Neuvième jour
Salle du conseil, Upper Fort Garry
Jeudi 3 février 1870
Onze heures — Les membres de la Convention sont rassemblés.
Le débat reprend au sujet de l'article 19.
M. Riel, en français, interprété par M. Ross — J'aimerais attirer votre attention sur le
fait qu'avec cet article, nous décidons des droits des étrangers aussi bien que des
natifs du pays. Bien sûr, quelle que soit notre décision, certains y trouveront à
redire. Par principe, nous devons nous efforcer de faire ce qui est juste, tout en
tenant spécialement compte des intérêts des gens de ce pays. Nous devons faire en
sorte de préserver l'existence de notre peuple. Nous ne devons pas nous laisser submerger
à cause de décisions que nous avons prises. S'il arrive une telle chose, que cela
ne soit pas dû à nos actions. Je ne veux en aucun cas nuire aux étrangers, mais nous
devons avant tout agir de façon juste et adaptée à nos propres intérêts. Dans cette
perspective, tous ceux qui ne sont pas d'ici doivent être considérés comme des étrangers,
non seulement les Américains, mais les Canadiens, les Anglais, les Irlandais et les
Écossais. Ils sont tous étrangers parce qu'ils ne sont pas d'ici, qu'ils ne sont pas
familiers avec nos conditions de vie et ne sont pas susceptibles de comprendre pleinement
nos points de vue et nos sentiments. Bien que nous soyons, en un sens, des sujets
britanniques, nous devons considérer comme des étrangers tous ceux qui viennent d'ailleurs
et, tout en respectant ces étrangers, nous devons aussi nous respecter nous-mêmes.
La situation de notre pays est particulière et en conséquence, si nous faisons des
choses particulières – lorsqu'on compare avec des cas analogues –, cela s'explique
par le fait que nous sommes un peuple particulier dans des circonstances exceptionnelles.
Pour ma part, je suis d'avis de laisser l'article comme il est, à l'exception de la
durée de résidence de l'électeur. Une année ne suffit pas; deux ans ne suffisent pas;
trois ans seraient une durée convenable à considérer. Si nous permettons à toutes
les personnes qui résident ici depuis un an de voter, il n'est pas impossible que
l'année suivante elles nous régissent; et ceci n'est certainement pas ce que nous
voulons. Si je considère la composition de cette Convention, je ne suis pas sûr que
ceci passera, mais ceux qui nous succèderont nous remercieront de nos efforts, même
si nous échouons.
M. Schmidt, appuyé par
M. C. Nolin, propose, sous forme d'amendement, que tout homme de ce pays – à l'exception des
Indiens – ayant atteint l'âge de vingt et un ans et tout étranger, s'il est sujet
britannique, ayant résidé trois ans dans le Territoire, aient le droit de voter, et
que tout étranger autre que sujet britannique ait le droit de voter après la même
période dans le Territoire, à condition qu'il ait prêté serment de fidélité ».
M. Scott — Prêter un serment de fidélité ne fait pas d'un homme un sujet britannique. Il doit
déclarer son intention de devenir sujet britannique et quand il l'a fait, il prête
serment de fidélité.
DBird propose, sous forme d'amendement, qu'au lieu de dire « trois ans de résidence »,
on insère les mots : « tout sujet britannique possédant une maison et ayant résidé
un an dans le Territoire ».
M. Scott — Ce dernier amendement semble être en conflit direct avec l'esprit de la motion
de M. Schmidt, selon lequel il n'y aurait pas besoin d'être propriétaire pour voter.
M. Riel — J'estime que la motion d'origine est meilleure que l'amendement. Nous ne pouvons
pas prendre la propriété comme critère pour décider si quelqu'un peut voter. De fait,
dans ce pays, plus les gens sont pauvres, plus ils sont honnêtes et en disant que
seuls les riches doivent avoir ce droit, on calomnie notre peuple. Je suis personnellement
d'avis que le système américain est meilleur que le système canadien. J'ai été témoin
de plus de troubles pendant des élections à Montréal que je n'en ai jamais vu aux
États-Unis. La liberté de vote est ce qui nous conviendrait le mieux. Il ne devrait
pas y avoir de discrimination contre les étrangers. Nous devons être justes envers
eux.
M. Ross — Je suis très étonné d'entendre M. Riel, qui œuvre pour le peuple de ce pays, s'exprimer
ainsi. Je suis étonné. Cependant, étant donné l'heure tardive, je propose que nous
suspendions la séance pour dîner.
À une heure trente, la séance est suspendue pendant une heure et demie.
