ecoutez ! écoutez !) Il s'agit ici, 
                  
                  messieurs, non pas de voter quelques milliers 
                  
                  de louis, mais d'opérer une révolution. Une 
                  
                  révolution peut aussi bien se faire par l'exercice du pouvoir politique que par la
                  force 
                  
                  physique : dès que le gouvernement d'un 
                  
                  pays est bouleversé, peu importe à laquelle 
                  
                  de ces causes est dû ce bouleversement ; 
                  
                  ce n'en est pas moins une révolution, et 
                  
                  l'effet est le même pour le pays. La proposition qui nous est faite a pour but de
                  remplacer notre constitution par une autre qui 
                  
                  peut être meilleure ou beaucoup moins bonne. 
                  
                  Voyant qu'il ne s'en faut que cinq minutes 
                  
                  pour six heures, je vais me hâter de conclure. 
                  
                  ( Cris de " parlez ! parlez !" ) Eh ! bien, 
                  
                  puisque les hon. messieurs paraissent le 
                  
                  désirer, je ferai quelques nouvelles observations à la reprise de la séance après
                  dîner. 
                  
                  —Un message est reçu de l'assemblée, et le 
                  
                  conseil ajourne jusqu'à huit heures, p.m. 
                  
                  A la reprise de la séance-  
                  
 
               
               
               
               L'HON. M. DICKSON continue en ces 
                  
                  termes :—La grande raison qui me porte à 
                  
                  demander un délai se comprend sans peine, car 
                  
                  par l'adoption des résolutions présentées par 
                  
                  le cabinet, on va changer la constitution du 
                  
                  pays sans consulter le peuple qui est le principal intéressé. Je n'ai pas encore entendu
                  
                  une seule observation des ministres ni 
                  d'aucun hon. membre qui démontrât la nécessité de hâter ainsi la passation de cette
                  
                  
                  
                  
                  293
                  
                  
                  mesure, qui devrait être retardée jusqu'aux 
                  
                  prochaines élections générales, et en disant 
                  
                  cela, je prie les hons. messieurs de remarquer 
                  
                  que je ne suggère nullement la dissolution 
                  
                  de l'autre branche de la législature ; mais s'il 
                  
                  y a réellement nécessité de se hâter, la constitution offre au gouvernement le moyen
                  
                  de recourir sans retard à l'appel au peuple. 
                  Mon hon. ami d'en face dit que sans en 
                  appeler au pays ou a bien enlevé à la couronne 
                  la prérogative de nommer à cette chambre, 
                  et que l'on peut encore faire de même pour 
                  reconférer à la couronne cette prérogative 
                  sans qu'il en résulte aucun mal. Messieurs, 
                  nous avons fait là une expérience qui a bien 
                  réussi, pourquoi alors ne pas nous y tenir ? 
                  En cette circonstance, nous avons perfectionné la constitution ; or, que propose-t-on
                  
                  de faire aujourd'hui ? D'enlever au peuple 
                  un pouvoir sans aucunement le consulter. 
                  Eh ! bien, je dis avec force que ce n'est pas 
                  ainsi qu'il faut en agir. Ce pouvoir qui 
                  lui à été conféré et qui ajoute à ses 
                  franchises politiques, il ne l'a jamais demandé, et vouloir le lui ôter aujourd'hui,
                  
                  sans presque le prévenir, serait insulter à 
                  sa dignité. N'est-ce pas là le principe fondamental du régime sous lequel nous vivons,
                  
                  que le peuple, par l'intermédiaire de ses 
                  députés, doit être consulté sur la composition de son gouvernement ? Quant à l'entente
                  
                  entre électeurs et représentants à l'égard de 
                  ce projet, il n'en existe aucune, et si j'ai 
                  demandé ce délai c'est que je pense qu'il 
                  n'y a nullement lieu de se hâter. La constitution donne les moyens de connaître les
                  
                  vues du peuple, et le devoir du gouvernement est de s'en servir. D'hons. messieurs
                  
                  disent : " Oh ! ne travaillez donc pas à 
                  faire faire des élections générales avant le 
                  temps voulu ; nous en avons eu assez depuis 
                  cinq ans. " Or, hons. messieurs, que comptet-on faire une fois ces résolutions passées
                  ? 
                  Est-ce que leur adoption ne donnera pas 
                  lieu à une nouvelle élection avant 18 mois ? 
                  Il est une autre observation que je désire 
                  faire à l'égard des hons. membres qui 
                  veulent connaître l'opinion de leurs commettants en allant de porte en porte leur
                  
                  demander s'ils souscrivent à la première 
                  résolution, à la seconde, et ainsi de suite 
                  pour toutes les autres. Je ne crois pas que 
                  ce serait là un bon moyen de connaître les 
                  vues de vos électeurs. La bonne manière 
                  d'obtenir ces renseignements, pour un député, 
                  serait de réunir ses commettants dans la 
                  grande salle de quelque hôtel ou autre 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  édifice, et de leur soumettre tout le projet, 
                  
                  tout en faisant des commentaires conformes 
                  
                  à ses opinions sur les divers articles qui le 
                  
                  composent. En ce faisant, il parviendrait 
                  à leur inculquer ses propres vues. Je n'ai 
                  encore entendu qu'un seul membre qui ait 
                  mentionné le fait d'avoir reçu les résolutions 
                  et de les avoir remises immédiatement dans 
                  leur enveloppe — parce qu'elles portaient la 
                  suscription de " personnelle "—et cela sans 
                  chercher à connaître l'opinion de ses électeurs à leur sujet. J'entretiens l'espoir
                  que 
                  l'on trouvera quelque moyen de mettre à 
                  effet l'amendement proposé par mon hon. 
                  ami de la division de Niagara. Cet amendement ne fait qu'énoncer : 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Que sur une question d'une aussi grande 
                     
                     importance que celle de la confédération projetée 
                     
                     du Canada et de certaines autres colonies anglaises, 
                     
                     cette chambre se refuse à assumer la responsabilité 
                     
                     de consentir à une mesure qui renferme tant de 
                     
                     graves intérêts, sans que l'opinion publique ait 
                     
                     l'occasion de se manifester d'une manière plus 
                     
                     solennelle. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Ainsi, hons. messieurs, à ceux qui veulent 
                  
                  prendre la responsabilité de priver le peuple 
                  
                  d'une occasion de se prononcer sur une question aussi grave que celle d'un changement
                  
                  de constitution, de voter contre l'amendement, à ceux qui veulent le contraire de
                  voter 
                  pour son adoption ! Cet amendement exprime 
                  bien mes vues, et comme je ne me guide que 
                  d'après mon propre jugement, n'ayant pas 
                  de mandataires à consulter, je voterai pour 
                  l'affirmative. S'il est rejeté, le cabinet n'en 
                  persistera que plus à faire adopter son 
                  grand projet de confédération sans consulter 
                  le pays, mais il va sans dire que sous le 
                  système actuel de gouvernement responsable il sera aussi tenu d'en prendre la responsabilité.
                  
                  
                  
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Hons. messieurs.—J'aimerais à pouvoir continuer les 
                  
                  débats sur le ton et avec le même esprit qui 
                  
                  ont marqué le discours de mon hon. ami qui 
                  
                  vient de s'asseoir. J'envie beaucoup mon 
                  
                  hon. ami pour la possession de cette heureuse 
                  
                  faculté qui lui permet d'amuser et d'instruire 
                  
                  la chambre en même temps. Je regrette un 
                  
                  peu d'avoir à attirer l'attention des hons. 
                  
                  membres sur ce qui est peut-être plus 
                  
                  important au point de vue des affaires et 
                  
                  moins intéressant que les remarques qui eut 
                  
                  été faites par mon hon. ami. Je dois dire 
                  
                  que je regrette beaucoup que mon hon. ami 
                  
                  ait cru qu'il était de son devoir d'appuyer 
                  
                  l'amendement particulier qui est maintenant 
                  
                  
                  
                  294
                  
                  
                  en discussion, parce qu'il est évident pour 
                  
                  moi, comme il doit l'être pour tous les hons. 
                  
                  membres présents, que mon hon ami, tout 
                  
                  en appuyant l'amendement, partage des 
                  
                  opinions tout à fait différentes de celles qui 
                  
                  ont été énoncées par l'hon. représentant de 
                  
                  Niagara, qui l'a proposé. Mon hon. ami dit : 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Si l'on doit avoir du délai, que ce soit un 
                     
                     délai sérieux ; que ce soit un délai qui entraînera 
                     
                     la dissolution du parlement ; un délai qui puisse 
                     
                     permettre au peuple de se prononcer, mais seulement de la manière reconnue par la
                     constitution 
                     
                     anglaise. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Je puis respecter ce sentiment. Il y a 
                  
                  quelque chose de réel dans un argument 
                  
                  basé sur ce principe. Je lui rends la justice 
                  
                  de croire qu'il exprime cette opinion avec le 
                  
                  sincère désir que le délai ne nuise pas au 
                  
                  projet, mais qu'il soit adopté par le peuple 
                  
                  lorsqu'il lui sera soumis. Cependant, hons. 
                  
                  messieurs, comparez cette opinion avec l'idée 
                  
                  suggérée par l'hon. membre qui a proposé 
                  
                  cette résolution. Que veut-il ? Non pas qu'il 
                  
                  y ait un délai tel qu'il puisse permettre au 
                  
                  peuple de s'exprimer de la manière que le font 
                  
                  la Grande-Bretagne et toutes ses colonies, 
                  
                  mais de cette manière qui, comme l'a si bien 
                  
                  dit mon hon. ami ( M. DICKSON ), ressemble 
                  
                  plutôt au colportage d'horloges qu'à rien de 
                  
                  ce qui se rattache aux procédés constitutionnels anglais ? Que dit l'hon. membre ?
                  
                  
                  Il dit : donnez-nous vingt jours ou un mois. 
                  
                  
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE— J'ai dit que c'était 
                  
                  là le délai le moins long que je voulais 
                  
                  demander.   
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Que pourriez- 
                  
                  vous faire durant ce délai de vingt jours ou 
                  
                  d'un mois ? Est-il possible que le peuple se 
                  
                  prononce d'une manière constitutionnelle en 
                  
                  vingt jours ou un mois ? L'hon. membre 
                  
                  sait très bien que cela n'est pas possible, et 
                  
                  que sous aucun système de gouvernement, 
                  
                  la législature ne pourrait sanctionner un plan 
                  
                  comme celui qu'il a suggéré. Le peuple de 
                  
                  l'Etat de New-York, ou d'aucun autre Etat 
                  
                  de l'Union, sanctionnerait-il un pareil acte ? 
                  
                  Au contraire, il adopterait de suite le moyen 
                  
                  de faire soumettre le projet à un vote direct 
                  
                  du peuple. Si vous adoptez le moyen constitutionnel anglais, il faudra alors une dissolution
                  du parlement ; mais si vous adoptez 
                  le système américain, le peuple sera appelé 
                  à voter par " oui ou non " sur le projet tel 
                  qu'il est. Qu'on s'exprime d'une manière 
                  ou d'une autre, franchement et constitutionnellement, selon notre système de gouvernement—mon
                  hon. ami ne demande pas cela. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  Il veut faire ajourner la question, d'une 
                  manière ou d'une autre, pendant vingt jours 
                  ou un mois, et je suis fâché de voir que mon 
                  hon. ami qui a parlé en dernier lieu ait cru 
                  devoir adopter un plan si contraire à ce que 
                  je sais être ses opinions sur ce qui est juste 
                  et convenable, d'après les idées constitutionnelles et britanniques qu'il professe.
                  Je 
                  suis fâché qu'il ait été induit à adopter un 
                  plan qu'il ne préconise évidemment pas pour 
                  les mêmes motifs que ceux qui font agir 
                  mon hon. ami de Niagara. 
                  
                  
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. DICKSON—J'approuve la 
                  
                  résolution telle qu'elle est, et je maintiens 
                  
                  les idées que j'ai énoncées. J'ai toujours 
                  
                  prétendu qu'une élection générale était le 
                  
                  moyen constitutionnel convenable pour connaître l'opinion du peuple, et j'ai dit expressément
                  que je ne tenais pas à avoir un délai 
                  
                  de quelques jours. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CURRIE—Tout ce que j'ai 
                  
                  suggéré, c'est que le gouvernement pourrait 
                  
                  au moins donner vingt jours ou un mois, 
                  
                  s'il ne voulait pas accorder davantage. 
                  
                  Comme de raison, je désire obtenir ce que 
                  
                  mon hon. ami, ( M. DICKSON ), a demandé. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL —J'espère qu'au 
                  
                  contraire l'hon. membre retirera son appui 
                  
                  à l'amendement lorsqu'il verra qu'il n'est 
                  
                  pas d'accord avec son auteur, qui suppose, 
                  
                  évidemment, que l'on recourra à d'autres 
                  
                  moyens que ceux connus de la constitution 
                  
                  anglaise pour connaître les vues du peuple, 
                  
                  comme ceux, par exemple, que les membres 
                  
                  pourraient prendre en allant de porte en 
                  
                  porte, en tenant des assemblées, et en se 
                  
                  rendant agréables à leurs commettants par 
                  
                  leur hospitalité, etc. Je suis très-certain 
                  
                  que ce n'est pas là l'idée de l'hon. membre en 
                  face de moi. Je suis également persuadé 
                  que ce n'est pas non plus celle d'aucun hon. 
                  membre qui désire la confédération des provinces. Il ne saurait vouloir que ces résolutions—vu
                  leur importance majeure et la 
                  nécessité où l'on se trouve d'en venir à une 
                  prompte décision à leur égard—soient mises 
                  de côté en attendant que mon hon. ami de 
                  Niagara ait été frapper à chaque porte de 
                  sa grande division pour connaître les vues 
                  de ses électeurs sur chacune d'elles. Mon 
                  hon. ami est chargé de représenter ses mandataires dans cette chambre, et il est à
                  
                  supposer qu'il est bien capable, au point de 
                  vue de l'intelligence et du jugement, 
                  de remplir ce devoir lorsqu'il est appelé à 
                  dire si, dans son ensemble, le projet sera ou 
                  non avantageux au pays ; ( écoutez ! écoutez !) 
                  
                  
                  
                  
                  
                  295
                  
                  
                  mais il semble ignorer tout cela. Il nous 
                  paraît ne pas vouloir se prononcer sur cette 
                  mesure. Il ne veut pas dire s'il l'a trouvée 
                  assez défectueuse pour voter contre. S'il 
                  ne peut prendre une décision, il devrait 
                  alors résigner et donner sa place à quelqu'un 
                  de plus décidé. Mais considérez donc la 
                  position d'un homme qui vous dit : 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Je n'ai pas d'opinion à moi ; si les électeurs 
                     
                     que je représente sont pour le projet, je n'aurai rien à dire. Bien que je le désapprouve,
                     je 
                     
                     voterai en sa faveur pour plaire à mes électeurs. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
               
                  Qu'il donne à ses mandataires le bénéfice de 
                  
                  son jugement, et après avoir réfléchi qu'il y 
                  
                  a cinq provinces et un nombre infini d'électeurs à consulter, il verra, messieurs,
                  que ce 
                  
                  qu'il désire ne saurait être mieux constaté 
                  
                  que par cette chambre. Il dit que ses commettants ne l'ont pas chargé de changer la
                  
                  
                  constitution ; cela est vrai, mais ils lui ont 
                  
                  imposé le devoir d'exercer son meilleur 
                  
                  jugement sur tout sujet soumis à cette 
                  
                  chambre. Nous ne sommes pas ici expressément pour modifier la constitution ; nous
                  
                  
                  n'avons pas le pouvoir de la changer quand 
                  
                  nous voulons, mais nous avons un devoir 
                  
                  sacré à remplir : celui d'exprimer nos vues 
                  
                  à l'égard de tels changements qui peuvent 
                  
                  être jugés avantageux pour le pays. ( Ecoutez ! écoutez !) Est-ce que ces résolutions
                  
                  
                  changent la constitution ? Pas du tout. Elles 
                  
                  ne font qu'affirmer que ces changements 
                  
                  sont à désirer. Les autorités impériales 
                  
                  seules peuvent changer la constitution. En 
                  
                  cela nous nous tenons dans les limites de 
                  
                  notre mandat. Nous n'avons pas le pouvoir 
                  d'amender la constitution, mais nous avons 
                  celui d'exprimer nos vues dans une adresse 
                  à Sa Majesté—qu'il est question de faire 
                  adopter par toutes les législatures—déclarant 
                  que tels et tels changements seraient, selon 
                  nous, avantageux au pays. En cela nous ne 
                  faisons que remplir le devoir qui nous est 
                  imposé. Nous donnons à nos commettants 
                  le bénifice de notre expérience et de nos 
                  convictions honnêtes sur les sujets soumis à 
                  nos délibérations. Cette chambre n'a-t-elle 
                  pas déjà adopté des résolutions qui avaient 
                  pour but de modifier la constitution ? A-t-on 
                  dit alors qu'il ne lui appartenait pas de 
                  discuter ces résolutions ? Il paraît que non. 
                  Le premier changement demandé était à 
                  l'effet de permettre l'usage de la langue 
                  française dans la chambre du parlement. 
                  Les hon. membres auraient pu dire alors 
                  qu'ils n'avaient pas le pouvoir de demander 
                  
                  
                  
                  
                  
                  cette permission, mais l'idée ne leur en est 
                  
                  jamais venue. 
                  
                  
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Je n'avais pas 
                  
                  alors l'honneur d'avoir un siége en cette 
                  
                  chambre, mais je suis heureux d'entendre 
                  
                  dire que cette résolution fut unanimement 
                  
                  adoptée. Le changement réclamé ensuite 
                  
                  avait trait à la composition de ce conseil, 
                  
                  dont tous les membres étaient autrefois 
                  
                  nommés à vie, et qui, en 1856, devint électif. 
                  
                  N'était-ce pas là changer la constitution ? 
                  
                  Cependant, personne ne songea à représenter 
                  
                  alors que cette chambre n'avait pas le droit 
                  
                  de passer une semblable résolution. Nous 
                  
                  sommes pourtant aujourd'hui dans la même 
                  
                  position, et il me semble futile et illogique 
                  
                  de prétendre que nous n'avons pas le pouvoir 
                  
                  de faire ce que l'on se propose en passant ces 
                  
                  résolutions, c'est-à-dire de prier la Reine de 
                  
                  vouloir bien changer la constitution de cette 
                  
                  province, de manière à ce que nous soyons 
                  
                  unis sous un seul gouvernement avec les 
                  
                  autres provinces de l'Amérique Britannique 
                  
                  du Nord. Je suis parfaitement convaincu 
                  
                  qu'après avoir refléchi, les hons. messieurs 
                  
                  reconnaîtront qu'ils n'outrepasseront aucunement les pouvoirs à eux confiés par leurs
                  
                  
                  mandataires. Mon hon. ami de Niagara 
                  
                  suggère cet amendement dans un but peu 
                  
                  élevé comparativement aux motifs qui portent 
                  
                  l'hon. membre vis-à-vis de moi à lui donner 
                  
                  son appui. Il se dit en faveur de l'union 
                  
                  mais opposé à quelques uns des détails du 
                  
                  projet. Cela me fait peine de voir un hon. 
                  
                  membre, qui avoue être favorable à l'union, 
                  
                  s'appuyer sur une objection à certains détails 
                  
                  pour s'y opposer. Est-ce que mon hon. ami 
                  
                  propose sérieusement de soumettre au pays 
                  
                  tous ces détails divers ? Pense-t-il, réellement, que le peuple pourra bien juger
                  de 
                  
                  tous ces détails ? Tout ce qu'il pourrait 
                  
                  obtenir serait l'expression de l'opinion générale en faveur de la confédération. Nous
                  
                  
                  sommes tous convaincus qu'elle serait dans 
                  
                  ce sens. Je crois que nous ne comptons 
                  
                  que deux ou trois membres de cette chambre 
                  
                  qui soient réellement contre la confédération. 
                  
                  Consultez dix mille habitants du pays, et 
                  
                  vous en trouverez neuf sur dix pour l'union. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Eh ! bien, je 
                  
                  me soumets à l'opinion des hon. membres du 
                  
                  Bas-Canada, car je ne puis prétendre connaître aussi bien qu'eux les sentiments de
                  
                  
                  
                  
                  296
                  
                  
                  leurs mandataires. Quant au Haut-Canada, 
                  
                  par exemple, je suis en mesure de pouvoir 
                  
                  en parler aussi bien que nul autre représentant, et je n'hésite pas à dire que là
                  le peuple 
                  
                  est presque unanime pour la confédération. 
                  
                  Je suis convaincu que si la question était 
                  
                  soumise par la voie d'une élection générale, 
                  
                  tout le Haut-Canada voterait en masse pour 
                  la mesure. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'Hon. M. CAMPBELL—Mon hon. ami 
                  
                  de Niagara dit par ironie : écoutez ! écoutez ! 
                  
                  Mon hon. ami trouve à redire sur toute assertion qui peut se faire ;  il cherche à.
                  répandre 
                  
                  le doute sur les calculs présentés en faveur 
                  
                  de la mesure ; il a recours à tous les moyens 
                  
                  d'opposition que son imagination peut inventer ou que son habileté lui permet de trouver,
                  
                  
                  si bien que j'ai de la peine à comprendre 
                  
                  comment cet hon. monsieur peut être en 
                  
                  faveur du projet, lui qui saisit toute occasion 
                  
                  de l'attaquer, et qui, quand on l'accuse d'hos 
                  
                  tilité, se retranche derrière de prétendues 
                  
                  objections à ses détails. (Ecoutez écoutez !) 
                  
                  Cela me fait croire que ses sentiments ne 
                  
                  sont pas sincères, et qu'il veut  détruire 
                  
                  les véritables fondements sur lesquels 
                  
                  repose la confération, non pas peut-être 
                  
                  parce qu'il est opposé au principe fédératif même, ni parce que celle projetée n'est
                  
                  
                  pas selon ses goûts, mais seulement pour le 
                  
                  plaisir d'apporter des entraves au succès de 
                  
                  ceux qui se sont honnêtement dévoués à 
                  
                  l'œuvre qui est maintenant soumise à la 
                  
                  chambre. S'il était donné au peuple de pouvoir exprimer son opinion ainsi que nous
                  
                  
                  pouvons exprimer la nôtre ce soir, j'affirme, 
                  hons. messieurs, qu'il adhérerait spontanément à la première résolution. (Écoutez
                  ! 
                  écoutez !) aintenant, messieurs, puisqu'il 
                  est entendu que nous sommes tous en faveur 
                  de l'union, comment allons-nous en régler les 
                  détails ? Est-il possible que les quatre millions 
                  d'âmes des provinces qui doivent entrer dans 
                  l'union puissent s'entendre pour le règlement 
                  de ces détails ? Certainement non ; et ceux 
                  qui prétendent que le projet devrait émaner 
                  du peuple en connaissent très bien l'impossibilité. Eh ! bien, alors, les parlements
                  de ces 
                  provinces pourraient-ils, réunis ensemble, convenir d'un projet de confédération ?
                    Pour 
                  faire adopter le projet par cette chambre, 
                  voyez les difficultés auxquelles nous sommes 
                  en butte sur chaque point de ses détails, et 
                  jugez ensuite si, pouvant se réunir ensemble, 
                  les parlements de toutes les provinces 
                  
                  
                  
                  
                  
                  pourraient parvenir à régler les détails d'une 
                  
                  confédération. Le seul moyen pratique-   et c'est celui-là que nous avons choisi—se
                  
                  
                  trouve dans la réunion de délégués chargés 
                  
                  de rédiger des résolutions sur le sujet, et 
                  
                  d'après lesquelles l'acte constituant 'union 
                  
                  doit être édicté. D'hons. messieurs ont 
                  
                  demandé qui avait autorisé ces délégués à se 
                  réunir pour préparer ces résolutions, et pourtant ils savaient très bien que notre
                  gouvernement actuel a été formé dans le véritable 
                  but d'élaborer et de soumettre un projet de 
                  ce genre. Sur ce point encore mon hon. 
                  ami de Niagara s'esquive en alléguant que 
                  le cabinet ne se proposait de préparer un 
                  projet de fédération que pour le Canada seulement, et que l'idée de faire entrer toutes
                  
                  les provinces dans cette confédération n'était 
                  que secondaire ; mais l'hon. membre sait 
                  mieux que personne que cette allégation 
                  n'est qu un prétexte. Nous savions tous 
                  que le cabinet ferait tous les efforts pour 
                  surmonter les difficultés qui entravaient la 
                  marche du gouvernement Canadien, soit à 
                  l'aide de l'un ou de l'autre projet. L'hon. monsieur a cité la partie du discours
                  du trône à 
                  la lôture de la dernière session qui a trait à 
                  l'établissement d'une union fédérale des deux 
                  sections de cette province, et non à celle de 
                  toutes les provinces. Pourquoi donc n'a-t-il 
                  pas consulté et cité aussi le iscours du trône 
                  à l'ouverture de cette session ; il eut trouvé 
                  dans les lignes qui vont suivre de quoi 
                  rendre inutile son allégation :-  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  " A la clôture de la dernière session du parlement, je vous informai que j'avais intention,
                     de 
                     
                     concert avec mes ministres, de préparer et de 
                     vous soumettre une mesure pour la solution du 
                     problème constitutionnel dont la discussion agite  la province depuis quelques années.
                     Une considération attentive de la position générale de 
                     l'Amérique Britannique du Nord a porté à conclure que les circonstances des temps
                     offraient 
                     l'occasion, non simplement de régler une question 
                     de politique provinciale, mais de plus de créer 
                     simultanément une nouvelle nationalité." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Ainsi, mon hon. ami prétend que nous 
                  
                  avons eu tort de saisir l'occasion qui s'est 
                  
                  offerte d'essayer d'unir en une nation ces 
                  
                  provinces sous le gouvernement d'une vice- 
                  
                  royauté émanant de la couronne britannique, 
                  
                  et pourtant, tout hon. membre devrait au 
                  
                  contraire avouer que non seulement nous 
                  
                  avions le droit de nous réunir ainsi, mais 
                  
                  encore que nous n'avons fait que tenir la 
                  
                  promesse faite à la législature à la fin 
                  
                  de la dernière session du parlement. En 
                  
                  vérité, messieurs, je suis surpris autant 
                  
                  
                  
                  297
                  
                  
                  que chagrin de ce que mon hon. ami,—que 
                  
                  je sais bon patriote et fidèle sujet de Sa 
                  
                  Majesté,—n'ait pas senti qu'il était de son 
                  
                  devoir de s'unir à nous pour atteindre le but 
                  
                  qui nous est le plus cher, en un mot, pour 
                  
                  resserrer davantage ces liens qui nous unissent 
                  
                  à la mère-patrie et mieux perpétuer les institutions anglaises sur ce continent. (Ecoutez
                  ! 
                  
                  écoutez !) Mon hon. ami ne voit dans tout 
                  
                  le projet que concessions aux provinces maritimes ; eh! bien, qu'il aille dans aucune
                  
                  
                  partie des provinces inférieures, et qu'il 
                  
                  écoute ce qui s'y dit contre le projet, et il 
                  
                  verra que le seul argument de ceux qui, 
                  
                  comme lui, ne réfléchissent pas à la nécessité de faire des concessions lorsqu'il
                  s'agit 
                  
                  du bien commun, ne tend à rien moins qu'à 
                  
                  affirmer que ces provinces ont tout concédé au 
                  
                  Canada. Il entendra dire à quelques uns : 
                  
                  "nous allons nous unir à une province très 
                  
                  supérieure à nous sous le rapport de la popu 
                  
                  lation et des richesses, et dont les hommes 
                  
                  publics, par leur habileté, sont en mesure 
                  
                  de commander une plus grande influence 
                  
                  que les nôtres." A les entendre, on croirait 
                  
                  que ces provinces vont être reléguées au 
                  
                  second plan, et que tout ce qu'elles pourront 
                  
                  désirer sera à peine écouté. Oubliant ce qu'il 
                  
                  doit au gouvernement et ses devoirs de 
                  
                  citoyen envers son pays, mon hon. ami ne 
                  
                  songe qu'à trouver défectueux les détails d'un 
                  
                  projet qu'il croit être avantageux pour le 
                  
                  pays ; non seulement il se plaint de ce que 
                  
                  le peuple canadien n'a pas été consulté 
                  
                  mais il trouve encore que sur tous ces points 
                  
                  les intérêts du Canada ont été sacrifiés. 
                  
                  Oublie-t-il que tous les membres du cabinet 
                  
                  aiment leur pays, et qu'ils y ont des intérêts 
                  
                  aussi chers que ceux du reste du peuple ? 
                  
                  Est-il à présumer que mon hon. ami le 
                  
                  premier ministre voudrait sacrifier tout ce 
                  
                  qui est cher à sa race et au peuple de cette 
                  
                  province ? Est-il à croire qu'aucun de nous 
                  
                  voulût délibérément faire abandon d'un 
                  
                  avantage que nous aurions pu conserver ? 
                  
                  Si mon hon. ami pouvait être amené à juger 
                  
                  la mesure avec cet esprit de libéralité ne 
                  
                  que devrait savoir apporter tout homme public, 
                  
                  il admettrait que, bien que nous ayons cédé 
                  
                  quelques choses, nous avons fait pour le 
                  
                  mieux dans l'intérêt du pays. Qu'il se 
                  
                  trouve, ainsi que nous l'avons été, assiégé 
                  
                  par mille intérêts divers : particularités ici. 
                  
                  préjugés la, et grands intérêts d'un autre 
                  
                  côté, et qu'il produise ensuite, s'il le peut, 
                  
                  un projet dont l'ensemble soit plus avantageux au peuple de cette province ou qui,
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  en général, promette plus au pays que la 
                  
                  mesure actuellement  sur le bureau de cette 
                  
                  chambre ! Qu'il fasse cela, et je lui pardonnerai 
                  
                  le manque de libéralité dont il s'est rendu 
                  
                  coupable envers ceux qui ont travaillé de 
                  
                  leur mieux à. l'élaboration du projet sur 
                  
                  lequel nous avons à décider. (Ecoutez ! 
                  
                  écoutez !) Je pourrais lui pardonner tout à 
                  
                  fait si, comme mon hon. ami en face de moi 
                  
                  il ne voulait que retarder l'adoption du 
                  
                  projet jusqu'après une élection générale : 
                  
                  mais loin de là il met tout en œuvre pour 
                  
                  préjuger la chambre contre la mesure. J Je 
                  
                  pense que, pour obtenir son rejet, il est disposé à tout ; et je pars de là pour dire
                  qu'il 
                  
                  n'est guère facile de le croire un partisan 
                  
                  sincère de la confédération. Il est bien 
                  
                  facile de dire : je suis en faveur du projet, 
                  
                  mais opposé à. quelques-uns de ses détails ; 
                  
                  mais est-ce que chacun de ces dé ails n'a pas 
                  
                  été pesé, discuté, autant que faire se peut, 
                  
                  sur tous ses points, par des hommes intelligents et aussi bien renseignés sur le sujet
                  
                  
                  que n'importe quel hon. membre de ce 
                  
                  conseil? Tous ceux qui m'entendent savent 
                  
                  très bien qu'il n'était pas possible d'arriver 
                  
                  à un projet sans défaut. Quand même un autre 
                  
                  projet eût été présenté à cette chambre, voire 
                  
                  même celui de mon hon. ami, s'il eut été capable d'en soumettre un infiniment supérieur
                  
                  
                  à celui que nous discutons, quelqu'un croit- 
                  
                  il que certains hons. conseillers lui auraient 
                  
                  donné leur appui ? Les résolutions peuvent 
                  
                  bien être défectueuses ici et là, mais les hons. 
                  
                  messieurs doivent tenir compte des circonstances qui ont donné lieu à leur origine
                  et 
                  
                  juger d'après elles si cette chambre doit ou 
                  
                  non les adopter dans leur ensemble. D'hons. 
                  
                  messieurs ont aussi demandé ce que le 
                  
                  Canada allait gagner à. une confédération ; 
                  
                  eh ! bien, à mon tour je demande si le 
                  
                  Canada ne trouvera pas avantageux de voir 
                  
                  disparaître les obstacles que créaient aux 
                  
                  relations entre les provinces, les droits de 
                  
                  douane,—obstacles dont la disparition aura 
                  
                  l'effet de développer le commerce du St. 
                  
                  Laurent? Pourra-t-on dire que le peuple 
                  
                  des provinces maritimes ne trouvera pas 
                  
                  qu'il doit gagner à l'ouverture d'un commerce 
                  
                  avec ces trois millions d'âmes qui habitent 
                  
                  le long du St. Laurent et des lacs ? Tout sujet 
                  
                  Anglais qui veut maintenir notre alliance 
                  
                  avec la mère-patrie peut-il dire :—" Je 
                  
                  préfère que nous restions seuls, être Haut- 
                  Canadien et laissé à moi seul, et que les 
                  habitants des autres colonies fassent de 
                  même ?" Mon hon. ami demande aussi quel 
                  
                  
                  
                  
                  
                  298
                  
                  sera le surcroît de force militaire que nous 
                  
                  apportera la confédération ? Prétendrait-il 
                  
                  nier qu'il y ait plus de force dans l'union 
                  
                  que dans l'isolement ? Quelqu'un peut-il 
                  
                  prétendre que huit cents ou mille hommes 
                  
                  d'un régiment sont aussi forts débandés que 
                  
                  formés en rangs et dirigés par l'intelligence 
                  
                  d'un homme ? La même chose peut se dire 
                  
                  de ces provinces, dont les forces sont comparativement faibles par suite de leur isolement.
                  
                  
                  Si nous pouvions dire aux Etats-Unis que 
                  
                  nous avons quatre millions d'âmes pour 
                  
                  garder nos frontières et repousser une 
                  
                  invasion, est-ce que nous n'aurions pas là 
                  
                  une grande force ? Un gouvernement serait- 
                  
                  il alors embarrassé, dans le besoin, de faire 
                  
                  un appel aux armes ? C'est dans l'union 
                  
                  des provinces que l'on acquerra une force 
                  
                  immensément supérieure à celle que le 
                  
                  Canada seul pourrait montrer sur le champ 
                  
                  de bataille, et c'est d'après cette force que 
                  
                  le gouvernement pourrait juger des résultats 
                  
                  qu'il pourrait possiblement obtenir en l'appelant au service actif. Comment donc des
                  
                  
                  hommes peuvent-ils s'éloigner de tout ce 
                  
                  qui est vrai, utile et patriotique jusqu'au 
                  
                  point de s'opposer à l'union des moyens de 
                  
                  défense et à un projet qui est vraisemblablement le seul qui nous permettra de maintenir
                  
                  
                  pendant longtemps cette alliance avec la 
                  
                  Grande-Bretagne à laquelle nous tenons tant ? 
                  
                  Dans le cours de ses observations, mon hon. 
                  
                  ami de Niagara a cherché à mettre en doute 
                  
                  une ou deux de mes assertions, surtout celle qui 
                  
                  avait trait aux terrains miniers de Terreneuve. 
                  
                  J'ai dit que je pouvais convaincre la chambre 
                  
                  que Terreneuve avait des minières d'une 
                  
                  assez grande richesse. Je n'occuperai pas 
                  
                  le temps de la chambre à le lire, mais j'ai à 
                  
                  la main un exemplaire du rapport publié en 
                  
                  1840 sur cette colonie, et qui dit que les 
                  
                  minérais de ces terrains sont la galène, le 
                  
                  gypse, le marbre, l'or, le fer, le cuivre, etc. 
                  
                  Il s'y exploite aussi de vastes mines de plomb, 
                  et le professeur SHEPPARD dit avoir vu 3,500 
                  livres de pure galène sortir d'une veine ouverte 
                  par l'explosion d'une simple mine. Dans ce 
                  rapport, il est dit aussi que ces mines sont avantageusement situées, car elles peuvent
                  être 
                  approchées de très près par des navires tirant 
                  12 ou 16 pieds. Ce rapport prouve que mon 
                  hon. ami se trompait en supposant que 
                  Terreneuve ne récélait pas de minéraux de 
                  valeur. Supposons qu'en réalité il ne se 
                  trouve pas là de minéraux ; supposons que 
                  nous donnions à la province de Terreneuve 
                  $150,000 par année simplement pour faire 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  entrer cette Ile dans la confédération, ne 
                  vaut-il pas mieux avoir l'union de toutes les 
                  provinces plutôt que de se refuser à cette 
                  condition ? A entendre quelques hons. 
                  messieurs, en supposerait que les diverses 
                  sommes ne devront annuellement toucher 
                  ces provinces maritimes ne seront payées 
                  que par le Canada seul, et pourtant il n'en 
                  est rien, car c'est la confédération qui leur 
                  donnera ces sommes, auxquelles leur population contribuera dans la mesure de la 
                  subvention qui est faite à elles comme au 
                  Canada. Mon hon. ami, sait-il ce que 
                  Terreneuve doit apporter à la confédération 
                  en retour des $150,000 ? Ses terres et tout 
                  son revenu général. En 1862, le revenu 
                  brut de cette province atteignait le chiffre de 
                  $480,000, sur lesquelles seulement $5,000 
                  provenaient de sources locales, et l'on calcule 
                  que son revenu versera $430,000 par année 
                  dans la caisse générale, dont elle tirera à son 
                  tour $369,200 par année pour subvenir à ses 
                  dépenses locales. Y a-t-il là de quoi trouver 
                  beaucoup à redire ? En sus des $430,000 
                  que Terreneuve va donner à la confédération, 
                  desquelles il faut déduire ces $369,000 qu'elle 
                  en recevra, le gouvernement fédéral touchera 
                  le revenu territorial complet de cette province. Il en est ainsi pour toutes les provinces.
                  Chacune d'elles contribuera au revenu général de la confédération pour une 
                  plus forte somme que celle qui lui est 
                  affectée, de manière à ce que le revenu de 
                  tout le pays se trouvera avoir un surplus. 
                  Il est évident que l'hon. député de Niagara donne plus de portée à son amendement
                  
                  que mon hon. ami en face de moi, bien qu'il 
                  l'ait habilement appuyé ; on voit que par 
                  cet amendement il ne veut qu'obtenir un 
                  délai, afin qu'à la suite d'une dissolution du 
                  parlement le peuple ait l'occasion de se pro 
                  noncer. Cependant, messieurs, comment 
                  arriver à cette dissolution d'une manière 
                  constitutionnelle ? Supposons le cas où le 
                  projet serait adopté par une forte majorité 
                  dans deux chambres, de quelle manière, 
                  je vous le demande, pourrait-on obtenir une 
                  dissolution sous notre système actuel de 
                  gouvernement ? D'après la constitution, une 
                  dissolution ne peut avoir lieu que lorsque 
                  le cabinet ne peut faire adopter par le 
                  parlement une mesure dont il est l'auteur 
                  responsable. Appuyé comme l'est le gouvernement par les deux tiers des représentants,
                  de quelle manière une dissolution du 
                  parlement est-elle possible, puisqu'elle ne 
                  pourrait que plaire à une petite minorité ? 
                  
                  
               
               299
               
               
               
                  Ce serait demander beaucoup trop, quand 
                  
                  même la chose serait possible. Qu'est-ce 
                  
                  que veulent, d'ailleurs, les hons. messieurs 
                  
                  qui demandent le renvoi du projet au 
                  
                  peuple ? Ce qu'ils veulent, c'est que les 
                  
                  ministres mettent de côté la manière de 
                  
                  procéder qu'ils savent être la plus juste 
                  
                  comme la plus sûre au point de vue 
                  
                  de la constitution britannique, et cela, 
                  
                  pour recourir au système américain à l'aide 
                  
                  duquel on obtiendrait l'assentiment ou la 
                  
                  désapprobation du peuple à l'égard de ce 
                  
                  projet. A quelle conclusion pourrions-nous 
                  
                  en venir avec cette manière de procéder ? 
                  
                  Serait-il possible que quelque hon. membre 
                  
                  voulût donner au peuple l'occasion de se 
                  
                  prononcer en disant oui ou non à chaque 
                  
                  article de ces résolutions ? Je suis convaincu 
                  
                  que ce n'est pas là ce que veut mon hon. ami 
                  
                  de Niagara puisqu'il ne demande qu'un mois 
                  
                  de délai ; et mon hon. ami d'en face non 
                  
                  plus, car il connaît et vénère trop la constitution pour seulement songer à recourir
                  à 
                  
                  cette voie. De ce, il faut donc conclure que 
                  
                  le désir de ceux qui, par la voie d'amendements, s'opposent à l'adoption du projet,
                  
                  
                  est de le faire tomber, et que c'est dans ce 
                  
                  but qu'ils proposent ces amendements. 
                  