Trois heures de l'après-midi — Les débats reprennent.
M. Scott — L'amendement semble impliquer que les étrangers — Américains ou sujets britanniques
— puisqu'ils n'ont pas de biens dans ce pays, n'ont pas le droit de voter, même si
cela fait 100 ans qu'ils vivent ici. La propriété est donc une condition directe du
droit de vote.
Le
Président — La propriété dans le sens où la personne occupe une maison.
M. Riel, après avoir traduit les remarques de M. Scott, poursuit la discussion sur la propriété
en tant que condition du droit de vote. Je crois, dit-il, qu'il est injuste de demander
à ce qu'un homme soit propriétaire d'une maison pour pouvoir voter. Supposons que
sa maison ait brûlé, lui enlèvera-t-on le droit de vote? A-t-il perdu l'intelligence,
parce qu'il se trouve que sa maison a brûlé? En avançant cette condition, on défend
les intérêts des riches contre ceux des pauvres. Y a-t-il plus d'hommes honnêtes parmi
les riches que parmi les pauvres? Ne sommes-nous pas honnêtes, bien que nous soyons
pauvres? Dans l'ensemble, où trouverait-on des gens plus honnêtes que parmi les pauvres?
Supposons qu'au lieu de choisir M. Bruce pour diriger le Gouvernement provisoire nous
ayons choisi un homme à cause de ses richesses. Nous n'aurions pas bénéficié des bons
résultats de sa présidence.
M. Ross — Je ne nie pas le bien-fondé des remarques de M. Riel. Je suis tout à fait d'accord
pour qu'il attribue aux pauvres toute l'honnêteté qui, comme nous le savons, caractérise
cette classe. Je suis aussi tout à fait prêt à reconnaître que, parmi les hommes de
bien, il peut y avoir beaucoup de duperie, de chicanerie et de malhonnêteté. Mais
ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Je ne peux pas considérer les natifs de notre pays
et nos Sang-Mêlé comme des pauvres, dans le sens auquel il a été fait allusion. Je
pense que notre population est tout à fait à l'aise et peut soutenir la comparaison
avec la population rurale de n'importe quel pays étranger (acclamations). J'en suis
fier et reconnaissant. Pour trouver des gens pauvres, nous devons nous tourner vers
ces pays étrangers. Je ne pense pas que nos habitants fassent jamais partie de cette
classe de misérables que l'on doit vêtir et nourrir au jour le jour et dont on doit
s'occuper comme d'enfants. Nous sommes à l'aise; il n'y a presque aucun pauvre au
sein de nos frontières. Chaque homme, ou presque, a une maison et des terres, des
chevaux et du bétail. Grâce à notre labeur et à notre intelligence, nous avons une
Colonie composée d'hommes qui ne font pas partie des pauvres (acclamations). Cette
question du droit de vote revêt une grande importance car, en fin de compte, les électeurs
auront à prendre des décisions sur toutes les questions soulevées à la Législature.
Ils auront la source du pouvoir entre les mains. Si nous mettons la source du pouvoir
entre les mains de personnes qui n'œuvrent pas pour le bien du pays, nous faisons
en vérité la chose suivante : d'une part, nous obtenons un certain nombre d'avantages
et d'autre part, nous mettons en place un système qui permet de nous les enlever.
Pour ma part, j'aimerais obtenir pour les habitants de ce pays des avantages plus
importants que ceux que prévoient la motion ou l'amendement. Il est important, lorsqu'on
donne à un homme le droit de vote dans n'importe quel pays, que cette personne ait
un certain intérêt envers le pays. Dans ce pays, nous avons une population mixte.
Prenons la population actuelle, et je suis tout à fait prêt à dire que ces gens ont
un intérêt envers le pays, même s'ils n'ont pas un sou et pas de maison. Mais, en
vue de l'émigration, nous devrions déclarer qu'une personne doit avoir un intérêt
matériel dans le pays avant de pouvoir voter. La résolution d'origine disait qu'un
homme devait avoir résidé trois ans dans le pays – sans parler de propriété – pour
avoir le droit de vote. L'amendement proposait un an de résidence et précisait qu'il
fallait être propriétaire d'une maison. J'estime que trois ans de résidence et la
condition relative à la propriété d'une maison devraient s'appliquer à tous sauf aux
habitants actuels. Nous devrions nous protéger de façon à ne pas être submergés par
des personnes de l'extérieur qui n'ont pas d'attaches dans ce pays. Je suis convaincu
que ma proposition est dans l'intérêt des habitants actuels de la rivière-Rouge. Nombre
des requêtes que nous présentons peuvent, si nous obtenons ce que nous demandons,
être bonnes pour le pays. Mais sommes-nous certains qu'elles vont toutes être à l'avantage
de la population actuelle de la Colonie? J'en doute et nous devons rester sur nos
gardes afin de ne pas prendre des dispositions qui auraient pour conséquences pratiques
de nous couper la tête, en présentant une requête qui nous serait extrêmement nuisible.