                  ( Ecoutez ! écoutez !) D'après ce que j'ai pu 
                  
                  savoir l'adoption de l'amendement pourrait 
                  
                  grandement contribuer à faire tomber la 
                  
                  mesure, car il faudrait qu'il fut adopté 
                  
                  par les deux branches de toutes les autres 
                  
                  législatures et ensuite par le parlement 
                  
                  impérial. Or, les autres législatures attendent la décision de cette chambre : elles
                  
                  
                  désirent savoir si le conseil législatif du 
                  
                  Canada adhère au projet ; elles désirent 
                  
                  savoir si vous allez mettre de côté de 
                  
                  futiles objections à de minimes matières 
                  
                  de détails ; si vous allez faire abandon 
                  
                  de vos vues particulières sur tel et tel 
                  
                  point, et si vous allez donner votre appui à 
                  
                  l'ensemble du projet. Toute personne qui aura 
                  
                  réfléchi admettra que dans ces circonstances 
                  
                  exceptionnelles il n'y a qu'une conduite à 
                  
                  tenir. Voulez-vous une union de toutes les 
                  provinces britanniques américaines ou rester 
                  comme vous êtes ? Il ne s'agit que de cela. 
                  Pour ma part, je crois que sans cette fédération notre connexion avec la mère-patrie
                  
                  court rixe de ne durer guère longtemps. 
                  Que disent de nous les hommes publics de 
                  l'Angleterre depuis plusieurs années ? N 'avons-nous pas vu qu'ils affirmaient, avec
                  
                  une véhémence qui augmentait d'année en 
                  année, que nous négligions nos devoirs à 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  l'égard des défenses du pays. Si, sous des 
                  circonstances en dehors de notre contrôle, 
                  il arrivait que la Grande-Bretagne entrât en 
                  guerre avec les Etats-Unis, nos destinées 
                  n'en seraient pas moins liées à celles du 
                  grand empire dont nous faisons partie, et il 
                  est par conséquent de notre devoir de faire 
                  un peu plus que ce que nous avons fait 
                  jusqu'ici en face des éventualités qui pourraient surgir d'une cause ou d'une autre
                  ; 
                  Supposons, par exemple, que l'été dernier, 
                  une force armée des Etats-Unis soit venue au 
                  Canada à la poursuite des pillards qui se 
                  sont réfugiés de ce côté des lignes, ainsi que 
                  cela aurait pu avoir lieu si l'ordre du général 
                  DIX n'avait pas été révoqué ; supposons 
                  que, comme partie du grand empire, nous 
                  aurions jugé que l'intégrité de notre territoire n'avait pas été respectée, que la
                  Grande- 
                  Bretagne eût partagé les vues de notre 
                  gouvernement sur ce fait, et qu'elle eût 
                  déclaré la guerre aux Etats-Unis parce 
                  qu'ils se seraient permis d'exercer, dans 
                  une de ses provinces, des droits auxquels 
                  ne peut prétendre une puissance étrangère, 
                  d'où serait alors venue la cause de la guerre? 
                  De la revendication du droit de cette province à maintenir sa position comme partie
                  
                  intégrante de l'empire britannique. Supposons encore que la cause d'une guerre avec
                  
                  cette nation eût pris naissance dans une 
                  autre colonie, nous n'en serions pas moins 
                  obligés, avec l'empire, de soutenir son intégrité, quitte à succomber ou à sortir
                  avec 
                  lui victorieux de la lutte. Dirons-nous que 
                  nous ne voulons pas contribuer à notre 
                  défense autrement que par le moyen de 
                  volontaires, et que pour le reste nous laissons à la mère-patrie de faire pour nous
                  ce 
                  que la prudence lui suggérera? Serait ce 
                  là le sentiment dont un hon. membre 
                  devrait faire preuve, soit à l'égard de 
                  cette question ou de toute autre ? Je ne 
                  puis croire, assurément, qu'aucun de nous 
                  consentirait à rester les bras croisés, sachant 
                  qu'il doit la protection dont il jouit aux 
                  armes et à l'argent de l'Angleterre. Même 
                  mon hon. ami de Niagara, j'en suis sûr, 
                  répudierait la lâche indifférence que l'expression de ce sentiment comporterait. Cependant,
                  il est d'avis que cette chambre ne 
                  doit pas adopter ces résolutions ; qu'elles 
                  doivent être remises indéfiniment, et que les 
                  colonies doivent rester dans la position isolée 
                  où elles se trouvent aujourd'hui. Mais moi, 
                  au contraire, je pense que les intérêts 
                  et la destinée de ce pays dépendent de 
                  
                  
                  
                  300
                  
                  
                  
                  l'accomplissement du projet de confédération. 
                  
                  Supposons, ainsi que beaucoup le désirent 
                  
                  avec ardeur, que la guerre fratricide des 
                  
                  Etats-Unis soit à la veille de finir, et que, 
                  
                  dans un temps donné, le Nord et le Sud se 
                  
                  réconcilient, je suis positif que l'intégrité 
                  
                  de ces provinces dépendra alors de ce que 
                  
                  l'union sera ou ne sera pas un fait accompli. 
                  
                  Si on remet aujourd'hui le projet à plus 
                  
                  tard, on peut dire qu'il est indéfiniment 
                  
                  remis. Depuis des années on s'est évertué 
                  
                  à obtenir des provinces inférieures leur consentement à une union avec le Canada,
                  et si 
                  
                  le projet est maintenant rejeté, Dieu sait si 
                  
                  plus tard elles voudront y consentir. De la 
                  
                  décision de cette chambre va dépendre celles 
                  
                  des législatures de la Nouvelle-Ecosse, de 
                  
                  Terreneuve et de l'Ile du Prince-Edouard. 
                  
                  Si vous adoptez un amendement, ce sera 
                  
                  pour elles un indice que le peuple du Canada 
                  
                  n'est guère porté pour le projet. Hons. 
                  
                  messieurs, êtes-vous prêts à prendre sur vous 
                  
                  de déclarer que le Canada est adverse à la 
                  
                  confédération ? Réfléchissez-y bien, car nous 
                  
                  ignorons tous quand une autre occasion aussi 
                  
                  heureuse que celle-ci nous sera donnée d'accomplir cette œuvre grandiose. Ceux d'entre
                  
                  
                  vous qui connaissent les difficultés et les 
                  
                  objections que l'on a éprouvées, les intérêts 
                  
                  mesquins des diverses sections de cette province et des autres qu'il a fallu satisfaire,
                  
                  
                  sont forcés d'avouer que nous avions fait un 
                  
                  grand pas vers le progrès lorsque la mesure 
                  
                  a été amenée où elle en est. Cette occasion 
                  
                  perdue, quand pourrons-nous réunir une 
                  
                  seconde fois les représentants des diverses 
                  
                  provinces pour traiter de cette question ? 
                  
                  Quand les gouvernements des provinces 
                  
                  concernées pourront-ils mettre sur le bureau 
                  
                  de leur législature un projet aussi complet 
                  
                  que celui-ci dans tous ses détails ? Il est 
                  
                  impossible de prévoir quand un concours de 
                  
                  circonstances aussi heureuses se reproduira. 
                  
                  Mon hon. ami de Niagara dit en outre : 
                  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Vous ne nous avec pas donné ce projet en 
                     
                     détail ; vous ne nous l'avez pas donné en entier. 
                     
                     La chambre n'a pas devant elle la constitution 
                     
                     projetée qui doit régir le Haut et le Bas-Canada. 
                     
                     Vous ne nous avez pas fait connaître quels seront 
                     les droits et pouvoirs des législatures locales." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Eh ! bien, hons. messieurs, tout ce que je 
                  
                  puis répondre à cela, c'est qu'il eut été non 
                  
                  seulement impossible mais encore inutile que 
                  
                  le gouvernement eut apporté ce projet en 
                  
                  même temps que celui dont la chambre va 
                  
                  décider. Tant que cette mesure ne sera pas 
                  
                  adoptée par nous et par les autres provinces; 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  tant que nous ne saurons pas si nous allons 
                  oui ou non faire partie d'un gouvernement 
                  confédéré, il n'y aura pas non plus lieu 
                  d'introduire le projet relatif aux législatures 
                  locales. Je vous le demande, hons. messieurs, 
                  serait-il raisonnable ou même possible que 
                  ce projet fut adopté sans la sanction des deux 
                  branches de la législature ? D'un autre côté, 
                  quel que puisse être ce plan de constitution 
                  du Haut et du Bas-Canada, est-ce une chose 
                  que les ministres de la couronne peuvent 
                  porter sur eux et mettre en force sans la 
                  sanction du parlement ? Non, c'est une 
                  mesure qui sera plus tard présentée à cette 
                  chambre, qui sera discutée et sur laquelle 
                  nous aurons à nous prononcer avant qu'elle 
                  ne devienne loi. En temps opportun, ceux 
                  qui ne partagent pas les vues du gouvernement sur les constitutions de ces provinces
                  
                  auront une ample occasion d'exprimer leurs 
                  opinions et de chercher à les faire prévaloir. 
                  Je puis en dire autant des objections faites 
                  au chemin de fer intercolonial. A l'égard 
                  de cette voie ferrée, il a été dit que c'était 
                  une entreprise à laquelle on n'aurait jamais 
                  dû consentir ; cependant, hons. messieurs, il 
                  est de toute certitude que sans elle l'union 
                  sera impossible, et ceux qui croient à l'importance et à la nécessité d'une confédération
                  doivent savoir aussi que ce chemin de 
                  fer est la condition indispensable de son 
                  accomplissement. Mais, messieurs, le gouvernement ne peut de lui-même construire 
                  cette voie ; pas plus que les gouvernements 
                  des autres provinces, il n'a ce pouvoir. Cette 
                  entreprise sera du ressort du parlement 
                  fédéral, lequel décidera à quelles conditions 
                  nous aurons à l'exécuter. Avant que le 
                  chemin de fer intercolonial ne soit construit 
                  ou que les constitutions du Haut et du Bas- 
                  Canada ne soient adoptées, la discusion de ces 
                  sujets aura eu ses coudées franches. Le 
                  premier sera soumis au parlement fédéral ; 
                  le second au parlement actuel de ce pays,-   mais dans le cas seul où les résolutions
                  maintenant devant la chambre seront adoptées, 
                  attendu qu'il n'appartient qu'à la législature 
                  canadienne de décider en premier ressort sur 
                  ces constitutions. Je ne suis pas un de ceux 
                  qui, dans un but mesquin, voudrait s'abriter 
                  derrière les résolutions que la chambre a 
                  devant elle ; mais je dirai que l'amendement 
                  sur lequel nous délibérons doit étre repoussé : 
                  que tout hon. membre qui est vraiment favorable à ce projet, qui croit à la nécessité
                  
                  d'une confédération des provinces, ne sera 
                  pas vu votant pour cet amendement qui 
                  
                  
                  
                  301
                  
                  apportera un obstacle peut-être insurmontable à la réalisation du projet. Que l'on
                  
                  
                  considère depuis combien d'années ce 
                  
                  changement de gouvernement est projeté. 
                  
                  Comme a su le faire remarquer l'hon. 
                  
                  membre dont le siége est près du mien, c'est 
                  
                  une mesure dont il est depuis longtemps 
                  
                  question. Il nous a démontré que depuis 
                  
                  très longtemps elle avait attiré l'attention de 
                  
                  presque tous ceux qui ont quelque intérêt 
                  
                  dans les affaires publiques de ce pays. Pour 
                  
                  corroborer l'assertion de mon hon. ami, je 
                  
                  n'ai qu'à citer une des résolutions proposées 
                  
                  en cette chambre, il y a plusieurs années, par 
                  
                  un hon. membre de mes amis que chacun de 
                  
                  vous est aise de voir à sa place accoutumée, 
                  
                  je vous parle de mon hon. ami M. MATHESON. En 1855, il propose une série de résolutions
                  contre le principe électif, et ainsi 
                  
                  qu'on va le voir, la dernière est conçue dans 
                  
                  un langage prophétique dont l'expérience 
                  
                  nous a appris à connaître la vérité. 
                  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  
                  
                     8 Résolu,—Que le sujet d'une union de toutes les 
                     
                     provinces britanniques américaines ayant occupée 
                     
                     l'attention du public depuis des années, il 
                     
                     serait manifestement inopportun de compliquer 
                     
                     les arrangements futurs en changeant la constitution d'une de ces provinces, changement
                     qui 
                     
                     n'est pas demandé et qui de l'avis de cette chambre 
                     
                     ne serait pas acceptable pour les autres. Le conseil est en conséquence d'opinion
                     que tout acte à 
                     
                     ce sujet serait prématuré autant qu'inopportun." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Mon hon. ami entrevoyait alors ce qui est 
                  
                  à la veille de se réaliser, une union de ces 
                  
                  provinces ; il présageait aussi que le système 
                  
                  électif, s'il était appliqué à cette branche de 
                  
                  la législature, pourrait créer des difficultés. 
                  
                  Il est en effet une difficulté, mais il faut la 
                  surmonter ; il est un obstacle, mais il faut le 
                  franchir. Les objections personnelles soulevées par mon hon. ami de la division de
                  
                  Niagara sont des moins valables. Ce n'est pas 
                  ce que mon hon. ami près de moi ou mon hon. 
                  ami devant moi ont pu dire ou penser autre- 
                  fois qu'il s'agit maintenant de considérer. 
                  Nous sommes tous plus ou moins exposés à 
                  ces sortes d'attaques ; mais heureusement 
                  pour moi, il y a trop peu longtemps que je 
                  me suis jeté dans la vie publique, où je n'ai 
                  encore joué qu'un rôle bien peu marquant, 
                  pour être exposé, autant que beaucoup 
                  d'autres, à ces accusations. Je crois, néanmoins, que nous devons passer par dessus
                  
                  toutes ces choses. Quant à moi, je suis 
                  disposé à oublier tout ce qu'un hon. membre 
                  peut avoir fait en d'autres circonstances pour 
                  ne m'occuper que de la question de savoir si 
                  la confédération projeté est à désirér ; si 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  nous la désirons par affection pour les institutions monarchiques ; comme sujets de
                  l'empire britannique et pour perpétuer notre 
                  alliance avec l'Angleterre ? En ce faisant, 
                  nous renonçons à nos objections sur ce point 
                  et sur tout autre pour assurer le succès du 
                  principe Voilà bien des années que cette 
                  confédération est demandée, et jamais elle n'a 
                  été aussi près de s'accomplir qu'à présent ; jamais elle fut à l'état de possibilité
                  comme aujourd'hui. Après des années d'anxiété, de 
                  troubles et de difficultés, la réalisation du 
                  projet est jugée possible, et parce que j'y 
                  trouve à redire sur tel ou tel point, dois-je 
                  m'évertuer à le faire rejeter ? Il est bien 
                  certain qu'au début les rouages du système 
                  fédéral ne fonctionneront pas parfaitement, 
                  mais, comme pour toute autre chose, on 
                  parviendra, avec le temps, à remédier à leurs 
                  défauts. Il en a été ainsi à l'égard de 
                  l'union de 1840. Les Bas-Canadiens eurent 
                  à se plaindre de ce que la langue française 
                  était exclue du parlement provincial ; ce 
                  grief, qui faisait en même temps l'office 
                  d'entrave, donna lieu à des remontrances, 
                  et qu'en est-il résulté ? Ces remontrances 
                  eurent l'effet de faire réparer cette injustice, 
                  car l'usage des deux langues fût ensuite 
                  permis. Plus tard, le peuple voulut que 
                  cette chambre devint élective. On a eu 
                  peut-être tort de satisfaire à cette volonté, 
                  mais il n'en a pas moins obtenu le changement qu'il demandait. Qu'est-ce qui empêcherait
                  que la même chose pût se faire sous 
                  la confédération ? Il sera fait droit à toute 
                  demande de changement devenu nécessaire. 
                  A mon sens, il serait inconsidéré autant 
                  qu'impolitique de rejeter le projet, parce 
                  que sur tel ou tel point, ou dans tel détail, 
                  il ne rencontre pas exactement nos vues. 
                  Est-il une union entre deux pays, ou même 
                  une simple association de deux individus, qui 
                  ait pu durer sans qu'il y ait eu concessions de 
                  part et d'autre ? Que les hons. messieurs qui 
                  ont eu le bonheur de se lier conjugalement, et 
                  qui, naturellement, peuvent parler par expérience, nous disent si une union peut être
                  
                  heureuse ou durable sans que les conjoints 
                  se fassent de mutuelles concessions ? ( Ecoutez ! écoutez ! et rires.) Si vous voulez
                  
                  l'union, il faut se résigner volontiers aux 
                  concessions et à ne pas persister dans l'obtention de ce qui peut paraître mieux que
                  
                  ce qui nous est offert. Sans cela, toute 
                  union est impossible et le sera toujours. Ce 
                  qu'il faut c'est de la tolérance et des 
                  concessions. J'ai l'espoir et la conviction 
                  
                  
                  
                  302
                  
                  
                  que dans le cas présent cette opinion sera 
                  
                  celle de la législature de ce pays. Je 
                  
                  crois aussi que la confédération est reconnue 
                  
                  par tous comme absolument nécessaire, et 
                  
                  qu'au lieu d'insister sur tel ou tel point, on 
                  
                  se plaira plutôt à se figurer l'époque où ce 
                  
                  pays aura une population de quatre millions 
                  
                  d'âmes, un grand commerce et une marine 
                  
                  qui en feront une puissance de quatrième 
                  
                  rang. ( Applaudissements. ) Je suis pourtant 
                  
                  étonné qu'un hon. membre du Bas-Canada 
                  
                  soit adverse à cette union, d'autant plus que 
                  
                  par elle le peuple bas-canadien va rentrer en 
                  
                  possession de la contrée qui a appartenue 
                  
                  autrefois à sa race, et où se parle encore la 
                  
                  langue française ! Je crois que pour les 
                  
                  franco-canadiens de même que pour nous, 
                  
                  l'avenir est rempli de promesses, sur la réalisation desquelles on peut compter en
                  toute 
                  
                  confiance ; et parce que nous ne pouvons pas 
                  
                  obtenir la modification d'un détail d'une 
                  
                  importance mineure, allons-nous renoncer à 
                  
                  d'aussi belles espérances ? Je compte que 
                  
                  les hons. messieurs qui appuient la mesure 
                  
                  verront comme moi le danger qu'il y aurait 
                  
                  à remettre son adoption, et qu'ils repousseront cet amendement, lequel n'est fondé
                  
                  
                  que sur la présomption que son auteur et 
                  
                  ceux qui l'appuient ne sont pas prêts à se 
                  
                  prononcer, et qui, pour cette raison, demandent qu'on leur donne le temps d'aller
                  de 
                  
                  porte en porte s'enquérir de ce que les 
                  
                  électeurs pensent du projet sur lequel nous 
                  
                  sommes à cette heure appelés à rendre une 
                  
                  décision. La confédération est l'œuvre qui 
                  
                  doit sauver le pays ; eh ! bien, renonçons 
                  
                  alors à nos petites objections, et votons pour 
                  
                  elle. ( Applaudissements. ) 
                  
                  
               
               
               
               
                  L'HON. M. SEYMOUR—L'hon. commissaire des terres de la couronne a raison 
                  
                  de supposer que je suis opposé à la confédération, et je le suis surtout à celle qui
                  est 
                  
                  basée sur les résolutions adoptées à la 
                  
                  convention de Québec. Je ne dis pas que 
                  
                  je serais hostile à une union législative 
                  
                  conçue dans des conditions suffisantes d'équité et de justice, mais je suis opposé
                  à la 
                  
                  confédération dans les termes sous lesquels 
                  
                  elle est présentée à la considération de cette 
                  
                  chambre. Mon hon. ami a dit que toute union 
                  
                  supposait de la tolérance et des concessions 
                  
                  mutuelles ; il me semble que dans le cas actuel 
                  
                  la tolérance et les concessions n'ont été manifestées que d'un seul côté, et qu'elles
                  ont été 
                  
                  loin d'être réciproques. Il doit y avoir des 
                  
                  concessions mutuelles entre ceux qui forment 
                  
                  des associations ; mais il ne faut pas que le 
                  
                  
                  
                  
                  
                  même individu soit le seul à les faire, comme 
                  le Canada l'a été dans la confédération. 
                  Mon hon. ami, en dépit de toute son éloquence et de sa capacité, n'a pu détruire une
                  
                  seule des objections soulevées par mon hon. 
                  ami le député de Niagara ( M. CURRIE. ) Il 
                  a trouvé plus simple de les passer sous silence 
                  lorsqu'il a vu qu'il ne pouvait y répondre. 
                  Mon hon. ami s'est écrié : " Est-ce que 
                  l'usage de la langue française n'a pas été 
                  un changement apporté à la constitution ? " 
                  Ce droit, hons. messieurs, a été reconnu, je 
                  confesse, par l'administration conservatrice 
                  du jour, et ainsi que l'a dit mon hon. ami en 
                  face de moi ( M. BOULTON ) il l'a été à l'unanimité. Personne ne s'y opposa parce
                  que tout 
                  le monde comprenait que c'était reconnaître 
                  un droit incontestable et inaliénable à nos 
                  concitoyens d'origine française. Mais, je 
                  vous le demande, un tel acte peut-il être 
                  comparé aux résolutions qui nous sont 
                  proposées en ce moment, à un changement 
                  aussi radical de la constitution que celui-ci 
                  et destiné non seulement à régler nos destinées, mais encore celles de nos enfants
                  et de 
                  nos arrière-petits enfants ? Un changement 
                  connue celui qu'on nous propose peut-il 
                  réellement être comparé à celui de la reconnaissance de l'exercice de la langue française?
                  
                  Non, assurément non. En vérité, c'est bien 
                  là la plus étrange comparaison que j'aie 
                  jamais entendue faire. Mon hon. ami a 
                  ensuite parlé du changement dans la constitution du conseil législatif : mais est-ce
                  que 
                  cette question n'a pas été agitée autant comme 
                  autant dans l'opinion publique ? Le peuple 
                  n'a-t-il pas fait connaître plus d'une fois son 
                  opinion aux 
hustings sur cette question ? Oui, il 
                  l'a fait, et c'est parce qu'on a cru qu'il était 
                  pour le changement que l'amendement constitutionnel fut mis à effet. Mon hon. ami
                  
                  a ajouté que les délégués canadiens eurent 
                  à faire face à mille difficultés dont ils furent 
                  entourés dans le cours de la conférence. Je le 
                  crois, mais à qui doivent-ils s'en prendre ? 
                  N'est-ce pas à eux-mêmes qui permirent à l'Ile 
                  du Prince-Edouard et à Terreneuve de s' y faire 
                  représenter par autant de délégués que le 
                  Canada ? Je suis loin de nier les difficultés 
                  qu'ils eurent à vaincre et j'avoue qu'ils 
                  durent être écrasés sous les demandes et les 
                  exigences de ces délégués. L'hon. monsieur 
                  a prétendu que la confédération était nécessaire pour renforcer la défense du pays.
                  
                  Mais en quoi ? Quelqu'un de mes hons. auditeurs peut-il me dire de quelle façon ?
                  car 
                  je n'ai pas entendu un seul mot qui ait pu 
                  
                  
                  
                  303
                  
                  
                  me convaincre comme je l'aurais voulu que 
                  
                  le projet actuel est destiné à rendre le pays 
                  
                  plus formidable,—à moins toutefois que ce 
                  
                  ne soit en le plaçant sous un seul et 
                  
                  même gouvernement. Est-ce que, hons. 
                  messieurs, je n'ai pas démontré l'autre 
                  jour quel était le sentiment des provinces d'en-bas au sujet de la défense du 
                  pays ? Que faisaient-elles précisément dans 
                  le même temps qu'on proposait au parlement 
                  canadien de voter un crédit de plusieurs 
                  millions pour organiser la défense du pays ? 
                  On a vu le secrétaire du trésor de l'une de 
                  ces provinces proposer de voter un crédit de 
                  $20,000 ;—plus que cela, on l'a vu solliciter 
                  son pardon aux chambres de ce qu'il leur en 
                  demandait tant à la fois et pour un pareil 
                  sujet ! ! ! Le premier ministre actuel de la 
                  Nouvelle-Écosse, c'est-à-dire de la province 
                  qui tient le deuxième rang en importance 
                  parmi les colonies de l'Amérique Britannique 
                  du Nord, ne s'est pas contenté de cela et a 
                  été jusqu'à proposer de retrancher $l2,000 
                  de cette somme et de ne laisser que $8,000. 
                  Or, voilà des choses qui se passaient dans 
                  une province qui vient après la nôtre en 
                  importance, et à l'époque de l'affaire du 
Trent, 
                  c'est-à-dire dans un temps où le danger était 
                  beaucoup plus sérieux qu'aujourd'hui Que 
                  faisait le Nouveau-Brunswick de son côté, 
                  pendant ce temps ? il votait $15,000 pour sa 
                  défense. Eh ! bien, c'est avec de telles populations que l'on veut nous allier sous
                  le prétexte qu'elles contribueront à nous rendre 
                  formidables ! Pensez-vous, hons. messieurs, 
                  que ce sera en vous associant avec des provinces dont les chefs nourissent de pareils
                  
                  sentiments que nous acccroîtrons nos forces? 
                  Assurément non. Mon hon. ami, le commisaires des terres de la couronne, a aussi avancé
                  
                  que sur la population du Haut-Canada, il s'en 
                  trouvait 95 sur cent de favorables à la confédération. Il se trompe. Ayant eu déjà
                  
                  l'honneur de représenter une partie des 
                  électeurs de mon hon. ami, je puis prétendre 
                  avec raison connaître autant l'opinion, non 
                  pas simplement du peuple du Haut-Canada 
                  en général, mais même de ses propres constituants, autant que lui. C'est pourquoi
                  j'affirme 
                  que si mon hon. ami se présentait aujourd'hui 
                  devant ses électeurs pour leur dire que le 
                  Haut-Canada n'aura la confédération qu'à 
                  condition de supporter pour les deux tiers 
                  le coût du chemin de fer intercolonial, et 
                  son entretien subséquent, que les chemins des 
                  provinces du golfe devront devenir la propriété du gouvernement qui sera obligé à
                  
                  
                  
                  
                  
                  l'avenir de les entretenir à ses propres frais, 
                  
                  et que le Haut-Canada doit avoir les deux 
                  
                  tiers de tout ce fardeau à supporter, j'oserai 
                  
                  contester l'exactitude de son assertion et lui 
                  
                  nier que 95 de ses électeurs sur 100 seront 
                  
                  en faveur de la confédération 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL —Exposez-leur 
                  
                  toutes les circonstances et je n'ai aucun 
                  
                  doute de pouvoir les convaincre. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. SEYMOUR—Mon hon. ami 
                  
                  fait erreur, et je suis certain que s'il ne devait 
                  
                  pas être l'un des conseillers à vie de la 
                  
                  chambre haute du parlement fédéral, il n'en 
                  
                  demanderait pas tant pour les convaincre. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL —Mon hon. ami 
                  
                  va un peu trop vite : je puis l'assurer que 
                  
                  je n'ambitionne pas du tout un tel honneur. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. SEYMOUR—Mon hon. ami 
                  
                  est aujourd'hui au pouvoir mais libre à 
                  
                  lui de refuser de nouveaux honneurs. Mon 
                  
                  hon. ami représente un des collèges électoraux les plus intelligents du Haut- 
                  Canada ; eh ! bien, quelle grace aurait-il 
                  d'aller dire à ses électeurs qu'ils contribueront à la confédération en raison des
                  
                  droits d'importation qu'ils paient ; qu'ils 
                  contribueront en raison de leur richesse et 
                  qu'ils ne recevront qu'en raison de leur 
                  population ; qu'enfin quelque considérable 
                  que soit leur population ils seront malgré 
                  leur grande majorité, mis sur le même pied 
                  que la population flottante des provinces 
                  maritimes composée de pêcheurs et de fabricants de bois. Une doctrine de ce genre
                  n'est 
                  nullement celle d'un conservateur. Je me 
                  soumettrai à tout avant d'accepter un pareil 
                  projet. En l'appuyant tel qu'il nous est 
                  présenté je croirais trahir les intérêts du 
                  pays. A chacun ses opinions ; telles sont les 
                  miennes et j'y tiendrai. L'amendement de 
                  mon hon. ami qui demande un delai est juste, 
                  bien fondé et je ne vois pas comment on peut 
                  s'y opposer dans une question dont dépendent les intérêts les plus chers du pays,
                  au 
                  moment où nous allons passer une loi qui 
                  intéressse encore plus les générations futures 
                  que nous-mêmes. En vue de l'importance de 
                  la mesure je ne vois pas comment les hons. 
                  messieurs peuvent voter contre une proposi 
                  tion si raisonnable. ( Ecoutez !) 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. FERGUSSON BLAIR— 
                  
                  L'hon. commissaire des terres de la couronne 
                  voudrait-il me donner quelques renseignements au sujet des législatures locales ?—Si
                  
                  je l'ai bien compris la partie du projet relative à ces législatures ne sera pas soumise
                  à 
                  la législature actuelle. 
                  
                  
 
               
               
               
               304
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. FERGUSSON BLAIR—Si 
                  
                  j'ai bien compris mon hon. ami, il a dit 
                  
                  qu'il ne considérait pas comme opportun de 
                  
                  faire connaître les constitutions projetées 
                  
                  des législatures locales avant que la chambre 
                  
                  ne se soit prononcée d'abord sur le projet en 
                  
                  général de la confédération. En vérité, je 
                  
                  n'en vois pas la raison :—néanmoins, je ne 
                  
                  ferai pas de ma demande une proposition 
                  
                  pour entraver la marche du plan actuellement soumis. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Mon hon. 
                  
                  ami de Brock peut raisonner juste, mais le 
                  
                  gouvernement a pensé qu'il était prématuré 
                  de présenter aux chambres le projet des 
                  constitutions locales avant qu'elles n'aient 
                  d'abord voté les résolutions actuelles. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. FERGUSSON BLAIR -   Mais ne pourrait-il pas arriver que plusieurs 
                  
                  membres de cette chambre, avant de se 
                  
                  décider à voter ces résolutions, eussent le 
                  
                  désir de connaître la nature des constitutions 
                  
                  locales qui doivent avoir une si grande 
                  
                  portée sur la solution de la question à l'ordre 
                  du jour ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Je répondrai 
                  
                  à l'hon. conseiller que le parlement du 
                  
                  Canada aura tout le temps et toutes les 
                  
                  occasions désirables de se prononcer sur ce 
                  
                  sujet. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Lorsque les 
                  
                  résolutions actuelles auront été votées. 
                  
                  Nous avons cru inutile de nous occuper des 
                  
                  constitutions du Bas et du Haut-Canada 
                  
                  tant que nous ne connaîtrions pas les vues 
                  
                  du parlement sur la confédération elle- 
                  
                  même. Une fois cette opinion exprimée, 
                  
                  ce sera alors notre devoir de donner toute 
                  
                  notre attention à cette question et d'exposer 
                  
                  au parlement les projets de constitution pour 
                  
                  les deux provinces. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—Je ne connais pas 
                  
                  quelles peuvent être les vues du gouvernement à ce sujet, mais il me semble qu'il
                  
                  
                  aurait certainement manqué de sagesse en 
                  
                  soumettant maintenant aux chambres les 
                  
                  projets de constitution du Bas et du 
                  Haut-Canada. Car il est fort possible que 
                  des divergences d'opinion se manifestent 
                  sur les principes de ces constitutions et 
                  que ces divergences soient de nature à 
                  entraîner la retraite de quelques uns des 
                  membres du cabinet. ( Cris :— Ecoutez ! 
                  écoutez !) Remarquez bien que je fais 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  en ce moment une supposition : or, en prévision de ces probabiités, ne serait-il pas
                  
                  
                  absurde et impolitique de la part du gouvernement de plonger le pays dans l'agitation
                  
                  
                  sur cette question avant que de s'assurer si 
                  
                  les résolutions actuelles seront emportées ou 
                  
                  rejetées ? Une telle conduite serait indigne 
                  
                  du ministère. Je n'ai pas bien compris si 
                  
                  mon hon. ami a dit ou non que le projet 
                  
                  des législatures locales serait soumis aux 
                  
                  chambres après le vote des résolutions ; mais 
                  
                  je serais fâché qu'il l'eut déclaré ainsi et 
                  
                  que le gouvernement n'attendit pas pour cela 
                  
                  que les provinces du golfe se fussent prononcées. Il devrait retarder afin de voir
                  si 
                  
                  la confédération y réussira ou non ; car, 
                  
                  en supposant que les résolutions fussent 
                  
                  adoptées ici et qu'elles ne le fussent pas là, 
                  
                  tout le projet est réduit à néant, et on se 
                  
                  trouve, sans résultat aucun, avoir jeté le pays 
                  
                  dans le désordre et l'agitation, en lui fesant 
                  
                  discuter des mesures inutiles. Le ministère 
                  
                  devrait d'abord, suivant moi, faire triompher 
                  
                  le projet actuel autant que possible, et du 
                  
                  moment qu'il aurait pu y rallier les deux 
                  
                  provinces les plus considérables du golfe, il 
                  
                  ne lui resterait que bien peu à faire :—alors, 
                  
                  mais alors seulement, sera arrivé le temps 
                  
                  favorable à la discussion des constitutions 
                  
                  locales. C'est pourquoi, grand a été mon 
                  
                  étonnement de voir une telle proposition 
                  
                  venir de mon hon. ami ( M. FERGUSSON 
                  
                  BLAIR ), lui que j'ai entendu à l'ouverture 
                  
                  des premiers débats se déclarer en faveur des 
                  
                  résolutions actuelles dans un si excellent 
                  
                  discours : et je ne comprends pas pourquoi 
                  
                  en vérité l'hon. monsieur a témoigné le désir 
                  
                  de prendre connaissance du projet des législatures locales. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. FERGUSSON BLAIR—Je 
                  
                  ne l'ai fait que parce que j'ai cru qu'il n'était 
                  
                  que raisonnable que les hons. députés 
                  
                  apprissent, avant de voter pour ou contre la 
                  
                  confédération, de quelle nature seraient les 
                  
                  constitutions projetées des législatures locales. 
                  
                  ( Ecoutez ! écoutez !)   
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M CAMPBELL—Mon hon. ami 
                  
                  devrait ajouter ceci à ses remarques, à savoir 
                  
                  que les hons. membres auront en tous cas 
                  
                  pleine et entière occasion d'exprimer leur 
                  
                  opinion à ce sujet. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL—Hons. messieurs :-   Il vous paraîtra sans doute présomptueux de 
                  
                  la part de quelqu'un aussi peu au fait que 
                  
                  je le suis des discussions parlementaires 
                  
                  d'entrer en lice avec l'hon. commissaire des 
                  
                  terres de la couronne et d'oser lui contester 
                  
                  
                  
                  305
                  
                  
                  la validité de son raisonnement très-habile 
                  
                  contre l'amendement soumis à notre considération: cependant, toutes inégales que 
                  
                  soient les armes, je n'hésite pas à accepter 
                  
                  le combat, car je crois avoir de mon côté la 
                  
                  justice et la vérité dont la force ne peut 
                  
                  manquer de finir par triompher. J'ai prêté 
                  
                  une oreille très attentive au discours éloquent 
                  
                  de l'hon. monsieur et je ne puis lui refuser 
                  
                  mon approbation sur plusieurs points : mais 
                  
                  là où je diffère avec lui c'est lorsqu'il apprécie 
                  
                  les motifs de ceux qui supportent l'amendement de l'hon. député de Niagara 
                  
                  ( M. CURRIE ) et qu'il les taxe de manquer 
                  
                  de sincérité,—que dis-je, de manquer de 
                  
                  loyauté envers la couronne et le pays. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Je n'ai rien 
                  
                  dit autre chose que ceci, à savoir : que 
                  
                  j'hésitais à croire à la sincérité de ceux qui 
                  
                  tout en voulant une mesure lui fesaient 
                  
                  néanmoins la guerre sur les détails. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L' HON. M. VIDAL—C'était beaucoup 
                  
                  plus fort que cela, car j'ai entendu dire à 
                  
                  l'hon. député que les termes de la proposition 
                  
                  étaient tels qu'ils prouvaient à l'évidence 
                  
                  qu'elle n'avait été faite que dans le but de 
                  
                  renverser la mesure. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Et je répète 
                  
                  qu'en effet il en est ainsi, ce qui n'est pas du 
                  
                  tout la même chose que ce que l'hon. député 
                  
                  vient de me reprocher. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL—L'hon. monsieur a 
                  
                  fait la remarque que nous ne changerions 
                  
                  pas la constitution et que la proposition 
                  
                  principale demandait simplement à la chambre 
                  
                  de voter une adresse à Sa Majesté. Cela 
                  est vrai à ne prendre que les paroles mêmes 
                  de la proposition, mais je demande à mes hons. 
                  auditeurs s'il est de bonne guerre d'essayer 
                  de faire croire à la chambre que cette proposition de voter en effet une adresse,
                  n'aura 
                  pas pour conséquence de changer la constitution ? Ne nous a-t-on pas dit en propres
                  
                  termes que la métropole ne ferait rien tant 
                  que le sujet en question n'aurait pas reçu 
                  l'assentiment de la législature canadienne? 
                  Je maintiens donc que la proposition principale, en dépit de sa modestie, n'est ni
                  plus ni 
                  moins qu'une proposition a l'effet de changer 
                  la constitution. La chose étant ainsi, elle 
                  mérite que nous lui donnions notre plus 
                  sérieuse attention, et qu'on nous laisse tout 
                  le temps nécessaire pour la discuter librement et à fond. Les changements dont on
                  
                  a parlé et que l'on a essayé de comparer à 
                  celui-ci n'ont aucune analogie possible, et 
                  je prétends, comme l'a fait mon hon. ami 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  ( M. SEYMOUR ), que ce dernier est en 
                  réalité une révolution ; et l'expression n'est 
                  pas trop forte. Loin d'être, ainsi qu'on l'a 
                  affirmé, un simple changement comme la 
                  reconnaissance de l'usage de la langue française dans la législature ou même comme
                  la 
                  modification plus importante du principe constitutif de cette chambre, cette proposition
                  a 
                  pour but de changer de fond en comble 
                  notre système et nos relations politiques et 
                  de révolutionner les intérêts divers de ce 
                  pays. Quelle que soit l'exactitude des assertions de mon hon. ami contre les hons.
                  membres 
                  qu'il accuse de dissimuler leur hostilité au 
                  principe de la mesure sous une guerre dirigée 
                  contre les détails, je les repousse pour ma 
                  part ; je ne veux aucunement m'abriter derrière les détails ; au contraire, mon vote
                  sur 
                  l'amendement de l'hon. député de Niagara 
                  est inspiré par les motifs les plus sincères et 
                  les plus constitutionnels. Mais cela ne veut 
                  pas dire que je m'accorde avec lui sur tous 
                  les points en litige, car je ne suis pas certain, 
                  en somme, de n'être pas plus prêt de m'entendre avec l'hon. commissaire des terres
                  de 
                  la couronne. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Je suis heureux d'entendre de telles paroles sortir de la 
                  
                  bouche de mon hon ami ; c'est pourquoi 
                  
                  j'aimerais à savoir de plus s'il est de l'opinion 
                  
                  de l'hon. député de Niagara lorsque celui-ci 
                  
                  demande un délai d'un mois ou plus ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL  —Je répondrai à cette 
                  
                  question lorsque j'en viendrai à parler de ce 
                  
                  sujet. Qu'il me soit permis d'ajouter seulement 
                  
                  que loin d'être guidé dans la conduite que je 
                  
                  tiens en ce moment par une opposition factieuse, je suis animé au contraire par tous
                  
                  
                  les sentiments de loyauté envers la couronne 
                  
                  et envers le pays, et que mon but au lieu de 
                  
                  renverser la mesure est uniquement d'en 
                  
                  assurer le succès en lui donnant des bases 
                  
                  plus larges et plus solides. Combien sont 
                  
                  différentes et variées les opinions que l'on a 
                  
                  exprimées sur notre position envisagée au 
                  
                  point de vue du vote que nous devons 
                  
                  donner sur cette proposition ! D'un côté, 
                  
                  on nous dit que comme représentants du 
                  
                  peuple, nous avons pleinement droit de voter 
                  
                  comme bon nous semblera,—de l'autre, on 
                  
                  nous démontre qu'en ne votant pas dans tel 
                  
                  ou tel sens nous ne représentons pas le 
                  
                  peuple : comment réconcilier ces deux manières de voir ? On nous dit aussi, et c'est
                  
                  
                  le seul argument quelque peu plausible  
                  
                  que j'aie entendu sur ce sujet, que si nous laissons échapper l'occasion présente
                  d'unir les 
                  
                  
                  
                  306
                  
                  
                  provinces ensemble, il nous faudra attendre 
                  
                  longtemps avant qu'il s'en présente une autre 
                  
                  semblable. J'admets que l'occasion est une 
                  
                  chose que l'on a attendu depuis longtemps, 
                  
                  une chose dont nous devons tirer tout le 
                  
                  meilleur parti, et pour ma part ce sera l'objet 
                  
                  constant de mes efforts :—mais si la mesure 
                  
                  offre véritablement tous les avantages que 
                  
                  l'on a énumérés, je ne comprends pas qu'elle 
                  
                  puisse courir de danger à être retardée un 
                  
                  peu, car plus on aura de temps d'en discuter 
                  
                  le mérite, plus le peuple, suivant toute 
                  
                  raison, pourra se convaincre de son importance. Je ne puis me faire à l'idée que le
                  
                  
                  projet sera exposé à être renversé par le seul 
                  
                  fait qu'on donnera au peuple et à ses représentants plus de temps pour en étudier
                  les principes et les détails. Depuis l'ouverture des 
                  
                  débats, la question a été grandement élucidée 
                  
                  par les explications données dans cette 
                  
                  chambre et dans l'autre, et je suis certain 
                  
                  que les hons. membres de ce conseil saisissent 
                  
                  bien mieux qu'auparavant certains détails du 
                  
                  projet. Pour moi, après y avoir songé plus 
                  
                  d'une fois, et après avoir écouté avec attention les argumements des divers orateurs,
                  j'en 
                  
                  suis arrivé à être de plus en plus convaincu 
                  
                  de la grandeur et de l'importance des intérêts 
                  
                  qui se rattachent à la question, et à croire 
                  
                  qu'il est de notre devoir de ne procéder 
                  
                  qu'avec lenteur et précaution à opérer 
                  
                  un changement aussi grand que celui 
                  
                  qu'ont voulu les auteurs des résolutions,-   un changement qui ne va à rien moins
                  qu'à 
                  
                  révolutionner, ainsi que je l'ai dit, tout notre 
                  
                  système de gouvernement. Pour réussir et 
                  
                  durer, la confédération devra d'abord être 
                  fondée sur les principes de la vérité et de la 
                  justice, et il faudra que le peuple puisse 
                  comprendre et apprécier ces principes. Malgré tout ce qu'on en a dit dans cette 
                  chambre, en dépit de toutes les assertions 
                  qui ont été faites à l'effet de prouver que le 
                  peuple était au courant de la question, je 
                  n'en persiste pas moins à croire le contraire. 
                  Je pense qu'en somme le peuple ne connaît 
                  pas les détails de la mesure. Quelles lumières nouvelles ont été jetées sur le sujet
                  
                  depuis que nous sommes assemblés ici ? 
                  N'a-t-on pas vu des membres mêmes de la 
                  conférence ignorer ce que certaines résolutions 
                  voulaient dire ? N'est-il pas avéré que l'attention publique n'a eu pour les peser
                  aucun 
                  raisonnement ni argument sérieux et tant 
                  soit peu développés contre la question ? Et 
                  cependant, il serait très essentiel que pour 
                  bien juger de la mesure le peuple prit 
                  
                  
                  
                  
                  
                  connaissance des deux côtés de la question. On 
                  
                  ne devrait, ce me semble, pas plus lui cacher 
                  
                  la noble perspective qu'avec la confédération 
                  
                  il formera partie d'un grand pays, que le 
                  
                  prix auquel il achètera un si grand avantage ; 
                  
                  et il en devrait être d'autant plus instruit 
                  
                  que le mouvement ne vient pas de lui. Tous 
                  
                  les grands changements constitutionnels 
                  
                  doivent prendre naissance et de fait prennent 
                  
                  ordinairement naissance parmi le peuple ; 
                  
                  mais c'est une anomalie, car ici on nous propose d'adopter une constitution rédigée
                  par 
                  
                  un corps qui s'est donné lui-même les pouvoirs nécessaires à cette fin,—droit que
                  je lui 
                  
                  reconnais pleinement,—et qui nous la présente 
                  
                  comme parfaite, comme un document analogue à un traité et dont nous n'avons pas le
                  
                  
                  droit de changer le moindre détail. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Mon hon. ami 
                  
                  met en doute la légitimité de nos actes ; 
                  
                  mais il me semble qu'il devrait savoir que le 
                  
                  parlement ayant sanctionné la formation 
                  
                  d'une administration dont le but et l'intention 
                  
                  expresse était de mener à bonne fin le projet 
                  
                  de confédération, le peuple a pu confirmer 
                  
                  ce qui avait été fait. Mon hon. ami est monarchiste et par conséquent il reconnait
                  qu'il y 
                  
                  a d'autres sources d'autorité que le peuple, 
                  
                  comme, par exemple, l'autorité royale, et à 
                  
                  ce sujet je prendrai la liberté de lui signaler 
                  
                  la dépêche écrite par le secrétaire d'Etat des 
                  
                  colonies. Il y trouvera entr'autres choses que 
                  
                  c'est : 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Avec la sanction de la couronne, et sur l'invitation du gouverneur-général, que
                     des délégués de 
                     
                     chaque province, choisis par les lieutenants-gouverneurs respectifs sans distinction
                     de partis, se 
                     
                     sont réunis afin de considérer des questions de la 
                     
                     plus haute importance pour tous les sujets de la 
                     
                     Reine, de quelque race et religion qu'ils soient, 
                     
                     qui résident en ces provinces, et en sont arrivés à 
                     
                     une conclusion qui doit avoir une influence des plus 
                     
                     grandes sur le bien-être futur de toute la société. " 
                     
                     
                   
               
               
               
               
               
                  Ainsi donc, c'est avec la sanction royale 
                  
                  que les délégués des autres provinces se sont 
                  
                  occupés de la question ; quant à nous, le 
                  
                  parlement nous avait autorisé à le faire 
                  
                  lorsqu'il avait donné son approbation au 
                  
                  ministère qui s'était formé avec l'intention 
                  
                  manifeste d'accomplir la confédération. 
                  