En ce qui concerne les trois ans de résidence, je vous dis franchement que cette condition
m'empêchera de voter, mais c'est égal, car si elle m'empêche de voter, elle empêche
également probablement vingt autres personnes que j'aimerais voir privées de leur
droit de vote.
M. Riel — Cela m'empêcherait de voter également.
M. Ross — J'aimerais presque que l'on passe une loi faisant exception dans votre cas (rires).
On a fait l'objection qu'en demandant une durée de résidence de trois ans, au lieu
d'un, on empêcherait peut-être de voter des hommes qui ont des moyens financiers.
Pour chaque homme que l'on empêcherait ainsi d'exercer le droit de vote pendant trois
ans, on en exclurait quinze ou vingt dont la voix serait nuisible au pays. Si l'on
permet à un homme qui n'est pas propriétaire d'une maison de voter, il pourrait alors
s'opposer, à Winnipeg par exemple, au vote d'hommes comme M. Andrew McDermott ou M.
Bannatyne (bravos).
M. Scott — Je pense, comme M. Ross, que les trois ans de résidence ne sont pas une mauvaise
stipulation. Je ne suis pas d'accord avec la condition relative à la propriété. Il
est bien connu que les pauvres ont besoin d'un représentant bien plus que toute autre
classe dans le pays. Ce sont les pauvres, plus que les riches, qui ont besoin de la
protection de bonnes lois. Si les riches sont les seuls représentés parmi les législateurs
du pays, que va-t-il se passer? Les lois seront faites pour les riches et auront pour
conséquence de rendre les riches plus riches et les pauvres plus pauvres. Pourquoi
l'homme riche se soucierait-il de mettre en place un système scolaire efficace accessible
à tous? Il peut envoyer ses enfants dans un séminaire privé. Réfléchissez encore aux
prêtres qui habitent sur l'autre rive et ont fait vœu de pauvreté. Doit-on les priver
de participer à l'établissement des lois parce qu'ils ne sont pas riches? C'est absurde.
Enfin, selon ce principe, si les douze apôtres venaient dans ce pays, ils n'auraient
pas non plus le droit de vote (rires). Est-ce la maison ou l'homme qui vote, je vous
le demande?
M. Cummings — J'affirme qu'il n'y a quasiment aucun pauvre dans ce pays. Je suis ici depuis onze
ans et je n'ai presque jamais vu un pauvre (bravos). Et c'est à ce propos que je ne
suis pas d'accord avec M. Scott. Il n'y a pratiquement aucun homme dans ce pays qui
n'ait pas une maison et des terres et qui ne gagne pas bien sa vie, sauf s'il est
trop paresseux.
M. Scott — Je parlais des pauvres qui viennent ici, pas des pauvres du pays. Les gens qui
sont ici à l'heure actuelle doivent tous avoir le droit de vote.
M. Riel, en français, recommande instamment aux membres de la Convention de réfléchir au
contenu des remarques de M. Ross, surtout en ce qui concerne les trois ans de résidence
plutôt qu'un an.
M. O'Donoghue — Il n'est pas clair, selon moi, que tous les hommes nés dans le pays auront le droit
de vote à partir de l'âge de vingt et un ans. Je pense qu'il faut donner le droit
de vote non seulement à ceux qui sont ici maintenant, mais aussi à tous ceux qui vont
naître ici à partir de maintenant, lorsqu'ils auront l'âge voulu. En ce qui concerne
la nécessité d'avoir une maison, j'estime que ce ne devrait pas être n'importe quelle
maison. Et je pense aussi que nous devrions faire la distinction entre les propriétaires
et les locataires de maisons.
Le
Président — L'objectif de ceux qui proposent ou appuient l'amendement est d'empêcher les étrangers
qui viennent ici d'exercer le droit de vote pendant trois ans. Pour ma part, j'ai
des doutes profonds sur la justesse de cette période de trois ans. Cela semble impliquer
de notre part une grande méfiance envers les sujets britanniques qui pourraient venir
dans ce pays en provenance d'autres Colonies (bravos). Je ne pense pas qu'il y ait
des raisons suffisantes pour justifier cette méfiance, pourvu que les choses soient
gérées comme il faut et pourvu qu'il soit prévu, comme il est déjà prévu, que la population
de ce pays participe au pouvoir à la Législature dans une juste part. Moi-même, je
n'aurais jamais pensé demander plus de deux ans. Peut-être pourrait-on justifier une
telle période étant donné les circonstances particulières du pays. Mais trois ans,
je crains, si cette condition est précisée dans une loi, que cela ne mette un frein
au progrès et à la prospérité du pays. D'autre part, en ce qui concerne la condition
relative à la propriété, si nous croyons que les deux grandes fonctions du Gouvernement
sont de protéger la vie et les biens, nous ne pouvons pas trouver qu'il est étrange
de vouloir examiner la question de la propriété comme condition du droit de vote.
Si les personnes qui ont proposé l'amendement avaient choisi cette période intermédiaire
de deux ans, je pense qu'il serait faisable de mettre cela aux voix. Examinons la
question en comparaison avec les autres Colonies. Dans le groupe australien, par exemple,
on ne demande pas à un homme de quelle partie de l'Empire il vient, ni s'il a des
biens. C'est le suffrage universel qui est utilisé là-bas. On invite tout homme qui
est là depuis six mois et a vingt et un an à aller voter. Si l'on a fixé cette période
dans ces Colonies — des Colonies du monde entier auxquelles on a accordé des Constitutions
très libérales,— et si, même dans la vieille Angleterre, cette période de trois ans
ne serait pas envisageable, ne vous exposeriez-vous pas à un danger considérable en
demandant cette période d'attente très longue?
Le
Président — Simplement ceci – si vous voulez bien me pardonner d'exposer une vérité si évidente :
étant donné que trois est plus que deux, une personne qui arrive ici pourrait à juste
titre être effrayée par le chiffre trois, alors qu'elle pourrait ne pas trouver à
redire au chiffre deux (bravos et rires). Un homme — un homme que l'on aimerait beaucoup
avoir ici — pourrait décider de ne pas venir dans ce pays à cause de la différence
entre trois et deux. Je sympathise entièrement avec ceux qui souhaitent avoir une
loi spéciale à l'avantage de ceux qui ont vécu toute leur vie dans un pays comme celui-ci.
Et si je puis me permettre de parler de moi-même, je pense que vous pouvez tous m'entendre
témoigner que, dans l'exercice de mes fonctions publiques, je me suis toujours efforcé
de veiller à ce qu'on s'occupe tout particulièrement des intérêts de nos habitants
– des gens comparativement simples – alors qu'ils étaient mis en contact avec les
conditions d'une civilisation plus avancée. J'ai toujours estimé qu'il était de mon
devoir de voir à ce que la communauté dans laquelle mes semblables ont vécu depuis
presque un quart de siècle souffre aussi peu que possible de ce contact (acclamations).
Je puis donc envisager certaines raisons d'adopter une loi spéciale, mais je crois
que vous allez trop loin dans cette direction exceptionnelle. Je n'insiste pas, mais
je vous présente simplement mes suggestions. Prenez donc, si vous le voulez, des précautions
spéciales pour éviter que les habitants ne soient soudain submergés, mais veillez
à ce que vos mesures ne soient pas telles qu'elles aient pour conséquence de repousser
les nouveaux arrivants qui pourraient faire de ce pays la grande nation que nous voulons
qu'il devienne (acclamations).
M. Riel, après avoir fait allusion aux remarques du Président, déclare — Je pense que trois
ans sont une période plutôt courte. Il est impossible de dire à quels dangers nous
devrons faire face lorsque nous serons entrés dans la Confédération, et trois années
d'une telle protection, c'est vraiment là le minimum que nous puissions demander.
Nous devons protéger les droits et les biens que nous avons actuellement par tous
les moyens que nous avons en notre pouvoir. Les sauterelles nous ont fait du tort
l'an dernier et cela a représenté un contretemps pour nous. La même chose pourrait
se reproduire cette année et nous serions alors dans la période de deux ans après
laquelle les personnes de l'extérieur commenceraient à bénéficier des privilèges en
question. Si l'on met en avant cette période de deux ans, je dirai que je suis très
tenté de demander quatre ans. Il me semble intéressant de voir un représentant de
la Compagnie – une Compagnie qui a jusqu'à maintenant totalement refusé d'accorder
le droit de vote — de voir donc un tel représentant s'efforcer de raccourcir le plus
possible la période d'attente.