                  
                  
               
               
               L'HON. M. VIDAL—J'ai déjà déclaré 
                  d'une façon non équivoque que j'approuvais 
                  entièrement la conférence et ses travaux, 
                  c'est pourquoi je ne sais vraiment pas la 
                  raison pour laquelle mon hon. ami a cru 
                  nécessaire de donner les explications ci- 
                  dessus. J'ai toujours reconnu sans la 
                  
                  
                  
                  307
                  
                  
                  moindre idée de doute, que la conférence 
                  
                  fut constituée d'une manière légale, convenable et suivant toutes les formes, et j'ai
                  
                  
                  décerné à ses membres tous les éloges 
                  
                  possibles pour l'intelligence et le zèle qu'ils 
                  
                  ont déployés en cette occasion à la défense 
                  
                  et à la sauvegarde des intérêts du pays. 
                  
                  Mais, je le répète, je maintiens que ce mouement ne part point du peuple lequel n'a
                  
                  
                  jamais fait de requête à ce sujet,—qu'en 
                  
                  conséquence il serait de notre devoir, avant 
                  
                  d'adopter cette mesure, de connaître son 
                  
                  opinion, et que l'amendement de mon hon. 
                  
                  ami, le député de Niagara doit recevoir mon 
                  
                  appui. Je pense qu'une fois les débats 
                  
                  actuels terminés dans les deux chambres et 
                  
                  publiés au long dans les rapports officiels, le 
                  
                  peuple pourra se former une opinion assez 
                  
                  exacte des avantages de la question, car il 
                  
                  aura en sa possession à peu près tout ce qui 
                  
                  peut être dit d'un côté comme de l'autre, et 
                  
                  si en dépit de tout il est incapable de 
                  
                  donner un bon jugement ce sera sa propre 
                  
                  faute. Si l'on ne se propose pas de consulter 
                  
                  le peuple, à quoi bon, je le demande, pour 
                  
                  cette hon. chambre de s'imposer une aussi 
                  
                  grande dépense—plus de $2,000—pour faire 
                  
                  tirer à un si grand nombre d'exemplaires 
                  
                  des rapports des débats ?—Si l'on veut faire 
                  
                  passer la mesure sans attendre l'expression des 
                  
                  sentiments populaires, pourquoi soumettre au 
                  
                  public des discours et des discussions qui 
                  
                  ne feront que l'agiter sans résultats ? J'irai 
                  
                  plus loin, et je dirai que non seulement le 
                  
                  projet n'a pas pris sa source dans la volonté 
                  
                  du peuple, mais qu'il a été conçu et rédigé 
                  
                  sans même la participation de ses représentants. Je ne croirais pas nécessaire d'en
                  
                  
                  appeler au peuple si ces résolutions étant 
                  
                  l'œuvre de notre propre gouvernement, nous 
                  
                  étaient proposées à l'instar de ses autres 
                  
                  mesures, et si elles étaient discutées et 
                  
                  votées à l'ordinaire, bien que néanmoins je 
                  
                  considère la chose désirable :—mais je mets 
                  
                  en fait que les députés du peuple n'ont pas 
                  
                  été consultés et qu'il ne leur a été laissé 
                  
                  aucun moyen de modifier les résolutions en 
                  
                  quoique ce soit ou d'influencer la législature 
                  
                  impériale sur l'union projetée. Mes hons. 
                  
                  auditeurs, j'en suis sûr, conviendront avec moi 
                  
                  que si après tout ce qui a été dit, le pays 
                  
                  s'opposait au changement proposé, si le 
                  
                  peuple en général venait à être persuadé 
                  
                  qu'on le lui fait payer trop cher, et que les 
                  
                  sacrifices qu'on exige de lui pour lui procurer les avantages de la mesure sont trop
                  
                  
                  considérables, il faudrait la mettre de côté. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  ( Ecoutez !) Est-ce qu'en vérité il y aurait 
                  
                  danger d'en appeler au pays ? Mais le danger 
                  serait bien plus à craindre si on impose au 
                  pays une mesure qu'il pourrait bien ne pas 
                  approuver. ( Ecoutez !) Non, hons. messieurs, 
                  il n'existe aucun danger à soumettre le projet 
                  au peuple, parce que la grande majorité, 
                  ainsi n'on l'a affirmé tant de fois, lui est 
                  favorable. Il est probable que si, dans l'appel 
                  au peuple, j'apercevais imminence de péril 
                  pour la question, je n'insisterais pas aussi 
                  fortement sur ce point ( écoutez ! et rires ) ;-   mais, comme je suis d'opinion que
                  le changement est demandé par le pays en général, 
                  je crois qu'il n'y a aucun risque de lui soumettre la question. Que deviennent dès
                  ce 
                  moment les dangers de ce délai auquel on 
                  tient tant ? Une chose qui m'a surtout frappé 
                  dans l'éloquent discours de l'hon. commissaire 
                  des terres de la couronne, c'est qu'il n'a pas 
                  discuté le fond même de l'amendement. ll 
                  a bien dit, il est vrai, qu'un délai serait 
                  très préjudiciable et que nous nous exposions à perdre la mesure en temporisant, 
                  mais comment l'a-t-il prouvé ? Moi, au contraire, je suis d'avis que le délai est
                  le salut 
                  du projet, parce qu'il mettra le pays et la 
                  législature en état de voir au fond de la 
                  question, d'en peser tous les avantages ou 
                  désavantages ( en supposant qu'elle en ait ) 
                  et de l'adopter certainement si le projet est 
                  bon ou de le rejeter s'il est mauvais. Quant 
                  à la manière de consulter le peuple en cette 
                  circonstance, j'avoue qu'on peut différer 
                  d'opinion. Qu'on ne croie pas me faire 
                  changer d'avis en me reprochant d'être républicain, car les plaisanteries ou les railleries
                  
                  ne m'arrêtent pas lorsque j'ai de bonnes 
                  raisons pour appuyer ma conduite. De 
                  quelles railleries n'ai-je pas été l'objet à 
                  cause de mon adhésion à la cause de la 
                  tempérance ; m'ont-elles fait changer d'avis? 
                  Je crois que l'on peut faire prononcer le 
                  peuple sur la question sans que le délai 
                  mette le projet en danger. En supposant 
                  que les débats se prolongent encore une 
                  semaine ou deux dans les deux chambres, et 
                  que les rapports officiels soient terminés peu 
                  de temps après, il serait facile de prendre le 
                  vote populaire directement et cela en toute 
                  convenance et sûreté. Cette proposition de 
                  faire voter directement une mesure au peuple 
                  peut, de prime abord, sembler contre les coutumes anglaises, et nous répugner même
                  ;mais ce ne sont pas les préjugés qui doivent 
                  ici nous guider mais bien la raison et la 
                  réflexion, et si nous pouvons trouver un 
                  
                  
                  
                  
                  
                  308
                  
                  
                  moyen de nous assurer correctement et 
                  
                  fidèlement de la volonté populaire, adoptons 
                  
                  ce moyen peu importe son nom. Suivant 
                  
                  moi, la meilleure manière de le faire, serait de 
                  
                  poser directement la question aux électeurs : 
                  
                  —" Voici la mesure ; l'approuvez-vous, oui 
                  
                  ou non ?—Ce n'est pas de discuter les amendements que nous devons leur demander, et
                  
                  
                  d'ailleurs comment réunir toutes les populations des provinces ensemble ? Comment
                  
                  
                  empêcher la confusion d'une telle discussion ? Voilà, comment la chose doit être 
                  
                  proposée au peuple, un oui ou un non et 
                  
                  rien de plus. 
                  
                  
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—Comment ! vous refuseriez au peuple le pouvoir de modifier les 
                  
                  détails ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL—Oui, car c'est ainsi 
                  
                  qu'on en a agi avec cette chambre, et si l'on 
                  
                  a tort pour le peuple il en est d'autres qui 
                  
                  ont eu les premiers ce tort avec la chambre. 
                  
                  ( Ecoutez !) Un autre motif qui me porte 
                  
                  à être en faveur de ce mode, c'est mon vif 
                  désir de ne pas m'exposer au mécontentement de la chambre d'assemblée, dont les 
                  députés pourraient nous adresser les reproches suivants, dans le cas où nous demanderions
                  une dissolution des chambres et de 
                  nouvelles élections sur ce sujet : " Ce que 
                  vous demandez est très-bien, nous le supposons ; mais ne gardez-vous pas vos siéges
                  et 
                  vos mandats pendant que vous nous renvoyez 
                  devant nos électeurs ? " Et puis, je ne vois 
                  pas pourquoi nous n'attendrions pas aux 
                  prochaines élections générales, c'est-à-dire, 
                  dans deux ans d'ici, alors que le peuple 
                  aura eu tout le temps possible de la réflexion 
                  et de la discussion pour former son opinion, 
                  sans compter que ce serait là le mode 
                  constitutionnel par excellence. Cependant, 
                  comme les ministres nous disent que nous 
                  ne pouvons attendre, alors ayons un vote 
                  direct du peuple sur le sujet., plutôt que de 
                  hâter les élections générales. Je préférerais 
                  ce moyen à une élection générale, parce que 
                  dans celle-ci, d'autres influences sont en jeu 
                  qui prennent leur source dans des motifs de 
                  politique de parti. Qui ne sait, qu'en plusieurs endroits, la considération personnelle
                  
                  du candidat l'emporte sur le penchant de 
                  l'opinion des électeurs, que dans d'autres 
                  une bourse bien garnie remportera la victoire, et qu'ailleurs ce seront les préjuges
                  
                  de localité qui domineront toutes les autres 
                  questions ? Avec le moyen que je propose, 
                  c'est-à-dire en appelant le peuple à se prononcer directement sur la mesure, rien
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  de tel ne se produira, et les électeurs 
                  
                  n'auront que leur patriotisme pour inspirer 
                  
                  leur conduite. La chambre représentant le 
                  
                  peuple constitutionnellement, on ne saurait 
                  
                  trouver mauvais qu'après les élections générales elle décide la question ; néanmoins,
                  le 
                  
                  but à atteindre, c'est-à-dire, la constatation 
                  
                  de la volonté populaire se réaliserait beaucoup plus vite et à beaucoup moins de frais
                  
                  
                  par un vote direct. A quoi sert d'appeler 
                  
                  ce procédé 
yankee ou 
républicain ? N'a-t-il 
                  
                  pas été employé par Rome ancienne ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL —Ou bien, si vous le 
                  
                  voulez, impérial, car on y a eu recours en 
                  
                  France et au Mexique. On pourrait également y avoir recours ici avec l'assurance 
                  
                  que le vote serait ce qu'il doit être, car dans 
                  
                  quel but pourrait-on intervenir dans la 
                  
                  décision populaire, ou obtenir un vote qui ne 
                  
                  serait pas l'expression fidèle des volontés du 
                  
                  peuple ? ll nous serait facile de nous assurer 
                  
                  de l'opinion de tout le pays dans un court 
                  
                  espace de temps, plus qu'un mois peut-être, 
                  
                  mais encore assez tôt pour nous permettre 
                  
                  d'adopter la mesure dans le cours de cette 
                  
                  année. La législature du Nouveau-Brunswick ne devant pas se réunir sous peu, il 
                  
                  s'écoulera par conséquent du temps avant 
                  
                  qu'on y vote le projet ;—mais en supposant 
                  
                  que la chose se fasse plus vite, la mesure 
                  
                  devra être envoyée en Angleterre pour y 
                  
                  être soumise aux autorités impériales et en 
                  
                  attendre une décision finale. Or, le parlement anglais est assemblé en ce moment et
                  
                  
                  devra, suivant son ordinaire, rester en session cinq ou six mois : on voit donc que
                  
                  
                  nous avons tout le temps nécessaire de 
                  
                  prendre le vote du pays. En vérité, j'aimerais qu'on me donnât quelque bonne raison
                  
                  
                  pour me convaincre qu'il y a danger et 
                  
                  attendre, à part celle que l'on a hasardée au 
                  
                  sujet des éventualités qui pourraient bien 
                  
                  se produire en cas de guerre et que je ne crois 
                  
                  aucunement valable. Car combien de temps 
                  
                  s'écoulera-t-il une fois ces résolutions adoptées avant qu'elles ne recoivent leur
                  entière 
                  
                  exécution ? Douze mois, je crois : eh ! bien, 
                  
                  si nous pouvons attendre ces douze mois, qui 
                  
                  nous empêche d'attendre vingt-quatre mois 
                  
                  sans plus de danger ? Quelle force cette 
                  
                  mesure va-t-elle nous apporter sur le champ ? 
                  
                  La confédération va-t-elle nous donner un 
                  
                  soldat de plus, va-t-elle nous donner plus de 
                  
                  ressources financières, moins de frontières à 
                  
                  
                  
                  
                  309
                  
                  
                  défendre et plus de puissance militaire ? 
                  
                  Mais on a dit que les provinces se trouvant 
                  
                  placées sous un seul gouvernement, toutes 
                  
                  les armées de l'Amérique anglaise obéiraient 
                  
                  à un même chef en cas de guerre. C'est 
                  
                  là le seul argument qui puisse s'appliquer 
                  
                  à cette face de la question :—mais peut- 
                  
                  on entretenir un seul moment l'idée que, 
                  
                  dans le cas où l'étranger envahirait le 
                  
                  Canada, le Nouveau-Brunswick ou la Nouvelle-Ecosse toute l'Angleterre ne frémirait
                  
                  
                  pas d'indignation et n'enverrait pas ses 
                  
                  armées à notre secours, soit que nous 
                  
                  gardions notre situation actuelle, soit que 
                  
                  nous nous unissions ? Je crois donc que 
                  
                  ces appréhensions sont futiles comme argument contre l'appel au peuple. ( Ecoutez
                  !) 
                  
                  Un hon conseiller a prétendu que la défense 
                  du pays ne fera aucun progrès tant que la 
                  confédération ne sera pas accomplie. Je ne 
                  sais d'où part ce renseignement et s'il est 
                  officiel ou non ; mais il n'en est pas moins 
                  une annonce foudroyante. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL—Je ne puis croire 
                  
                  et ne crois pas que le gouvernement anglais 
                  
                  nous laissera sans protection et sans défense, 
                  
                  même en supposant que la confédération ne 
                  
                  soit pas adoptée. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Mais nous 
                  
                  pouvons fort bien présumer que le résultat 
                  
                  de nos délibérations sur le projet de confédération affectera plus ou moins les préparatifs
                  de défense que la métropole pourrait 
                  faire en ce pays, et que notre état de défense 
                  de même que nos dispositions à agir auront 
                  tout également leur influence sur les actes 
                  des autorités impériales. 
                  
                  
 
               
               
               L'HON. M. VIDAL—Cela peut être en 
                  définitive, mais je parle d'évènements actuels, 
                  et je suis sûr que le gouvernement de Sa 
                  Majesté nous enverrait aujourd'hui tout le 
                  secours dont nous pourrions avoir besoin. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON M. MACPHERSON —S'il est un 
                  
                  fait évident pour tout hon membre c'est le 
                  
                  manque de progrès de nos défenses. Cette 
                  
                  question semble attendre la solution de 
                  
                  celle de la confédération, car rien ne se 
                  fait. 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
 
               
               
               L'HON. M. VIDAL—En effet, telle est 
                  l'apparence des choses ; mais ce que je ne puis 
                  concevoir, malgré les assertions contraires, 
                  c'est que tout ce qui contribuera à notre 
                  défense sous la confédération ne puisse pas 
                  tout aussi bien nous être utile aujourd'hui. 
                  ( Ecoutez ! écoutez !) L'hon. commissaire des 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  terres de la couronne, en répondant à l'hon. 
                  
                  député de Niagara, a dit que les résolutions 
                  
                  présentes n'avaient aucunement pris le pays 
                  
                  par surprise : je pense le contraire. Il est 
                  
                  bien vrai que ce qui regarde le principe 
                  
                  même du projet n'affirme rien de nouveau 
                  
                  pour le peuple, mais c'est la plupart des détails qui ont pris le monde par surprise.
                  
                  
                  Jamais auparavant on avait songé à la nature 
                  
                  et au caractère des changements proposés. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL—En effet, elle peut 
                  
                  l'être, et elle l'a été pour plusieurs. Ce fut 
                  
                  une surprise agréable de voir des hommes 
                  
                  de toutes les provinces et appartenant à des 
                  
                  partis politiques opposés se réunir et au 
                  
                  moyen de concessions mutuelles élaborer en 
                  
                  commun un projet comme celui qui nous est 
                  
                  soumis en ce moment. ( Ecoutez ! écoutez !) 
                  
                  On a fait ce qui devait être, et l'on se trompe 
                  
                  grandement lorsqu'on me donne comme 
                  
                  opposé à la confédération. Mais c'est aussi 
                  
                  parce que j'en apprécie tous les avantages et 
                  
                  que je veux empêcher le mal qui pourrait 
                  
                  résulter de son adoption trop prématurée 
                  
                  que je parle en ce moment comme je le fais. 
                  
                  ( Ecoutez ! écoutez !) On a prétendu que l'on 
                  
                  n'en avait pas appelé au peuple lors de 
                  
                  l'union de l'Angletere et de l'Ecosse, et de la 
                  
                  Grande-Bretagne et de l'Irlande :—c'est- 
                  
                  vrai ; mais il est également hors de doute 
                  
                  que ces deux mesures furent votées par les 
                  
                  parlements de ces divers pays et que les 
                  
                  députés qui concoururent à ces résultats 
                  
                  représentaient les populations intéressées. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—C'est précisément ce 
                  
                  qui arrive en ce moment pour nous. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL—Je demande pardon 
                  
                  à mon hon. interrupteur de le contredire ; 
                  
                  qu'il me montre une seule partie du 
                  
                  projet actuel qui émane du parlement. 
                  
                  Est-ce qu'on ne nous dit pas au contraire 
                  
                  que si ce dernier vote un seul amendement 
                  
                  aux résolutions c'en est fait de la mesure ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—La conduite tenue 
                  
                  ici a été exactement la même que celle de 
                  
                  l'Angleterre : les négociations ont d'abord 
                  
                  eu lieu, ensuite est venue la sanction du 
                  
                  parlement. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON M. FERGUSSON BLAIR -   Les unions de l'Angleterre et de l'Ecosse et 
                  
                  de l'Angleterre et de l'Irlande ne furent 
                  
                  pas de simples négociations, mais plutôt des 
                  
                  traités. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—Oui, mais ils furent 
                  
                  d'abord négociés, puis soumis au parlement. 
                  