M. K. McKenzie — Cette loi que vous proposez serait injuste envers moi, qui suis nouvellement arrivé
du Canada, car elle m'empêcherait de participer.
M. Ross — Tous ceux qui sont dans ce pays à l'heure actuelle et qui ont vingt et un ans ont
le droit de voter.
M. Riel — Si nous avions l'assurance que les hommes qui viendront du Canada seront aussi
bons et honnêtes que M. McKenzie, nous leur donnerions avec joie tous les privilèges.
Nous souhaiterions la construction de quatre chemins de fer plutôt qu'un, afin qu'ils
arrivent plus vite (rires et acclamations). Mais malheureusement, avec les bons viendront
les méchants.
M. Scott — Les membres de la Convention ont-ils l'intention de permettre aux femmes de voter?
Il y en aura sans doute beaucoup qui viendront et seront propriétaires de maisons
(rires).
Le Président — Toutes ces résolutions devront faire l'objet d'un bon classement.
M. Ross — La motion de M. Schmidt donne à tous les étrangers le droit de voter au bout de
trois ans, même s'ils n'ont absolument aucuns biens dans ce pays. L'amendement indique
qu'il faut non seulement avoir résidé ici pendant trois ans, mais aussi qu'il faut
avoir des biens fonciers.
M. Riel — La motion a une telle importance que j'aimerais que les membres de la Convention
me permettent de consulter rapidement M. Ross à ce sujet.
M. Riel et M. Ross s'étant consultés, l'amendement de M. Schmidt a été mis aux voix
et adopté sous la forme suivante :
« Que tout homme de ce pays (à l'exception des Indiens qui ne sont ni civilisés ni
établis) ayant atteint l'âge de vingt et un ans, et tout étranger, s'il est sujet
britannique, ayant résidé trois ans dans ce pays et possédant une maison, ait le droit
de voter pour élire un député à la Législature du pays et au Parlement de la Puissance;
de même, que tout étranger autre que sujet britannique ayant résidé dans ce pays pendant
cette même période et jouissant de la propriété d'une maison, ait le même droit de
vote, pourvu qu'il prête serment de fidélité. Il est entendu que cet article n'est
sujet à amendement que de la part de la Législature locale exclusivement ».
« 20. Que le Territoire du Nord-Ouest ne soit jamais tenu responsable d'une part quelconque
de la somme de 300 000 £ versée à la Compagnie de la Baie d'Hudson, ni de quelque
portion que ce soit de la dette publique du Canada contractée avant notre entrée dans
la Confédération; et si par la suite on nous demande d'assumer notre part de cette
dette publique, nous y consentons uniquement à condition que l'on nous accorde d'abord
le montant dont nous devrions être responsables ».— Adopté.
M. Riel, en français — interprété par M. Ross — Nous sommes arrivés ce soir à la fin des
articles et je ne peux pas laisser passer cette occasion de faire quelques remarques.
Cela fait environ quinze jours que nous nous consultons sur des questions d'une importance
extrême et l'atmosphère qui a régné durant ces séances est digne de louanges. Nous
avons prouvé au monde que nous sommes capables de discuter honorablement de questions
qui ont un grand poids politique. Lorsque des différences ont fait surface, il s'agissait
de différences qui existent naturellement entre des hommes intelligents et raisonnables
qui discutent de questions importantes (acclamations). Je félicite sincèrement les
membres de la Convention et je leur dis un chaleureux
bon noir [sic] (acclamations).
Après un court moment,
M. Riel se lève de nouveau pour dire — Le comité qui a été chargé d'examiner les questions
à présenter aux membres de la Convention a dressé deux listes, l'une devant être présenté
à M. Smith au cas où nous demandions à entrer dans le Dominion en tant que Territoire,
l'autre au cas où nous demandions à être admis comme Province. Les conditions de la
participation des Provinces à la Confédération sont précisées dans la loi sur la Confédération.
Il s'agit de quelque chose de très simple, et nous pouvons probablement en discuter
sans difficulté demain avant midi. En tant que Territoire, nous avons notre liste,
mais une liste dressée en vue de l'admission en tant que Province aurait aussi ses
avantages.
M. Ross — Il s'agirait de savoir si nous ne devrions pas demander aux Secrétaires de faire
une copie de la Liste des droits pour M. Smith et la lui présenter, afin de lui demander
de nous donner une opinion là-dessus demain matin.
M. Riel s'oppose à cette dernière suggestion et finalement la séance est levée jusqu'au matin
suivant.