                  
 
               
               310
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL—Comme je n'ai pas 
                  
                  l'intention de porter davantage la parole dans 
                  
                  le cours de la discussion, je parlerai d'une 
                  
                  question qui ne se trouve pas liée précisement à l'amendement actuel, mais sur 
                  
                  laquelle j'ai déjà dit quelque chose dans une 
                  
                  occasion precédente. Nous avons entendu 
                  
                  discourir longuement de la nouvelle constitution du conseil législatif ; et l'on a
                  prétendu entr'autres choses que ce furent d'abord 
                  
                  des nécessités politiques qui imposèrent le 
                  
                  système électif à des hommes qui n'en 
                  
                  étaient aucunement épris. Je crois qu'on a 
                  
                  établi ce fait d'une manière satisfaisante. 
                  
                  Il me conviendrait peu à moi, député élu, de 
                  
                  m'étendre sur le mérite ou l'excellence du 
                  
                  principe électif appliqué à la constitution 
                  
                  de cette branche de la législature ; et de 
                  
                  fait personne de nous, hons. messieurs, ne 
                  
                  saurait toucher à la question avec la même 
                  
                  indépendance d'esprit que si nous n'étions 
                  
                  pas conseillers élus. Cependant, j'attirerai 
                  l'attention de cette chambre sur le fait que 
                  pas un des maux que l'on redoutait de l'application du nouveau système ne s'est encore
                  
                  produit, et je ne crois pas du tout raisonnable et encore bien moins nécessaire d'en
                  
                  attendre de l'avenir. D'accord avec ceux 
                  qui protestèrent contre ce système lorsqu'il 
                  fut introduit, je ne le considérai pas alors 
                  comme un progrès et je pense encore de 
                  même. Je n'ai aucune prédilection pour 
                  un conseil législatif élu et je lui préférerais 
                  un conseil nommé par la couronne : mais je 
                  me rappelle que je ne suis pas ici pour faire 
                  triompher mes vues ou mes goûts personnels, 
                  mais pour défendre les droits et priviléges 
                  de mes électeurs ; et je rappellerai à mes 
                  hons auditeurs qu'il y a une grande différence entre accorder et enlever un privilége.
                  
                  ( Ecoutez ! écoutez !) On peut octroyer un 
                  privilége au peuple sans qu'il le demande, mais 
                  il est dangereux de le lui ôter contre son consentement ou même lorsqu'on n'y est
                  pas invité. ( Ecoutez ! écoutez !) Je ne trouve pas 
                  que le gouvernement canadien ait fait quoique 
                  ce soit pour maintenir le principe électif, et 
                  je ne vois rien qui me porte à croire que le 
                  principe contraire lui ait été imposé par les 
                  provinces d'en-bas. Quelques-unes des provinces maritimes ont peut-être désiré maintenir
                  la constitution de leur conseil législatif, 
                  mais le changement de la nôtre a rencontré 
                  assurément les vœux des membres du ministère, car rien ne fait voir qu'ils aient tenté
                  
                  le moindre effort pour conserver au peuple 
                  de ce pays le privilège dont il jouit aujourd'hui de choisir les membres de cette
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  chambre. ( Ecoutez !) Il y a encore dans le 
                  
                  projet certains autres détails repréhensibles 
                  
                  et dont le gouvernement canadien est responsable, et en m'exprimant ainsi je ne le
                  fais 
                  
                  pas comme son adversaire mais bien comme 
                  
                  son ami le plus sincère et le meilleur, comme 
                  
                  quelqu'un qui désire l'empêcher de commettre des erreurs. Ce n'est donc pas comme
                  
                  
                  adversaire de la confédération ou du ministère que je soutiens l'amendement de l'hon.
                  
                  
                  député de Niagara. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. ROSS—Mais cet amendement 
                  
                  est, je crois, un vote de non confiance? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L' HON. M. VIDAL—C'est en effet ce que 
                  
                  l'on a prétendu, mais rien n'établit qu'il en 
                  
                  soit ainsi ; cette déclaration est arbitraire. 
                  
                  Pour ma part, je ne puis accepter d'être 
                  
                  placé dans une telle alternative. Il est bien 
                  
                  vrai que le gouvernement peut dire :—" Vous 
                  
                  cesser de nous supporter si vous votez de 
                  
                  cette façon. "—Mais, de mon côté, je ne 
                  
                  puis faire le sacrifice de mes convictions pour 
                  
                  rester son ami. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. CAMPBELL—Mon hon. ami 
                  
                  voit bien que si tous nos amis en agissaient 
                  
                  ainsi il nous serait impossible de faire passer 
                  
                  n'importe quelle mesure. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. VIDAL—En limitant à cette 
                  
                  chambre la première nomination des conseillers législatifs, la conférence a enfreint
                  la 
                  
                  prérogative de la couronne et outrepassé ses 
                  
                  droits. Loin de moi de vouloir pour un 
                  
                  moment supposer aux délégués canadiens 
                  
                  seuls responsables du fait, des motifs bas ou 
                  
                  intéressés, et de croire qu'ils n'en ont agi ainsi 
                  
                  qu'afin de rallier à leur projet des votes de 
                  
                  cette chambre qu'ils n'auraient pas eus autrement : je ne puis cependant pas m'empêcher
                  
                  
                  d'ajouter que cette partie du projet me 
                  
                  paraît louche, et que plusieurs peuvent dire 
                  
                  comme l'hon. député de Wellington, ( M. 
                  
                  SANBORN ), que si ce n'est pas de la corruption cela lui ressemble beaucoup . Telle
                  n'est 
                  
                  pas néanmoins ma manière de voir. Je 
                  
                  pense qu'on a voulu par ce moyen rendre le 
                  
                  changement de système plus acceptable au 
                  
                  peuple en choisissant parmi ses représentants 
                  
                  dans cette chambre un certain nombre des 
                  
                  nouveaux membres du futur conseil législatif. (Ecoutez! écoutez !) Quant à la prétendue
                  impartialité de la 14e résolution, 
                  
                  j'avoue que je n'attache aucune importance 
                  
                  à ses dispositions ; car je crois que s'il n'était 
                  
                  pas compris que le choix sera fait en la 
                  
                  manière y désignée, rien n'empêcherait la 
                  
                  mesure d'être attaquée par une forte opposition de parti,—et c'est cela qu'on doit
                  
                  
                  éviter. ( Ecoutez !) Il me reste encore une 
                  
                  
                  
                  311
                  
                  
                  question à traiter se rapportant à ce détail 
                  
                  du projet et que je crois très-importante, 
                  
                  c'est celle de la déchéance du mandat de 
                  
                  vingt-un membres de cette chambre. Sans 
                  
                  doute, personne ne sait qui demeurera et 
                  
                  qui partira. 
                  
                  
                  
 
               
               
               UNE VOIX—Il faudra les tirer au sort. 
                  
                  
               
               
               L'HON. M. VIDAL—Je ne parle pas du 
                  mode par lequel on déterminera ce choix. 
                  ( Ecoutez !) Il y a parmi nous vingt-un conseillers à qui l'on devra dire de rester
                  chez eux ; 
                  —les prendra-t-on parmi ceux qui tiennent leur 
                  mandat de la couronne ou parmi les députés 
                  du peuple ? Ce ne serait que juste, suivant 
                  moi, que ceux qui ont été nommés par la 
                  couronne fissent les premiers partie de la 
                  nouvelle chambre :—l'élimination ne devra 
                  dès lors porter que sur les membres élus, 
                  dont près de la moitié se trouvera retranchée. 
                  Or, n'est-ce pas placer les membres de cette 
                  chambre dans une position très-anomale que 
                  de les obliger à voter sur une telle mesure? 
                  Il eut été, suivant moi, bien plus sage et 
                  assurément plus conforme aux sentiments de 
                  cette chambre de faire voter d'abord les résolutions dans l'assemblée législative
                  ; du 
                  moment que cette clause eut été acceptée par 
                  une chambre qui représente plus particulièrement le peuple, il est certain que nous
                  
                  aurions bien moins hésité à la passer. Mais 
                  comme le contraire à été fait, je considère 
                  de mon devoir envers ceux que je représente 
                  d'élever la voix contre cette partie du projet ; 
                  je n'ai pas le droit de concourir à les dépouiller d'un privilége quand même mon 
                  vote devrait m'assurer ma nomination à vie, 
                  car je trahirais les intérêts qui m'ont été 
                  confiés. Je suis même convaincu que mon 
                  hon. ami de Saugeen qui vient d'être envoyé 
                  ici pour représenter cette division, admettra 
                  qu'un grand nombre de ses électeurs voteraient dans la négative s'ils savaient que
                  le 
                  projet de confédération actuel doit les forcer 
                  à faire le sacrifice de leur député. ( Ecoutez ! et rires. ) 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. MACPHERSON—Je pense 
                  
                  au contraire qu'une grande majorité d'entr'eux voteraient dans l'affirmative. ( Rires.
                  ) 
                  
                  
                  
 
               
               
               L'HON. M. VIDAL—Je diffère d'opinion 
                  avec mon hon. ami sur ce point. ( Ecoutez !) 
                  Hons. messieurs, j'ai avancé que j'étais favorable au projet d'union et  je l'affirme
                  encore, 
                  quoique l'hon. commissaire des terres de la 
                  couronne ait dit qu'il n'en pouvait être ainsi 
                  et qu'en votant l'amendement on donnait le 
                  coup de mort au projet lui-même. Je ne suis 
                  pas de cet avis et je pense que ma conduite 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  au contraire est de nature à contribuer 
                  beaucoup au succès de la confédération. Je 
                  me regarde comme l'un de ses plus fidèles 
                  partisans puisque je cherche à l'affermir sur 
                  des bases solides, sur l'approbation du peuple, 
                  et cela au prix d'un délai insignifiant. Il a 
                  été dit beaucoup de choses inutiles pour 
                  servir de préface à la mesure, et on nous a 
                  fait des amplifications interminables sur les 
                  difficultés de parti qui se rapportaient à la 
                  question. En vérité, de si minces circonstances ne peuvent avoir amené la nécessité
                  
                  d'un aussi grand changement constitutionnel. 
                  Le peuple, pas plus que le représentant de Sa 
                  Majesté, ne pourra croire que ces difficultés 
                  provenaient de la source que lui ont assignée 
                  quelques uns de nos hommes politiques. Car, 
                  quelles sont les paroles de Son Excellence 
                  dans un mémorandum communiqué à cette 
                  chambre par le conseil exécutif, le 30 juin 
                  dernier ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Il n'a été soulevé en parlement durant l'existence des divers cabinets qui se sont
                     succédé 
                     
                     depuis les élections de 1861, aucune question de 
                     
                     principes qui ait pu empêcher les hommes politiques 
                     
                     d'agir de concert pour le bien public. Le temps 
                     
                     est venu de faire appel au patriotisme des deux 
                     
                     côtés de la chambre pour faire cesser-  
                     
                   
               
               
               
               quoi ? leur conduite de partisans ? leurs 
                  luttes politiques ? non-  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  " leurs dissidences particulières, et s'unir dans un 
                     
                     effort réciproque pour procurer l'avancement et le 
                     
                     bien-être du pays." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Un peu plus loin, Son Excellence revient 
                  
                  encore sur " l'absence de questions politiques qui pourraient les diviser, " et 
                  
                  ajoute clairement qu' " un tel état de 
                  
                  choses ne pouvait qu'être préjudiciable 
                  
                  aux meilleurs intérêts de la province." 
                  
                  Ainsi que je l'ai dit, le peuple était en voie 
                  
                  d'arriver bientôt à la même conclusion et 
                  
                  d'y remédier dans ses élections sans avoir 
                  
                  besoin pour cela de changements constitutionnels. Telles étaient donc les vues que
                  
                  
                  Son Excellence a communiquées à son 
                  
                  conseil dans un mémorandum, et je me réjouis 
                  
                  de les lui voir énoncer. Dans le cas où pareille 
                  
                  opinion eût été partagée par le public, je 
                  
                  n'hésite pas à dire que les maux dont nous 
                  
                  souffrions eussent pu être guéris radicalement 
                  
                  sans avoir besoin de recourir à la confédération. Déjà le peuple commençait à s'apercevoir
                  que les animosités personnelles inspiraient 
                  
                  la conduite de ses chefs, qu'on n'accordait 
                  
                  plus autant d'importance à l'inégalité de la 
                  
                  représentation, que personne même, amis ou 
                  
                  ennemis, n'en parlait plus, et, cependant, la 
                  
                  
                  
                  
                  312
                  
                  
                  question de la représentation des deux parties 
                  
                  de la province suffisait, suivant moi, à l'introduction d'un pareil changement, et
                  à produire 
                  
                  un rapprochement entre des hommes d'état 
                  
                  pour tâcher de trouver une solution. Je 
                  
                  suis d'opinion que le projet actuel est peut- 
                  
                  être le meilleur sur lequel on puisse s'entendre, 
                  
                  aussi, suis-je prêt à en attribuer et reconnaître 
                  
                  tout le mérite à ses auteurs. Je suis satisfait 
                  
                  des neuf-dixièmes et plus peut-être du plan, 
                  
                  et je suis prêt à passer sur les quelques 
                  
                  défauts que j'y trouve pour le voir adopter 
                  
                  en entier. Je crois que le nom seul et le 
                  
                  prestige de cette grande mesure auront une 
                  
                  influence salutaire sur notre avenir, qu'ils 
                  
                  nous inspireront la fierté propre aux grandes 
                  
                  nations et ce patriotisme qu'il est si nécessaire d'avoir. ( Ecoutez !) L'union fédérale
                  
                  
                  raffermira notre crédit et c'est là un résultat 
                  
                  qui vaut la peine d'être obtenu même au prix de 
                  
                  quelques sacrifices. Je crois en outre que 
                  
                  lorsque la mesure sera complétée, elle aura 
                  
                  pour effet d'attirer ici l'émigration et d'accroître ainsi notre population. A l'heure
                  qu'il est, 
                  
                  nous ne réussions guère à attirer l'immigration de ce côté ou ne savons pas la retenir,
                  tandis 
                  
                  que si nous étions connus à l'étranger comme 
                  
                  étant un grand pays, nous offririons une carrière à cette partie entreprenante et
                  industrielle de la population qui constitue la force et 
                  
                  la richesse d'un état. L'union activera, en 
                  
                  outre, notre commerce et développera nos 
                  
                  ressources et notre industrie. Il est bien de 
                  
                  rappeler toutes ces considérations ; sans en 
                  
                  attendre tous les avantages que prophétisent 
                  
                  les avocats les plus enthousiastes de la confédération, elles n'en sont pas moins
                  dignes 
                  
                  de toute notre attention. ( Ecoutez !) Quant 
                  
                  à dire que les dépenses du gouvernement 
                  
                  sous le nouveau régime seront moins fortes, 
                  
                  je crois qu'on avance une fausseté, et que ce 
                  
                  sera une source de désappointement pour le 
                  
                  public s'il s'en aperçoit trop tard. Le 
                  
                  bon moyen et le seul rationnel eut été de 
                  
                  faire connaître les faits, d'avouer qu'au lieu 
                  
                  de diminuer sous la confédération les 
                  
                  dépenses du gouvernement seront plus fortes; 
                  
                  qu'à cela il faudra ajouter le coût des 
                  
                  travaux de défense qui doivent être construits, du chemin de fer intercolonial qui
                  
                  
                  forme partie du projet, et des autres améliorations sur les canaux dont on ne cesse
                  de 
                  
                  parler. La confédération sera dispendieuse 
                  
                  sans aucun doute : pourquoi ne pas l'avouer? 
                  
                  Pourquoi ne pas dire au peuple: " Voici de 
                  
                  grands avantages, mais ils devront nécessairement nous coûter beaucoup ! " Pour ma
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  part, je suis prêt à payer ces avantages au 
                  
                  prix qu'on en demande. Je ne me suis pas 
                  
                  attaché à analyser tous les chiffres dont 
                  
                  l'hon. député de Niagara a émaillé son 
                  
                  discours ; car la profusion et la confusion en 
                  
                  matière de chiffres dans un discours me 
                  
                  font absolument le même effet : je ne le 
                  
                  suivrai donc point sur ce terrain. Ma confiance dans les talents et la capacité financière
                  
                  
                  des hommes chargés de surveiller nos intérêts est telle que je n'accepte qu'avec beaucoup
                  de précaution les objections sous 
                  
                  forme de chiffres qu'on soulève contre la 
                  
                  mesure. Un des hons. orateurs qui m'ont 
                  
                  précédé, a remarqué que le doigt de Dieu 
                  
                  était visible dans le concours des éléments 
                  
                  contraires qui se sont réunis pour l'élaboration de ce projet : je le crois car j'aime
                  à 
                  
                  reconnaître l'action d'en Haut sur la vie des 
                  
                  individus comme des nations : je me réjouis 
                  
                  de voir tous les jours cette chambre demander 
                  
                  à Dieu de bénir ses délibérations et j'ai 
                  
                  foi qu'elles le sont. J'aurais la même 
                  
                  consolation si je voyais la question soumise 
                  
                  au peuple, car l'argument qui veut que 
                  
                  nous fassions connaître de suite notre 
                  
                  décision n'aguère de valeur, et ne nous 
                  
                  impose certainement pas l'obligation de 
                  
                  voter à la hâte le projet tel qu'il est. 
                  
                  ( Ecoutez !) J'ai essayé, hons. messieurs, 
                  
                  de vous montrer que je ne m'étais inspiré 
                  
                  que du désir le plus sincère de favoriser 
                  
                  les intérêts de ce pays dans la conduite que 
                  
                  j'ai cru devoir tenir au sujet de cet amendement, et je me suis efforcé de désabuser
                  ceux 
                  
                  qui pensent qu'en agissant ainsi je me suis 
                  
                  laissé influencer par mon opposition à un 
                  
                  projet qu'au contraire je crois avantageux 
                  
                  au pays, mais dont je voudrais voir précisément les avantages confirmés par la sanction
                  
                  
                  populaire. Je pense probable, et peut-être 
                  
                  est-ce une certitude, que c'est la dernière 
                  
                  année que je siège comme député du peuple 
                  
                  dans les conseils de mon pays: mais je ne 
                  
                  veux pas que ma carrière, quelque courte 
                  
                  qu'elle ait été, soit souillée de la moindre 
                  
                  tache d'égoïsme, et c'est pourquoi je ne consentirai jamais à donner un vote qui pourrait
                  
                  
                  bien me faire nommer conseiller à vie, mais 
                  
                  qui en même temps dépouillerait ceux qui 
                  
                  m'ont élu du privilége d'avoir un représentant dans le conseil législatif. ( Applaudissements
                  !) 
                  
                  
               
               
               
               
                  L'HON. M. BUREAU—Je n'ai pas l'intention de prendre part aux débats sur 
                  
                  l'amendement qui occupe maintenant cette 
                  
                  hon. chambre. Mais en vérité je ne serais 
                  
                  
                  
                  
                  313
                  
                  
                  pas justifiable de passer sous silence la 
                  
                  déclaration que vient de nous faire l'hon. 
                  
                  membre pour Toronto (M. ROSS ). Il nous a dit 
                  
                  tout naïvement que si le ministère soumettait 
                  
                  un bill concernant l'organisation des gouvernements locaux, que ce serait mal, car,
                  dit-il, il 
                  
                  est probable qu'il surgira des difficultés à ce 
                  
                  sujet qui pourraient entraîner la résignation 
                  
                  de plusieurs membres du cabinet actuel. 
                  
                  L'hon. membre pour Toronto, dans ces quelques paroles, a donné le meilleur argument
                  
                  
                  pour justifier le délai que nous demandons; 
                  
                  mais ce n'était pas son intention. Dans un 
                  
                  autre sens, quelques autres hon. députés 
                  
                  ont été, dans mon opinion, d'une force et 
                  
                  d'une logique vraiment remarquables. Mais 
                  
                  est-il possible de faire une demande plus 
                  
                  essentiellement légitime que celle de l'hon. 
                  
                  député de Niagara ? Pour ma part, je ne le 
                  
                  crois pas. En effet, quoi de plus raisonnable 
                  
                  que le désir de connaître et de pouvoir juger 
                  
                  sainemement, entièrement et avec satisfaction pour soi et ses commettants, du plan
                  
                  
                  qu'on nous propose ? Cette chambre n'a-t-elle 
                  
                  pas le droit d'exiger du gouvernement actuel 
                  
                  qu'il lui soumette dans un délai raisonnable, 
                  
                  non seulement d'une manière générale, mais 
                  
                  surtout d'une manière détaillée, les différents 
                  
                  aspects de la constitution qu'on veut lui faire 
                  
                  voter avec une precipitation si imprudente 
                  
                  et si étrange ? Rappelons-nous qu'on ne 
                  
                  fait aucune difficulté quelquefois de donner 
                  
                  une session entière à la considération d'une 
                  
                  mesure secondaire : ainsi, l'année dernière, 
                  
                  on n'a pas essayer de passer un nouveau bill 
                  de milice à la vapeur comme on veut le faire 
                  aujourd'hui pour la mesure de la confédération ;  
                  
                  au contraire, on a pris le temps nécessaire 
                  
                  pour le mûrir et l'examiner sous toutes ses 
                  
                  faces. Cependant, quelle immense différence   
                  
                  existe entre ces deux mesures, sous le rapport 
                  
                  
                  de l'importance et des conséquences solennelles qu'elles sont susceptibles d'entraîner?
                  
                  
                  Et puis, il n'y a pas à le nier, le plan que 
                  l'on veut nous faire adopter n'est encore 
                  
                  qu'imparfaitement connu de la législature 
                  
                  canadienne, et le peuple en connait à peine  
                  
                  le premier mot, n'ayant pas encore eu le 
                  
                  
                  temps d'en prendre connaissance, tant nos 
                  
                  ministres l'on entouré de mystère et de    
                  
                  secret. Je considère que l'hon membre pour 
                  
                  Toronto a montré un peu trop de zèle pour 
                  
                  
                  
                  la cause de ses amis en venant nous faire la 
                  
                  déclaration que la chambre a entendue avec 
                  
                  un étonnement bien marqué. Je suis prêt 
                  
                  à reconnaître qu'en cela il nous a rendu un 
                  
                  
                  bien grand service. Je ne doute nullement, 
                  
                  
                  
                  
                  
                  en effet, comme nous l'a dit cet hon. 
                  monsieur, que l'exposition de l'organisme 
                  des gouvernements locaux à cette phase de la 
                  discussion, serait, pour le ministère du jour, 
                  une action imprudente, et qu'elle serait 
                  grandement susceptible de lui susciter de 
                  graves difficultés. Je suis aussi d'opinion 
                  qu'une des moindres difficultés qu'il appréhende n'est pas celle de la distribution
                  
                  ou de la répartition de la partie de la dette 
                  publique que doivent supporter les différentes provinces. En effet, on peut fort 
                  bien se demander s'il va être possible de 
                  s'entendre sur en point. Avec un courage 
                  digne d'une meilleure cause, le ministère 
                  vient aujourd'hui nous dire : " Votez d'abord l'adresse, et après cela nous vous 
                  soumettrons le plan de l'organisation des 
                  gouvernements locaux." Mais voyez donc 
                  la contradiction que le gouvernement commet en ceci, et combien sa conduite est 
                  illogique ! Supposons pour un instant, que 
                  cette mesure soulève des difficultés assez 
                  graves, dans le gouvernement actuel, dans 
                  le cours de la discussion sur les débats de 
                  la mesure, pour qu'il lui faille résigner. 
                  Qu'arrive-t-il ? L'adresse étant votée par 
                  notre législature, on l'expédie en Angleterre, 
                  et pendant que le gouvernement britannique 
                  est occupé à la ratifier et à l'incorporer dans 
                  un bill qui doit devenir notre constitution, 
                  le ministère actuel succombe sur les débats 
                  du plan concernant les gouvernements 
                  locaux. Un nouveau gouvernement lui succède, un appel au peuple a peut être lieu 
                  dans l'intervalle, et quand la nouvelle constitution nous arrive de la Grande-Bretagne,
                  
                  nous avons un gouvernement et une legislature prêts à la rejeter avant sa promulgation.
                  
                  Est-ce en présence d'une pareille perspective 
                  que l'on doit se hâter d'accéder à la demande 
                  du gouvernement et refuser le délai légitime 
                  demandé par la motion maintenantt devant 
                  cette hon. chambre ? J'ai donc cru ne pas 
                  devoir laisser passer sous silence la déclaration de l'hon membre pour Toronto, car
                  je 
                  considère qu'elle est de nature à nous convaincre que la précipitation est grandement
                  
                  dangereuse dans une occasion aussi eminemment solennelle. La constitution d'un pays
                  
                  ne doit pas être changée, de fond en comble, 
                  sans que ceux qui sont préposés à la garde 
                  des intérêts publics et de cette même constitution, aient eu le temps nécessaire de
                  voir 
                  et de constater, d'une façon certaine, si un 
                  pareil changement est nécessaire et demandé 
                  par le peuple. (Ecoutez ! écoutez!) 
                  
                  
 
               
               
               314
               
               
               
               
                  L'HON. M. OLIVIER—Hon. messieurs : 
                  
                  —Je désire adresser quelques mots à cette 
                  
                  hon. chambre. Je n'ai certainement pas l'intention de revenir sur ce que j'ai déjà
                  dit 
                  
                  dans un discours précédent, mais dans cette 
                  
                  occasion, pressé par le temps, qui me faisait 
                  
                  défaut, j'ai dû laisser de côté certains aspects 
                  
                  du projet sur lesquels j'avais l'intention de 
                  
                  revenir lorsque la présente motion serait 
                  
                  soumise à cette chambre. Je savais en effet 
                  
                  que cette motion reviendrait devant nous, vu 
                  
                  qu'elle se trouvait alors inscrite sur les 
                  
                  minutes de nos délibérations. Avec ces 
                  
                  quelques observations préliminaires, hon. 
                  
                  messieurs, je viens considérer avec vous les 
                  
                  quelques particularités du projet que j'ai été 
                  
                  forcé de passer sous silence lors de mon 
                  
                  premier discours sur la mesure de la confédération qui nous est maintenant soumise.
                  
                  
                  Un incident bien remarquable, hon. messieurs, s'est produit à la séance de cette 
                  
                  après-midi. Une déclaration tout à fait 
                  
                  nouvelle pour chacun de nous, je pense, 
                  
                  est tombée des lèvres de l'hon. ministre des 
                  
                  terres de la couronne, qui n'a eu que cette 
                  
                  seule et unique raison à nous donner pour 
                  
                  motiver et exécuter la précipitation avec 
                  
                  laquelle son gouvernement veut faire passer 
                  
                  et adopter la nouvelle constitution : 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Nous désirons obtenir le vote de cette hon. 
                     
                     chambre pour l'offrir au Nouveau-Brunswick et aux 
                     autres provinces maritimes qui désirent entrer 
                     dans la confédération." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  Voilà donc la vraie raison de cette précipitation incompréhensible et imprudente,
                  
                  
                  car je ne puis croire que la raison donnée 
                  
                  par l'hon. député qui siége immédiatement 
                  
                  devant moi ( Sir N. F. BELLEAU ), pour 
                  
                  expliquer cette précipitation, fût sérieuse. 
                  
                  En effet, comment ne pas trouver quelque 
                  
                  peu étrange la raison que voici, donnée par 
                  
                  l'hon. Sir N. F. BELLEAU : 
                  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Le ministère tient à faire adopter de suite le 
                     
                     plan de confédération, parce que lord PALMERSTON, 
                     qui est déjà vieux, peut mourir d'un jour à l'autre." 
                     
                     
                   
               
               
               
               
                  J'aime mieux accepter la raison de l'hon. commissaire des terres de la couronne que
                  celle 
                  
                  de son hon. ami, que je ne puis croire avoir 
                  
                  été autorisé à la donner. Ainsi donc, cette 
                  
                  chambre et le pays connaissent maintenant 
                  
                  le secret de cet empressement intempestif 
                  
                  du gouvernement, et je ne doute pas qu'il en 
                  
                  prenne note. Mais je me permettrai de demander à l'hon. commissaire des terres de
                  la 
                  
                  couronne, qui nous a donné une aussi étrange 
                  
                  raison, s'il veut s'exposer à tromper les 
                  
                  
                  
                  
                  
                  populations des provinces d'en-bas avec le 
                  
                  vote qu'il veut ainsi précipiter. Je lui demanderai s'il est désirable que cette chambre
                  
                  
                  donne sur-le-champ le vote en question,-   vote qui aura indubitablement l'effet de
                  les 
                  
                  induire en erreur sur le sentiment et l'opinion du peuple de ce pays relativement
                  au 
                  
                  projet de confédération ? Eh bien ! hon. 
                  
                  messieurs, je n'hésite pas un seul instant 
                  
                  à déclarer devant cette chambre que le 
                  
                  fait seul de l'anxiété du ministère à vouloir 
                  
                  obtenir de suite un vote de cette chambre 
                  
                  sur cette importante mesure, est ce qui 
                  
                  devrait le plus nous mettre sur nos gardes, 
                  
                  et justement ce qui devrait le plus nous 
                  
                  engager à ne pas le donner ainsi à la légère et 
                  
                  d'une manière peu digne de législateurs 
                  
                  prudents et sages. En effet, hon. messieurs, notre vote aura une signification 
                  
                  qu'on chercherait en vain à diminuer ; nous 
                  
                  formons la première chambre de ce pays, et 
                  
                  quand on verra là-bas, aux provinces maritimes, que nous avons voté pour la mesure
                  
                  
                  telle qu'elle nous a été soumise, on croira 
                  
                  naturellement et avec raison que notre vote 
                  
                  a été donné avec parfaite connaissance de 
                  
                  cause, et que nous exprimons pleinement le 
                  
                  vœu et le sentiment populaires sur cette 
                  
                  importante question. On ne supposera jamais 
                  
                  que nous ayons mis de côté et négligé 
                  
                  d'interroger l'opinion de ceux que nous 
                  représentons dans cette chambre ; on ne 
                  croira jamais que le pays ait été aussi peu 
                  consulté qu'il l'a en effet été. Je dis donc, 
                  hon. messieurs, que le vote qu'on veut nous 
                  faire donner aujourd'hui est de nature à 
                  tromper le peuple des provinces d'en-bas, 
                  tant sur l'opinion de cette hon. chambre que 
                  sur celle de la grande majorité du peuple de 
                  cette province, et que nous ne pouvons pas 
                  le donner avec satisfaction pour nous-mêmes 
                  non plus que pour ceux que nous représentons ici. J'ai déjà eu occasien de dire avant
                  
                  aujourd'hui que le plan de confédération ne 
                  nous avait pas été soumis en entier. Je suis 
                  prêt a prouver cette assertion. Je maintiens 
                  qu'une partie seulement du projet nous a été 
                  soumise, et sous ces circonstances je demande 
                  à cette hon. chambre s'il est prudent d'accepter et de sanctionner une mesure que
                  
                  nous ne connaissons qu'imparfaitement ? En 
                  acceptant et recevant de mes électeurs le 
                  mandat de conseiller législatif, j'ai pris la 
                  ferme détermination de ne jamais accepter 
                  les yeux fermés les différentes mesures ou 
                  projets qui pourraient être soumis à mon 
                  approbation cette hon. chambre. Cette 
                  
                  
                  
                  315
                  
                  
                  résolution, je l'ai suivie jusqu'à présent, et 
                  
                  j'espère que jamais je ne l'oublierai dans le 
                  
                  cours de ma carrière politique. J'ai dit il y 
                  
                  a quelques instants, hon. messieurs, que le 
                  
                  plan de confédération ne nous avait pas été 
                  
                  soumis en entier : je vais maintenant essayer 
                  
                  de le démontrer. Par l'article 6 de la 43me 
                  
                  résolution, nous voyons que les législatures 
                  
                  locales auront le pouvoir de faire des lois 
                  
                  sur le sujet de l'éducation, sauf les droits et 
                  
                  priviléges que les minorités catholiques ou 
                  
                  protestantes posséderont par rapport à leurs 
                  
                  écoles séparées au moment de l'union. De 
                  
                  sorte que par cette résolution nous allons 
                  
                  affirmer que les minorités seront liées par 
                  
                  les lois d'école qui existeront au moment 
                  
                  que s'opèrera la confédération. D'un autre 
                  
                  côté, nous apprenons qu'il sera présenté un 
                  
                  bill pour protéger davantage les droits de 
                  
                  la minorité protestante dans le Bas-Canada, 
                  
                  sans que l'on sache si la même protection et 
                  
                  les mêmes avantages seront accordés à la 
                  
                  minorité catholique du Haut-Canada. Ces 
                  
                  lois d'école forment donc partie même du 
                  
                  projet que nous sommes appelés à voter ; et 
                  
                  si malheureusement, après que nous aurons 
                  
                  adopté ces résolutions, nous ne pouvions 
                  
                  obtenir justice pour la minorité du Haut- 
                  
                  Canada, ne serions-nous pas coupables d'avoir 
                  
                  voté ce plan sans le connaître en entier? 
                  
                  Nous avons donc le droit d'être sur nos 
                  
                  gardes. En effet, si, comme on le dit, la 
                  
                  mesure ne devait pas mettre en danger les 
                  
                  droits de la minorité catholique du Haut- 
                  
                  Canada, pourquoi nous refuserait-on, comme 
                  
                  on 1e fait, les détails et les renseignements 
                  
                  que nous voulons et désirons avoir avant de 
                  
                  nous prononcer sur son mérite ? Je maintiens que tout homme qui désire sincèrement
                  
                  
                  rendre justice aux minorités en question, 
                  
                  ne saurait voter comme on nous demande 
                  
                  de le faire. En l'absence des renseignements que nous avons le droit de 
                  
                  demander au ministère sur la nature des 
                  
                  garanties qui seront offertes par la nouvelle constitution aux minorités des deux
                  
                  
                  instants du Canada, je n'hésite pas un 
                  
                  instant à déclarer que cette hon. chambre 
                  
                  est justifiable et remplit un devoir sacré en 
                  
                  demandant le délai demandé par la motion 
                  
                  de l'hon. deputé de Niagara. S'il arrive 
                  
                  que le peuple soit appelé à se prononcer sur 
                  
                  le mérite de la mesure, il faudra de toute 
                  
                  nécéssité que nous, ses représantants, puissions 
                  
                  lui expliquer et lui exposer les détails de 
                  
                  
                  cette même mesure. Nous avons donc raison 
                  
                  d'insister pour que ces renseignements nous 
                  
                  
                  
                  
                  
                  soient fournis. Le premier ministre me 
                  
                  permettra maintenant de lui faire une 
                  
                  question. Ne pourra-t-il pas arriver, après 
                  
                  que ces résolutions auraient été adoptées, 
                  
                  que la majorité protestante du Haut-Canada 
                  
                  s'allie à la minorité protestante du Bas- 
                  
                  Canada dans le parlement actuel, et enlève 
                  
                  à la minorité catholique du Haut-Canada 
                  
                  les droits qui devraient lui appartenir au 
                  
                  sujet de l'éducation de ses enfants? Si une 
                  
                  pareille éventualité se produisait, je le demande à l'hon. premier ministre, quel
                  moyen 
                  
                  resterait à la minorité lésée de se faire rendre 
                  
                  justice ? 
                  
                  
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. OLIVIER —L'hon. premier 
                  
                  ministre devrait nous faire connaître les 
                  
                  détails de la mesure à ce sujet. Je ne veux 
                  
                  pas dire que je suis contre toute confédération 
                  
                  possible, mais ce à quoi je ne consentirai 
                  
                  jamais, c'est de voter pour une confédération 
                  
                  dont je ne connais ni la nature exacte ni les 
                  
                  détails. L'article que j'ai cité plus haut, 
                  
                  hon. messieurs, est un de ceux sur lesquels 
                  
                  je tenais à appuyer ; je citerai maintenant 
                  
                  la résolution 67. Je vois par cette résolution 
                  
                  " que le gouvernement général devra remplir 
                  
                  tous les engagements qui pourront avoir été 
                  
                  pris, avant l'union, avec le gouvernement 
                  
                  impérial, pour la défense du pays." Eh ! 
                  
                  bien, le croiriez-vous, on ne s'est même 
                  
                  pas donné la peine de dire par qui ces 
                  
                  engagements doivent être pris ! Non, on 
                  
                  se contente tout bonnement de constater 
                  
                  l'obligation plus haut mentionnée dans la 
                  
                  résolution, Eh! bien, je suppose le cas où 
                  
                  notre gouvernement se serait ainsi engagé 
                  
                  pour une somme de cinquante millions de 
                  
                  piastres, allons-nous et pouvons-nous affirmer 
                  
                  que cette obligation était nécessaire en 
                  
                  votant pour la mesure sans même connaître 
                  
                  la portée de cette obligation ? Maintenant, 
                  
                  si je passe à la résolution 68, j'y lis : 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  
                  
                  
                     " Le gouvernement général devra faire compléter sans délai, le chemin de fer intercolonial,
                     
                     
                     de la Rivière-du-Loup à Truro, dans la Nouvelle 
                     
                     Ecosse, en le faisant passer par le Nouveau- 
                     Brunswick."   
                     
                     
                   
               
               
               
               
               
                  Eh ! bien, hon. messieurs, je maintiens 
                  
                  qu'il y a encore ici une partie du plan que 
                  
                  nous ne connaissons pas. Nous ne savons pas 
                  
                  quel sera le coût de cette voie ferrée ainsi 
                  
                  indiquée dans la résolution que je viens de 
                  
                  citer ; nous sommes ici encore tenus dans la 
                  
                  plus compléte ignorance par le gouvernement 
                  
                  actuel. Un hon. membre de cette chambre 
                  
                  
                  
                  316
                  
                  
                  a déclaré que quand bien même le chemin 
                  
                  de fer intercolonial devrait coûter cinquante 
                  
                  millions de piastres, nous ne devrions pas 
                  
                  hésiter à favoriser sa construction, car 
                  
                  même à ce prix exorbitant le pays y trouverait son compte. Eh! bien, je vous le 
                  
                  demande, cette chambre agirait-elle avec 
                  
                  cet esprit de sagesse et de prudence qui doit 
                  
                  la caractériser en votant aveuglément une 
                  
                  dépense aussi énorme que celle-là ? Je ne 
                  
                  le crois pas, et, pour ma part, je n'hésite 
                  
                  pas un instant à dire que je refuserai. Je 
                  
                  sais bien, d'un autre côté, que l'établissement de cette immense voie ferrée ne saurait
                  
                  
                  coûter une aussi forte somme, mais je sais 
                  
                  aussi qu'il est généralement admis, tant dans 
                  
                  cette chambre qu'au dehors de la législature, 
                  
                  qu'elle ne pourra pas coûter moins qu'une 
                  
                  vingtaine de millions. Et puis, ne sait-on 
                  
                  pas encore qu'il est arrivé très-souvent que des 
                  
                  travaux publics dont on avait fixé le coût à 
                  
                  un million de piastres, par exemple, se sont 
                  
                  trouvés une fois complétés en avoir coûté 
                  
                  le double et quelquefois même plus que le 
                  
                  double ? Il peut en arriver de même pour 
                  
                  le chemin de fer intercolonial, qui, il n'y a 
                  
                  pas à se le cacher, coûtera certainement plus 
                  
                  que la somme que l'on suppose ; et je le répète, 
                  
                  cette chambre doit y songer à deux fois avant 
                  
                  de sanctionner une dépense aussi onéreuse 
                  
                  pour son trésor, déjà considérablement obéré, 
                  
                  et qui ne se trouvera guère dans une 
                  
                  position plus florissante lorsque les diverses 
                  
                  provinces britanniques de ce continent se 
                  
                  trouveront réunies sous la confédération. Je 
                  
                  demande donc avec raison qu'on fasse connaître les détails du plan avant de venir
                  nous 
                  
                  demander de le sanctionner. J'ai déjà dit 
                  
                  que je ne prétendais pas être contre toute 
                  
                  confédération des provinces ; que je pourrais 
                  
                  être pour une confédération qui ne serait pas 
                  
                  trop onéreuse pour ce pays ; mais on comprend qu'il m'est complètement impossible
                  
                  
                  d'être pour un projet de ce genre dont je ne 
                  
                  connais pas les détails ni l'ensemble. Il me 
                  
                  semble que le ministère n'aura pas le droit 
                  
                  de se plaindre si, sous ces circonstances, 
                  
                  nous votons contre son projet, que nous désirerions connaître entièrement afin de
                  former 
                  
                  à cet égard notre jugement et celui du peuple 
                  
                  que nous représentons. Je ne pense pas 
                  
                  qu'on puisse prétendre que cette chambre 
                  
                  n'a pas le droit d'exiger une chose aussi juste 
                  
                  et aussi raisonnable. Comme vous avez pu le 
                  
                  voir, hon. messieurs, si nous acceptons les 
                  
                  résolutions que l'on nous propose, nous nous 
                  
                  trouverons à mettre en danger les droits des 
                  
                  
                  
                  
                  
                  minorités dans les deux sections de la province ; 
                  nous nous exposons à payer des sommes 
                  énormes pour la construction d'un chemin 
                  de fer qui serait peut-être d'une complète 
                  inutilité pour la défense du pays. Il me 
                  semble qu'avant de contracter des obligations aussi onéreuses, nous avons besoin de
                  
                  refléchir mûrement et de bien peser toutes 
                  les chances possibles d'éventualités aussi 
                  sérieuses. Je n'ignore pas qu'il est certains 
                  hon. membres de cette chambre qui ne se 
                  rendront jamais aux raisons que je viens 
                  d'énumérer ; aussi n'entreprendrai-je pas de 
                  les convertir à mon opinion, car je sais que 
                  tous mes efforts seraient inutiles. Le fait 
                  que nous ne voulons pas accepter la mesure 
                  qu'on nous propose sans auparavant la connaître, n'implique certainement pas, comme
                  
                  on le dit et le supose, que nous soyons contre 
                  toute idée de confédération. Une autre disposition du projet que nous ne saurions
                  
                  approuver, c'est celle par laquelle la constitution du conseil législatif du parlement
                  fédéral 
                  se trouve basée sur le principe nominatif au 
                  lieu du principe électif, comme c'est le cas 
                  aujourd'hui pour cette même branche de la 
                  législature sous notre gouvernement actuel. 
                  J'ai déjà eu occasion d'exprimer mon opinion 
                  sur le changement constitutionnel qu'on voulait faire subir à notre conseil actuel
                  : ainsi, 
                  je ne reviendrai point sur ce sujet. L'hon. 
                  commissaire des terres de la couronne 
                  a prétendu que nous nous trouvions autorisés par notre mandat actuel à voter 
                  sur le renversement de constitution projeté. Je me permettrai de différer de 
                  son opinion. Je connais la nature d'un 
                  mandat, soit civil, soit politique : tous deux 
                  ils entraînent à peu près les mêmes devoirs. 
                  Eh bien ! quel est le mandat que nous 
                  avons reçu de nos commettants ? Celui de 
                  faire fonctionner la constitution actuelle au 
                  meilleur de notre intelligence et de notre jugement. Tel est le mandat qui nous a
                  été 
                  conféré, mais jamais nos électeurs ne nous 
                  ont autorisé comme on le propose aujourd'hui, de détruire cette même constitution
                  
                  et de faire une alliance politique avec les 
                  autres provinces anglaises de ce continent. 
                  L'exemple d'un pareil bouleversement constitutionnel, sans l'autorisation du peuple,
                  ne 
                  se trouve dans aucune des pages de l'histoire. 
                  On a déclaré dans cette enceinte que le 
                  projet de confédération était connu d'une 
                  partie du pays, et qu'il n'y avait aucun 
                  inconvénient à en presser l'adoption. Je 
                  me permettrai de différer encore des hon. 
                  
                  
                  
                  317
                  
                  
                  membres qui ont exprimé une pareille 
                  
                  opinion. Je pense que quand bien même 
                  
                  le projet serait, comme on le dit, connu 
                  
                  d'une partie du peuple de ce pays, ce ne 
                  
                  serait pas une raison pour en précipiter ainsi 
                  
                  l'adoption ; car le plan intéresse également le pays en général, et il ne suffit pas
                  
                  
                  qu'il soit acceptable à une certaine partie des 
                  
                  habitants de ce pays, mais bien à la grande 
                  
                  masse du peuple. D'ailleurs, si les assemblées 
                  
                  qui ont déjà eu lieu dans le Bas-Canada au 
                  
                  sujet de la confédération peuvent servir à 
                  
                  faire connaître l'opinion populaire relativement à cette question, au moins dans cette
                  
                  
                  section de la province, on peut dire sans 
                  
                  crainte qu'elle a été universellement condamnée dans 15 comtés. Oserait-t-on prétendre
                  que le Bas-Canada ne saurait compter 
                  
                  dans la confédération, et que le Haut-Canada 
                  
                  seul a droit de faire entendre sa voix ? que son 
                  
                  approbation ou désapprobation du projet 
                  
                  peut seule entraîner l'adoption ou le rejet 
                  
                  de ce même projet ? Assurément, je ne 
                  
                  pense pas qu'on ose jamais émettre une telle 
                  
                  prétention. Je ne connais qu'un seul comté 
                  
                  dans le Bas-Canada qui ait autorisé son mandataire à voter comme bon lui semblerait
                  sur 
                  
                  le projet en question. Je crois donc pouvoir 
                  
                  dire que la raison qui incite le gouvernement 
                  
                  à faire adopter cette mesure sans en soumettre tous les détails, c'est qu'il craint
                  que 
                  
                  ces détails ne soient connus du peuple, qui 
                  
                  ne pourrait faire autrement sans doute que 
                  
                  de les rejeter. Après lui avoir montré la confédération sous les dehors les plus brillants,
                  
                  
                  il craint de la lui laisser voir sous son véritable jour et telle qu'on veut la lui
                  imposer. 
                  
                  J'ai déjà dit que dans tout le Bas-Canada il 
                  
                  ne s'était trouvé qu'un seul comté qui avait 
                  
                  laissé à son représentant le privilége de voter 
                  
                  suivant son jugement sur la mesure actuelle 
                  Dans tous les autres comtés où le peuple a 
                  été appelé à se prononcer, le projet de 
                  confédération a été formellement condamné. 
                  
                  
               
               
               
               L' HON. M. GUEVREMONT—Plusieurs 
                  comtés se sont prononcés en faveur du 
                  projet, le comté de Vaudreuil entre autres. 
                  
                  
 
               
               
               L'HON. M. OLIVIER—Je ne sache pas 
                  que le comté de Vaudreuil ait voté en faveur 
                  de la confédération. L'hon. député de 
                  Saurel a aussi mentionné le comté de 
                  Richelieu comme l'un de ceux qui n'avaient pas rejeté le projet de confédération.
                  
                  
                  
 
               
               
               L'HON M. GUÈVREMONT—L'assemblée en question n'a pas condamné la confédération : elle s'est simplement
                  prononcée en 
                  faveur de certaines résolutions qui lui ont 
                  
                  
                  
                  
                  
                  été soumises, lesquelles demandaient que le 
                  peuple fût consulté sur le changement constitutionnel projeté. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. OLIVIER—Il est bien vrai 
                  
                  que le comté de Richelieu n'a pas condamné 
                  
                  les détails de la mesure, et cela pour une 
                  
                  raison bien simple : c'est que le gouvernement ne les a jamais laissés connaître et
                  qu'il 
                  
                  persiste encore, à cette heure, à les laisser 
                  
                  ignorer au pays Mais l'hon. membre admet 
                  
                  que le comté de Richelieu a chargé son 
                  
                  mandataire de demander un appel au peuple. 
                  
                  Dire que le Bas-Canada est favorable au 
                  
                  projet de confédération, c'est avancer une 
                  
                  chose que les assemblées populaires qui ont 
                  
                  eu lieu depuis un mois ou deux démentent 
                  
                  de la manière la plus formelle. Je sais à 
                  
                  quoi m'en tenir sur l'expression de l'opinion 
                  
                  publique dans le district de Montréal ; quant 
                  
                  au district de Québec, les hon. membres qui 
                  
                  représentent ses différentes divisions voudront bien me dire s'il y a eu ou non des
                  
                  
                  assemblées en faveur de la confédération. 
                  
                  En attendant qu'on me démontre que le 
                  
                  projet y a été approuvé, je me permettrai 
                  
                  de penser que le district de Québec, de 
                  
                  même que celui de Montréal, n'approuve 
                  
                  pas la confédération projetée. Je ne veux 
                  
                  pas dire que le pays entier est contre toute 
                  idée de confédération, mais je maintiens 
                  qu'il ne saurait être en faveur d'un projet 
                  dont il ne connaît pas les détails et dont 
                  l'ensemble ne lui est pas connu. Le moyen 
                  le plus efficace de pourvoir à la défense d'un 
                  peuple et d'un pays, c'est que le peuple 
                  soit attaché à la constitution du pays ; 
                  vouloir lui imposer une constitution, c'est 
                  tout simplement le pousser vers l'anarchie. 
                  Or, nous sommes déjà assez entourés de périls 
                  pour ne pas aggraver davantage notre position Faites en sorte que le peuple aime sa
                  
                  constitution, et vous pouvez être assurés 
                  qu'il saura la défendre quand elle sera 
                  menacée. Mais ce n'est certainement pas en 
                  procédant comme vous le faites que vous 
                  arriverez à ce résultat. La raison donnée par 
                  l'hon. commissaire des terres de la couronne 
                  pour presser la mesure ne me parait pas 
                  suffisante. Nous ne sommes pas ici pour 
                  plaire aux provinces maritimes ou pour 
                  législater dans leur intérêt, mais nous sommes 
                  ici pour sauvegarder les droits de nos concitoyens : nous ne sommes pas venus ici
                  avec 
                  l'idée préconçue d'empêcher tout projet 
                  d'union ; nous sommes tous intéressés à la 
                  prospérité et à la grandeur de notre pays. La 
                  dernière fois que j'ai eu l'honneur d'adresser 
                  
                  
                  
                  318
                  
                  
                  la parole à cette hon. chambre, j'ai dit que 
                  
                  pour les questions qui intéressaient le plus le 
                  
                  Bas-Canada, la confédération projetée serait 
                  
                  une union législative ; c'est-à-dire, que nous 
                  
                  serions à la merci du Haut-Canada et des 
                  
                  provinces maritimes. J'ai exprimé cette 
                  
                  opinion de bonne foi, et si je me suis trompé 
                  
                  dans mes prévisions, j'espère que les hon. 
                  
                  membres du gouvernement voudront bien 
                  
                  m'éclaicir à ce sujet et me démontrer mon 
                  
                  erreur. On ne l'a pas fait dans l'occasion, 
                  
                  car je ne saurais accepter comme une réponse 
                  
                  satisfaisante les quelques explications données à cet effet par l'hon. membre qui
                  siége 
                  
                  devant moi. Je dis que le gouvernement 
                  
                  fédéral aura le pouvoir de déclarer que les 
                  
                  corporations religieuses, par exemple, n'auront pas le droit de posséder des propriétés
                  
                  
                  immobilières au-delà d'une certaine valeur, 
                  
                  plus qu'il ne leur en faudra pour les besoins 
                  immédiats de leurs maisons. Il aura aussi 
                  le pouvoir de décréter qu'il n'y aura aucune 
                  relations entre l'Eglise et l'Etat. Je dis que 
                  les pouvoirs du gouvernement fédéral seront 
                  tels que le Bas-Canada ne sera qu'un zéro 
                  dans les affaires qui l'intéressent le plus. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. SIR. E. P. TACHÉ — L'hon. 
                  
                  membre doit comprendre dans quel sens je 
                  
                  dis " oui." Il doit voir que je dis cela 
                  
                  ironiquement. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. OLIVIER—Si l'hon. chevalier dit cela ironiquement, tout ce que j'ai à 
                  
                  lui répondre, c'est que je regrette de voir 
                  
                  que, lorsque je m'informe sérieusement des 
                  
                  affaires du pays, lorsque je cherche à avoir 
                  
                  des éclaircissements sur une question aussi 
                  
                  importante, l'on ne puisse répondre sérieusement et que l'on n'emploie que l'ironie
                  pour 
                  
                  répondre. Je demande des informations 
                  
                  parce que j'avoue, moi, que je puis me 
                  
                  tromper dans l'opinion que je me forme sur 
                  
                  cette question ; mon opinion n'est pas infaillible, pas plus que les membres de la
                  conférence de Québec n'étaient infaillibles, pas 
                  
                  plus que les membres bas-canadiens du 
                  
                  ministère ne sont infaillibles ; et c'est 
                  
                  précisément à cause de cela que je voudrais 
                  
                  avoir des informations qui pussent m'éclairer 
                  
                  et me permettre de porter un jugement correct sur la question. Est-ce que ceux qui
                  ont 
                  
                  préparé ce projet ont la prétention de croire 
                  
                  qu'ils ne peuvent pas se tromper ? Quand je 
                  
                  m'informe des détails de ce projet au nom de 
                  
                  
                  
                  
                  
                  mes commettants, l'on répond ironiquement ! 
                  
                  Mais je connais la valeur de ces réponses-là, 
                  
                  et je sais que c'est à l'ironie que l'on a recours 
                  
                  lorsque l'on est embarrassé de répondre 
                  
                  sérieusement et que l'on n'a pas de bonnes 
                  
                  raisons à donner. Je sais ce que c'est que 
                  
                  de discuter, et si je n'ai pas souvent discuté 
                  
                  dans cette hon. chambre, j'ai discuté au 
                  
                  barreau, et je sais parfaitement que ceux qui 
                  
                  n'ont pas de bonnes raisons à opposer aux 
                  
                  arguments de leurs adversaires cherchent à 
                  
                  changer le terrain de la discussion en la 
                  
                  faisant porter sur un point mineur et en se 
                  
                  servant de l'ironie. Si l'on refuse de donner 
                  
                  ici les explications que je demande, comment 
                  
                  pourrai-je donner à mes électeurs les informations qu'ils ont le droit d'attendre
                  de 
                  
                  moi ? Mais je vais en venir au principe de 
                  
                  nomination que l'on veut introduire dans la 
                  
                  nouvelle constitution du conseil législatif 
                  
                  fédéral. Quand j'ai entendu l'hon. chevalier 
                  
                  faire l'histoire des derniers moments du 
                  
                  conseil législatif nominatif, il m'a semblé que 
                  
                  c'était la plus forte condamnation possible 
                  
                  du projet actuel. En effet, il nous a dit 
                  
                  que les membres nommés à vie étaient des 
                  
                  hommes honorables qui, par leur position et 
                  
                  leur intégrité, avaient le droit de marcher la 
                  
                  tête haute, mais que, lorsqu'ils passaient dans 
                  
                  les rues, ils semblaient marcher la tête basse. 
                  
                  Pourquoi ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. SIR E. P. TACHÉ—Je n'ai pas 
                  
                  dit qu'ils marchaient la tête basse dans les 
                  
                  rues. J'ai dit que c'était des hommes 
                  
                  honorables qui avaient le droit de marcher 
                  
                  la tête haute partout, mais qu'ils ne voulaient plus venir siéger au conseil à cause
                  
                  
                  des préjugés de l'opinion publique, qui avait 
                  
                  été faussée. 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'HON. M. OLIVIER—L'opinion unanime d'un pays ne se fausse pas ainsi, et 
                  
                  l'opinion du pays était unanime à condamner 
                  
                  le système de nomination par la couronne. 
                  
                  Et pour que l'opinion publique devienne 
                  
                  aussi unamine qu'elle l'était contre ce 
                  
                  système, il faut que ce soit le résultat d'un 
                  
                  travail lent et profond, et que la cause de 
                  
                  mécontentement soit réelle. Il faut que le 
                  
                  Bas-Canada, de même que le Haut-Canada, 
                  
                  ait souffert longtemps du système pour le 
                  
                  condamner comme ils l'ont fait. Et je regrette 
                  
                  beaucoup d'avoir entendu l'hon. chevalier 
                  
                  dire qu'il voulait revenir à ce système. 
                  
                  Peut-être qu'en avançant en âge on peut 
                  
                  changer ses vues et ses opinions ; mais il me 
                  
                  semble qu'on ne devrait pas les changer en 
                  
                  aussi peu de temps que l'hon. chevalier l'a 
                  
                  
                  
                  
                  319
                  
                  
                  fait à propos de la constitution du conseil 
                  
                  législatif ; et il n'y a pas longtemps que le 
                  
                  document qui a été lu ce soir a été signé. 
                  
                  Je dis donc que le récit que nous a fait l'hon. 
                  
                  chevalier est la condamnation du système 
                  
                  que l'on veut introduire aujourd'hui. Après 
                  
                  ce que l'hon. chevalier a dit des conseillers 
                  
                  nommés par la couronne, avec quelle grâce 
                  
                  les nouveaux conseillers viendront-ils siéger 
                  
                  ici ? N'y aura-t-il pas un préjugé plus fort que 
                  
                  jamais contre eux, parce que l'on dira que 
                  
                  ceux qui auront voté pour le projet qui 
                  
                  nous est soumis, l'auront fait dans le but de 
                  
                  garder leur siége pour le reste de leur vie ? 
                  
                  Quel respect le peuple pourra-t-il avoir pour 
                  
                  une telle chambre ? 
                  
                  
                  
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. OLIVIER—Ni pour un plat 
                  
                  d'or. Je demande si le gouvernement de 
                  
                  l'hon. chevalier m'a jamais compté parmi 
                  
                  ses solliciteurs ? 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
               
                  L'HON. M. OLIVIER—Je comprends 
                  
                  l'intention de l'hon. chevalier. Et quand on 
                  
                  dit ironiquement que je ne vendrais pas les 
                  droits du peuple pour un plat de lentilles, 
                  j'ai le droit de dire que je ne les vendrais 
                  pas même pour un plat d'or, car jusqu'à 
                  présent, Dieu merci ! pas un gouvernement 
                  ne m'a jamais compté au nombre de ses 
                  solliciteurs. Je vis de mon travail et je n'ai 
                  pas besoin du gouvernement. J'ai remarqué 
                  l'expression dont s'est servi l'hon. chevalier 
                  quand il a parlé des derniers moments du 
                  conseil législatif nommé par la couronne. Il 
                  nous a dit que pour ramener le prestige du 
                  conseil législatif, on avait été obligé de le 
                  rendre électif. Mais ce n'était pas là la 
                  seule raison de ce changement : il y avait un 
                  motif également raisonnable pour que le 
                  conseil devînt électif, et ce motif, c'est qu'en 
                  faisant élire les conseillers, ils seraient 
                  pris dans toutes les parties du pays, et 
                  qu'en conséquence ils représenteraient l'opinion publique des différentes parties
                  du 
                  pays. Il y a eu un temps, sous l'ancien 
                  ordre de choses, où l'opinion de deux ou 
                  trois homnes des villes de Québec et de 
                  Montréal formaient l'opinion publique de tout 
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  
                  le Bas-Canada. Cela avait un mauvais effet, 
                  car il faut que l'opinion publique des différentes parties du pays soit représentée
                  dans 
                  cette chambre comme dans l'autre. C'est pour 
                  atteindre ce but que le pays a été séparé en 
                  divisions, et que l'on a exigé que les conseillers élus résidassent dans ces divisions
                  ou y 
                  eussent des propriétés foncières au montant 
                  de £2,000. Mais avec le système des nominations par la couronne, on pourrait choisir
                  
                  comme autrefois des hommes dans les grandes 
                  villes,—car il ne sera pas difficile pour eux 
                  d'acquérir pour £1,000 de propriétés dans 
                  les divisions,—et le pays ne se trouvera pas 
                  également représenté au conseil. Une autre 
                  raison pour laquelle le système électif est 
                  préférable au système nominatif, c'est qu'à 
                  chaque nouvelle élection le nouveau membre 
                  élu représente l'opinion alors actuelle du 
                  peuple, tandis que les conseillers nommés à 
                  vie peuvent représenter quelquefois l'opinion 
                  publique de vingt ans en arrière. Il est 
                  désirable pour le progrès du pays que de 
                  temps en temps il vienne dans cette chambre 
                  des hommes qui représentent l'opinion 
                  actuelle du pays. 
                  
                  
 
               
               
               
               
               
               L'HON. M. OLIVIER—Maintenant je 
                  vais tâcher de répondre à une objection faite 
                  par l'hon. commissaire de terres de la couronne ( M. CAMPBELL ) à la motion de l'hon.
                  
                  membre pour Niagara ( M. CURRIE. ) Il a 
                  prétendu que cette motion était en contradiction avec la position prise par l'hon.
                  
                  membre qui a secondé la motion, parce qu'il 
                  s'est déclaré en faveur de la confédération. 
                  Pour ma part, je ne vois pas de contradiction dans l'action de l'hon. membre, car
                  il 
                  demande seulement que du délai sort accordé 
                  au peuple afin qu'il ait le temps de se prononcer sur la question. Il est indifférent
                  
                  que ce délai soit accordé d'une manière 
                  plutôt que d'une autre. Si le gouvernement 
                  accorde ce délai, il lui restera à décider si la 
                  question sera soumise au peuple au moyen 
                  d'une élection générale ou autrement. 
                  L'amendement de l'hon. membre pour Niagara ne propose aucun moyen particulier de 
                  soumettre la question au pays ; tout ce qu'il 
                  veut, c'est qu'elle soit soumise, et il laisse 
                  au gouvernement le choix du moyen qui lui 
                  paraîtra le plus convenable. Et c'est précisément la position que je prends moi-même
                  ; 
                  car j'ai dit aux membres qui ont l'air de 
                  croire que je suis absolument opposé à la 
                  confédération, que tel n'était pas le cas ; mais 
                  
                  
                  
                  320
                  
                  
                  je veux obtenir du délai pour avoir le temps 
                  
                  de savoir si le peuple est hostile ou favorable 
                  
                  au projet. Mais si le plan était soumis au 
                  
                  pays, il serait désirable qu'il le fût dans tous 
                  
                  ses détails, et non pas seulement dans l'état 
                  
                  dans lequel il est actuellement devant nous. 
                  
                  Je ne veux pas fatiguer la chambre, mais je 
                  
                  tenais à exprimer mes vues et à dire pourquoi je me propose de voter en faveur de
                  la 
                  
                  motion de l'hon. membre pour Niagara. 
                  
                  ( Applaudissements. ) 
                  
                  
 
               
               
               
               
                  L'amendement proposé par l'hon. M. 
                  
                  CURRIE est alors mis aux voix et perdu sur 
                  
                  la division suivante : 
                  
                  
               
               
               
               
                  
                  
                  
                  
                     Pour :—Les hon. messieurs Aikins, Archambault, Armstrong, Chaffers, Currie, Dickson,
                     
                     
                     A. J. Duchesnay, E. H. J. Duchesnay, Flint, 
                     
                     Leonard, Malhiot, Olivier, Perry, Proulx, Read, 
                     
                     Reesor, Seymour, Simpson, et Vidal,—19. 
                     
                     
                  
                  
                  
                  
                     Contre : — Les hon. messieurs Alexander, 
                     
                     Armand, Sir N. F. Belleau, Bennett, Blake, Boulton, Bull, Burnham, Campbell, Christie,
                     Crawford, 
                     
                     DeBeaujeu, Dumouchel, Foster, Gingras, Guévremont, Hamilton (Inkerman,) Hamilton (Kingston,)
                     Lacoste, McCrea, McDonald, McMaster, 
                     
                     Macpherson, Matheson, Mills, Panet, Ross, Shaw, 
                     
                     Skead, Sir E. P. Taché, et Wilson.—31.